Drogue. Substituts, vaporisateurs, pipes... Ou comment éviter le tabac tout
en continuant à consommer du cannabis.
Il y a de la fumette sans feu
Par Arnaud AUBRON
lundi 03 novembre 2003
«Les gens tombent accros au mélange tabac-herbe. C'est ce que j'appelle les
joints accrochants.» Michka, du musée du Fumeur omme on mange bio, on veut
désormais fumer bio. Maintenant qu'il semble difficile de prétendre ignorer
que «fumer tue», de plus en plus d'amateurs de pétards ont décidé de changer
de vie et d'arrêter de fumer... du tabac. Mais comment faire pour continuer
la fumette sans fumer ?
Raphaël (1), 30 ans, fait partie de ces fumeurs d'un genre nouveau. «Je ne
fumais plus que de l'herbe pure et, sans m'en rendre compte, j'ai perdu
l'habitude de consommer du tabac. Quand j'ai racheté des cigarettes,
quelques mois plus tard, j'ai trouvé ça dégueulasse. Puis, en me remettant à
fumer du hasch, j'ai repris le tabac. D'abord dans les pétards, puis dans
les cigarettes.» Raphaël voudrait arrêter définitivement la cigarette :
«J'en fume encore quand je suis stressé et je le fais quand je ne peux pas
fumer de pétard, ce qui prouve que je suis dépendant.»
Tentatives infructueuses. «De plus en plus de gens sont contents d'avoir
arrêté la cigarette, mais ils se leurrent car ils fument du tabac avec le
chanvre et retombent dans la consommation de cigarette, confirme Michka, du
musée du Fumeur. L'essentiel c'est de ne pas mélanger. Le tabac rend accro,
l'herbe non. En mélangeant, les gens tombent accros au mélange, c'est ce que
j'appelle les joints accrochants.» Après quelques tentatives infructueuses
d'arrêt de la cigarette tout en continuant les pétards au tabac, beaucoup
finissent par se ranger à cet avis. Et décident finalement de ne plus
toucher un brin de tabac.
Mini-révolution. Et là, c'est à chacun sa manière. Traditionnelle d'abord :
«Au Maghreb, poursuit Michka, les gens fumaient dans un sepsi (pipe dont le
long tuyau permet de refroidir la fumée, ndlr). Les Mexicains, eux, fumaient
l'herbe pure, ce qu'on appelle "à l'américaine".» Mais l'herbe pure n'est
pas sans effet. «Ã‡a me fait tousser, je ne pourrais pas en fumer», regrette
Bernadette, 45 ans, agricultrice dans l'est de la France, qui a pourtant
arrêté la cigarette il y a deux ans. «J'en fumais une dizaine par jour.
J'avais des quintes de toux, une bronchite chronique. Il fallait que je
fasse un choix, et comme je préférais le cannabis, j'ai décidé d'arrêter le
tabac. Malheureusement, j'en mets toujours un tout petit peu avec l'herbe.
Or le tabac ne m'apporte rien, alors je me renseigne sur les vaporisateurs.»
Le vaporisateur ? Une mini-révolution destinée au marché du cannabis
thérapeutique et issue de l'imagination fertile de l'Américain Eagle Eye
Bill, l'homme qui a prouvé qu'il peut y avoir fumette sans feu. Le principe
est simple : une résistance maintient l'herbe, ou le haschisch, au-dessus
des 200 °C, température à laquelle le THC  le principe actif  s'évapore,
sans entraîner de combustion. Et sans combustion, il n'y a pas de goudron et
les risques pour les poumons sont donc moindres. Pas non plus de fumée, mais
une sorte de gaz à aspirer. Le modèle le plus récent (sans fil !) est même
prévu pour diffuser ce gaz dans l'air ambiant d'une pièce.
Autre manière, moins technologique, de régler de problème de combustion :
des dizaines de recettes au chanvre sont disponibles dans différents livres
ou sites web. Enfin, un objet étrange semble en vogue ces temps-ci, à en
croire le nombre de pages Internet qui lui sont consacrées : le «budbomb».
D'après ses concepteurs, cette petite pipe métallique en forme d'obus permet
de limiter la quantité de fumée dégagée et filtre même les goudrons au
passage.
Odeur. Mais, pour certains «puristes», rouler et faire tourner un pétard
fait partie du plaisir du cannabis. Ces derniers semblent se tourner vers
les substituts au tabac. Là aussi le marché s'est développé : alors que les
substituts classiques ont une odeur à faire fuir tout amateur de fumée, une
société allemande commercialise désormais un mélange d'herbes à base de
chanvre, mais celui-là, avec moins de 0,2 % de THC, est parfaitement légal.
Il est d'ailleurs vendu comme désodorisant d'intérieur.
(1) A la demande des intéressés, les prénoms ont été modifiés.
Sources : CIRC Paris
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