Le conseil d'Etat a décidé d'autoriser le test salivaire de détection de stupéfiants pratiqué par l'employeur sur ses salariés. Il avait été saisi par une société gardoise.
Un employeur pourra désormais pratiquer un test salivaire de détection de stupéfiant sur ses employés. Tout du moins sur ceux qui occupent un poste hypersensible en matière de sécurité. Le conseil d'Etat vient de donner son feu vert.
La haute juridiction avait été saisie par l'entreprise gardoise Sud Travaux à Garons. Elle lui a donc donné raison contre l'Inspection du travail qui était opposé à cette pratique. C'est surtout le secteur du bâtlment qui est concerné: selon une enquête de la Fédération du bâtiment en Languedoc et dans le Roussillon 2 employés sur 10 fument du cannabis..
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Pour Philippe Tamaï, le président de la Fédération du bâtiment dans le Gard, cette décision du conseil d'Etat est une bonne nouvelle.
Interview de Philippe Tamaï, président de la fédartion du bâtiment dans le Gard
Le député PS Benoît Hamon, candidat à la primaire de la gauche, a estimé lundi que « la vraie gangrène » des quartiers était « l'économie du cannabis » et plaidé pour la légalisation afin de « tuer ces trafics ».
« Je pense surtout qu'il faut qu'on s'attaque à la vraie gangrène, à savoir l'économie du cannabis », a déclaré le député des Yvelines sur France info, en réagissant à l'attaque dont ont été victimes quatre policiers en lisière de la cité difficile de la Grande Borne dans l'Essonne.
« C'est pour ça que ma position, c'est la légalisation du cannabis, pas simplement la dépénalisation d'usage. Afin que demain, nous puissions tuer ces trafics », a dit M. Hamon.
Selon un sondage Ipsos diffusé lundi, plus d'un Français sur deux (52 %) est favorable à ce que la question de la législation du cannabis soit abordée dans le cadre de la prochaine campagne présidentielle.
« Ne pas être dans le déni »
L'ancien ministre de François Hollande, qui a quitté le gouvernement à l'été 2014, appelle également à la réinstallation de la « police de proximité », notamment dans les quartiers difficiles.
« La question est de savoir si l'on peut avoir une relation plus normale avec les forces de police. La population y aspire, ceux qui n'en veulent pas, ce sont ceux qui se nourrissent de la population, du cannabis et qui en font non seulement le moyen d'en vivre mais s'en servent pour mettre sous coupe réglée certains quartiers », a-t-il plaidé.
M. Hamon, qui se veut le chantre de « la question sociale », a aussi revendiqué des « robustes différences » avec ses principaux rivaux aux primaires, déclaré (Arnaud Montebourg) ou non (François Hollande). Il a ainsi exhorté à « changer de politique » sur les sujets sociaux et « ne pas être dans le déni ».
Des engagements « dépassés »
« C'est pour ça que je ne cours plus après un modèle de développement qui fait de la croissance l'alpha et l'oméga des politiques publiques », a rappelé le député des Yvelines, qui propose notamment un « revenu universel ». « Car non seulement la croissance ne revient pas mais en plus elle a un coût environnemental et un coût social insoutenables. »
« Mon objectif, et c'est surement la différence que j'ai avec Arnaud (Montebourg), ce n'est pas d'être le gardien des engagements de 2012 de François Hollande », a-t-il encore dit.
« Car, à bien des égards, ces engagements de 2012 sont aujourd'hui dépassés. On voit que la révolution numérique va entraîner la destruction de centaines de milliers d'emplois sans qu'il n'y ait aucune anticipation sur ces conséquences. »
Depuis plusieurs décennies, c’est l’un des sujets sociétaux les plus discutés. Et il y a fort à parier que la dépénalisation et/ou la libéralisation du cannabis sera de nouveau évoqué lors de la campagne présidentielle. Voici ce qu’en pense François Fillon, candidat Les Républicains.
Si la question n’est pas directement abordée dans la profession de foi diffusée sur son site internet, cela n’empêche pas l’ex-Premier ministre de Nicolas Sarkozy d’avoir un avis bien tranché sur la réponse à apporter.
François Fillon est farouchement opposé à toute évolution législative sur le sujet. Il l’a dit à BFMTV en janvier 2016. «Je suis contre la dépénalisation ou libéralisation (…). Il y a une augmentation de la consommation, notamment chez les jeunes, mais (…) l'argument qui consiste à dire que parce que la consommation augmente on va tout libéraliser ne me satisfait pas», avait-il déclaré.
Et ce n’est pas l’exemple des Pays-Bas, où la consommation et la revente du cannabis sont autorisées et encadrées, qui fera infléchir les convictions de François Fillon. «La politique suivie en France n'est pas forcément la meilleure, mais celle conduite dans d'autres pays qui ont dépénalisé le cannabis (Pays-Bas) n'a pas les résultats qu'on veut bien lui donner. Aux Pays-Bas, la question fait débat. On ne peut pas dire que là où c'est dépénalisé, il y a moins de consommateurs», croit-il savoir.
En 1970 déjà, c’est en catimini, le 31 décembre, qu’une poignée de député(e)s votèrent la loi désormais contestée sur les stupéfiants, sans autre forme de débat.
Proposée par le progressiste ministre de l’Intérieur de l’époque, M. Raymond Marcellin, fonctionnaire zélé du régime de Vichy et par la suite proche de M. Pompidou, cette mesure intégrait parfaitement le dispositif des lois « anti-casseurs » destinées à lutter contre les velléités révolutionnaires d’une partie de la jeunesse d’alors.
Durant ce dernier demi-siècle, nombre d’aménagements en modifièrent le contenu pour en aggraver les peines ou créer de nouveaux délits, la plupart du temps dans un contexte émotionnel intense dépourvu de toute argumentation rationnelle. Ainsi fut notamment adopté le texte dit « loi Marilou » suite à un accident de la route ayant entrainé le décès d’une enfant, le conducteur ayant été révélé positif au cannabis. Désormais la seule présence de traces de cannabis suffit à considérer l’automobiliste incapable de conduire en dépit de la plupart des études menées sur ce sujet.
En matière de drogues, il semble apparaitre qu’aucune place ne soit accordée à la discussion et à la raison. Tout est bon pourvu qu’on abonde dans le sens de la pensée dominante qui considère l’usage de certaines substances psychotropes au mieux comme une pathologie qu’il faut soigner contre la volonté même des individus, au pire comme un vice qu’il faut purement et simplement éradiquer. Afin d’éviter toute contestation, le législateur ajouta dès le début, la notion de « provocation à l’usage » et de « présentation sous un jour favorable » des stupéfiants, délit pouvant être poursuivi sans qu’il ne soit suivi d’effet, un comble !
À aucun moment donc, les piètres résultats du dispositif répressif ne furent réellement dénoncés si ce n’est à l’occasion de rapports ministériels aussitôt enterrés. Ce fut le cas en 1978 avec le rapport Pelletier, en 1990 et le rapport Trautman, en 1995 avec celui du Pr Henrion, en 1997 enfin avec le rapport du Pr Roques. D’autres parutions d’institutions à valeur « consultatives » parvenant aux mêmes conclusions réformatrices connurent un « succès » identique.
Il semble qu’aucun document, aucune étude, aucune expérience révélant le total échec du dogme prohibitionniste n’ait jamais pu le remettre en question. En tout cas dans l’esprit des décideurs politiques pour lesquels le thème des drogues s’est toujours accordé avec celui de la sécurité, depuis peu avec la santé, de façon récurrente à l’approche du renouvellement de leur mandat. Ils/elles sont ainsi nombreux(euses) à s’être fait(e) élire par ce biais sans avoir jamais cependant eu à rendre de compte. C’est pourtant ce que l’on demande aux élu(e)s, des résultats…
Les peines visant les usagers des drogues illicites et notamment ceux de la plus populaire d’entre elle, le chanvre/cannabis ont donc été renforcées, particulièrement dans les années 90. De nouveaux textes ont ajouté des peines aux peines, parfois consécutivement. Ainsi au délit de conduite sous l’emprise de drogue, suit le retrait du permis, la perte d’un emploi sans parler des conflits familiaux potentiels.
Dans la même confidentialité qu’il y a 46 ans, nos législateur(trice)s viennent d’adopter un amendement dans le cadre de la loi cyniquement baptisée « Égalité et citoyenneté », texte prévoyant que « le contrat de location est résilié de plein droit à la demande du bailleur, lorsque le locataire ou l’un des occupants du logement a fait l’objet d’une condamnation passée en force de chose jugée » pour trafic, vente, achat ou usage de drogue, en vertu des article 222-34 à 222-39 du code pénal. Ainsi toute personne impliquée et condamnée pour des faits liés à une ILS (infraction à la législation sur les stupéfiants) peut perdre, ainsi que ces proches, famille ou hébergeur, son logement.
Nous atteignons là un niveau de violence et d’ignominie avec la déchéance des Droits les plus élémentaires nous amenant à nous interroger sur les prochaines étapes à venir. L’interdiction de l’accès à l’éducation pour les enfants d’usagers de drogues ? Aux cantines scolaires ? Aux services et prestations sociales comme cela a vraisemblablement déjà été suggéré ? À l’emploi ? À des travaux forcés pourquoi pas ? Nous ne sommes pas à une régression prêt.
La situation est d’autant plus préoccupante qu’elle survient alors qu’un vaste mouvement international visant à abandonner le « tout-répressif » s’est amorcé, en Amérique notamment. Au sud, l’Uruguay est devenu le premier pays à légaliser l’usage récréatif et thérapeutique du chanvre/cannabis tandis que d’autres semble prêts à lui emboîter le pas. Au printemps 2017 un éminent membre du G7, le Canada, fera de même.
Aux USA, ce sont plus de la moitié des États qui ont légiféré l’usage thérapeutique et près d’une dizaine la filière récréative, dont le plus emblématique, la Californie. Un mouvement de cette ampleur ne semble pas prêt à disparaitre. Les résultats positifs que ses partisans annonçaient n’ont pas tarder à se faire sentir, mécaniquement. La criminalité artificiellement générée par le loi a de fait disparu. Les dealer(euse)s d’antan sont devenu(e)s d’honorables commerçant(e)s possédant des licences.
Chacun(e)s dans cette filière florissante paye des taxes venant combler les déficits des États concernés. Aux bénéfices financiers viennent s’ajouter les économies réalisées depuis la suppression des budgets alloués à la répression. La chute de la population carcérale n’est pas négligeable, pas plus que la sur-représentation de certaines minorités, mais gageons que la police nord-américaine trouvera toujours de nouveaux prétextes pour s’en prendre à elles.
En Europe en général et en France en particulier, le débat finira par se produire. Négligemment présenté comme un « marronnier électoral » par ses détracteur(trice)s, il n’en est pas moins un sujet des plus grave de notre société. Son implication dans de nombreux secteurs comme celui de la Santé, de la Justice, de la Sécurité et de la cohésion sociale en font un des thème majeur que nos prétendant(e)s à des mandats politiques se devraient d’aborder avec tout le sérieux nécessaire.
En l’absence d’initiatives de leur part, c’est à la société civile que revient ce rôle. Aux organisations et mouvements directement ou non impliqués dans ce sujet. Aux associations d’usagers, de soignant(e)s, humanistes aussi, avec une ouverture aux personnalités politiques disposées à collaborer ensemble en dépit de leurs divergences idéologiques.
Un tel groupe nécessiterait la nomination d’un(e) représentant(e), d’un porte-parole capable de suscité l’adhésion d’un grand nombre. Quelqu’un(e) d’impartial(e) parfaitement au faîte du sujet et compétent(e). Une perle rare que le collectif qui commence à se mettre en place aura fort à faire à désigner.
C’est à ce projet qu’il faut désormais s’atteler pour en finir avec l’idéologie prohibitionniste.
Les députés ont voté une disposition qui permet de virer de leur location les dealers mais aussi le simple consommateur de cannabis... et sa famille.
Tout le monde dehors en cas de fumette ? C’est bien ce qui risque d’arriver à certains locataires, si l’on en croit l’amendement plutôt stupéfiant adopté par l’Assemblée nationale, la semaine dernière, dans le cadre de l’examen de la loi égalité et citoyenneté. Dans le but – louable – de lutter contre les trafiquants de drogue qui pourrissent la vie de certains quartiers, la députée (PS) du Nord Audrey Linkenheld a suggéré de compléter la loi du 6 juillet 1989 par un alinéa en forme de pétard mouillé.
En clair, cet amendement autorise le bailleur qui en fait la demande à résilier le contrat de location « lorsque le locataire ou l’un des occupants du logement a fait l’objet d’une condamnation » pour trafic, vente, achat ou usage de drogue, en vertu des articles 222-34 à 222-39 du Code pénal. Bref, cette expulsion concerne non seulement l’auteur du délit, mais aussi sa famille qui a le malheur de vivre avec, ou ceux qui l’hébergent ! « C’est-à-dire les parents et les enfants qui n’ont pas été condamnés et n’ont donc pas à voir avec le trafic ou la consommation, mais qui subiront de plein fouet la sanction de l’expulsion », alerte l’association Droit au logement (DAL), qui y voit une entorse aux principes fondamentaux du droit.
Pour le moins. D’autant que le champ d’application est extrêmement large. Il concernera des faits se produisant dans le logement loué, mais également « dans l’immeuble ou le groupe d’immeubles ». En somme, dans tout le quartier. Quant aux faits proprement dits, il s’agira aussi bien de l’achat et de la revente de drogue que du simple « emploi illicite ». ça risque de faire du monde dans un pays où plus de quatre millions de personnes déclarent consommer des stupéfiants… En revanche, souligne le DAL, cette belle mesure n’inquiétera pas vraiment les gros dealers ou riches consommateurs, ces derniers ne vivant que très rarement en location. Bref, un amendement qui ressemble à un bel écran de fumée.
"Oui, ça m’arrive de fumer un joint, bien sûr". C'est ce qu'a affirmé ce 1er décembre Malek Boutih, député PS de l'Essonne au micro de Philippe Vandel sur France Inter.
Il est agé de 52 ans, et ne l'a jamais caché : il est "favorable à l’étatisation du cannabis". Ce 1er décembre sur France Inter, Malek Boutih, l'ancien président de l'association SOS Racisme a levé le voile sur ses convictions très personnelles à propos de la consommation de drogues dites "douces".Dans l'émission "Tout et son contraire",
Malek Boutih a expliqué qu'il était pour "que l’Etat reprenne tout en main". Et d'ajouter : "La prohibition du cannabis, c’est le moteur de la nouvelle mafia. Dans certain point de vue, c’est quand même embêtant que tous ceux qui aiment fumer un joint financent le terrorisme à un degré ou un autre. C’est quand même chiant !" Celui qui a visiblement travaillé son dossier a aussi détaillé, "On estime qu’il y a d’une manière hebdomadaire, pas avec la même fréquence, sept millions de personnes qui consomment.
C’est énorme !"Et quand Philippe Vandel lui a demandé "Vous en faites partie ?", l'homme politique de gauche, supporter de Manuel Valls, n'a pas hésité à répondre très franchement :
"Oui ! Oui, ça m’arrive de fumer un joint, bien sûr".F.A
Selon un récent sondage, réalisé par Ipsos, un Français sur deux serait favorable à une législation contrôlée sur le cannabis. Un avis que partage Sébastien Béguerie, conférencier et co-fondateur de l'Union Francophone pour les Cannabinoïdes en Médecine. Tribune.
"En Europe, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, la Suisse, la Belgique, les Pays-Bas, la Finlande, la Norvège, la République Tchèque, la Croatie et l'Autriche ont autorisé l'usage du cannabis médical".
afp.com/Drew Angerer
Aujourd'hui, les lois françaises sur la consommation et la détention de cannabis sont obsolètes et non applicables. Chez nos voisins, les effets thérapeutiques du cannabis médical ont été reconnus et encadrés par des lois permettant sa culture et sa distribution, mais aussi son étude par les professionnels de la santé.
Le débat peine à émerger, la classe politique craignant une augmentation de la consommation chez les jeunes, des addictions aux drogues, de la criminalité et du nombre d'accidents de la route... Néanmoins, les tendances de consommation dans les pays où le cannabis a été légalisé témoignent d'une autre réalité.
L'autoculture, un facteur d'augmentation de la consommation
Aux États-Unis, 28 des 51 Etats ont rendu la substance légale à des fins thérapeutiques et/ou récréatives. Ils sont passés d'une guerre totale à une libération du marché désengorgeant les prisons, tout en économisant de l'argent sur les interventions policières. Ils se concentrent depuis de manière plus efficace contre le grand banditisme tout en contribuant à la croissance économique.
Celle-ci est exponentielle avec la création d'emplois dans tous les secteurs d'activités du secteur primaire au tertiaire (agriculture, services privés et publics). En 2015 au Colorado, 996 millions de dollars ont été engendrés par l'industrie du cannabis. 135 millions ont été reversés à l'Etat sous forme de taxes qui ont été majoritairement utilisées pour rénover les infrastructures scolaires. Aucune hausse de la consommation n'a été enregistrée.
D'après les derniers résultats du baromètre santé de l'INPES, publiés en 2014: 700 000 Français de 15 à 75 ans consomment quotidiennement du cannabis et 1,4 million fument au moins 10 joints par mois. Parmi eux, des milliers cultivent leurs propres plantes. Cette nouvelle offre serait, selon l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), l'une des raisons de l'exposition grandissante des jeunes à la consommation de cannabis.
Près de 48% des moins de 17 ans admettent en avoir déjà consommé en 2014, contre 41,5% en 2011. Chez les adultes, ce taux est passé de 8% à 11%. La France est dans le top 3 des consommateurs de cannabis en Europe, après la République Tchèque et l'Espagne. Pourtant, elle est aussi le pays qui possède la loi la plus répressive en la matière, preuve d'un paradoxe et d'une hypocrisie politique qui ignore de la réalité des habitudes des Français.
Une hypocrisie qui bénéficie au grand banditisme
Cette hypocrisie a des répercussions directes sur les patients à qui le gouvernement avait promis, au travers d'un décret en juin 2013, un traitement à base de THC et CBD: le Sativex. Mais son prix en pharmacie n'a pas été accepté par l'ANSM qui empêche sa distribution et son accès dans les pharmacies de l'Hexagone. Cette situation oblige les malades à se fournir sur le marché noir, ou à cultiver pour leur consommation privée mais illégale, y compris lorsqu'ils bénéficient d'une prescription médicale pour ces médicaments!
En Europe, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, la Suisse, la Belgique, les Pays-Bas, la Finlande, la Norvège, la République Tchèque, la Croatie et l'Autriche ont autorisé l'usage du cannabis médical sous prescription. En 2017, l'Allemagne autorisera l'auto-culture et la délivrance de cannabis médical pour les patients ayant une prescription de leur docteur (gratuitement pour ceux qui participent à une étude nationale sur l'impact de cette plante sur les malades).
Pour être à la hauteur de ce défit, la France devra créer des centres éducatifs pour les professionnels de la santé, de l'agriculture et de l'ingénierie. Dans cet objectif, le think-tank Terra Nova propose de créer à la façon de l'ARJEL (autorité de régulation des jeux en ligne), une Autorité de Régulation du Cannabis Agricole (ARCA) dont le rôle serait de délivrer des licences de production et de distribution mais aussi d'encadrer les professions et les formations liés aux emplois engendrés par cette industrie.
La France est désormais attendue par l'Europe pour engager son évolution vers l'acceptation et la création de sa filière cannabique "made in France". La présidentielle de 2017 pourront-elles permettre de franchir se tournant et arrêter cette polémique incessante?
Sébastien Béguerie est conférencier. Il interviendra le 30 novembre (jour où le Parlement européen organise une session parlementaire sur le cannabis thérapeutique et son usage) lors d'une conférence organisée par l'association Noise La Ville sur la régulation d'une économie du cannabis en France.
Conférences Université de Nantes:
La légalisation du cannabis peut être organisée selon des modalités variées. Mais il est d'ores et déjà possible de spéculer sur les conséquences juridiques, économiques, sanitaires, sécuritaires et politiques d’une légalisation du cannabis. Renaud Colson revient sur ces enjeux.
La légalisation du cannabis peut être organisée selon des modalités variées. Les systèmes de régulation existant en Uruguay, où la distribution est étroitement contrôlée par l'Etat, ou au Colorado, qui s'en remet largement aux acteurs privés, témoignent de la pluralité des modèles envisageables. Dans les deux cas, la réforme est trop récente pour mesurer précisément les effets d'une sortie de la prohibition.
Mais il est d'ores et déjà possible de spéculer sur les conséquences juridiques, économiques, sanitaires, sécuritaires et politiques d’une légalisation du cannabis. Pour approfondir le sujet, un ensemble de ressources scientifiques complémentaires, issues notamment de l’ouvrage "Les drogues face au droit" (Presses universitaires de France, 2015), est disponible.
Présentation de l'intervenant
Renaud Colson est maître de conférences en sciences criminelles à l'Université de Nantes, membre du laboratoire Droit et Changement Social (UMR CNRS 6297). Honorary Lecturer et British Academy Visiting Fellow à l’université de Cardiff, il a été Marie Curie Fellow à l’Institut universitaire européen de Florence de septembre 2011 à août 2013. Ses recherches portent, entre autres, sur le droit pénal (comparé et européen) et sur les politiques de lutte contre les drogues et la toxicomanie.
Sur ce sujet, il a notamment publié "La prohibition des drogues. Regards croisés sur un interdit juridique" - Presses universitaires de Rennes, 2005 (https://www.pur\-editions.fr/detail.php) et "Les drogues face au droit" - Presses universitaires de France, 2015 (https://www.puf.com/content/Les\_drogues\_face\_au\_droit). En collaboration avec Henri Bergeron, il prépare actuellement un ouvrage comparatif consacré aux politiques des drogues en Europe (European Drug Policies: The Ways of Reform, Routledge. Du même auteur, voir également : l'inévitable légalisation du cannabis.
Cette haute autorité administrative se prononce également pour une contraventionnalisation de l’usage des autres produits stupéfiants
C’est un terrain sur lequel personne ne l’attendait. La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) s’est prononcée, mardi 8 novembre, en faveur d’une dépénalisation de l’usage du cannabis et d’une contraventionnalisation de l’usage des autres produits stupéfiants, jugés « plus addictogènes ». Une prise de position qui intervient alors que la ministre de la santé, Marisol Touraine, s’est dite favorable le 11 octobre à la tenue d’un « débat sur la nature de la sanction » pour simple usage de cannabis, aujourd’hui passible d’un an de prison et de 3 750 euros d’amende.
« Le statu quo ne saurait être une option envisageable, au regard de l’échec du dispositif répressif actuel et de l’indigence des politiques de prévention et de santé publique actuellement en vigueur », fait valoir la CNCDH, qui appelle à l’organisation d’une « vaste conférence de consensus » associant experts, responsables politiques et usagers pour « présenter cette modification législative importante » et « en renforcer l’acceptabilité sociale ».
Dans un avis dévoilé par Le Monde en août, la Mission interministérielle de lutte contre les drogues se prononçait en faveur de la mise en place d’une amende de cinquième classe de l’ordre de 300 euros pour usage de stupéfiants, sans distinguer le cannabis des autres stupéfiants.
Lire aussi : Un rapport interministériel préconise le recours à l’amende pour l’usage de cannabis
Si la CNCDH, autorité administrative indépendante, a choisi de s’emparer de cette question, c’est parce que la loi française de 1970 pénalisant l’usage de drogue interroge, selon elle, plusieurs droits fondamentaux. Celui à la liberté individuelle, tout d’abord, qui « suppose la possibilité de pouvoir faire des choix sur son propre corps et sur son mode de vie ».
Le « droit à un procès équitable » est également invoqué, les jeunes hommes issus des minorités visibles ou les SDF étant, selon elle, davantage contrôlés et donc condamnés que d’autres catégories de la population pour ce motif. La criminalisation des usages de drogues pousserait enfin à la consommation de drogues « dans des environnements insalubres et isolés, ce qui augmente le risque d’infection et de mort par surdose », et constituerait donc une atteinte au droit à la protection de la santé.
La « décriminalisation » de l’usage de cannabis proposée par la CNCDH, qui permettrait également de « réduire la charge imposée aux forces de police et à la justice », s’accompagnerait toutefois du maintien des délits en matière d’infraction au code de la route (conduites sous influence) ou au code du travail.
La sécurité routière lance ce jeudi une nouvelle campagne de communication sur l’usage de cannabis et autres stupéfiants au volant. Celle-ci précède de quelques semaines la mise en place de tests salivaires plus faciles à mettre en œuvre au bord des routes.
Selon Drogue info service, 550 000 français consommeraient quotidiennement du cannabis et 1,2 million en seraient des usagers réguliers. Le produit se banalise et avec lui d’autres drogues, ce qui a hélas des répercussions sur les statistiques : dans les accidents mortels, 13 % des conducteurs contrôlés sont positifs aux stupéfiants.
Dans son dernier bilan annuel, la Sécurité routière précise ainsi que « les stupéfiants seraient cause principale de 9 % des accidents mortels, mais 23 % des décès routiers interviennent lors d’un accident impliquant au moins un conducteur testé positif aux stupéfiants. » A titre de comparaison, l’alcool serait la cause principale de 21 % des accidents mortels.
Il y a donc urgence à s’attaquer au problème de l’usage des stupéfiants au volant, et c’est précisément le nouveau chantier auquel s'attellent les pouvoirs publics, qui dévoileront ce jeudi leur nouvelle campagne de communication sur le sujet.
Cette campagne précède de quelques semaines la mise en place de tests de dépistages au bord des routes. A partir du mois de décembre, les forces de l’ordre auront en effet la possibilité de contrôler la consommation de stupéfiants (cannabis, cocaïne, crack, opiacés, ecstasy et amphétamines) par test salivaire, ce qui permettra d’améliorer l’efficacité des contrôles.
Concrètement, en cas de test salivaire positif, un prélèvement de salive sera effectué directement sur place, puis le kit envoyé en laboratoire pour analyse, comme cela se pratique aujourd’hui pour un prélèvement sanguin. Quelques 80 000 kits seront fournis aux forces de l'ordre dans un premier temps.
De Marseille à Paris et ses banlieues, en passant par Grenoble, les quartiers populaires ressemblent de plus en plus au Chicago des années 1920 alors que régnait en maître le crime organisé.
illustration Tabas pour "Le Monde magazine"
L’État nord-américain avait alors choisi d’interdire la production, la vente et la consommation d’alcool. Tout comme la Nature, le monde des affaire déteste le vide. C’est donc la diaspora mafieuse venue d’Europe qui s’en chargea, tandis que les pays frontaliers non prohibitionnistes servaient très souvent de bases arrière à ces réseaux. L’on évoque peu souvent le rôle de certaines des colonies françaises comme St Pierre et Miquelon qui servit, durant toute cette époque, de plaque tournante à ce juteux buisiness.
De cette époque, les autorités politiques étasuniennes n’auront finalement retenu que peu de chose. Après avoir finalement renoncé à interdire l’alcool et repris le marché en main, c’est à un autre phénomène de société encore peu développé qu’elles choisirent de s’attaquer en décidant d’interdire certaines substances dont la plus emblématique désormais, le chanvre/cannabis.
Après avoir largement contribué à l’expansion mafieuse dans tout le pays, voici que l’État fédéral nord-américain offrait sur un plateau à ces mêmes réseaux, une nouvelle filière, de nouveaux débouchés pour accroître leurs profits et leur emprise sur la société. Bientôt appliquée par la plupart des pays occidentaux, la prohibition et ses conséquences désastreuses n’ont pas tardé à s’étendre au monde entier. Ça ne seront plus désormais des villes, des régions qui tomberont sous l’emprise de cartels criminels, mais des pays entiers avec parfois l’aval et la complicité des États les plus engagés dans la lutte contre la drogue.
De curieuses relations virent le jour entre les USA et l’Asie, mais aussi avec certains pays d’Amérique latine, certaines dictatures. En de nombreux fronts contrerévolutionnaires, le trafic d’héroïne et de cocaïne servit à financer les coups tordus des services secrets, largement démontrés depuis par les dossiers de la CIA rendus publics.
La France s’illustra, elle, dans la formidable tolérance qu’elle manifesta – et semble toujours manifester – à l’égard de « son ami le roi », le maître du Maroc dont la production de haschisch alimente depuis toujours le marché noir. Et de couvrir cette opportune absence en pointant du doigt la politique éclairée de certains de nos voisins européens en matière de drogues, et particulièrement les Pays-Bas.
Chacun se souvient ainsi des déclarations à l’emporte-pièce de M. Jacques Chirac à leur encontre, oubliant cependant les nombreux voyages qu’il fit au royaume chérifien, ou les tout aussi nombreuses réceptions de son bon roi en France.
Moins d’un demi-siècle de prohibition en France aura donc suffi à rendre certains quartiers populaires de nos banlieues aussi corrompues que le Chicago des années 1920. Des endroits où les habitant(e)s, après s’être senti(e)s abandonné(e)s, se sentent désormais en insécurité.
Délaissée par les services sociaux, en proie à un chômage galopant et surtout victime d’une stigmatisation des populations d’origine immigrée, leur jeunesse survit depuis longtemps des ressources que lui procurent différents trafics, dont celui des drogues et particulièrement du cannabis. Pour ce dernier, sans doute faut-il y voir une raison culturelle dans la mesure où son usage est répandu parmi une grande partie de la population originaire du Maghreb. Rien d’étonnant donc.
Mais en laissant à des réseaux criminels le soins de se charger de ce négoce, l’État a pris l’énorme risque de laisser aussi s’y développer d’autres réseaux peut-être bien plus dangereux encore. Car malgré leurs prêches vertueux, les radicaux religieux ou politiques ne se sont jamais privés de pratiquer toute sorte de trafics pour financer leurs activités. Les drogues n’y échappent pas.
Une sorte de chape de silence s’est abattue sur ces quartiers. Nos responsables politiques semblent préférer ignorer les faits. Feindre de ne pas voir qu’en certains endroits, les habitudes ont changé. Qu’il est devenu impossible aux jeunes filles d’observer les mœurs libérales que nous connaissons. Petit à petit, des barbus se sont infiltrés, répondant à l’absence de considération de notre société à l’égard de ces jeunes, par un message pseudo-religieux et crypto-autoritaire.
Nous n’avons donc pas fini de découvrir les inconséquences de la prohibition des drogues. Et ses adorateurs, les croisés de la guerre à la drogue qui continuent d’occuper les plateaux, de répandre leur dangereux dogme dans les médias, sans que personne n’ose leur opposer les arguments de bon sens qui s’imposent. Nul besoin de diplômes ou d’études supérieures pour comprendre et admettre l’intenable position des partisans de la prohibition qui, tout en prétendant vouloir débarrasser nos sociétés du « fléau de LA drogue », ont depuis toujours renoncé à en réguler les filières et par conséquent laissé à « Mafia sans frontière », le soin de s’en occuper.
Cette attitude fait d’eux les complices de ce qu’ils dénoncent et prétendent combattre. Les alliés objectifs de réseaux qui se perpétuent ne serait-ce que par l’absence de règles.
La prohibition n’est pas le stade ultime de la régulation mais bien un renoncement à réguler. La légalisation représente, elle, une volonté de contrôler et de limiter les risques encourus par les usagers, ainsi que ceux qu’un marché dérégulé fait courir à nos sociétés.
Devant cette évidence, on ne peut que s’interroger sur le fait que ces « vertueux prohibitionnistes » ne soient pas systématiquement dénoncés et ostracisés de par leurs positions ambigües. Sans doute devront-ils un jour répondre de leurs propos et de leurs actes.
La question n'est pas de savoir si on est pour ou contre les drogues mais quelles solutions permettent d'en consommer le moins possible et dans les conditions les moins dangereuses possibles.
Ueslei Marcelino / Reuters
Une femme fume du cannabis lors d'une manifestation au Brésil.
D'après un sondage récent réalisé par l'Ipsos, un Français sur deux serait favorable à la légalisation du cannabis et souhaiterait que cette question soit abordée pendant la campagne présidentielle.[1]
Toutefois les hommes et les femmes politiques ne prennent que rarement position sur le sujet, et quand ils le font c'est en général, à l'instar de Ségolène Royal ou de Valérie Pécresse, pour clamer leur opposition à toute évolution de la législation. Et pourtant toutes les familles françaises, d'hommes et de femmes politiques compris, sont concernées par ce problème.
La France : championne des fumeurs de joints
La France est, avec la république Tchèque, le pays d'Union-Européenne où l'on consomme le plus de cannabis : 39% des 15-16 ans l'ont déjà expérimenté et plus de 11% de la population âgée de 15 à 65 ans en a consommé au cours de l'année écoulée. En même temps la France est le pays d'Europe qui procède au plus grand nombre d'interpellations pour des infractions à la législation sur les stupéfiants, 216 000 en 2014, majoritairement pour usage de cannabis.
Ces interpellations contribuent à l'encombrement des services de police et de justice. Par exemple 15 % des détenus français sont en prison pour une infraction à la législation sur les stupéfiants. Ainsi la dépense publique engagée par l'État et l'Assurance maladie pour lutter contre les drogues illicites est estimée par Pierre Kopp à 2,4 milliards d'euros en 2010.[2]
Ces coûts recouvrent essentiellement les dépenses liées à la répression, en particulier les actions policières et judiciaires. Et face à ces coûts, aucune rentrée fiscale puisque les trafics sont clandestins et ne donnent lieu à aucune taxation.
La prohibition : une politique de l'offre
La politique française concernant les psychotropes vise à leur éradication par le biais de leur prohibition. Elle prend corps en 1961 avec la Convention unique sur les stupéfiants des Nations Unies et est popularisée en 1971 par Richard Nixon sous l'intitulé de "guerre à la drogue". Cette "guerre" sera reprise et amplifiée par Ronald Reagan, qui mettra en œuvre une politique répressive sans précédent.
Pour éradiquer la drogue de la société américaine il va en criminaliser l'usage, notamment via la Convention de l'ONU de 1988, dont la France est signataire. Le résultat de cette politique est un échec. Non seulement le marché des stupéfiants ne va pas disparaître, mais la consommation de drogue va même augmenter pendant cette période, sans parler de l'explosion des coûts liés à la répression que doivent financer les contribuables.
Ainsi, c'est sous la présidence de Reagan que le nombre d'incarcérations liées au trafic, et surtout à l'usage de stupéfiants va exploser aux Etats-Unis. Ils ont depuis le plus haut taux d'incarcération au monde : 1 adulte sur 110 y croupit en prison.
L'échec de la guerre à la drogue
Comme supprimer l'offre légale de stupéfiants n'a jamais supprimé la demande, la prohibition a favorisé l'émergence du crime organisé mondial. Le trafic de drogue est en effet sa première source de revenu, évalué à 870 milliards de dollars en 2009.
Il corrompt la finance mondiale par des opérations de blanchiment de grande envergure. Il engendre dans les pays producteurs instabilité, assassinats, guérilla et corruption. La prohibition est à l'origine de violations massives des droits de l'homme à l'échelle de la planète, sans parler des problèmes de santé publique (overdose, épidémie de sida...) et de coûts fiscaux exorbitants.
Plusieurs pays souhaitent en finir avec la guerre à la drogue, qui comme pour la prohibition de l'alcool, a créée plus de problèmes qu'elle n'en a résolus. Ainsi plusieurs états américains, dont celui du Colorado, ont récemment autorisé l'usage du cannabis récréatif. Contrairement à ce qu'on aurait pu craindre, sa consommation n'a pas explosé. En revanche le marché des dealers a commencé à s'effriter, étant remplacé par des achats légaux, avec en bonus une fiscalité florissante.
Les politiques de la demande : légalisation et répression
La question n'est pas de savoir si on est pour ou contre les drogues mais quelles solutions permettent d'en consommer le moins possible et dans les conditions les moins dangereuses possibles. Or les politiques de tempérance efficaces sont celles de gestion de la demande, comme en attestent les expériences menées avec le cannabis aux Pays-Bas ou l'alcool dans notre pays. Un monopole d'État sur la distribution, à l'instar du tabac, permettrait de contrôler la disponibilité et la qualité des produits dans des officines dédiées.
En particulier la vente aux mineurs doit être interdite et lourdement sanctionnée. Cela permettrait aussi d'appliquer une fiscalité spécifique. Ainsi 80% du prix d'un paquet de cigarette est constitué de taxes. Il faut que le cannabis soit lui aussi fortement taxé. Il faut également définir les contextes dans lesquels on peut fumer, et ceux dans lesquels c'est interdit, comme par exemple avant de prendre le volant, et finalement mettre en place des campagnes d'information centrées autour de faits objectifs. L'autre volet d'une politique de légalisation réussie est la répression du marché parallèle.
Légalisation et répression sont deux politiques publiques qui sont complémentaires. Pour pouvoir assécher la demande des réseaux criminels, tout en maintenant des prix élevés, il est indispensable de réprimer l'offre illégale en s'attaquant aux dealers et à leurs clients. Ces derniers doivent comprendre qu'à partir du moment où on peut acheter légalement du cannabis, se fournir au marché noir est sévèrement puni.
Pour faciliter l'éviction du crime organisé il est souhaitable d'appliquer au départ une fiscalité modérée, puis de relever les prix pour faire baisser les consommations, une fois le marché monopolisé par l'Etat.
[1] Sondage réalisé par internet du 27 au 29 septembre auprès de 1097 personnes constituant un échantillon représentatif de la population française âgée de 16 ans et plus à la demande de SOS Addictions, du LIEPP de Sciences Po et du Cnam.
[2] «Le coût social des drogues en France», Note 2015-04 Saint-Denis, le 10 septembre 2015 Pierre Kopp
Pour en finir avec les Mafias - Sexe, drogues, clandestins: et si on légalisait?, de Emmanuelle Auriol aux éditions Armand Colin. 16,90€
Par Emmanuelle Auriol Professeur à la Toulouse School of Economics
Le think tank Terra Nova propose la création d'une Autorité de régulation du cannabis (Arca) sur le modèle de l'Autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel).
Une solution pour deux addictions ? Selon Terra Nova, la problématique du cannabis se rapproche de celle des jeux en ligne, car les comportements des consommateurs sont similaires, tout comme l'offre "où se côtoient désormais offre physique et offre en ligne". Ainsi, le think tank - cercle de réflexion -, classé à gauche, propose la création d'une Autorité de régulation du cannabis (Arca) calquée sur l'Autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel). Cela permettrait, selon un rapport de ce cercle publié le 18 octobre, la légalisation du cannabis en France sur un marché contrôlé.
À l'heure où la course à la présidentielle 2017 s'accélère, la question de la dépénalisation du cannabis revient sur le devant de la scène. Début octobre, un sondage Ipsos révélait que 52% des Français réclament un débat sur le cannabis et 84% considèrent que la législation actuelle est inefficace. Certains candidats ont pris un parti favorable à la régulation, au risque de s'engouffrer parfois sur cette thématique épineuse.
Assécher le marché criminel
Comme la loi du 12 mai 2010 légalisant le marché des jeux d'argent et de hasard, le pari de la légalisation du cannabis est "l'assèchement du marché criminel d'un côté, la prise en compte d'un problème de santé publique de l'autre", explique le rapport. Avec 4,6 millions de Français ayant connu au moins un épisode de consommation de cannabis en 2014, selon l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (ODT), la France est toujours en tête des classements européens en matière d'usage de cannabis. Et "les campagnes de prévention menées en population générale n'ont été que d'une faible efficacité", rappelle Terra Nova, qui souligne aussi l'inefficacité de la politique pénale.
"Les interpellations pour possession ou usage de cannabis ont plus que doublé sur la décennie 2000", souligne le rapport, alors que "le nombre de consommateurs a continué de croître". Une fois légale, la vente de cannabis pourrait être confiée, selon Terra Nova, à des détaillants agréés par l'autorité de régulation spécialement dédiée l'Arca, dans "le réseau des débitants de tabac, celui des officines pharmaceutiques ou un nouveau réseau de magasins".
Pour une production confiée aux agriculteurs
Comme pour le tabac, la commercialisation devrait alors être soumise à une "interdiction aux mineurs", des "avertissements sanitaires et un packaging neutre", ainsi qu'à "une interdiction de la consommation dans les lieux à usage collectif et de travail clos et couverts". Quant à la production, elle "pourrait soit se faire par des agriculteurs français autorisés par des licences du ministère de l'Agriculture, soit par des entreprises étrangères", avec un dosage en THC (Delta-9-tétrahydrocannabinol) limité, précise Terra Nova.
La création d'une autorité administrative indépendante aurait enfin "l'avantage de déconnecter un marché du cannabis générateur de recettes fiscales et les ministères du Budget ou des Finances", estime le think tank, les pouvoirs publics ayant "la fâcheuse habitude de devenir dépendants aux recettes fiscales faciles", glisse celui-ci dans son communiqué.
La question de la conduite après usage de stupéfiants est souvent absente du débat sur la dépénalisation du cannabis. Le gouvernement vient pourtant de muscler, cet été, le dispositif de lutte contre les stupéfiants au volant.
Les explications de Me Jean-Baptiste le Dall.
La chose peut paraître surprenante, mais la législation sur les stupéfiants au volant n’est pas si ancienne que cela et ne remonte qu’à 2003 ! Sans aller jusqu’à dire qu’un conducteur avec une pleine pharmacie dans les veines pouvait poursuivre tranquillement son chemin après un contrôle alors que celui qui avait bu une bière de trop se voyait retirer le permis, la justice manquait clairement d’un texte adapté. L’oubli a été corrigé dès 2003 avec un délit de conduite après usage de stupéfiants.
Au départ, le texte a été appliqué avec discernement par les juridictions pénales, jusqu’à ce que la Cour de cassation vienne rappeler que l’infraction prévue et réprimée par le Code de la route n’est pas un délit de conduite sous l’influence de produits stupéfiants mais celui de conduite après usage de produits stupéfiants. Et la nuance est de taille. Explications.
Cannabis : de simples traces suffisent pour être condamné
Pour le cannabis, il est parfaitement possible pour un laboratoire de retrouver des traces ou des métabolites du produit plusieurs jours après la consommation. Clairement le consommateur n’est plus, depuis bien longtemps, sous l’influence du THC, pour autant, en cas de contrôle routier, les analyses toxicologiques risquent de le conduire droit au tribunal correctionnel.
Pour le conducteur fumeur, plus ou moins occasionnel, la mésaventure risque fort de se traduire par une suspension provisoire immédiate du permis de conduire. Cette mesure administrative qui émane du préfet est prise sur la base de grilles faisant correspondre une infraction à un nombre plus ou moins important de mois de suspension. En matière de stupéfiants au volant, la suspension provisoire est souvent de quatre ou six mois sans prise en compte des taux constatés sur le conducteur.
Pas de taux mais des sanctions parfois très lourdes
La grande différence entre l’alcool et les stupéfiants en matière de conduite, c’est qu’il n’existe pas de taux pour ces derniers. Un conducteur ayant bu quelques verres d’alcool pourra avoir un taux lui permettant de prendre le volant en toute légalité, un taux contraventionnel qui lui vaudra une amende forfaitaire de 135 euros, ou un taux délictuel qui entrainera privation de permis de conduire et passage par la case tribunal.
En matière de stupéfiants, et notamment de cannabis –car c’est le produit le plus consommé –rien de tout cela, d’infimes traces feront d’un conducteur lambda un délinquant. A la clé, suspension de permis de conduire, amende, retrait de six points sur le permis de conduire, inscription au casier judiciaire….
Les conséquences peuvent s’avérer bien lourdes pour un jeune automobiliste qui aura partagé un « joint » avec des amis lors d’une soirée deux jours avant de prendre le volant et de se faire contrôler…
La sévérité du dispositif législatif a souvent été dénoncée, mais il sera rappelé que contrairement à l’alcool, les produits stupéfiants ne font l’objet d’aucune information sur le dosage de la substance consommée, que des effets secondaires peuvent survenir longtemps après la consommation et surtout que la consommation de produits stupéfiants, même du cannabis, demeure interdite en France.
Ce qui va changer : l'arrivée du prélèvement salivaire
Un décret publié au Journal officiel le 24 août 2016, dont les arrêtés d'applicaiton sont attendus d'ici à la fin de l'année, va permettre une plus grande efficacité sur le terrain. Au départ la lutte contre les stupéfiants au volant s’est avérée compliquée à mettre en œuvre avec le recours obligatoire aux prélèvements sanguins tant au stade du dépistage qu’à celui de l’analyse.
On le comprend, immédiatement, un prélèvement de sang n’est pas une opération que l’on pratique à l’arrière d’un fourgon de police ou sur le capot du véhicule du conducteur. Résultat : des allers et venues en perspective pour les forces de l’ordre et une perte de temps considérable.
Les choses avaient déjà été simplifiées avec l’arrivée des kits de dépistage salivaires. Ce kit permet d’avoir une première indication qui sera confirmée ou non par un laboratoire. Jusqu’à présent ce laboratoire travaillait sur un prélèvement sanguin. Tel ne sera plus le cas demain avec l’arrivée du prélèvement salivaire.
Une révision à la baisse des droits des justiciables
Qu’il s’agisse de l’alcool ou des stupéfiants, le principe est celui d’un droit à une nouvelle expertise. C’est le fameux droit au "second souffle" pour les contrôles d’alcoolémie opérés par éthylomètre. C’est la même chose pour les stupéfiants. Jusqu’à présent la procédure était assez simple, le prélèvement sanguin opéré en cas dépistage positif était réparti dans deux flacons. Dans le cas où le conducteur sollicitait la contre-expertise, le second flacon était ressorti pour analyse.
Avec le prélèvement salivaire, le gouvernement donne moins de droits aux conducteurs contrôlés. La contre-expertise ne sera, à l’avenir, possible que si le conducteur la demande immédiatement. Au lieu de prévoir directement un double prélèvement salivaire, le gouvernement a préféré ne prévoir qu’un unique prélèvement salivaire tout en proposant à l’intéressé un prélèvement sanguin pour se préserver la possibilité de demander ultérieurement la contre-expertise.
Ainsi ,lorsque les taux relevés par le laboratoire sur le prélèvement salivaire seront notifiés à l’intéressé, il lui sera proposé une contre-expertise mais uniquement s’il a demandé le prélèvement sanguin lors du contrôle.
On imagine bien que peu de conducteurs solliciteront ce prélèvement sanguin, avec des agents qui leur expliqueront qu’une telle démarche est bien sûr possible mais qu’ils devront patienter des heures ou toute une nuit dans les couloirs d’un hôpital pour attendre qu’un médecin puisse les prendre en charge.
Le conducteur qui, de toute bonne foi, pensait que l’analyse ne révèlerait que d’infimes traces de cannabis et se verra notifier des résultats indiquant, par exemple, une consommation importante de cocaïne, d’héroïne, de GHB et de la dernière drogue de synthèse à la mode ne pourra plus demander une contre analyse.
Maître le Dall, docteur en droit et vice-président de l'Automobile club des avocats intervient sur son blog et sur lci.fr.
Depuis près de 50 ans, tout ce qui touche à ce que l’on appelle les produits stupéfiants est régi en France par la loi 70-1320 du 31 décembre 1970. Un demi-siècle après, avec donc suffisamment de recul pour en apprécier l’efficacité, on ne peut que constater sa totale inefficacité.
La France est bonnet d’âne de l’Europe en matière de prévalence cannabique (nombre de personnes rapportées à une base 100 ayant consommé le produit), dans toutes les tranches d’âge, et particulièrement chez les plus jeunes. Ce qui pose un réel problème de santé publique, puisqu’il est démontré que le cannabis est dangereux sur des cerveaux en formation, en gros pour la plupart des personnes, jusqu’à 20 ans.
Pire, cette pénalisation du cannabis a induit plusieurs effets pervers. Le premier est une (sur)occupation des forces de police pour des crimes sans victimes, qui ne sont donc pas affectés à des tâches qui peuvent sembler plus prioritaires. Cet engorgement se poursuit dans les palais de justices (à titre d’exemple en 2014, 180000 dossiers concernant la détention ou l’usage de produits stupéfiants ont été transmis au parquet, la plupart du temps pour une boulette au fond de la poche.
Enfin, la pénalisation de l’usage du cannabis permet surtout aux politiques et fins experts en statistiques du ministère de l’intérieur de tenir un outil d’affinage des chiffres. Un quidam arrêté avec une boulette sur lui, c’est une infraction constatée, une infraction résolue, et donc un taux de réussite de 100%. Ce qui est très chic dans les Powerpoint pour le ministre et l’opinion publique. Pourtant, personne ou presque dans nos parlementaires n’ose remettre en cause cette loi de 1970.
Un sondage paru lundi 10 octobre montre montre pourtant que l’opinion publique, elle, change. 84 % des interrogés font le même constat : cette loi ne marche pas, elle n’empêche ni la consommation (croissante) ni le trafic (en conséquence), et elle coûte cher (environ 500 millions€ par an tout compris selon plusieurs sources). Alors que de part le monde certains pays ont déjà révolutionné avec succès leur approche répressive, pourquoi la France est-elle à la traine sur ce sujet ?
Esther Benbassa, sénatrice EELV, organisait ce lundi 10 octobre un colloque au Sénat avec des experts venus du monde entier (universitaires, médecins addictologues, policiers, juges…) pour faire le point sur cette question. On y était, et c’était passionnant !
Par Christophe Tisseyre , Vincent Massot, Anna Guillerm, Didier Mariani
Le sondage IPSOS : les français et le cannabis
Nous avons sous le nez la Hollande, où la vente libre ne pose aucun problème. Il n’y a pas davantage de drogués là-bas qu’ici.
Sur BFM TV, c’est impératif : à la suite d’une info importante, les journalistes doivent trouver des moyens de meubler l’antenne. Les événements de Viry-Châtillon suscitaient donc un débat sur le thème inusable de la légalisation du cannabis qui mettrait donc un terme – peut-être, c’est pas sûr – à l’agitation criminelle de la racaille de banlieue.
Pour en discuter, deux policiers, messieurs Nicolas Comte (SGP Police) et Fabien Vanhemelrick (Alliance police nationale) font face à une députée EELV, Éva Sas, étonnamment peu hystérique sur le sujet, alors que ses consœurs cassent à chaque fois le mobilier dès que leur interlocuteur les contredit, d’où l’obligation, pour le personnel de BFM, de remeubler l’antenne…
Mais passons aux choses sérieuses : le fameux report de délinquance défendu par les policiers qui sont très pessimistes quant aux retombées bénéfiques de la vente libre sur l’humeur des incendiaires.
Ce en quoi ils n’ont, à mon humble avis, que partiellement raison. Trafiquer du « shit » est une activité de tout repos, sans risque ou presque, très rentable, avec des clients pas compliqués, nombreux… Contrairement à ce qu’affirment les deux représentants de la loi, le recyclage du personnel vers d’autres activités frauduleuses poserait de graves problèmes à la sphère racailleuse. Les braquages de banques ou trafics de cocaïne vers lesquels les ex-dealers se précipiteraient, selon les policiers, paraissent peu réalistes. Compliqué pour l’un, créneau minuscule et déjà pris pour l’autre…
Bref, notre marchand de plantes prohibées se retrouverait fort dépourvu si la légalisation survenait… Nous savons que l’arrêt de la prohibition aux États-Unis a mis un terme à la guerre des gangs… S’imaginer que l’interdiction d’un produit aux vertus plus ou moins hallucinatoires restreint sa consommation est un leurre. Elle la freine un peu, tout au plus. Ce « un peu » mérite-t-il tout ce déploiement policier ?
Par ailleurs, la drogue dure de l’État est la rentrée fiscale.
Celle générée par ce nouveau commerce lui fournirait une dose supplémentaire… Roulé dans une feuille d’impôt, le cannabis procure au fonctionnaire de Bercy des hallucinations paradisiaques. Puis passons à l’argument de la toxicité du produit. Tabac : 70.000 morts chaque année. Alcool : 49.000 (en France). Au nom de quelle drôle de morale est-il convenable que ces deux produits soient en vente libre et pas le cannabis, qui ne présente aucune dangerosité supplémentaire ?
Quoi qu’il arrive, ceux qui veulent en consommer en consomment. S’en procurer est simple comme bonjour… En quel honneur faudrait-il laisser les bénéfices de ce commerce juteux à des petites frappes qui, dans certains cas, investissent cet argent dans l’achat d’armes et autres voyages en Syrie ? Le cannabis est l’un des moteurs financiers du djihadisme de banlieue. Pourquoi continuer ?
Enfin, nous avons sous le nez l’exemple de la Hollande, où la vente libre ne pose strictement aucun problème. Selon toutes les études, il n’y a pas davantage de drogués là-bas qu’ici. Et peut-être même moins, selon certaines observations. Malgré cette mesure prétendument décadente, les rues d’Amsterdam sont plus sûres que les rues parisiennes.
En résumé, c’est la mort dans l’âme qu’il faut convenir que, sur cette affaire de légalisation, la gauche, pour une fois, a raison.
PS : article rédigé par un non-consommateur de cannabis.
12Benoît Hamon, candidat à la primaire de la gauche pour la présidentielle de 2017, était, lundi 10 octobre, l'invité de franceinfo. Le député PS des Yvelines prône la légalisation du cannabis pour mettre fin à l'hyper-violence dans certains quartiers.
Benoit Hamon, candidat à la primaire du PS, ancien ministre et député socialiste des Yvelines
(Jean-Christophe Bourdillat / Radio France)
Benoît Hamon, invité de franceinfo lundi 10 octobre, a réagi à l'agression de quatre policiers près du quartier de la Grande Borne, à Viry-Châtillon samedi 8 octobre. Pour le candidat à la primaire socialiste pour la présidentielle 2017, la seule façon de ramener l'ordre est de s'attaquer "à la vraie gangrène, l'économie du cannabis".
Pour le député PS des Yvelines, c'est "un peu la loi de la jungle dans des territoires où l'économie du cannabis règne, où l'économie parallèle règne". "Ces territoires ont beaucoup de mal à lutter contre le poids de ces bandes et de ces trafics", a-t-il ajouté. Selon l'ancien ministre de l'Education nationale, la véritable cause de cette hyper-violence dans certains quartiers est due à la prohibition du cannabis, qu'il veut lever : "Je pense qu'il va falloir qu'on s'attaque à la vraie gangrène : l'économie du cannabis. [...] Ma position, c'est la légalisation du cannabis, [...] de façon à ce que demain nous puissions tuer ces trafics."
Benoît Hamon a estimé qu'il ne peut pas y avoir de solution à long terme sans s'attaquer à ce problème. "Quand vous avez des jeunes qui ne respectent plus rien, pas plus leur famille que l'État et qui agissent comme ça, ça ne se règlera pas par deux escadrons de CRS. Regardons ce qui fait que ces bandes prospèrent dans ces quartiers : c'est l'économie du cannabis", a martelé Benoît Hamon sur franceinfo.
Le député PS des Yvelines s'est dit en faveur d'une reformation de la police de proximité car, selon lui, la situation actuelle, une "forme de détestation entre la police et une partie de la jeunesse" est due en partie à sa suppression, voulue par Nicolas Sarkozy dès son arrivée au ministère de l'Intérieur, en 2002. "Si nous avions gardé des îlotiers sur ces territoires, il y aurait une relation complètement différente dans ces quartiers", a affirmé Benoît Hamon.
Une police à pied qui n'est pas là "juste pour interpeller"
Pour le candidat à la primaire socialiste pour la présidentielle, il faut "plus d'État ordinaire" dans ces quartiers. Benoît Hamon aimerait que la police n'y soit pas "juste pour interpeller ou pour faire un flagrant délit." Selon lui, les policiers devraient aussi pouvoir y faire "une patrouille à pied, dans un quartier où les gens aspirent à une vie normale", ce qui passe, selon lui, par la fin préalable des trafics liés au cannabis.
Retrouvez l'interview, en intégralité, de Benoît Hamon sur franceinfo :
C’est une avancée pour les tenants d’une légalisation du cannabis. Selon un sondage IPSOS, réalisé dans le cadre du colloque sur la légalisation qui se tiendra lundi au Sénat (*) à Paris, A 84 %, les Français jugent la législation actuelle «inefficace» pour limiter le trafic et la consommation de cannabis.
Un échantillon représentatif de la population (1097 personnes) a été interrogé à la demande de SOS addictions, du Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) et du laboratoire interdisciplinaire d'évaluation des politiques publiques (Liepp) de Sciences Po, du 27 au 29 septembre 2016. Un quart des personnes sondées ont reconnu avoir déjà fumé un joint.
La France est un des pays européens les plus répressifs en la matière. L’utilisation de produits stupéfiants y est depuis la loi de 1970 considérée comme un délit. Les contrevenants s’exposent à une peine de prison pouvant aller jusqu’à 1 an et à une amende de 3750 €. Mais, aux yeux des Français, quel que soit leur âge, l'échec est patent.
54% des moins de 60 ans favorables à l'autorisation de consommation.
Preuve de la banalisation de l'usage récréatif de la marijuana, une courte majorité de Français (50%) est pour l'autorisation de la consommation de cannabis (sauf pour les mineurs et au volant). Sur cette question, on note une différence marquée selon les générations. Les plus de 60 ans y sont majoritairement hostiles (64%) alors que le reste de la population y est favorable (54%).
52% des Français jugent efficace la vente de cannabis sous contrôle de l'Etat pour casser le trafic.
Alors que les politiques restent dans l’ensemble très frileux sur le sujet, plus de la moitié des Français (52%) considèrent que « la vente de cannabis sous contrôle de l’Etat serait plus efficace que l'interdiction pour lutter contre le trafic ». «Le système actuel est le pire qui soit car il ne protège pas les jeunes.
On ne peut pas compter sur les réseaux mafieux pour faire de la santé publique», commente, sarcastique, l'addictologue Didier Jayle, professeur au Cnam et co-organisateur du débat. Là encore, ce sont les plus jeunes (moins de 35 ans) qui défendent à 56 % ce virage législatif en faveur d'un contrôle de l'Etat. Nouveauté, ils sont 55 % à avoir la même position dans la classe d'âge des 35-59 ans. Autre élément intéressant, le camp du oui est majoritaire parmi les cadres (60%) et les professions intermédiaires (66 %).
Une question pour la campagne présidentielle.
Autre enseignement de ce sondage, plus de la moitié des Français (52 %) souhaitent que la question soit abordée lors de la future campagne présidentielle et que les « candidats prennent position sur l'évolution de la législation ». «La légalisation est un chantier à ouvrir, martèle Didier Jayle, également ex-directeur, de 2002 à 2007, de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt, devenue Mildeca). Ce sondage et le rendez-vous de ce lundi sont une occasion d'aller plus loin. Les Français attendent un débat. Et j'espère que d'autres rencontres auront lieu dans d'autres villes de France».
Pour la sénatrice (EELV) du Val-de-Marne, Esther Benbassa, à l'initiative du colloque, les résultats de ce sondage sont encourageants. «La société civile a l'air d'avoir bougé vers une meilleure acceptation : c'est une avancée dans le sens de la légalisation. Les politiques sont en retard sur cette question. Dans l'histoire, c'est toujours la société civile qui a forcé par son opinion les politiques à aller de l'avant. La loi s'est toujours faite sur la pression et c'est ça qui est intéressant». La sénatrice s'est fait connaître du grand public en défendant une proposition de loi autorisant l'usage contrôlée du cannabis qui a fait l'objet d'un débat en 2015 au Sénat mais qui n'a pas été adoptée.
(*) : "Légalisation du cannabis : l'Europe est-elle condamnée à l'impasse ?"
Source: leparisien.fr
"Sud Ouest". Pourquoi avoir choisi de prendre position sur le sujet du cannabis ?
Florence Delaunay. Cela ne date pas d'aujourd'hui. J'ai toujours été dans l'expectative concernant l'interdiction telle qu'elle est pratiquée en France. On voit bien, en se baladant par exemple sur la côte l'été, que celle-ci n'est pas respectée et qu'elle ne peut pas l'être. Nos forces de l'ordre consacrent déjà près d'un million d'heures de travail chaque année pour faire la chasse aux consommateurs et aux trafiquants. Je crois qu'elles ont mieux à faire, et notre justice également.
N'y a-t-il pas tout de même des enjeux de santé publique ?
Justement, l'interdiction totale a pour conséquence de ne pas faire entrer un seul centime dans les caisses de l'État. Cet argent pourrait être réutilisé pour la prévention et le suivi sanitaire des consommateurs. Il existe aussi de nombreux usages thérapeutiques du cannabis, pour soulager la douleur causée par la fibromyalgie ou certains cancers par exemple. De nombreuses études le prouvent. On associe souvent le cannabis au tabac et à la fumée mais il y a d'autres manières de le consommer, en gâteau par exemple !
A quoi pourrait ressembler un marché légalisé ?
Je plaide pour un marché encadré par l'État. Aujourd'hui, il est pris en charge par des réseaux mafieux, au même titre que la prostitution. On ne sait pas où va l'argent, ni ce qu'il finance. Ce serait une manière de leur couper les vivres. Très franchement, je préfère que cet argent aille dans les caisses de la collectivité plutôt que dans la poche des réseaux mafieux. Je pense aussi à nos agriculteurs, pour qui la culture du cannabis pourrait être intéressante, sur le modèle des cultures de tabac sous contrat avec l'État. D'ailleurs, on cultive déjà le chanvre dans les Landes, à destination du bâtiment par exemple. Et la gendarmerie trouve souvent des pieds de cannabis au milieu du maïs en été, c'est donc qu'il y pousse plutôt bien !
Pensez-vous que votre position est majoritaire au sein du Parti Socialiste ?
Je ne pense pas. L'idée fait son chemin mais beaucoup ont encore du mal à prendre position. Ils ont sans doute peur de passer pour des soixante-huitards attardés… Il y a plein d'a priori sur ce sujet. Je crois qu'il ne faut pas s'autocensurer et refuser d'en parler pour de mauvaises raisons. L'étude publiée par Terra Nova est un bon point de départ pour examiner les conséquences d'un marché légalisé et trouver la meilleure solution. Je ne dis pas qu'il faut le faire demain mais ce serait idiot de ne pas étudier la question.
Comment expliquez-vous que la question resurgisse avant chaque grande élection, pour disparaître ensuite ?
Je n'en sais rien. Personnellement, je ne me positionne pas sur ce sujet pour draguer d'éventuels électeurs. Mais tant mieux si les élections sont l'occasion de remettre des sujets importants sur la table.
La création d’une « Autorité de régulation du cannabis (ARCA) » calquée sur l’Autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel) permettrait la légalisation du cannabis en France, sur un marché contrôlé, estime le club de réflexion
Terra Nova dans un rapport publié mardi 4 octobre.
Selon ce think tank classé à gauche, la problématique du cannabis se rapproche de celle des jeux connectés, les consommateurs ayant des comportements similaires. De plus, l’offre fait se côtoyer « offre physique et offre en ligne ».
Comme la loi du 12 mai 2010 légalisant le marché des jeux d’argent et de hasard, le pari de la légalisation du cannabis est « l’assèchement du marché criminel d’un côté, la prise en compte d’un problème de santé publique de l’autre », explique le rapport.
Avec 4,6 millions de Français ayant consommé du cannabis au moins une fois (chiffres de 2014), selon l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (ODT), la France est toujours en tête du classement européen en matière d’usage de ce stupéfiant. Et « les campagnes de prévention menées en population générale n’ont été que d’une faible efficacité », rappelle Terra Nova.
Lire aussi : Cannabis : pragmatisme ou démagogie ?
Déconnecter le marché des ministères
Le think tank souligne aussi l’impuissance de la politique pénale. « Les interpellations pour possession ou usage de cannabis ont plus que doublé sur la décennie 2000 », souligne le rapport, alors que « le nombre de consommateurs a continué de croître ».
Une fois légale, la vente de cannabis pourrait être confiée à des détaillants agréés par l’autorité de régulation spécialement créée, l’ARCA, dans « le réseau des débitants de tabac, celui des officines pharmaceutiques ou un nouveau réseau de magasins ».
Comme pour le tabac, la commercialisation devrait alors être soumise à une « interdiction aux mineurs », des « avertissements sanitaires et un packaging neutre », ainsi qu’à « une interdiction de la consommation dans les lieux à usage collectif et de travail clos et couverts ».
Quant à la production, elle « pourrait soit se faire par des agriculteurs français autorisés par des licences du ministère de l’agriculture, soit par des entreprises étrangères », avec un dosage en THC (delta-9-tétrahydrocannabinol) limité.
La création d’une autorité administrative indépendante aurait enfin « l’avantage de déconnecter un marché du cannabis générateur de recettes fiscales et les ministères du budget ou des finances », conclut le think tank, les pouvoirs publics ayant « la fâcheuse habitude de devenir dépendants aux recettes fiscales faciles ».
Source: lemonde.fr
Légaliser le cannabis? Mais on n’en a plus rien à foutre!
Le gouvernement tente une nouvelle fois de nous enfumer en faisant semblant d'ouvrir le débat sur le cannabis.. pour le refermer aussitôt ! La vérité, c'est que, légal ou pas, le cannabis est partout, bon et pas cher, et que les fumeurs n'en ont désormais plus rien à foutre qu'il soit autorisé ou non!
Alors qu’une bonne partie de la jeunesse est dans la rue pour combattre la loi El Khomri de destruction du code du travail, le ministre « socialiste » Jean Marie Le Guen a expliqué dans la presse, en substance, que l’interdiction du cannabis ne fonctionnait pas et qu’il était temps de passer à autre chose...
Il a été immédiatement recadré par deux autres ministres, Vallaud-Belkacem et Le Foll, qui se sont empressés de mettre les choses au point :
Non, il n'est pas question de changer la loi française sur les stups qui date... de 1970 (!) et le fait que les français soient les plus gros fumeurs de pétards d’occident ou les dizaines de victimes par balles de la guerre du shit à Marseille n’y changeront rien : on garde cette loi formidable qui punit théoriquement de prison ferme et inflige de lourdes amendes pour la possession ne serait ce que d’un joint de cannabis…
On remarquera au passage qu'il n'est plus question ici de la « modernité » et du « monde qui bouge » dont on nous rebat les oreilles en général quand il s'agit de déréglementer et de (contre) réformer, mais passons...
Pas question de légaliser, donc, ni même de dépénaliser l'usage du cannabis.
On continue comme avant.
Gageons qu'à l'approche de 2017 et des présidentielles, nombreux seront les politiques de tout bord à évoquer le sujet, à parler d'ouvrir le débat, espérant grappiller quelques voix chez les jeunes, pour aussitôt clore la parenthèse une fois l'élection passée.
Un petit exemple avec ce billet pathétique de la députée PS du Doubs:
https://blogs.mediapart.fr/barbara-romagnan/blog/070316/cannabis-une-repression-inefficace
Pathétique parce qu'on croirait, à la lire, que son parti est dans l'opposition !
Pathétique parce que les arguments qui nous sont servis, pour pertinents qu'ils puissent être, sont les mêmes qui sont répétés en boucle, sans succès, depuis 1970 ! De qui se moque-t-on?!
Alors que très franchement, en 2016, en France, légaliser ou pas le cannabis… on n'en a vraiment plus rien à foutre.
Parole de fumeur !
Laissez moi vous expliquer !
Il faut savoir que du cannabis, on en trouve partout désormais, et que ça soit en région parisienne et dans de nombreuses villes de Province, il n’y a pas une cité désormais qui n’ait son– voire ses- points de vente, où l’on peut trouver de l’herbe et du shit 7 jours sur 7 de midi ou au pire quatorze heures à vingt-deux heures voire minuit....
Ni la répression ni l’état d’urgence n'ont pu tarir – ni même ralentir- l’approvisionnement, et les prix ne bougent pas! Mieux, ils baissent, quand la qualité,elle, augmente.
De toute façon, désormais on fait pousser de l’herbe partout et les trafiquants (sans doute sensibles eux aussi au thème du développement durable ?) privilégient les circuits courts, ils produisent sur place et l'herbe n'a que quelques mètres faire de la chambre de floraison jusqu'au pochon qu’on vous bicrave.
Avec la concurrence de la weed auto produite, les producteurs marocains de shit ont dû s’adapter et ils fabriquent désormais un produit de plus en plus fort, qu'on appelle « la frappe », le « seum » (« poison » en arabe ) ou encore « la patate ».
On remarque également que les prix se sont standardisés, pour 10 euros un peu partout t’as environ deux grammes de shit, la même chose pour vingt balles avec la beuh.
Pour mémoire, dans les années 1980, la « barrette » de shit à cent francs (soit 15,24 euros) faisait au mieux deux grammes... et la bonne herbe était particulièrement dure à trouver.
Plus besoin non plus d’ avoir ses entrées dans les cités et de connaître le milieu pour y aller, c’est désormais très bien organisé et professionnel et les arnaques qui étaient légion dans les années 90 (où l’on fourgait entre autres un shit infâme surnommé le Tcherno...) ne sont qu’un mauvais souvenir, même un bolos’ en costard cravate peut acheter son matos sans prendre le moindre risque !
Quant aux flics, il y a longtemps qu’ils ont renoncé à embarquer les fumeurs de joints, eux qui en consomment parfois aussi, comme toutes les couches de la société ! C'est tout juste s'ils vous le confisquent, sauf si vous avez un produit particulièrement bon et qu'eux même sont en rade!
Pourquoi légaliser, donc ? Veut-on supprimer les seuls emplois qui existent dans les quartiers dits « difficiles » ? Veut on cesser de bénéficier de l'expertise et des compétences de ces jeunes en matière de culture, d’import-export, de distribution ? Veut on que le marché tombe entre les mains des grands groupes, type Leclerc ou Auchan qui sont déjà gavés d'oseille ?.. Veut on faire augmenter les prix ?
Non, vraiment, laissez nous gérer nous même notre marché, et s'il vous plait, ne légalisez pas le cannabis !
Une solution économique alternative
Alors que la France connait depuis plusieurs années un état de crise profond et durable, que les gouvernements successifs tentent en vain de réanimer un système atteint d’une obsolescence incurable et que les Français voient inlassablement au fil des mandats présidentiels qu’ils rechignent à voter, s’évaporer leurs rêves de véritable changement. Un phénomène de société relativement récent, souffrant à l’heure actuelle de la qualification juridique de « licite », pourrait contre toute attente s’avérer finalement être une alternative économique solide et viable. Souvent diabolisé, assimilé au phénomène dit de banlieue (insécurité) et donc soumis à une vision policière et conflictuelle de la chose. Nous tenterons dans cet article d’aborder la légalisation du cannabis d’un point de vue pragmatiquement économique et politique.
Image @Gribouyou
Cela fait maintenant de longues années que les instances politiques de notre pays, conscientes des enjeux économiques d’un tel basculement, tentent maladroitement d’appréhender les mots ô combien sulfureux de « légalisation » et de « dépénalisation », en ce qui concerne le cannabis. Le dernier exemple en date étant la sortie médiatique de Vincent Peillon alors qu’il occupait les fonctions de ministre de l’éducation, en octobre 2012.
Lors de laquelle il se déclara en être en faveur d’un débat sur la dépénalisation du cannabis, en ajoutant qu’il s’agissait selon lui d’un sujet majeur. Ces déclarations déclencheront une vive polémique au sein de l’opinion publique et des médias. Le ministre de l’éducation sera lui, publiquement recadré par le 1er ministre Jean-Marc Ayrault à travers un cinglant désaveu émanant d’une froide dépêche AFP. Il perdra partiellement ce jour là, sa crédibilité en tant que ministre. Cet épisode tentant à prouver la dimension hautement sensible de ce sujet, au sein de la classe politique française.
Alors que les médias évoquent régulièrement l’économie « parallèle » lors de nombreux reportages sensés informer la population des dangers gangrenant la périphérie des grandes villes de l’hexagone et que la France se trouve paradoxalement être, le pays dénombrant le plus grands nombres de consommateurs de cannabis d’Europe. En ces temps de crises et après les multiples mesures de rigueur inquiétantes de contre productivité de la droite comme de la gauche, l’hypothèse d’une alternative économique étant encore hier qualifié d’inenvisageable, pourrait demain s’avérait être une presque obligation.
Une industrie difficilement quantifiable !
On dénombre en France à l’heure actuelle des centaines de points de ventes de drogues, procédant à des dizaines de transactions journalières de jour comme de nuit. Car aussi impensable que cela puisse paraitre, les gentils mégots parfumés des soixante-huitards ont laissé place en France lors de ces quarante derniers années, à une industrie nationale impliquant toutes les classes sociales de notre pays et générant une manne financière ainsi qu’un flux de numéraires colossal, continue et plus ou moins régulier.
Afin de prendre la réelle mesure économique d’un tel phénomène, nous allons nous intéresser à cette économie souterraine dans son état actuel et nous concentrer dans un premier temps sur un seul département. En l’occurrence l’un des plus actifs en ce qui concerne le commerce de produits stupéfiants, à savoir le département de la Seine Saint-Denis. Le département (93) compte en son territoire une cinquantaine de points de vente en activité, générant chacun d’après les saisies policières et les nombreuses estimations journalistiques, un chiffre d’affaires journalier allant de 6500€ à 12 000€.
Sans tenir compte des éventuels pertes des trafiquants liés à la politique de répression, ces commerces génèrent chacun un CA mensuel d’un montant pouvant aller de 195K€ à 360K€. Soit à l’échelle du département un transit mensuel et en cash (cash-flow) d’un montant pouvant aller de 9 millions d’euros à 18 millions d’euros. Soit une manne financière avoisinant les 200 millions d’euros annuel pour le seul département du 93, échappant totalement aux services fiscaux de l’Etat et ne bénéficiant donc pas à la communauté dans son ensemble.
Ce calcul d’une fiabilité somme toute limitée, ne peut bien entendue s’appliquer de manière linéaire à l’ensemble du territoire français. Cependant, aussi surprenant que cela puisse paraitre, il suffirait que cinq départements soit aussi productifs que le 93 pour que le montant généré par cette industrie à l’échelle nationale atteigne le milliard d’euros mensuel. Et il semble de toute évidence que ces montants soient effectivement générés par l’économie parallèle sur le territoire français aux moments ou vous lisez ces lignes.
Ce phénomène, qui ne cesse de s’accroitre depuis ces dernières décennies, est en France la cause d’une hypocrisie sociétale ainsi que du cuisant échec de la politique répressive menée à outrance par l’état français par le passé. La preuve ultime de cette pathétique hypocrisie sociétale étant la croissance des bénéfices des entreprises françaises vendant légalement des ustensiles destinés à consommer un produit prohibé (ex :ocb, Bolloré). Les buralistes jouissant d’un statut de témoins privilégiés de ce phénomène, se trouvent donc être pleinement conscients de l’importance de cette industrie et se disent donc officieusement favorable à une légalisation, leur permettant un jour de vendre légalement du cannabis via leur bureau de tabac et donc d’accroitre leurs bénéfices.
Dans la lignée du Made in France…
Alors que 13 millions de Français déclarent avoir déjà fumés du cannabis, la légalisation, l’industrialisation et la taxation de la commercialisation par l’état français du cannabis, pourrait rapporter au pays en seulement une poignée d’années, des dizaines de milliards d’euros… Cela même lui faisant grandement défaut à l’heure actuelle !
L’industrialisation qui a pour vertu d’optimiser les rendements commerciaux, de créer des emplois sur le sol français ainsi que de diversifier une agriculture hexagonale, est à l’heure actuelle maintenue en soin palliatif par les drastiques et inéquitables règles de la mondialisation. En définissant un système de subvention de la culture de cannabis français par des agriculteurs français, on pourrait observer la mise en place d’une filière de cannabis « Made in France » destinée en premier temps à une vente à l’échelle national mais pouvant éventuellement dans un second temps, être exporté dans les pays ayant adoptés une politique de commercialisation légale de cette substance.
La régularisation et la maitrise de la commercialisation du cannabis au même titre que le tabac ou l’alcool ayant pour objectif, en plus de renflouer les caisses trop longtemps trouées de l’état, de diminuer la criminalité et l’insécurité liée au trafic de drogue. La légalisation associée à la déjudiciarisation, aurait pour vertu de diminuer les frais judiciaires de l’état. Le tout permettant in fine de diminuer le montant des impôts des français, ou du moins de ne pas les augmenter d’avantage, ainsi que d’éviter la mise en place future d’un énième plan de rigueur qui sera certainement aussi fantasmatique qu’il n‘est réalisable.
Le pragmatisme économique !
Cet outil économique se trouve être potentiellement viable à condition que celui-ci s’imbrique dans un processus de changement global, impliquant principalement les secteurs de l’économie, du social, de la justice et de l’agriculture. Celui-ci pouvant donc, sous couvert de conditions optimales, s’imposer à moyen-long termes comme un véritable outil économique alternatif.
A l’heure ou le dédale du blanchiment trouve naissance dans la périphérie de nos villes pour finir sa longue course dans la verdure des pâturages du système bancaire suisse en passant par les montagnes sinueuses du Maroc ; que les différents plans de rigueur mis en place cette dernière décennie et présentés par nos politiques comme des solutions ultimes de sauvetage, s’avèrent être en réalité de pitoyables économies « bout de chandelle ». Au sacrifice de quelques valeurs morales dépassées n’ayant plus à l’heure actuelle de réelle légitimité, face aux analyses prévisionnelles déconcertantes d’alarmisme de certains experts, ne serait-il donc pas temps que la France se résigne enfin à apporter au système qui est le sien, les modifications nécessaires à un redressement économique durable ?
Ce nouvel outil économique pourrait une fois maitrisé, optimisé, régulé et associé à une politique de prévention de grande ampleur, générer des revenus d’une importance considérable, sans pour autant détériorer la qualité de vie des français.
Dans la difficile cruauté du monde capitaliste et consumériste qui est le notre, qu’elle pourrait être la justification du rejet d’un revenu annuel futur se chiffrant en milliard d’euros, émanant d’un état dont le modèle économique est présentement en grande difficulté ? En me basant sur l’analyse de Marie France Garaud dans l’article « la France a perdu son indépendance » dans lequel elle écrit « Il faut essayer de voir le monde tel qu’il est et non pas comme on aimerait qu’il soit. », la France devra un jour se résoudre à enfin faire preuve de pragmatisme et à quérir l’argent là ou il est et non pas là ou elle souhaite le prendre… Et où elle a déjà trop pris !
Chaque fois que le débat sur le cannabis surgit sur la scène publique française, la politique lui coupe l’herbe sous le pied. Mais les choses changent. Ou vont peut-être changer. Alors que la campagne électorale pour 2017 se profile, quatre candidats ont déjà exprimé leur malaise vis-à-vis de la législation actuelle sur le cannabis. Certains vont même jusqu’à proposer sa légalisation. Mais de quoi parle-t-on au juste ?
Une campagne en dessin pour la promotion aux États-Unis du cannabis à usage thérapeutique.
Jonny Goldstein/Flickr, CC BY
Entre prohibition et légalisation, un éventail de possibilités
La loi française est l’une des plus prohibitionnistes en Europe. Celle-ci condamne en effet la production et le trafic de stupéfiants, mais aussi leur usage illicite. La consommation de cannabis est donc une infraction pénale, plus précisément un délit. Et lors des débats sur la substance, c’est cette catégorisation qui est le plus souvent remise en cause.
Depuis un an, le principe de « contraventionnalisation » gagne en popularité. Terme similaire à celui de décriminalisation, l’idée est de remplacer la peine de prison par une amende, en réduisant la gravité de l’infraction, mais en maintenant son interdiction pénale. C’est ce que prône le décret autorisant la transaction pénale d’octobre 2015. Une idée qu’on retrouve dans les conclusions d’un rapport interministériel sur la question du traitement juridique du cannabis. Le but de ces modifications est de désengorger le système judiciaire sans aller jusqu’à une dépénalisation ou suppression de la peine, qui ne jouerait pas le rôle dissuasif voulu par la législation actuelle.
À l’inverse, en sortant l’usage du cannabis du cadre pénal, la légalisation enlèverait les interdictions qui pèsent sur la substance. Mais légalisation ne signifie pas nécessairement libéralisation, laquelle se traduirait par l’ouverture du marché à la concurrence. Tout en légalisant le cannabis, l’État peut garder un contrôle sur la production, la distribution et/ou l’usage.
Les opposants à toute modification soutiennent que la dangerosité du produit justifie son interdiction et que toute évolution de la législation entraînerait une augmentation de la consommation. Nous allons à présent détailler les arguments qui contredisent ces idées sans pour autant inciter à la consommation de cannabis, fait qui constituerait également une infraction.
Réprimer : coûteux, hypocrite et inefficace
La loi de 1970 sur les stupéfiants a pour objectif la baisse de la consommation de ces substances. Or, au regard de cet objectif primaire, la répression n’est pas efficace. Le cannabis est la substance illicite la plus consommée en France : 4,6 millions d’usagers durant l’année 2014, dont 1,4 million considérés comme réguliers. Les jeunes Français sont les plus grands consommateurs en Europe et l’herbe est plus disponible qu’avant.
Un appel entendu dans les États du Colorado et de Washington.
Patrick Harris/Flickr, CC BY-NC-ND
Alors que plus de la moitié des Français continue à considérer le cannabis comme dangereux, le signal moral qu’on prétend envoyer aux jeunes aujourd’hui ne fonctionne pas. De plus, les cas de dépénalisation, comme au Portugal, et de légalisation, comme au Colorado (Etats-Unis), n’ont pas été suivis d’une augmentation de la consommation.
De plus, la répression policière envers les consommateurs en France continue à être la plus draconienne d’Europe, alors que le système juridique ne suit pas. Depuis l’instauration de l’interdiction des stupéfiants en 1970, cinq circulaires ministérielles ont assoupli l’application de la loi pour ce qui concerne l’usage du cannabis, et aujourd’hui, la grande majorité des cas se soldent par de simples rappels à la loi ou avertissements. Cette ambiguïté révèle à la fois l’hypocrisie qui règne au sein du système policier (qui doit « faire du chiffre ») et un gaspillage des finances publiques.
Car la lutte contre le cannabis coûte cher. Alors que le marché du cannabis est estimé à plus de 1,1 milliard d’euros, l’État dépense environ 1,7 milliard en prévention, répression et soins. Ces sommes astronomiques représentent un double coût pour la collectivité : outre la facture publique, les grands bénéfices de la drogue sont accaparés par des réseaux criminels, qui acquièrent un potentiel déstabilisateur par la corruption et la violence, en France et ailleurs dans le monde.
De plus, il est aujourd’hui avéré que tous les usagers de cannabis ne sont pas des consommateurs à risque. À la différence de ce que laisse penser l’application de la loi, la simple récidive n’est pas synonyme de consommation problématique.
S’il y a 4,6 millions d’usagers de cannabis, il n’y a pas autant de toxicomanes. Le cannabis n’est pas le produit le plus dangereux et il cause très peu de morts. Mais son usage peut s’avérer dangereux et une consommation précoce, régulière, prolongée et/ou à des fortes doses peut provoquer des troubles cognitifs, psychologiques, voire psychiques.
Des risques pour la santé et la cohésion sociale
Toute dangerosité doit être prise en compte par les politiques publiques. Mais quand on parle du cannabis, la nocivité de la substance semble augmenter avec la prohibition. D’une part, la qualité de la substance n’est pas contrôlable sur le marché noir, et le cannabis qu’on trouve en France est de plus en plus accessible et dosé en THC, essence psychoactive qui peut avoir des effets secondaires non désirés.
De plus, en voulant imiter la substance, des nombreux « cannabis de synthèse » ont été créés, provoquant des effets très nocifs pour la santé et allant jusqu’à produire des surdoses. À l’inverse, la recherche sur les possibles effets médicaux et thérapeutiques de la substance, qui n’est pas interdite par la loi, a longtemps été marginalisée.
Concert au Canada lors de la « Journée du cannabis » en 2014.
GoToVan/Flickr, CC BY
Ainsi, le climat d’interdiction en France provoque-t-il une augmentation des dommages potentiels liés à la consommation de cannabis. La raison d’être des politiques de réduction des risques est de chercher à prévenir et détecter les usages problématiques sans nécessairement interdire la consommation. Hélas, la prévention intelligente est impossible en France. Or, comme l’affirme un avis du Conseil économique, social et environnemental, « il est indispensable de lever la stigmatisation qui pèse encore sur les addictions afin que les personnes demandent davantage d’aide et de soutien ».
On entend souvent dire que la prohibition serait un moyen de « contrôler » les banlieues. Mais cet argument est (au mieux) doublement immoral. Premièrement, il suggère qu’on peut délaisser une partie de la population, et lui permettre d’utiliser le trafic illégal des stupéfiants pour pallier la rupture du lien social et l’exclusion économique.
Deuxièmement, il traduit l’idée que l’État appliquerait la loi de manière discriminatoire, voire raciste, sur une partie de la population. Il s’avère que cette hypothèse est de plus en plus tangible avec l’homogénéisation des profils des usagers interpellés et condamnés, plus jeunes par rapport aux condamnés dans l’ensemble des délits, et qu’on peut supposer, en raison d’un contrôle au faciès avéré qui n’est pas évalué statistiquement, avec des traits physiques particuliers.
Finalement, il est regrettable de ne pas considérer la réalité de la légalisation du cannabis ailleurs dans le monde. Après les États du Colorado et de Washington aux États-Unis (en 2012), nombreux sont les pays où la légalisation du cannabis est mise à l’agenda. L’Uruguay a franchi le pas en 2013 et des discussions sont en cours au Canada, en Italie et dans d’autres États américains… La question qui se pose n’est plus de savoir pourquoi, mais comment légaliser.
Quel modèle de légalisation à la française ?
Nombreux sont les modèles de légalisation du cannabis disponibles dans le monde. Or, d’après les expériences actuelles, il s’avère que la légalisation dans un cadre concurrentiel stimule le développement d’une industrie où le chiffre d’affaires serait l’objectif et qui développerait par conséquent, un marketing incitatif à la consommation. Ce type de légalisation est, bien entendu, impossible à mettre en place dans le contexte français.
Dans une rue de San Francisco.
ilbert Laszlo Kallenborn/Flickr, CC BY-NC-ND
Pour diminuer les dommages sociaux et sanitaires, une régulation stricte des marchés semble s’imposer. Un modèle fort permettrait d’envisager une légalisation avec des restrictions de production, de vente et de consommation, dans les lieux publics et de travail par exemple. En France, il pourrait se rapprocher des modèles de régulation des ventes de tabac ou de celui des jeux en ligne, dont trois caractéristiques permettraient d’assurer le succès.
L’État doit rester un acteur fort dans la régulation. L’autorité étatique doit définir et contrôler les règles de production, de distribution et d’accessibilité, l’âge légal de la consommation, le prix de vente et sa taxation, les dosages des produits, et surveiller la qualité de la substance. De plus, la réglementation peut interdire toute publicité et obliger les acteurs du secteur à développer des campagnes de prévention fortes.
Le modèle doit pouvoir évoluer avec le temps. Tel que le développe un rapport du think tank Terra Nova, il semble important qu’il s’adapte en fonction des avancés du processus de légalisation. Par exemple, le prix de vente devrait être fixé au niveau de celui du marché noir afin d’attirer les consommateurs vers la légalité, puis, il devrait augmenter par des taxes dont l’objectif serait de décourager la consommation. Un tel processus a été suivi après la fin de la Prohibition de l’alcool aux États-Unis. La flexibilité du modèle ne doit pas être considérée comme un signe de faiblesse, mais comme un potentiel d’adaptation de la politique suite à son évaluation.
Dans le paradigme économique actuel, la politique de régulation doit pouvoir satisfaire ses propres besoins. De nombreux articles soulignent les avantages économiques de la légalisation, notamment à la lumière de l’excédent budgétaire généré par les taxes du cannabis au Colorado. Cependant, il ne faudrait pas penser que la légalisation du cannabis puisse combler le trou de la Sécurité sociale. Le but de la politique doit rester le contrôle de la consommation et l’argent collecté grâce à la légalisation doit servir à développer des campagnes de prévention, prendre en charge les consommateurs problématiques, lutter contre les trafics illicites et améliorer le système de régulation. La politique publique doit pouvoir répondre à l’ensemble des enjeux du secteur.
Finalement, le modèle de régulation par l’État peut permettre la production de cannabis pour un usage personnel et des modèles de régulation citoyenne comme les Cannabis Social Clubs d’Espagne. Ces structures, qui doivent être également contrôlées, permettraient la création d’environnements sûrs de consommation et – pourquoi pas ? – renforceraient le lien social grâce à l’engagement associatif.
En guise de conclusion, il reste à poser la question du quand légaliser. Le plus tôt serait le mieux. Ce sont les États-Unis qui ont encouragé la diabolisation du cannabis dans le monde. Or avec la légalisation instaurée dans plusieurs États outre-Atlantique, le monde globalisé et une industrie américaine placée à l’avant-garde, un cannabis « Made in USA » sera disponible et adulé sur le marché au moment de l’inévitable légalisation en France.
Auteur
Luis Rivera Velez Doctorant sur la politique des drogues en Amérique latine, Sciences Po – USPC
Source: theconversation.com
Déclaration d’intérêts
Luis Rivera Velez reçoit un financement de Sciences Po. Il participe actuellement à l'organisation de l'association ECHO. Partenaires
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Celui qui se veut de droite et de gauche a également affirmé ne pas être contre la légalisation du cannabis, tout en précisant qu'il s'agit d'une "réponse provisoire".
Emmanuel Macron, le 4 septembre 2016 sur franceinfo. (FRANCEINFO)
"C'est un sujet éminemment compliqué. Aujourd'hui, le cannabis pose un problème, en effet, de sécurité, de lien avec la délinquance dans des quartiers difficile, de financement de réseaux occultes, et donc, on voit bien que la légalisation du cannabis a des intérêts de ce point de vue, et a une forme d'efficacité."
"Le sujet est ouvert, et doit être considéré", explique Emmanuel Macron. "Quand on regarde d'ailleurs l'incapacité qu'ont les magistrats de régler le problème d'un point de vue pénal, on voit que nous sommes dans un système très hypocrite.
Donc je ne suis pas contre, si cette réponse provisoire peut être la mienne aujourd'hui, mais, en même temps, j'entends les préoccupations de santé publique qui sont émises par ailleurs, ce n'est pas un sujet qui est léger, donc je souhaite qu'on puisse ouvrir ce sujet, je souhaite l'aborder, de manière méthodique, dans les semaines qui viennent, mais je ne suis pas contre pour un principe d'efficacité et de justice" a argumenté Emmanuel Macron