Le cannabis thérapeutique, une tentation pour le crime organisé?


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Depuis le 1er avril, les patients qui se font prescrire du cannabis thérapeutique peuvent s'approvisionner auprès des 13 fournisseurs exclusifs sélectionnés et triés sur le volet par Santé Canada.

 

Un texte de Frédéric ArnouldtwitterBird.pngcourriel.jpg
 

Parmi eux, des entreprises financées à grand renfort de millions de dollars, notamment pour satisfaire aux nombreuses conditions de sécurité. Une ruée vers l'or vert qui pourrait, selon certains, attirer le crime organisé, déjà bien implanté sur le marché de la drogue.

Tilray est l'une des 13 entreprises accréditées officiellement par Santé Canada pour cultiver de la marijuana thérapeutique.

 

Située à Nanaimo sur l'île de Vancouver, Tilray, qui emploie 60 personnes, s'est installée dans un immeuble dont les mesures de sécurité feraient pâlir d'envie une banque centrale. À l'intérieur, on y trouve des plants de marijuana thérapeutique de toutes sortes et de différentes teneurs en THC, ainsi qu'une chambre forte pouvant contenir une valeur de 35 millions de dollars de cannabis à des fins médicales.

 

Depuis le premier avril, Tilray livre sa marijuana en 24 heures partout au Canada au coût de 8 à 12 $ le gramme.

 

L'entreprise bat pavillon canadien, mais les capitaux viennent surtout d'ailleurs. En fait, il aura fallu quatre ans à Brendan Kennedy, un Américain de Seattle, président de Tilray, pour trouver 20 millions de dollars auprès d'investisseurs qui, selon lui, ont à cœur d'éliminer la prohibition du cannabis thérapeutique au Canada. Il a amassé 20 millions de dollars grâce à des investisseurs du Mexique, de Singapour, d'Israël et de la France, entre autres.

 

Les 20 millions ont donc été investis avant même de savoir si le permis allait être délivré par Santé Canada.

 

140701_hg32j_marijuana-therapeutique_sn6Laboratoire de marijuana thérapeutique en Colombie-Britannique.  Photo :  Frédéric Arnould

 

Vérification par la GRC

 

Questionnée au sujet de la vérification, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) a répondu qu'elle « apporte son concours au filtrage des demandeurs de licence en vertu du Règlement sur la marijuana à des fins médicales, en effectuant, pour le compte de Santé Canada et du ministre de la Santé, des vérifications d'antécédent criminel, à l'appui de la décision du ministre de délivrer une licence de production ».

 

La GRC n'offre aucune autorisation de licence de production, ajoute Laurence Trottier, agente des relations avec les médias. C'est à Santé Canada et au ministre de la Santé qu'il revient d'approuver, ou non, une demande de licence de production.

 

La GRC communique à Santé Canada toute information pertinente et légitime sur les demandeurs de licence, notamment toute notion de criminalité de la part du demandeur ou toute association connue de ce dernier à des éléments criminels. Pour que l'entreprise obtienne son permis de production de marijuana thérapeutique, les antécédents de chaque employé et membre de la direction sont donc passés au crible par la GRC.

 

Financement étranger difficile à retracer

 

Mais qu'en est-il des investisseurs qui pourraient financer ces compagnies? Impossible à vérifier selon les experts comme Messaoud Abda, responsable du Programme de criminalité économique de la Faculté de l'éducation permanente de l'Université de Montréal.

 

« L'assurance qu'on contrôle le processus de A à Z, moi, je n'y crois pas encore dans le moment, surtout que j'arrive dans un marché qui n'est pas naturel pour les activités légitimes. » — Messaoud Abda

 

Pour Yvon Dandurand, professeur en criminologie à l'Université de la Vallée du Fraser, le crime organisé peut difficilement être retracé à travers la vérification de la GRC : « Il y aura toujours la possibilité d'investir dans ces établissements-là par personne interposée et hommes de paille ».

Quant à savoir si le crime organisé est partenaire ou non de ces fournisseurs de cannabis thérapeutique, cela prendrait de solides preuves pour donner lieu à des enquêtes plus approfondies et, dans le cas de capitaux étrangers qui seraient investis, il en coûterait beaucoup d'argent pour entreprendre ce genre d'enquêtes internationales, ajoute M. Dandurand.

 

Messaoud Abda, lui, craint que ces vitrines légitimes soient utilisées par le crime organisé pour contrôler d'une manière ou d'une autre le commerce des drogues.

Philippe Lucas, vice-président de Tilray, reconnaît que la GRC ne peut vérifier la provenance d'argent extérieur au Canada, mais il assure que la bonne foi et le sérieux de l'entreprise garantissent la transparence. Il serait trop risqué, pense-t-il, de s'acoquiner avec le crime organisé. Santé Canada et le ministère fédéral de la Sécurité publique maintiennent que le processus de vérification est sûr.

 

https://ici.radio-canada.ca/widgets/mediaconsole/medianet/7115255/?seektime=undefined

Le reportage de Frédéric Arnould en vidéo

 

Source: ici.radio-canada.ca

 

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