La Californie face au défi du cannabis récréatif


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Au White Rabbit High Tea, salon de thé et de cannabis, à Los Angeles, le 30  septembre.

Les ventes légales de marijuana devaient débuter le 1er janvier, après des ratés dans la mise en place du marché.

 

A Berkeley, tout est prêt. A 6 heures du matin, lundi 1er janvier, le maire Jesse Arreguin doit couper le ruban : les ventes de marijuana pourront commencer au magasin du Berkeley Patients Group (BPG), sur San Pablo Avenue. Un moment « historique » selon le propriétaire du dispensaire, Sean Luse, qui milite pour la légalisation du cannabis depuis vingt ans et qui a connu les hauts et les bas du combat contre la prohibition de 1915 : les premières prescriptions de marijuana médicale, en 1996, la brusque répression pendant la présidence de George W. Bush, en 2004, et la grande libéralisation des années Obama.

Sean Luse s’attend à une file d’attente qui fera « le tour du pâté de maison ». Le magasin a installé des distributeurs automatiques de joints préroulés. Il prévoit des « kits du débutant » pour les néophytes qui voudront tester les différentes variétés (Indica, Sativa, etc.). Il faudra payer en espèces. Le secteur bancaire hésite toujours à s’engager dans un commerce qui reste illégal au niveau fédéral. Tout comme les assurances : 44 des multiples plantations illégales du « triangle d’Emeraude » du nord de la Californie viennent d’en faire l’expérience. Dévastées par les incendies d’octobre, elles n’ont aucun espoir de compensation.

 

La légalisation de la marijuana – avec ses produits dérivés exotiques, soupes, élixirs – est devenue presque banale aux Etats-Unis. Sept Etats l’ont déjà approuvée. Mais par son importance (39 millions d’habitants), le Golden State donne une dimension irréversible au mouvement lancé par le Colorado, premier Etat à avoir franchi le pas, le 1er janvier 2014. A partir du 1er janvier 2018, un Américain sur cinq vivra dans un Etat qui autorise la consommation à des fins récréatives. Seule une poignée d’Etats, dans le Sud républicain, résistent à la tendance et interdisent même la marijuana médicale.

Une once et six plants

Le marché, dans l’Etat le plus peuplé des Etats-Unis, s’annonce colossal. Les estimations décrivent des ventes annuelles de 7 milliards de dollars (5,8 milliards d’euros) en 2020, soit plus que le chiffre d’affaires de l’industrie laitière et autant que la récolte des amandes et des pistaches, les fleurons de l’agriculture locale. Inquiet de voir circuler autant de cash dans l’Etat (les entreprises apportent leurs liasses de liquide en fourgonnettes blindées chez le receveur des impôts), le bureau du gouverneur Jerry Brown a pris contact avec les représentants de 65 banques et établissements de crédit pour contourner l’obstacle fédéral.

Lire aussi :   Au Canada, la légalisation du cannabis, un casse-tête pour les économistes

La légalisation fait suite à l’adoption par les électeurs de la proposition 64, en novembre 2016, à une majorité de 56 %. L’administration californienne avait un an pour se préparer. Elle a pris du retard, ce qui a introduit une certaine pagaille. La réglementation n’a été publiée qu’en novembre 2017 : elle prévoit que les adultes pourront acheter une once (28,3 grammes) et cultiver six plants à domicile. Surtout, elle requiert que les exploitants obtiennent au préalable une licence de leur municipalité. Résultat : des bagarres au sein des conseils municipaux, qui ont fait apparaître une réalité contrastée. Alors qu’elle a été le premier Etat à développer la marijuana médicale, la Californie, bastion progressiste, traîne les pieds pour la mise en place du marché « récréatif ».

 

En Californie, 2,7 millions d’arrestations liées à la marijuana ont eu lieu entre 1915 et 2016
 

Au jeudi 28 décembre, seules 42 autorisations avaient été accordées par l’Etat, 150 autres étaient en cours d’examen et les employés du bureau de contrôle du cannabis prévoyaient de travailler tout le week-end pour expédier les dossiers. Los Angeles ne sera pas prête pour le 1er janvier et à San Francisco, l’ouverture des premiers magasins n’aura lieu que le 5, et avec des permis temporaires de cent vingt jours.

 

Seule une minorité de collectivités locales (27 %), parmi les 500 de l’Etat, ont approuvé la vente libre sur leur territoire. Les localités désargentées de l’intérieur et les desert towns de Californie du Sud ont donné leur feu vert, alléchées par la manne fiscale (de 7 à 9 % des ventes, en plus de la taxe fédérale de 15 %). En revanche, les communautés asiatiques ont refusé. Tout comme Palo Alto, où siège l’université Stanford. Même dans le comté de Marin, au nord de la baie de San Francisco, le lieu de naissance de la fête du cannabis – le 20 avril –, les anciens hérauts de la contre-culture se sont opposés aux pot shops.

Lire aussi :   Aux Etats-Unis, le cannabis médicinal a le visage d’une enfant de 12 ans

Il semblerait que la Californie a pris en compte les injustices provoquées par les années de répression. Selon le groupe NORML, qui milite pour l’abrogation de la prohibition, 2,7 millions d’arrestations liées à la marijuana ont eu lieu entre 1915 et 2016. Or, selon l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU), les Noirs ont quatre fois plus de chance que les Blancs d’être arrêtés pour possession de cannabis, alors qu’ils ne consomment pas plus.

Cause populaire

En guise de « réparations », selon l’expression des militants, plusieurs localités, dont San Francisco et Los Angeles, ont mis en place des programmes dits « d’équité ». L’idée est née à Oakland, le fief historique des revendications afro-américaines. Dès le printemps, la ville a décidé de réserver la moitié des autorisations d’exploiter aux victimes de la « guerre contre la drogue ». Conditions : avoir été condamné pour un délit lié à la marijuana, avoir des revenus de moins de 80 % de la moyenne locale, ou avoir résidé pendant dix des vingt dernières années dans un quartier ayant connu un nombre élevé d’arrestations. Cent trente personnes ont postulé au programme.

 

La municipalité d’Oakland a aussi encouragé les riches investisseurs à s’associer à des victimes s’ils voulaient bénéficier d’une autorisation d’exploiter. L’industrie du cannabis nécessite des capitaux importants, hors de portée des jeunes des quartiers pauvres. Il faut assurer le traçage de chaque pied, installer un système de vidéosurveillance, soumettre la récolte à des tests de pesticides, recruter des agents de sécurité pour le convoyage.

 

Depuis un an, l’administration Trump renvoie des signaux contradictoires. Le ministre de la justice, Jeff Sessions, répète régulièrement qu’il est opposé au marché libre et qu’il n’a pas perdu espoir de sévir. Jusqu’à présent, le Congrès a préféré fouetter d’autres chats, d’autant que la légalisation est une cause populaire chez les libertariens et que 64 % de la population américaine y est favorable, selon le sondage effectué par Gallup depuis 1969 (12 % à l’époque, 36 % en 2006). En 2017, la proportion de républicains soutenant la normalisation a dépassé 50 % pour la première fois.

Lire aussi :   Au Canada, la légalisation du cannabis, un casse-tête pour les économistes

La légalisation ne repose que sur deux textes, fragiles, mais qui témoignent de la souplesse du fédéralisme américain. Le premier est un mémorandum (« Cole Memo ») d’août 2013, dans lequel l’adjoint du ministre de la justice de Barack Obama, James Cole, recommandait aux procureurs fédéraux de ne pas poursuivre les individus ou entreprises agissant en accord avec une série de principes qu’il énonçait – pas de vente aux mineurs, pas de débordements dans les Etats non légalisateurs, pas d’usage ou de production sur les terres fédérales, pas de retombées financières au profit de gangs ou de cartels… Il n’a pas été officiellement abrogé, mais nombre de procureurs ne l’appliquent plus.

 

Le second est un amendement, dit amendement Rohrabacher-Farr, qui empêche les procureurs fédéraux de consacrer des ressources aux poursuites contre ces entités. L’amendement, qui date de mai 2014, a été discrètement reconduit le 22 décembre lorsque Donald Trump a signé la loi de finances rectificative. Les avocats de la marijuana pourront profiter de la fête du 1er janvier.


Source: http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2017/12/31/la-californie-face-au-defi-du-cannabis-recreatif_5236230_3222.html
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Salut!

Intéressant ce qui se passe en CA quand on imagine que cet état, qui au passage serait la 4 ou 5ème puissance mondiale si c'était un pays (!), va surement servir de "laboratoire" pour les gouvernements qui se pencheront sur cette idée qu'est celle de légaliser: s'ils se loupent pas la peine de l'envisager chez nous d'une manière ou d'une autre! Le cas du Canada sera intéressant à suivre également.

++

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Salut

 

Ils se louperont forcement , puisque qu'on leur mettra des bâtons dans les roues , la production et la distribution sera insuffisante , et le marché noir continuera en parallèle.

Les licences vont être cédé au compte goute. Ils vont faire trainer les dossiers etc ....

 

A++

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il y a 57 minutes, Demourok a dit:

Salut

 

Ils se louperont forcement , puisque qu'on leur mettra des bâtons dans les roues , la production et la distribution sera insuffisante , et le marché noir continuera en parallèle.

Les licences vont être cédé au compte goute. Ils vont faire trainer les dossiers etc ....

 

A++

Bonjour

Pour le moment le traitement globale de la légalisation/depenalisation état par état donne quelque chose de plutôt propre.

L'administration bosse bien, le suivit est là. Pas de soucis en vue pour le moment.

Quand au problème d'approvisionnement, je sais pas ou tu as vu ça mais si y a bien un état qui n'a et n'aura aucun problème a subvenir a ses besoins c'est bien la Californie!

Ils sont déjà en surproduction cela malgré les pertes du au feu et autres soucis environnementaux.

 

Je ne pense pas que la Californie serve de "laboratoire" et perso je ne le voudrais pas.

Faut quand même voir que la légalisation thérapeutique a engendrer des tas d'abus avec des cartes médicales qu'on peu se procurer chez n'importe quels médecins pour un mal de dos ou un asthme...

Par contre, comme le Colorado, la Californie va etre un modèle économique pour les usa, voir combien l’état va générer d’impôts et les utilisés etc.

 

Je rappel que le meilleur "laboratoire" a prendre en exemple reste le Portugal, avec une depenalisation de toutes les drogues et cela depuis 15 ans.

Niveau recul, information et résultats c'est ce qui ce fait de mieux. (overdose divisé par 10, criminalité par 30 etc)

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il y a une heure, Demourok a dit:

Salut

 

Ils se louperont forcement , puisque qu'on leur mettra des bâtons dans les roues , la production et la distribution sera insuffisante , et le marché noir continuera en parallèle.

Les licences vont être cédé au compte goute. Ils vont faire trainer les dossiers etc ....

 

A++

Hello!

Merci d'avoir noirci mon utopie ;)
Non plus sérieusement tu as peut-être raison, mais ne sous-estime pas non plus l'activisme Américain surtout lorsque cela concerne une chose légale.. lorsqu'ils ouvrent une porte où il y a bcp de $ à la clef il est très difficile de la refermer chez eux.. et pas qu'un peu! Aux states le lobbyisme ça marche dans les 2 sens! Les sociétés impliquées dans la vente de cannabis vont prendre rapidement une telle ampleur financière qu'ils se pencheront sérieusement sur toutes dérives qui peuvent nuire à leur business.

++

il y a 12 minutes, Indi-Punky a dit:

Je rappel que le meilleur "laboratoire" a prendre en exemple reste le Portugal, avec une depenalisation de toutes les drogues et cela depuis 15 ans.

Niveau recul, information et résultats c'est ce qui ce fait de mieux. (overdose divisé par 10, criminalité par 30 etc)

On a (hélas) jamais regardé l'excellent exemple portugais, et je ne pense pas que ce soit demain la veille.. un Macron est plus sensible à ce qui se passe au Canada ou aux States que ce qui se passe à 1000 bornes de chez lui.. même pas sûr qu'il connaisse le nom du 1er ministre/président portugais^^ 

Modifié par MistaFaya
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Salut

 

En Californie c'est vrai qu'ils avaient déjà le médical , mais pour les pays ou états qui parte de zéro ou presque.

En Californie j'avais entendu de parler de médecins qui disaient , moi on me demande une ordonnance pour du cannabis , peu importe pour quoi c'est , je donne .

Donc forcement ils auront moins de mal sachant que y'a déjà pas mal de gens qui ont accès a la marijuana médicale sans vraiment que ce soit thérapeutique .

 

Mais dans d'autres pays états ou y'a tout a crée, j'ai hate de voir pour l'Italie par exmeple , en plus ils remboursent eux .

En Europe toute façon la France va se retrouver entouré de pays qui sont déjà en train de mettre en place le thérapeutique .On va se sentir seul d'ici peu ..au milieu de tout ca .Ca va trafiquer a mort je sens ( ca trafic déjà pas mal ----> Francois thierry).

 

PS J'dis pas que ca se fera jamais en France , mais a mon avis on va plus être emporter par la législation de nos voisins limitrophes que par l'exemple outre atlantique. Impossible d'être le seul pays répressif quand tous les autres autour on au moins légalisé le médical .

 

Et pis nos chers chefs d'états qui veulent faire une grande europe (unie) , il faudra bien un jour qu'on est les meme lois , les meme salaires etc ... la meme legislation sur les drogues si on veut que ca fonctionne parce qu'avec les frontières ouvertes ....comme elles le sont , ca va etre dur de dire aux Français " Ah non le cannabis c'est pas pour vous , vous c'est la morphine et c'est tout ."

Et pis ce sera pas avec Macron ca c'est sur .

 

 

A++

 

 

Modifié par Demourok
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