Boogerman 6 413 Posté(e) janvier 8, 2022 Partager Posté(e) janvier 8, 2022 https://www.dna.fr/societe/2022/01/06/cannabis-la-consommation-avant-16-ans-est-liee-a-un-risque-eleve-de-chomage Cannabis : "la consommation avant 16 ans est liée à un risque élevé de chômage" Une récente étude de l'Inserm alerte sur le lien entre la consommation précoce de cannabis chez les adolescents et le risque de connaître des épisodes de chômage à l'âge adulte. Maria Melchior, épidémiologiste et auteure de l'étude, nous en dit plus et nous explique pourquoi il faut travailler à reculer l'âge d'expérimentation de cette drogue chez les plus jeunes. Par Propos recueillis par Juliette MITOYEN - 06 janv. 2022 à 16:01 - Temps de lecture : 5 min Photo d'illustration Adobe Stock Les Français sont les plus gros consommateurs de cannabis en Europe. Les jeunes, particulièrement, en sont particulièrement friands. Dans l'Hexagone, près de 40% des adolescents de 17 ans indiquent en effet en avoir consommé au cours de l'année écoulée. Mais selon une récente étude (1) menée par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et publiée dans la revue Drug and Alcohol Dependence, commencer à fumer du cannabis à l'adolescence pourrait avoir des effets néfastes à l'âge adulte. Pas seulement sur la santé psychologique, comme de nombreuses enquêtes l'ont déjà démontré, mais aussi sur la vie professionnelle, soutiennent les chercheurs à l'origine de cette étude. Selon leurs résultats, les personnes qui ont déclaré avoir initié leur consommation de cannabis à l’âge de 16 ans ou avant auraient environ deux fois plus de chances de vivre une période de chômage à l’âge adulte que celles n’ayant jamais consommé de cannabis. Concernant les jeunes Français qui ont commencé à fumer cette drogue après l'âge de 16 ans, ils auraient 39% plus de risques de faire face à une période de chômage que ceux n'en ayant jamais consommé. Maria Melchior, épidémiologiste et directrice de recherche à l'Inserm, nous donne plus de précisions sur les impacts de la consommation de cannabis sur le chômage à l'âge adulte à l'heure où la question de la légalisation de cette drogue est remise sur la table par des députés et candidats à l'élection présidentielle. Maria Melchior. Photo DR. Pourquoi vous êtes-vous intéressée à la relation entre la consommation de cannabis à l'adolescence et le risque de chômage une fois adulte ? "Parce que l'on sait que parmi la population adulte, les chômeurs - qui sont donc en situation précaire vis-à-vis de l'emploi - ont tendance à consommer plus de cannabis, de tabac et d'alcool. Donc la question que l'on s'est posée, c'est : « Est-ce que c'est le fait d'avoir une situation sociale précaire qui mène à la consommation de cannabis ou est-ce que l'effet inverse existe aussi ? Et est-ce que les consommations de cannabis sont un facteur prédictif des difficultés professionnelles ?». C'est très compliqué de distinguer l’œuf de la poule." Quelles ont été les conclusions principales de l'étude ? "On a interrogé les participants entre 2009 et 2018 à quatre reprises sur le fait qu'ils aient été au chômage ou non, soit dans l'année écoulée, soit entre deux questionnaires envoyés. Et l’association que l'on trouve entre la première consommation de cannabis avant 16 ans et le fait d'être à risque de chômage est nette. Et ce qui est encore plus marquant c'est que la consommation de cannabis à l’adolescence est vraiment liée à un risque élevé d'être au chômage à plusieurs reprises. C'est assez préoccupant, parce que cela signifie qu'il pourrait vraiment y avoir un lien entre le cannabis et la trajectoire professionnelle." "Il y a eu des études similaires en Nouvelle-Zélande et en Australie, où les gens consomment beaucoup de cannabis. Elles ont elles aussi montré que la consommation à l'adolescence était liée à une augmentation du risque de connaître le chômage à l'âge adulte." Il y a probablement des facteurs sociaux, économiques et familiaux qui favorisent la consommation de cannabis à l'adolescence, voire le chômage quelques années plus tard, n'est-ce pas ? "Oui, aussi. On sait que les jeunes dont les parents ont des problèmes de consommation de drogue ou d'alcool sont les plus vulnérables et en consomment eux-mêmes. Mais c'est aussi le cas des jeunes qui ont des difficultés psychologiques - angoissés, déprimés, troubles du comportement -, ou ceux qui ont des difficultés scolaires. On a pris en compte l'ensemble de ces facteurs dans notre étude." Outre celui de connaître le chômage à l'âge adulte, quels autres risques présente la consommation de cannabis chez les jeunes ? "Chez les jeunes il y a des vrais risques associés à la consommation de cannabis parce que le cerveau est en développement jusqu'à 25 ans. Chez les adolescents, il y a aussi des conséquences négatives notamment sur la concentration, la mémoire, l'humeur, parce que cela active certaines zones du cerveau liées à ces ressentis. Le principal problème avec les adolescents c'est que l'on ne sait pas si les effets du cannabis sur le fonctionnement cérébral sont réversibles." "Chez les adultes, il y a des études qui suggèrent que les pertes cognitives que l'on rencontre au-delà de 45 ans ou 50 ans sont beaucoup plus marquées chez les usagers de cannabis que chez ceux qui n'en consomment pas. C'est avéré. Il y a aussi un risque accru de dépression." Au-delà d'encourager à ne pas consommer de drogue, il faudrait donc que les politiques de santé publique parviennent à repousser l'âge de la première expérimentation de cannabis ? "Oui, cet âge d'expérimentation est un très bon indicateur pour savoir si les gens vont en consommer dans le temps." Il faut alerter sur les risques associés à la consommation de cannabis et vraiment reculer le plus possible dans le temps l'âge auquel les jeunes en consomment, justement à cause des risques spécifiques liés à la consommation à l'adolescence. Faut-il selon-vous maintenir une politique du « tout répressif » en France, qui n'a pas vraiment l'air de fonctionner au regard des chiffres de consommation ? "Ce n'est certainement pas une bonne politique mais, en même temps, elle n'est pas très respectée. C'est paradoxal. En fait, les peines les plus lourdes ne sont que très peu appliquées. L'année dernière, une commission parlementaire a détaillé les évolutions dans la réponse pénale au cannabis et a montré le coût que représentait la répression de sa consommation pour la police et le système judiciaire..." "En revanche, même si le cannabis est perçu de manière positive notamment en raison des discussions autour de sa légalisation ou du cannabis thérapeutique, cela ne veut pas dire qu'il ne présente pas de risque. Même si, c'est vrai, il y a moins de risques avec le cannabis que les opiacés, ou même l'alcool. Il y a certainement des avantages à légaliser la consommation en termes économiques, mais il faut que l'aspect sanitaire soit également pris en compte." (1) L’analyse a porté plus précisément sur un échantillon de 1487 jeunes adultes qui ont été suivis sur une période de neuf ans, entre 2009 et 2018. À quatre reprises au cours de cette période, les participants ont été interrogés sur l’âge de leur première consommation de cannabis et leur statut professionnel. D’autres éléments ont également été pris en compte pour éviter de biaiser l’analyse, comme le niveau socio-économique, la situation familiale, les difficultés scolaires rencontrées au cours de l’enfance et de l’adolescence ainsi que l’évaluation psychologique des participants. 1 Lien à poster Partager sur d’autres sites
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