Au Mexique, puis en Argentine, les juges ont décidé de ne plus pénaliser les faibles quantités de cette drogue destinées à la consommation personnelle. La tendance s'étend à d'autres pays latino-américains. Le but: se consacrer aux "gros poissons".
Source: lexpress.fr
Roberto Ledesma a 27 ans et huit grammes de marijuana dans sa poche. Il se promène avec, en toute liberté, raconte le quotidien argentin Pagina 12. Arrêté par la police, risque-t-il de se retrouver en prison? Non: la Cour suprême d'Argentine vient de le relaxer, pour respecter la jurisprudence établie quelques jours auparavant. La possession de faibles quantités de stupéfiants destinées à la consommation personnelle n'est en effet plus punie de cette façon.
La Cour suprême revendique ainsi le concept d'autonomie individuelle: ne pas pénaliser des conduites privées si elles ne nuisent pas aux autres.
Jusqu'alors, la possession de petites quantités de n'importe quelle drogue était pénalisée avec un maximum de deux ans de prison. Cette nouvelle décision vient changer un critère établi depuis 20 ans en Argentine, selon lequel les consommateurs sont considérés comme le premier maillon d'une chaîne qui conduit tout droit au dealer.
Dans ce contexte, la Cour a aussi exhorté l'Etat à réformer les politiques contre le trafic de drogues. Et le gouvernement de la présidente Cristina Fernandez de Kirchner travaille déjà sur le sujet: il reçoit des projets pour réformer la loi antidrogue.
Se concentrer sur les "gros poissons"
https://www.cannaweed.com/upload/server8/fd294c.jpg[/img]La décision de la Cour argentine, très attendue, était néanmoins quelque peu prévisible. Il a un peu plus d'un an déjà, le gouvernement parlait de relativement se désintéresser des petits consommateurs pour concentrer l'attention des autorités sur les "gros poissons".
Dans un pays où 440 000 personnes se disent consommateurs habituels, selon des sources officielles, l'Argentine s'écarte de la politique qu'elle partageait avec les Etats-Unis et adopte des critères plus flexibles tels que ceux considérés au Brésil ou en Uruguay (voir l'encadré).
Le Mexique est allé un peu plus loin que l'Argentine: une loi anti-drogues existe déjà. Elle dépénalise la possession de 500 milligrammes de cocaïne, 50 mg d'héroïne, 40 mg d' amphétamine, 2 g d'opium ou 5g de marijuana, entre autres.
Pour la justice mexicaine, c'est une façon d'inciter les accrocs à chercher des soins qui seraient financés par le gouvernement.
Mais cette décision suscite l'inquiétude, aux États-Unis... "Les milliers d'étudiants américains qui partent chaque année au Mexique pour le "spring break" choisiront maintenant cette destination pour obtenir des drogues", estime un chef de police.
Pourtant, malgré cette inquiétude, ces premiers changements de politiques au Mexique et en Argentine n'ont pas été critiqués outre mesure aux États-Unis. Dans quelques États américains, la possession de petites quantités de marijuana n'est pas non plus condamnée.
REUTERS/Enrique Marcarian
En Argentine, la culture du cannabis ne sera pas pénalisée si elle est destinée à la consommation personnelle.
C'est de Colombie qu'est venue la critique la plus franche. Le président colombien Alvaro Uribe a en effet fustigé la dépénalisation: "légaliser la consommation aux drogues incite les jeunes au crime", dit-il.
Le magazine argentin THC, quant à lui, s'écrie "enfin libres"
La seule limite, selon un juge argentin qu'il cite, étant de ne pas faire du prosélytisme...
Par Nathalie Kantt