kyu 2 978 Posté(e) mars 7, 2015 Partager Posté(e) mars 7, 2015 La survenue d’une psychose apparaît aujourd’hui comme liée à l’interaction entre des facteurs génétiques et des facteurs environnementaux. Au-delà de ce lieu commun il est manifeste que nous ne pouvons agir sur les premiers, et que nous connaissons mal les seconds. Les moyens de prévention de la schizophrénie sont encore mal définis, et loin d’être efficaces. La consommation de cannabis est un facteur de risque établi, et dont il est possible de diminuer l’impact. Cependant le lien entre le cannabis et la schizophrénie reste mal connu. On sait que tous les consommateurs de cannabis ne vont pas développer une psychose, mais on ne connaît pas les modes de consommation les plus à risque. Un quart des psychotiques dans les quartiers sud de Londres Marta Di Forti et al présentent dans Lancet Psychiatry une étude cas-témoin menée au South London and Maudsley NHS Foundation Trust. Tous les patients entre 18 et 65 ans (606 au total) ayant souffert d’un premier épisode psychotique entre mai 2005 et mai 2011 devaient remplir un questionnaire sur leur consommation de cannabis, précisant la fréquence de consommation mais également le type de cannabis consommé : « hash » ou « skunk ». La « skunk » est une variété d’herbe se distinguant par une plus grande concentration de tétra-hydrocannabinol (THC), le « principe actif » du cannabis, responsable de ses effets psychotropes (15 % de THC contre 5 % pour la résine de cannabis, ou « hash »). Les sujets témoins (389) étaient recrutés par internet, la presse, et la distribution de prospectus dans le même quartier. L’analyse porte sur 410 questionnaires complets de cas (une proportion particulièrement élevée), et 370 de contrôles. La proportion de sujet ayant déjà consommé du cannabis était identique dans les deux groupes (67 % et 63 % respectivement, p = 0,227), mais les patients consommaient plus fréquemment du cannabis, avec 30 % de consommation quotidienne contre 11 % dans le groupe contrôle (p < 0,0001). Mais c’est surtout le mode de consommation qui différait entre les deux groupes, avec 53 % de consommation de « skunk » pour les patients, pour seulement 19 % pour les témoins (p < 0,0001). Dans une analyse multivariée, ajustée pour l’âge, le genre, l’origine ethnique, la consommation d’autres substances, le niveau d’éducation et l’emploi, les sujets ayant une consommation quotidienne ou une consommation de « skunk » avaient 3 fois plus de risque d’avoir un premier épisode psychotique (respectivement odds ratio [OR] = 3,04 ; intervalle de confiance à 95 % [iC95] 1,91 – 7,76 et OR=2,91 ; IC95 1,52 – 3,60). Le risque de présenter un premier épisode psychotique était de 5,40 pour les sujets consommant quotidiennement de la skunk. En supposant un lien de causalité, les auteurs estiment que 24 % des cas (17,4 – 30,6 %) de premiers épisodes psychotiques dans cette population seraient attribuables à la consommation de skunk. Du cannabidiol oui, du THC, non ! Cette étude souffre bien entendu des nombreux biais inhérents aux études rétrospectives, et mérite d’être confirmée au cours d’une étude prospective. Les cas et les contrôles n’étaient pas identiques en ce qui concerne le genre et l’origine ethnique. De plus la population étudiée présente une consommation de cannabis et de skunk supérieure à celle de la population générale. Cette étude cas-témoin montre cependant ce que l’intuition mais également des études expérimentales suggèrent : une consommation importante et fréquente de THC est associée à un risque accru d’entrée dans la psychose. La conclusion plus étonnante est « l’innocuité » de la consommation de cannabis de type « hash » qui n’est pas associée ici la psychose, quelle que soit la fréquence de consommation. Les auteurs supposent que contrairement au « skunk », le « hash » contient du cannabidiol en plus du tétra-hydrocannabinol, qui pourrait avoir des propriétés antipsychotiques. Ces données apportent des précisions intéressantes sur le risque de psychose associé à la consommation de cannabis, et devraient permettre de rendre plus efficace les efforts de prévention de la psychose, en se concentrant sur les populations les plus à risque. *Dr Alexandre Haroche* Référence Di Fiori M et coll. : Proportion of patients in south London with first-episode psychosis attributable to use of high potency cannabis : a case-control study. Lancet Psychiatry 2015,2: 233-238. doi.org/10.1016/S2215-0366(14)00117-5 Copyright © https://www.jim.fr Ce message a été promu en article Lien à poster Partager sur d’autres sites
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