Dr Franjo Grotenhermen : « Le cannabis m'a donné une nouvelle raison de vivre »


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Le point de vu du Dr Franjo Grotenhermen

 

Dr Franjo Grotenhermen : « Le cannabis m'a donné une nouvelle raison de vivre »
 
Le fondateur de l'Alliance internationale pour la médecine cannabinoïde (IACM) sur la recherche d'un nouvel objectif suite à ses propres problèmes de santé.
Par Sarah Sinclair
 
Fondateur de l'Alliance internationale pour la médecine cannabinoïde (IACM),le Dr Franjo Grotenhermen est l'un des plus grands experts mondiaux dans le domaine de la médecine du cannabis.Mais ses propres batailles en matière de santé sont tout aussi remarquables.
 
Le Dr Franjo Grotenhermen n'est pas un médecin typique.
 
Ayant travaillé aux côtés de Raphael Mechoulam, Lester Grinspoon et Roger Pertwee,il fait partie de ceux dont on se souviendra comme des pionniers de la médecine du cannabis et a joué un rôle non négligeable dans la réforme des lois sur le cannabis dans son pays d'origine,l'Allemagne.
 
Mais si ces réalisations professionnelles lui valent à juste titre une grande reconnaissance, son expérience en tant que patient est tout aussi significative.
 
Grotenhermen travaillait comme médecin dans un hôpital très fréquenté en Allemagne en 1988 lorsqu'il a commencé à avoir des problèmes de santé.
Il aurait ce qu’il décrit comme des « crises » et des crises d’hypotension orthostatique, une baisse significative de la tension artérielle qui survient généralement quelques minutes après être debout et est fréquente chez les patients souffrant d’insuffisance cardiaque.
 
Il est devenu trop malade pour travailler, mais personne n’a pu en identifier la cause.
 
« Mon état est assez étrange », dit-il.
« Il est difficile de le détecter ou d’en voir la raison. C’était une période difficile de ma vie, où j’avais des problèmes de santé, mais personne ne pouvait trouver de paramètre objectif sur ce qui n’allait pas. "
 
Il a fallu 18 mois et d’innombrables rendez-vous chez le médecin avant qu’on lui diagnostique finalement une maladie des petits vaisseaux à l’âge de 33 ans.
 
La maladie des petits vaisseaux est une affection dans laquelle les parois des petites artères du cœur ne fonctionnent pas comme elles le devraient,
réduisant ainsi le flux sanguin riche en oxygène vers le cœur. Elle peut provoquer des douleurs thoraciques (angine de poitrine), un essoufflement et d’autres signes et symptômes de maladie cardiaque, bien que, comme de nombreuses maladies chroniques, elle affecte les individus de différentes manières.
 
En 1990,Grotenhermen a subi une grave crise à la suite de laquelle il a été contraint de passer le reste de sa vie au lit, ou du moins allongé.
"Il n'est pas vrai que tous les patients atteints de cette maladie doivent rester au lit", dit-il.
"Ma condition est assez rare dans la mesure où elle s'exprime ainsi."
 
Au fil des années, il a appris à vivre au rythme de son corps. Son état est pire le matin,alors il se repose,mais l'après-midi, il peut travailler et voir des patients.
Le soir vers 18 heures, inexplicablement, il est capable de rester debout jusqu'à 90 minutes. Mais il doit continuer à bouger (il tombe malade s'il reste immobile) et respecter son emploi du temps comme sur des roulettes.
 
Personne ne sait pourquoi il en est ainsi, notamment Grotenhermen, mais il a appris à accepter que c'est ainsi.
 
« Je ne peux pas expliquer tout ce qui m'arrive et pourquoi c'est ainsi », explique-t-il.
« Je dois juste l'accepter car si je ne respecte pas les règles du temps et le rythme quotidien de ma vie,ma situation empire."
« La dernière fois que je me suis levé avant 18 heures, c'était en 1994 et cela a entraîné une détérioration dramatique de ma santé, tout simplement parce que je me suis levé à 17 heures et non à 18 heures. J’ai développé de graves problèmes cardiaques et je n’ai jamais retrouvé la santé comme avant… juste en allant un peu à contre-courant."
 
Avec un petit rire, il ajoute : « C'est toujours très étrange quand je vais à des conférences et que je fais mon discours allongé, puis à un certain moment je me lève, ce qui surprend tout le monde. Je suis sûr que les gens se demandent ce qui se passe.
 
Une nouvelle raison de vivre
 
Aujourd’hui âgé de 66 ans, Grotenhermen a passé autant de temps à vivre une « vie saine » qu’une « vie moins saine », comme il le dit.
 
« Lorsque j'ai reçu le diagnostic et que j'ai envisagé l'avenir, je ne savais pas si j'allais avoir 50 ou 60 ans », dit-il. "C'est incroyable que je continue à vivre."
 
Mais ce n'était pas la vie à laquelle il s'attendait.
 
« Je voulais devenir médecin, mais mes projets étaient complètement terminés », dit-il.
"J'ai essayé de trouver une nouvelle raison de vivre."
 
Cela n'a pas pris longtemps. En 1993,il a été contacté par une vieille connaissance, Michael Carus [fondateur du nova-Institute ], un physicien qui travaillait sur la fibre de chanvre et cherchait un avis scientifique sur un article qu'il rédigeait sur son potentiel de toxicomanie.
 
Cela a conduit à une autre opportunité, en 1994, d'écrire un deuxième chapitre de Marihuana,The Forbidden Medicine, par le Dr Grinspoon pour sa publication en Allemagne.
 
«Je pensais que c'était un sujet intéressant car en Europe personne n'en parlait», explique Grotenhermen.
« Mais j’ai été très impressionné par le potentiel thérapeutique. Comme il n’y avait rien en Allemagne, j’ai décidé d’écrire une critique sur les connaissances actuelles sur le cannabis en tant que médicament. Quelques mois plus tard, les gens ont commencé à me traiter d’expert en cannabis, ce que je n’étais pas, mais personne ne savait rien et j’en savais un peu."
 
En 1997,il fonde l' association allemande Arbeitsgemeinschaft Cannabis als Medizin e.V (ACM) et a commencé à rédiger un bulletin d'information régulier mettant en lumière les dernières recherches dans le domaine.
 
Il fut rapidement contacté par des experts étrangers, ce qui conduisit à la première conférence internationale et à la création de l'IACM.
 
«J'ai invité Roger [Pertwee], Raphi [Mechoulam] et Lester [Grinspoon] à notre première conférence en 1998 et nous avons commencé à travailler sur une base internationale.»
 
Ayant écrit des centaines d'articles sur le cannabis en tant que médicament,explorant tout, depuis son utilisation dans diverses indications jusqu'aux effets secondaires et aux modes d'administration, Grotenhermen peut désormais se considérer en toute confiance comme un expert.
 
«C'était intéressant pour moi pour trois raisons», dit-il à propos de son travail sur le terrain.
« Cela signifiait que je pouvais à nouveau travailler avec les patients, qu'ils pouvaient me joindre et que je pouvais leur conseiller comment l'utiliser, etc. Je m'intéresse à la science et à la recherche et c'était dans les années 1990, lorsque la découverte du système ECS [système endocannabinoïde] venait tout juste d'être découverte, donc c'était fascinant à plusieurs niveaux, et j’ai toujours été très actif politiquement et j’ai vu qu’il fallait faire quelque chose à l’échelle politique, il fallait changer la loi, il y avait tellement de travail à faire.
 
Témoignage lors d'une audition d'experts de la commission de la santé,Bundestag allemand, 2016.
 
Le point de vue du patient
 
L'ACM a joué un rôle fondamental dans le changement législatif permettant à certains patients de bénéficier d'une exemption pour se voir prescrire du cannabis pour un nombre limité de conditions en 2005,avant d'être élargie en 2016.
 
Après avoir réalisé que peu de médecins étaient réellement disposés à prescrire, Grotenhermen a recommencé à pratiquer la médecine en 2012 pour la première fois depuis 1990.
 
Malgré le manque d'études scientifiques solides sur le cannabis qui ont empêché de nombreux cliniciens de le prendre au sérieux en tant que médicament, les propres batailles de Grotenhermen en matière de santé lui ont donné une perspective différente.
 
« Je ne suis pas du genre à attendre de grandes études contrôlées par placebo portant sur 200 à 300 patients pour chaque indication »,dit-il.
« J’ai simplement décidé de prendre au sérieux les expériences des patients. Je parle à mes patients d’expert à expert, car ils sont devenus experts de leur maladie."
 
Être lui-même patient a donné à Grotenhermen un niveau d’empathie et de compréhension que, malheureusement, les systèmes médicaux modernes permettent rarement.
 
« Ce que je vis avec ma maladie est complètement inhabituel.J'ai rencontré tellement de médecins qui ne croyaient pas que c'était comme ça ou qu'il s'agissait d'une maladie psychosomatique. Je voulais être pris au sérieux et j’ai réalisé que de nombreux patients vivaient des expériences similaires."
« Lorsque je travaillais comme médecin dans un hôpital,je pensais que j'étais empathique et qu'il était important pour moi d'être un médecin à l'écoute de ses patients.Mais être patient [moi-même] a changé quelque chose.
"Lorsque Raphi et moi avons fondé l'IACM,nous avons dit que le centre de notre travail n'était pas le cannabis,mais que le centre de notre travail était d'apporter un traitement optimal aux patients et de leur donner une autre possibilité."
 
La 13e conférence de l'IACM sur les cannabinoïdes en médecine aura lieu en ligne du vendredi 12 au samedi 13 avril,avec des conférenciers de renom, dont le Dr Ethan Russo,le Dr Kirsten Müller-Vahl et le Dr Bonni Goldstein,ainsi que la présidente du Conseil des patients de l'IACM, Carola Perez. .
L'ordre du jour explorera des sujets tels que la médecine du cannabis dans le monde, les avantages et les risques des maladies psychiatriques et son utilisation en pédiatrie.
« Nous voulons rassembler les scientifiques, les médecins et les patients pour échanger des idées et, nous l’espérons,avoir un impact »,ajoute-t-il.
"Je pense que c'est une chance que je sois tombé malade, car sinon je ne serais pas venu au cannabis."
 
Vous pouvez consulter l'ordre du jour complet et vous inscrire à la conférence de l'IACM ici : https://www.cannabinoid-conference.org/#registration
The Doctor,un documentaire sur Grotenhermen et son travail,est sorti en 2022 à voir ici : https://www.imdb.com/title/tt18558020/?ref_=tt_mv_close
Modifié par Ex-UFCM-I Care
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