kyu 2 978 Posté(e) mars 27, 2015 Partager Posté(e) mars 27, 2015 La « rationalisation » du marketing du cannabis Des franges de plus en plus grandes de l’opinion publique ont désormais un regard favorable sur le cannabis. Les entreprises actives dans le secteur du cannabis élaborent des stratégies visant à renforcer cette image positive et qui tend toujours plus vers une situation d’acceptation totale. Les entreprises traditionnelles prennent également la mesure de ce phénomène et entendent trouver le moyen de profiter de cette tendance.Faut-il camoufler la contreculture entourant la consommation de cannabis ou bien l’exploiter ?Il semble que le marketing du cannabis soit en passe de se « rationaliser », principalement de deux façons : d’abord, les entreprises qui sont exclusivement centrées sur le cannabis ajustent de plus en plus leur marketing à destination d’un public plus large et plus hétérogène ; ensuite, les grandes entreprises très connues, qui n’avaient jusque-là rien à voir avec le cannabis, commencent à prendre acte de sa valeur et de sa rentabilité sur le marché actuel, et l’ont intégré à leurs gammes de produits et à leurs stratégies. Les membres de l’industrie du cannabis cherchent de plus en plus à prendre leurs distances avec l’image stéréotypée du camé (© Don Hankins).Étrangement, les deux camps semblent adopter des techniques quelque peu divergentes. Dans le premier, celui des dispensaires « nouveau riche » et des grandes entreprises du cannabis, la tendance est d’écarter toute connotation négative de la contreculture du « camé » pour démarquer l’entreprise promue ; dans le second, la tendance est d’insérer dans les textes et les images des allusions, « oh, quelle audace ! », à cette même contreculture pour renforcer l’image urbaine décontractée attachée à des entreprises par ailleurs banales – donnant pourtant dans bien des cas l’impression d’un adolescent tirant la langue à des parents au regard désapprobateur.Les dispensaires doivent-ils changer leur image ?Dans les premières années de la véritable révolution que nous vivons aux États-Unis avec la légalisation du cannabis, de nombreux dispensaires et autres entreprises apparentées ont adhéré à la sous-culture des milieux de la drogue et tentent désormais de s’en défaire : mais changer le visage de cette industrie nécessitera beaucoup de temps et d’efforts. Le « prescripteur » type correspond encore souvent à ce stéréotype. Dans chaque point de vente, on peut entendre les mêmes chansons hip-hop et reggae rendant hommage au cannabis. Les produits sont vantés par des beautés plantureuses amoureuses de la dope, photographiées dans des poses évocatrices, enroulées autour de créations en verre dernier cri ou flânant au milieu des participants de divers salons commerciaux pour leur ronronner des messages de bienvenue et leur offrir de tirer sur des pipes à eau électroniques de dernière génération. Bien que certains membres de la communauté du cannabis au sens large aient vu d’un mauvais œil ces aspects de la scène dès le départ, la grande majorité de la population des consommateurs de cannabis (massivement jeune et masculine) n’y ont rien trouvé à redire. Après tout, de nombreux jeunes hommes appréciant le cannabis aiment également les jeunes femmes attrayantes et la musique évocatrice de la consommation d’herbe. Simple comme bonjour, n’est-ce pas ? Pas si sûr : alors que la tolérance, l’acceptation et l’usage du cannabis se généralisent plus que jamais, certains aspects de ce qui fut jadis un étendard de la contreculture sous lequel les opprimés pouvaient se rassembler sont devenus des rappels embarrassants des raisons pour lesquelles l’industrie a tant peiné à être prise au sérieux pendant si longtemps, et les appels au changement sont plus forts et retentissants que jamais.Les personnes qui font entrer le business du cannabis dans la normalité Cannabrand est une agence de marketing qui croit à la « rationalisation » de l’industrie du cannabis.Ces appels au changement ont ouvert la voie à une nouvelle race de sociétés de marketing spécialisées dans le cannabis pour donner un nouveau visage public à l’industrie et le présenter d’une manière jugée plus acceptable pour les masses populaires. De plus en plus, leur discours assimile l’usage de cannabis aux gens ordinaires – le cadre travailleur, le parent au foyer, la personne âgée, l’individu sain et respectable –, dans le but de convaincre le grand public que le cannabis est accessible à tous ceux qui en ont envie ou besoin plutôt que réservé aux démotivés, aux désabusés, aux hommes de moins de trente ans ne faisant jamais rien de bon tels qu’ils sont décrits par le mouvement en faveur de la prohibition. Dans ce nouveau discours, les femmes sont tout aussi enclines à consommer des produits à base de cannabis que les hommes, ce qui rend l´image de la femme objet désormais inacceptable. Ainsi, la mentalité « Vas-y, mets-toi en phase, et décroche » (maxime inventée et popularisée par Timothy Leary et synonyme de « libération, contemplation [méditative] et contestation ») est également malvenue, faisant place à des personnes cherchant la reconnaissance en tant que travailleurs et individus contribuant à la société. Les représentants de l’industrie du cannabis ont repassé leur costume, réajusté leur cravate et relégué leurs hoodies et Nikes au fond de leur placard, pour le meilleur ou le pire. À Denver, Colorado, plusieurs entreprises se consacrent désormais à l’art du marketing de masse du cannabis qui s’adresse au grand public : Cannacorp, THC Media Group, Colorado Marijuana Marketing et Cannabrand, la dernière étant apparemment le « leader mondial » du marketing du cannabis.Un changement d’image controverséCannabrand, une agence de marketing dirigée par des femmes, a été particulièrement insistante quant à la nécessité d’un changement d’image à l’échelle du secteur : une tendance quelque peu controversée qui leur a même fait perdre un client important. Après avoir été citée dans le New York Times pour sa comparaison de certains dispensaires de Denver à des « cliniques d’avortement clandestines » et à des « caves de drogués », la chaîne de dispensaires fraîchement rebaptisée « Mindful » (anciennement Gaia Plant Based Medicines) a décidé de rompre ses liens avec l’agence, en dépit du fait que le changement de la marque avait été piloté par Cannabrand elle-même. Cannabrand a déclenché une controverse en déclarant que les dispensaires ressemblaient à des « cliniques d’avortement clandestines » et à des « caves de camés » (© marichica88). Divers groupes d’activistes se sont également élevés contre ce qu’ils considéraient comme une description injuste du mouvement de base en faveur du cannabis, résumée dans des termes du genre « nous œuvrons pour l’éradication des drogués », et qui renvoie une position jugée exclusive, élitiste et irrespectueuse pour de nombreux piliers de l’activisme qui ont consacré leur vie et abandonné leur liberté afin de porter cette industrie au niveau de respectabilité qu’elle connaît aujourd’hui – et sans qui des entreprises comme Cannabrand n’existeraient tout simplement pas. Cependant, malgré ce dégoût généralisé inspiré par les commentaires de l’agence dans le secteur, ils ont de toute évidence touché la corde sensible chez plusieurs enseignes ; Cannabrand n’a jamais eu autant de travail et se prépare à lancer une campagne nationale intitulée « Déstigmatiser pour légaliser », qui vise à faire changer d’avis le camp pro-prohibition plus affaibli que jamais.Pendant ce temps, le monde des affaires se tourne vers le cannabisAlors que l’industrie naissante du cannabis échafaude pas à pas la meilleure façon de se présenter au grand public, plusieurs entreprises traditionnelles notables cherchent comment tirer le meilleur parti du nouveau statut sociétal du cannabis afin de s’attirer certaines catégories de la population. Pour ces entreprises, une tactique courante consiste à s’adresser au large nombre de personnes qui ont un intérêt pour la contreculture du cannabis sans y être totalement plongées et qui ont peut-être encore quelques réticences en raison des stéréotypes persistants qui y sont associés. Cet aspect du marketing du cannabis ne trouve généralement pas écho auprès des entreprises qui produisent ou distribuent du cannabis, en raison du fait que le cannabis demeure illégal en vertu des lois fédérales. Au lieu de cela, ces dernières s’intéressent au chanvre, la forme non psychoactive du cannabis, cultivé pour sa fibre et ses graines qui sont utilisées pour produire un éventail de produits allant des produits de soin de la peau aux produits alimentaires, en passant par les vêtements. Toutefois, certains signes démontrent que de grandes entreprises élaborent actuellement des stratégies à long terme qui seront mises en œuvre lorsque le cannabis deviendra inévitablement légal en vertu du droit national et international.The Body ShopBien que la majeure partie des avancées récentes dans l’acceptation sociétale du cannabis aient été réalisées outre-Atlantique aux États-Unis, c’est une entreprise britannique, The Body Shop, qui est l’exemple parfait du potentiel commercial grandissant du cannabis et du chanvre. Cette entreprise a bâti une présence mondiale massive depuis ses débuts modestes dans une boutique de Brighton en 1976. Ayant toujours été une ardente défenseuse des questions sociales et environnementales, en offrant par exemple son soutien à Greenpeace dans les années 1980 ou en adoptant les principes du commerce équitable dans sa politique d’achat de produits auprès de petits producteurs issus des pays en développement, c’est sans doute sans surprise que la société a commencé à promouvoir les produits issus du chanvre pendant les années 1990 (produits qui devaient représenter à l’aube du millénaire environ 4 % de son chiffre d’affaires avoisinant alors le milliard de dollars). La gamme de produits à base de chanvre de The Body Shop est un bon exemple de publicité ouvertement procannabis devenant de plus en plus acceptable. Au début, sa gamme de produits était simple et simplement promotionnée (ayant recours à de vagues étiquettes en forme de feuille de cannabis et à d’autres actions de marketing neutres). Aujourd’hui, sa gamme de produits s’est élargie, et sa stratégie de marketing est un peu plus audacieuse. Son étiquetage est resté globalement le même depuis l’apparition de ses premiers produits, mais l’ajout subtil d’un savon suspendu à une simple corde et présenté sous la forme d’une feuille de chanvre et des allusions pas si subtiles que ça à la contreculture du cannabis dans leur publicité en ligne ont marqué un changement progressif de stratégie. Dans la section de son site Internet dédiée au chanvre, le titre de la page est « Moisture high for the very dry » (une « euphorie » hydratante pour les peaux très sèches) ; plus bas, on peut lire « Get your hands on the good stuff » (mettez la main sur le bon « matos ») qui est une exhortation pour ceux qui sont peut-être intéressés par ces savons en forme de feuille de chanvre suspendus à une corde en fibre de chanvre. Un peu plus loin, ils nous présentent « Three dope facts about hemp » (trois faits « stimulants » à propos du chanvre), avant de conclure en assurant le lecteur que d’autres clients « had a high time with hemp body care » (ont connu un moment « d’euphorie » avec les produits de soins corporel au chanvre). Inoffensif et amusant pour le plus grand nombre. Toutefois, pour d’autres (en particulier ceux qui considèrent que le chanvre et le cannabis psychoactif devraient être traités de manière distincte dans le discours public), c’est la preuve que les grosses entreprises n’ont aucun scrupule à exploiter la contreculture entourant le cannabis dans le but d’en tirer un profit. Il ne faut cependant pas passer sous silence le relatif regain d’intérêt pour les produits de soin de la peau à base de chanvre grâce à la promotion de leur gamme. La société a également à son actif diverses initiatives politiques visant à promouvoir l’acceptation du chanvre, par exemple en écrivant à la DEA pour lui faire part de ses inquiétudes concernant des modifications réglementaires imminentes. Anita Roddick, la fondatrice de la société, y déclarait : « Je vous prie instamment de ne pas adopter ces réglementations malavisées. Elles porteront atteinte à notre activité et sont erronées quant à la nature réelle du chanvre, l’une des plantes les plus utiles et les plus bénéfiques que la nature nous ait données ».Bière et herbe, l’association classiqueIl n’est par ailleurs pas surprenant que dans la véritable explosion de l’industrie de la brasserie artisanale aux États-Unis certaines entreprises s’approprient l’association bien connue du cannabis et du houblon et proposent quelques bières artisanales intéressantes, aromatisées aux fleurs ou aux graines de chanvre. La plupart de ces brasseries artisanales sont des petites entreprises dirigées par des personnes passionnées par leur métier, et il y a dans une certaine mesure des similitudes entre la sous-culture de la bière et celle du cannabis ; on peut donc s’attendre à voir apparaître des bières fantaisie à base de chanvre portant des noms et un étiquetage également fantaisiste. La « Joint Effort » de Red Hook est interdite à la vente hors des frontières de l’État en raison de son slogan évoquant ouvertement le cannabis. Sur les diverses bières au chanvre commercialisées aujourd’hui, les marques qui se distinguent sont O’Fallon Hemp Hop Rye Amber Ale, Humboldt Brown Hemp Ale et Redhook Brewery avec sa « Joint Effort », vendue frappée du slogan « A dubious collaboration between good buds » (une collaboration douteuse entre de fortes « têtes »). Il est intéressant de noter que la « Joint Effort » ne peut être vendue que dans l’État de l’Oregon en raison de son slogan évoquant ouvertement le cannabis, qui tombe sous le coup des réglementations de l’Alcohol and Tobacco Tax and Trade Bureau (TTB) et qui la rend du coup illégale au plan national. Même les bières qui ne contiennent pas de chanvre, mais qui ont un arôme rappelant le cannabis, sont commercialisées suivant les mêmes principes. C’est le cas par exemple de la Sweetwater 420 et d’une bière au nom merveilleux : la Dark Horse qui « Sent comme l’herbe ». C’est paradoxal, dans la mesure où la bière ne contient pas réellement de chanvre et que les brasseurs sont donc libres de la commercialiser comme bon leur semble, selon les réglementations du TTB.Les géants de l’alcool et du tabacSans aucun doute, les grands secteurs industriels qui ont le plus d’expérience dans la formulation de messages d’appel controversés destinés au grand public sont l’industrie du tabac et de l’alcool. En fait, certains détracteurs comparent la rationalisation du marketing du cannabis à la publicité pour le tabac, et font de sinistres prédictions dans lesquelles des enfants sont happés par la tentation irrésistible du cannabis et deviennent les victimes de ses conséquences désastreuses. Les grandes marques de l’industrie du tabac réfléchissent à pénétrer le marché du cannabis depuis les années 1970. Néanmoins, plusieurs industriels du tabac envisagent une incursion dans l’industrie du cannabis au moment opportun, et certains signes laissent à penser que des entreprises du secteur de l’alcool pourraient également bien passer à l’acte. Une étude publiée récemment suggère que Philip Morris (désormais Altria), British American Tobacco et RJ Reynolds (désormais Reynolds American) réfléchissent à la fabrication de cigarettes à base de cannabis depuis les années 1970. Altria et Reynolds American ont apparemment enregistré des noms de domaine internet comportant les mots « cannabis » et « marijuana ».La magie du marketing de masseFinalement, le marketing se résume à séduire le public. Pour ceux qui sont déjà favorables à l’utilisation et à la légalisation du cannabis, les publicités « rationalisées » participent à dépeindre un produit de plus en plus acceptable et renforcent leur conviction concernant sa valeur et sa crédibilité. Pour ceux qui ont encore un avis mitigé sur le cannabis, ce nouveau style de marketing pourrait les faire pencher du côté de l’acceptation.Et même pour ceux qui sont résolument contre l’utilisation de cannabis, un marketing qui prend soin d’éviter toute référence aux aspects les plus déplaisants de la contreculture du cannabis (en décrivant au contraire des gens sains, intelligents, travailleurs et par-dessus tout des gens normaux qui se contentent de savourer un biscuit médicamenteux après une journée de bureau éprouvante) pourrait permettre d’apaiser leurs craintes et, dans certains cas, même leur faire changer radicalement d’opinion. Source: sensiseeds.com 4 Lien à poster Partager sur d’autres sites
GuiGuiGnol 58 Posté(e) mars 27, 2015 Partager Posté(e) mars 27, 2015 (modifié) Salut ! Très intéressant cet article ! Cet article me fait pas mal penser au cliché du militant pro-légalisation en vêtements de chanvres avec des dreadlocks ou autres clichés, qui n'est pas majoritaire dans le panel de consommateurs mais pourtant beaucoup plus visible dans les médias (stigmatisation ?). Personnellement, avoir des porte étendards de la légalisation gominés en costard cravate, ça ne me dérange absolument pas ! Et ça pourrait faire changer les préjugés de ceux qui nous (les consommateurs en général) voient comme une bande de hippies illuminés ! Je suis assez jeune, et je n'ai jamais trop été a l'aise avec la plupart des fervents pro-légalisation de ma génération qui adoptent des comportement sociaux (look, musique par exemple) sur le simple fait de la consommation d'une plante, ce qui ne les empêchent pas d'avoir des idées reçues dessus ( et ouais ça marche dans les deux sens). D'ailleurs la stigmatisation ça marche dans les deux sens, il m'arrive de me faire prendre de haut par des chevelus en sarouel carhart (le joint de pneu a la bouche) lorsque j'interviens dans une discussion sur ce sujet qui me passionne ! Tout ça parce que j'ai un visage assez juvénile un dress code très classique et que je n'obéis a aucun cliché du fumeur de pétards ! En soirée ça peut être assez fatigant de voir le regard dédaigneux de clichés ambulants quand tu roules ton joint avec ta tête de minot, avec la petite réflexion du " c'est quoi ton truc chimique ", terme qui semble vouloir désigner toute herbe cultivée dans les règles de l'art En plus ils se gâchent le plaisir à se dire que la défonce brutale qu'ils se prennent dans la face n'est pas saine Bien sur j'ai eu ce cas de figures des dreadlocks au crane rasé, des nikes aux sandales ! En fait dans l'idéal j'aimerais que les gens ne s'attribuent pas le monopole de la weed en fonction de ce qu'ils sont, combien de fois j'ai entendu des clichés sur "les vieux" qui ne comprennent rien au cannabis, alors que des papis qui ont un plant dans le jardin et se fument un pétard avec leur verre de rouge le dimanche midi, ça existe Bref, c'était le coup de gueule pas forcément justifié d'un cannaweeder qui pense que les clichés façonnent la réalité et pas l'inverse, pas roots ni lascar pour deux sous mais portant une appétence déraisonnée pour ce buisson ardent qu'on aime tant ! Venez comme vous êtes, et explosons nous les mirettes ++ Modifié mars 27, 2015 par GuiGuiGnol 2 Lien à poster Partager sur d’autres sites
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