Le Point : On le sait, l'interdiction du cannabis n'empêche pas sa consommation, génère de l'insécurité et fait prospérer les trafics. Pour autant, sa légalisation n'a-t-elle que des avantages ?
Emmanuelle Auriol : Pour éliminer le crime organisé, il faut lui faire concurrence. Donner envie aux consommateurs d'acheter sur le marché légal. L'État doit proposer une offre suffisamment basse pour qu'elle se substitue à celle des réseaux mafieux. Les avantages ne manquent pas : même si le cannabis légal est un peu plus cher, les acheteurs sont sûrs que le produit est de bonne qualité, ils n'ont pas affaire à des trafiquants, ils peuvent consommer sans risquer de se faire arrêter.
L'État est le maître du marché. Le cannabis doit être cher pour que sa consommation reste occasionnelle. Une fois que vous avez délogé du marché les criminels installés, il faut donc augmenter les prix afin d'éviter une augmentation de la demande. Pour la drogue, l'élasticité des prix est positive, ce qui signifie que les consommateurs y sont sensibles. Si le prix du cannabis augmente, ils en achèteront moins. Sur le modèle du tabac. Aujourd'hui, 80 % du prix du tabac est constitué par les taxes. Mais le prix ne doit augmenter ni trop vite ni trop haut. Dans les États américains qui ont légalisé le cannabis en exerçant une pression fiscale modérée, le marché légal absorbe aujourd'hui 70 % de la demande. Dans l'État où la pression fiscale est plus forte, et où le gramme se négocie par exemple au-delà des 25 dollars, cela marche moins bien et le marché noir représente toujours une part importante des échanges.
Vous prônez l'élimination du trafic de cannabis par une politique de l'offre, mais comment éviter la tentation du marché noir ?
Les trafiquants peuvent en effet réduire leur marge et casser les prix. Il faut donc les dissuader de le faire en étant impitoyables avec eux. Ce qu'ont fait les Pays-Bas. Ils répriment très sévèrement le marché noir. L'État tirerait de la dépénalisation un bénéfice économique grâce aux nouveaux prélèvements générés par la légalisation. Mais on ne peut pas gagner sur tous les tableaux.
L'État doit investir dans la répression une partie des recettes fiscales engrangées par la légalisation. Ce n'est pas légalisation ou répression. Ces deux instruments de politique publique ne s'opposent pas, ils se complètent. La synergie des deux est la condition de leur efficacité. Il faut aussi mener un travail de pédagogie sur les drogues comme cela a été fait sur l'alcool, dont la consommation a été diminuée par deux en vingt ans en France. Actuellement, l'interdiction du cannabis empêche toute information pédagogique à ce sujet.
La légalisation du cannabis ne va-t-elle pas, comme on l'entend souvent, attirer de nouveaux consommateurs qui n'auraient pas franchi le pas autrement ?
Dans les États américains qui ont légalisé le cannabis à des fins récréatives, on n'a pas constaté d'explosion de la demande. Souvent chez les nouveaux consommateurs, et notamment les jeunes, l'un des attraits pour le cannabis est sa dimension transgressive. Dès lors qu'il n'est plus interdit, « fumer du shit » perd beaucoup de son intérêt. 13 millions de Français disent consommer ou avoir déjà consommé du cannabis, cela ne fait pas d'eux 13 millions de drogués. Pourtant, rien n'est plus facile que de consommer du cannabis.
C'est une drogue très accessible. Et puis, légaliser ne veut pas dire autoriser la vente libre. Il ne s'agit pas de trouver du cannabis en grandes surfaces ! Légaliser signifie encadrer la vente. L'État reprend la main sur un marché pour l'instant soustrait à la loi. Quand vous interdisez quelque chose, vous perdez au contraire toute possibilité de contrôle, et vous laissez le marché aux réseaux criminels.
Faut-il dès lors aussi légaliser la cocaïne, l'héroïne… ?
Le problème est différent. Déjà l'accès au produit n'a rien à voir. La France compte plusieurs millions de consommateurs de cannabis, et seulement quelques centaines de milliers d'usagers de cocaïne et d'héroïne. Or, le chiffre d'affaires de la cocaïne est à peu près équivalent à celui du cannabis, ce qui s'explique par le fait que le prix au gramme de la cocaïne est sans commune mesure avec celui du cannabis.
Ensuite, la cocaïne ou l'héroïne sont beaucoup plus addictives que le cannabis. Ces drogues suscitent une très forte dépendance. Pour créer la demande, les trafiquants commencent à faire circuler gratuitement les produits, les premiers consommateurs deviennent rapidement toxicomanes, pour se payer leur dose, ils se font souvent dealers à leur tour et ce faisant, entraînent d'autres personnes dans la toxicomanie. Pour acheter leur dose, certains vont se prostituer ou entrer dans la délinquance (vols notamment). Sans compter que les héroïnomanes se contaminent en utilisant des seringues usagées. Les pays d'Europe de l'Est notamment sont actuellement confrontés à une épidémie de sida provoquée par la consommation d'héroïne. Pour l'héroïne ou la coke, l'État doit lancer des programmes de substitution comme l'ont fait les Suisses dans le cadre de leur politique dite « des 4 piliers ». En quelques années, le nombre d'usagers a chuté et la délinquance associée à cette consommation a elle aussi diminué.
Votre analyse est évidemment économique, mais la consommation de cannabis, c'est aussi une question de santé publique…
En tant qu'économiste, je me suis intéressée aux coûts pour la collectivité générés par les problèmes de santé liés aux stupéfiants. Un jeune toxicomane se désocialise, il n'est plus productif, il risque de tomber malade et va donc avoir besoin de soins, sa toxicomanie déstabilise toute sa famille… En outre, la drogue est la première source de revenus du crime organisé, qui engrange chaque année des recettes supérieures à celles de l'industrie pharmaceutique mondiale. Imaginez la capacité de déstabilisation de ces réseaux et la menace qu'ils font peser sur nos économies. Leur pouvoir de corruption est immense du fait de la nécessité de blanchir ces sommes énormes.
La seule solution, sans aucune ambiguïté pour débrancher cette pompe financière des réseaux criminels, est d'assécher leurs marchés. La prohibition de l'alcool aux États-Unis dans les années 1920 n'a pas fait diminuer sa consommation dans le temps, mais a durablement installé le crime organisé aux États-Unis. Supprimer l'offre, sans supprimer la demande, l'interdiction crée une situation de non-droit qui profite au crime organisé.
Alors pourquoi la dépénalisation reste-t-elle un sujet tabou en France ?
La France a toujours une attitude ambiguë vis-à-vis de la drogue, nous créons des salles de shoot et dans le même temps, on criminalise les usagers… Je ne défends aucune position. J'observe les expériences à l'étranger.
Les Américains, qui ont été les premiers à déclarer la guerre à la drogue, en reviennent. Cela a commencé sous Nixon et s'est renforcé avec Reagan qui a criminalisé l'usage de la cocaïne et plus encore du crack, ce qui a eu un effet discriminatoire : les Noirs américains étant plus pauvres que les Blancs, ils consommaient du crack plutôt que de la cocaïne, qui est plus chère. Ils se sont retrouvés massivement incarcérés, souvent pour simple usage. Aujourd'hui, un Américain sur 111 est en prison, dont la moitié pour des infractions liées à la législation sur les stupéfiants, et la consommation dans les périodes où la répression était la plus forte n'a pas diminué. Un fiasco en matière de santé publique, sociale et fiscale.
Les prohibitionnistes estiment que l'interdiction est au moins un signal moral...
Mais cela ne fonctionne pas ! Alors faut-il s'entêter ? La France est un pays conservateur. Qu'il s'agisse du droit de vote des femmes, de la peine de mort, de l'euthanasie ou du mariage pour tous, nous ne sommes jamais les pionniers. Quant aux partisans de la légalisation, ils ne font aucun effort pédagogique, et par manque d'information, l'opinion confond légalisation et vente libre. Il ne s'agit pas de mettre la drogue en vente libre ! On ne le fait pas pour le tabac, qui est un monopole d'État. On ne le fait pas non plus pour la morphine. La solution miracle contre la drogue n'existe pas, mais s'entêter dans la prohibition est irresponsable. Il est temps de se tourner vers des solutions pragmatiques qui ont fait leurs preuves ailleurs !
D'après un récent sondage, près de 60 % des Français seraient favorables à la réouverture des maisons closes. Mais les pays qui ont suivi cette voie n'ont pas réussi à éliminer la prostitution clandestine. La légalisation, dans ce cas, ne fonctionne donc pas ?
Un acte sexuel tarifé n'est pas un acte banal. Quand il est librement consenti, il est forcément cher. Quand on autorise la prostitution et les maisons closes, c'est dans l'espoir que la prostitution légale remplace la prostitution clandestine. Or, cela ne peut pas marcher sans combiner de la répression à la légalisation. En effet, les prostituées légales appliquent des tarifs forcément élevés. Sans cela, elles préfèrent faire autre chose. Cela signifie qu'il y a toujours de la place pour de la prostitution clandestine tenue par des réseaux mafieux qui cassent les prix en exploitant des victimes de traite humaine. Légaliser la prostitution ne fait pas disparaître ces réseaux qui exploitent non pas des travailleuses du sexe libres, mais des esclaves sexuelles. Tous les pays, comme l'Australie, les Pays-Bas ou l'Allemagne qui se sont contentés de légaliser les maisons closes ont vu la prostitution, notamment clandestine, exploser. Ce qu'il faut, c'est accorder aux prostituées qui exercent volontairement cette activité, un statut de type profession libérale réglementée, avec un ordre en charge des questions de consentement, de tarifs minimums, de reconversions, etc. Ces prostituées auront une carte professionnelle et à charge aux clients de vérifier que celles qu'ils emploient ont bien un statut légal. Les pouvoirs publics doivent en parallèle sanctionner durement ceux qui font travailler des prostituées illégales et les clients qui ont recours à leurs services. Criminaliser le recours à des prostitués(e)s clandestin(e)s est un outil majeur dans la lutte contre l'exploitation sexuelle, en général de très jeunes filles.
Donc, là encore, légalisation et répression. Un remède que vous préconisez aussi contre l'immigration clandestine !
Oui, la vente de visas aux travailleurs immigrés, combinée à des mesures répressives fortes contre les réseaux et les entreprises qui emploient des clandestins. La priorité est d'assécher la demande pour le travail dissimulé, qui est un appel d'air pour l'immigration clandestine. Une grande partie des immigrés, y compris des réfugiés, sont motivés par le fait de pouvoir travailler pour subvenir à leurs besoins et s'intégrer. Il faut donc qu'ils sachent qu'ils ne trouveront pas de travail s'ils entrent dans le pays en situation irrégulière.
Il faut être impitoyable avec les employeurs de clandestins et avec la mafia des passeurs. C'est la seule façon pour l'État de contrôler les flux. Il faut en finir avec l'idéologie et l'hypocrisie. On brandit l'argument de la morale et on tolère que des jeunes dans certaines cités n'aient pas d'autre horizon professionnel que le trafic de stups, ou qu'un certain nombre de secteurs économiques utilisent des travailleurs immigrés clandestins, parce que c'est une main-d'œuvre corvéable et sous-payée, ce qui fait en plus monter l'extrême droite. Ce n'est pas tenable, ni économiquement, ni moralement, ni démocratiquement.
« La Creuse, territoire d’expérimentation de la légalisation du cannabis à usage médicinal et récréatif ». Cette proposition n’a pas été glissée entre deux portes, ni-même sur un post-it : Eric Correia, président de l’ Agglo du Grand-Guéret et conseiller régional de Nouvelle Aquitaine a rédigé une fiche complète et très argumentée sur le sujet à l’attention du préfet de la Creuse. Cet élu socialiste ( qui a pris du recul avec ce parti au niveau local) ne fait « que reprendre un point du programme de Benoît Hamon », tempère-t-il.
Sauf que l’idée d’une « légalisation » anticipée et donc localisée sur un territoire donné contient la promesse d’effets secondaires significatifs au plan économique. « Si l’on pouvait implanter une production de cannabis encadrée en Creuse, c’est toute l’économie du territoire qui décollerait », s’enthousiasme Eric Correia.
La fin de la répression ? Photo R Brunel
Ce responsable politique est connu pour sa sensibilité rock’n’ roll. Il est notamment à l’origine du festival El Clandestino qui a permis de faire venir Manu Chao en Creuse en juillet 2017 : « personnellement, je ne suis pas consommateur », tient toutefois à préciser le quinquagénaire , qui est aussi soignant de profession. Son argumentaire est en partie axé sur l’intérêt du « cannabis médicinal et thérapeutique, qui permet de diminuer considérablement la consommation d’antalgiques ».
Comme le Colorado, état américain qui tire profit de la légalisation
La Creuse pourrait se positionner comme l’équivalent hexagonal du Colorado ou de la Californie, états américains qui ont légalisé dans un objectif thérapeutique. Reste que la France n’est pas un état fédéral : difficile d’imaginer une légalisation « dérogatoire » et locale, tant le sujet est sensible.
Sur un plan politique et moral, la « fiche action »e développe l’argumentaire des pro-légalisation : « En France, malgré la répression de l’usage, 45 % des jeunes ont déjà testé le cannabis contre moins de 30 % aux Pays-Bas où le cannabis est à peu près légalisé de fait. La France est régulièrement en tête des classements européens pour la consommation de cannabis (…) L’échec est également sécuritaire et judiciaire puisque les interpellations sont en hausse constante pour usage de cannabis et vente illégale alors même que les tribunaux pourraient être avantageusement désengorgés en légalisant le cannabis pour effet récréatif ».
Si la Creuse ne possède pas de climat tropical, il semble tout à fait possible d’y faire pousser du cannabis pour plusieurs récoltes annuelles.
Tant qu’à être iconoclaste, Eric Correia n’exclut pas l’ « usage récréatif » de son argumentaire. Il envisage que le tourisme de la fumette pourrait profiter au département, à l’image de ce qui s’est passé au Pays-Bas.
Culture clandestine de cannabis
A la base de ce « levier économique », générateur de ressources fiscales ( le cannabis serait légalisé mais évidemment pas détaxé), c’est bien une filière agricole spécifique qui pourrait se développer : « Si la Creuse ne possède pas de climat tropical, il semble tout à fait possible d’y faire pousser du cannabis pour plusieurs récoltes annuelles », assure l’élu.
Eric Correia est président de l' Agglo du Grand Guéret et conseiller régional PS de Nouvelle Aquitaine.
Eric Correia va jusqu ’au bout de sa logique : « C’est plus qu’un pari, c’est une certitude. Le Grand Guéret se tient prêt à relever le défi ».
Si l’expérience était circonscrite au Grand Guéret, cela pourrait faire des jaloux sur le plateau de Millevaches. De toute façon, la perspective est encore un peu lointaine. Après le maire d’Aubusson Michel Moine qui demande au préfet de la Creuse d’user de son pouvoir dérogatoire exceptionnel pour conserver la limitation de vitesse à 90km/h sur les radiales qui raccordent Aubusson aux 2X2 voies, Philippe Chopin risque de se sentir débordé par les propositions planantes. Il n’a d’ailleurs pas retenu la proposition d’Eric Correia pour le premier comité interministériel dédié au plan de redynamisation de la Creuse. Le préfet s’est en somme refusé à faire le joint.
Editorial. Le gouvernement a annoncé, jeudi, qu’il envisageait de modifier la loi réprimant la consommation de cannabis et optait pour une amende forfaitaire.
Editorial du « Monde ». Depuis trente ans, les rapports de parlementaires ou d’experts se sont succédé avec une belle régularité. Tous ont fait le même constat, qui confine à l’absurde.
En effet, la France est l’un des pays développés qui disposent des législations les plus sévères contre le trafic et l’usage de stupéfiants en général et de cannabis en particulier. Depuis la loi de 1970, la consommation de cannabis est un délit pénal, passible d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende. Cette législation répressive est justifiée par un impératif de santé publique : la consommation précoce de cannabis, surtout si elle est régulière, est dangereuse, elle ralentit le développement intellectuel et accentue les risques de troubles psychiques.
Pourtant, nous sommes (avec le Danemark) le pays européen où l’usage du cannabis est le plus répandu. Pas moins de 17 millions de personnes l’ont déjà expérimenté, dont un collégien sur dix et deux lycéens sur cinq. En 2016, l’on comptait 5 millions d’« usagers », dont 1,4 million de « réguliers ». En 2016 toujours, quelque 140 000 personnes ont été interpellées pour usage de stupéfiants, un peu plus de 3 000 ont été condamnées à des peines de prison, dont à peine 1 300 de prison ferme.
La crainte d’être accusé de laxisme
Comme les précédents, le rapport que deux députés viennent de remettre au gouvernement conclut donc que la prohibition n’a en rien empêché la banalisation – et la « dépénalisation de fait » – de la consommation de cannabis. Inefficace, la législation répressive en vigueur est, en outre, aussi chronophage que coûteuse pour la police et la justice. Et elle n’a pas manqué de favoriser le développement d’un marché clandestin de type mafieux.
Mais comme la plupart de leurs prédécesseurs, les deux rapporteurs, Eric Poulliat (La République en marche) et Robin Reda (Les Républicains), apparaissent bien embarrassés et frileux au moment de formuler des propositions pour sortir de l’impasse. Paradoxalement, c’est le député de droite qui est le plus fidèle à la promesse faite par le candidat Macron il y a un an : il préconise d’infliger aux consommateurs de cannabis une contravention forfaitaire (de quatrième ou de cinquième classe), ce qui conduirait à une dépénalisation puisque la qualification de délit serait abandonnée. En revanche, le député de la majorité propose lui aussi une amende forfaitaire, mais dans le cadre pénal de la loi de 1970. Sans surprise, le ministre de l’intérieur, Gérard Collomb, vient d’approuver cette seconde option, la plus restrictive.
Alors que plusieurs Etats européens (Allemagne, Belgique, Espagne, Italie, Pays-Bas…) et une trentaine d’Etats des Etats-Unis ont progressivement dépénalisé la consommation de cannabis, alors que d’autres (comme la Californie depuis début janvier) ont franchi le pas d’une légalisation de l’usage récréatif du cannabis, l’attitude des autorités françaises apparaît donc étonnamment conservatrice. Aux antipodes de la philosophie libérale prônée, d’une manière générale, par le chef de l’Etat.
Tout se passe comme si la crainte d’être accusé de laxisme interdisait toute réflexion progressiste en la matière. Renoncer à modifier la loi de 1970 et son interdit moralisateur revient, en effet, à pérenniser tous les travers de la situation actuelle, à laisser prospérer le marché clandestin du cannabis (au lieu de le contrôler et de le réguler) et à se dispenser d’une véritable politique de prévention. Regrettable pusillanimité.
DROGUES - Dimanche au Grand Jury LCI-RTL-Le Figaro, la ministre de la Justice Nicole Belloubet a confirmé l'intérêt du gouvernement pour une verbalisation forfaitaire de l'usage de cannabis, sans confirmer les montants avancés jusqu'ici.
lien TF1 vidéo
"La consommation de cannabis restera toujours pénalisée" en France. C'est le message adressé le 28 janvier, lors du Grand Jury LCI-RTL-Le Figaro, par la ministre de la Justice Nicole Belloubet. "Il n'a jamais été question d'une dépénalisation", a-t-elle martelé.
Cette dernière a toutefois confirmé l'intérêt du gouvernement pour une réforme en profondeur des sanctions pour les usagers de cannabis, dans la lignée du rapport parlementaire présenté en commission à l'Assemblée nationale cette semaine, et des annonces du ministre de l'Intérieur Gérard Collomb.
"Nous réfléchissons à une verbalisation avec un montant forfaire", a ajouté Nicole Belloubet, sans confirmer l'hypothèse d'une amende de 150 euros. "Le montant n'est pas établi à ce stade. Il y a des questions juridiques à approfondir. Le gouvernement fera ses propositions dans le projet de loi pénale qui sera présenté au printemps prochain".
Pour la garde des Sceaux, l'enjeu de remplacer une peine de prison par de la verbalisation n'est pas financier mais un raisonnement "en termes d'efficacité". "Nous nous interrogeons sur la manière de sanctionner cette infraction de manière plus aisée, pour faciliter le travail des policiers et des magistrats". Il s'agit, précise-t-elle, de "dégager du temps" pour les enquêteurs afin de leur permettre de "poursuivre les trafics et les filières".
Dans un espace public, Sonia Chironi et Raphäl Yem animent un débat où les interventions se succèdent, ponctuées d'éléments chiffrés autour de la thématique abordée.
diffusé le dim. 21.01.18 à 12h20
témoignages | 25min | tous publics
Lien pour le replay
Beaucoup de fumée pour pas grand-chose. L’annonce de la prochaine mise à l’amende des usagers de cannabis relève d’une double hypocrisie d’Etat et d’une incapacité à décider par quel bout prendre le joint consommé par cinq millions de Français.
Photo AFP
Primo, le futur «PV cannabis» est surtout un geste envers les forces de l’ordre pour permettre de gagner du temps plutôt qu’une mesure de santé publique dans un pays où 17 millions de ‘curieux’ l’ont déjà testé. Secundo, l’Etat assouplit les règles mais se refuse à toucher à la loi de 1970 qui condamne la consommation d’un an d’emprisonnement et 3.750 euros d’amende. Depuis 45 ans, la fumette brûle les doigts du pouvoir, comme elle consume les rapports parlementaires. Parce que le débat est vicié comme l’air dans les poumons des 700.000 consommateurs quotidiens: assouplir c’est être laxiste, durcir c’est être hypocrite face à la croissance du phénomène, surtout chez les mineurs.
Personne n’ose bouger et les effets sont pervers: on ne va pas organiser une véritable campagne de prévention sur un produit interdit… Au contraire du tabac, dont le prix augmente en même temps que le caractère anxiogène des photos utilisées sur les paquets. Résultat, les adolescents estiment la cigarette beaucoup plus dangereuse que le joint, considéré comme un produit «moins chimique» et même «naturel et bio», selon l’étude de l’Observatoire français des drogues, publiée mardi.
Ailleurs, de plus en plus de pays relèguent au second plan leurs pudeurs de gazelles pour faire place nette à la couleur de l’argent, qui a pour une fois une odeur, celle de ce nouvel or vert. Sous couvert de «consommation récréative», la Californie a légalisé depuis le 1er janvier et en attend cinq milliards de dollars de chiffres d’affaires en 2021. Avec taxes et retombées à la clef pour l’état le plus peuplé des Etats-Unis. Au Canada, la consommation n’est même pas encore légale mais l’un des plus gros producteurs du pays a annoncé mercredi le rachat de son concurrent pour 719 millions d’euros. Racheter de la drogue comme on vend une usine est une mauvaise publicité pour le législateur français. Mais elle renforce l’idée des usagers d’être en avance sur les lois.
Édito - Sur la question du cannabis, ce qu’Emmanuel Macron présente comme une évolution vertueuse n’est en fait ni disruptif ni même pragmatique. Bref, banalement conservateur.
Emmanuel Macron à l'Elysée, ce mardi. Photo Ludovic Marin. AFP
Alors qu’on s’oriente vers la mise en place d’une «contravention délictuelle» pour les consommateurs (lire Libédu 23 janvier), le chef de l’Etat passe à côté des enjeux sur un sujet qui n’a rien de mineur. En matière de santé publique et de prévention, dans un pays où 17 millions de personnes ont déjà expérimenté la résine ou l’herbe (1,4 million d’usagers réguliers, dont la moitié fume au quotidien, selon l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies). Mais aussi en matière de lutte contre l’insécurité et la criminalité inhérente au trafic, alors que les règlements de comptes sanglants endeuillent régulièrement des familles en régions parisienne, marseillaise ou grenobloise. Et que le «shitstème» est une nuisance quotidienne pour de nombreux citoyens.
Si la France reste arc-boutée sur le «maintien de l’interdit moral», le monde bouge. Outre-Atlantique, le cannabis thérapeutique est autorisé dans une trentaine d’Etats et l’usage récréatif est régulé dans une dizaine.
Chez nous, la loi de 1970 et plus largement la parole publique apparaissent de plus en plus décalées par rapport au réel. Alors que les tenants du statu quo de la prohibition dénoncent l’idéologie laxiste du camp d’en face, l’enjeu est pourtant bien d’élaborer des politiques publiques efficaces. Dans un contexte où l’échec de la «guerre contre la drogue», ici comme ailleurs, est patent.
Après l’Uruguay il y a quelques années, le Canada vient de lever l’interdiction au niveau fédéral et la légalisation y sera effective le 1er juillet. Avec, à la clé, entre 700 millions et 1 milliard de dollars de recettes fiscales. Jackpot aussi en Californie ou dans le Colorado, avec nombre de créations d’emplois et une baisse de la criminalité.
Pour éclairer le débat, il s’agit déjà de s’entendre sur les mots. Disons-le : tout ce qui s’apparente à une dépénalisation (et la contraventionnalisation s’inscrit dans ce processus) n’est qu’une demi-mesure qui peut, certes, changer le quotidien des consommateurs, mais sans remettre en cause les conditions illégales de la culture ou la vente du cannabis.
Dès lors, la seule option raisonnable est une légalisation encadrée. Le fort peu gauchiste think tank Terra Nova l’a d’ailleurs prônée dans un rapport en octobre 2016, appelant à la création d’une instance de régulation du cannabis sur le modèle de celle créée pour superviser la libéralisation du jeu en ligne. Objectif : «assécher le marché criminel d’un côté» et «prendre en compte un problème de santé publique de l’autre».
Ces dernières années, les appels de praticiens et d’élus locaux se sont en outre multipliés en faveur d’un changement radical de politique. Ancien médecin et à l’époque ministre du gouvernement Valls, Jean-Marie Le Guen, loin de la culture soixante-huitarde, avait de même plaidé pour «des mécanismes de légalisation contrôlée mais surtout avec des politiques d’éducation et de santé publique». Au nom d’«une approche sanitaire» alors que «la prohibition n’amène pas la diminution de la consommation [de cannabis]». Lors de la dernière présidentielle, Benoît Hamon fut le premier candidat socialiste à se prononcer en faveur d’une légalisation contrôlée. Un pragmatisme inaudible dans un contexte où l’idéologie a changé de camp.
CHRONIQUE - Loin de légaliser le cannabis, un récent rapport parlementaire préconise au contraire de continuer à le réprimer. Une attitude qui conduit à nourrir trafic et délinquance.
photo Drew Angerer/Getty Images/AFP
« Plaisante justice qu'une rivière borne ! Vérité au-deçà des Pyrénées, erreur au-delà. » Si l'on substitue l'Atlantique aux Pyrénées, la formule désabusée de Pascal donne une bonne idée de la situation actuelle s'agissant du cannabis. Alors que son usage récréatif est autorisé en Californie depuis le 1er janvier, portant ainsi à huit le nombre d'Etats américains ayant fait le choix d'une légalisation totale, notre pays est en train de prendre le chemin inverse, en développant son arsenal répressif. L'Amérique fume et la France s'étouffe.
Dépénalisation de fait
Le récent rapport parlementaire sur la « contraventionnalisation » du cannabis, loin de constituer une première étape vers la libéralisation, comme on a pu le lire, assume et empire la prohibition. Les rapporteurs constatent qu'il existe aujourd'hui une « dépénalisation de fait » : sur les 140.000 personnes interpellées chaque année pour avoir fumé un joint dans la rue, l'immense majorité écope d'un simple rappel à la loi.
Sans compter les innombrables cas qui, par nature, échappent aux statistiques officielles, où la police préfère fermer les yeux : qu'on me permette à ce sujet de partager un souvenir d'adolescence, où les agents ayant arrêté notre petite bande sur un trottoir parisien n'avaient trouvé comme tout élément suspect, après la fouille au corps, que mon carnet de vocabulaire d'allemand et nous avaient laissés partir en ricanant sur les bons élèves qui s'encanaillent.
Tolérance de bon sens
En proposant d'établir une amende de quelques centaines d'euros, les rapporteurs souhaitent mettre fin à cette tolérance de bon sens, fruit de décennies d'interactions entre des consommateurs qui ne font de mal à personne et des forces de l'ordre qui ont mieux à faire. L'hypothèse la plus brutale mais, hélas, la plus probable, portée par l'actuelle majorité parlementaire, consisterait à conserver le caractère délictuel (et donc la possibilité de la prison) ; une proposition plus progressiste est formulée par le jeune député (LR) Robin Reda, qui souhaite que la consommation de cannabis cesse d'être une infraction pénale.
Mais, dans les deux cas, les sanctions seraient en pratique renforcées et l'interdit moral réaffirmé. Comme toujours, les plus défavorisés seront les premiers à en pâtir : le bobo pourra continuer à fumer ses pétards à l'abri de son appartement lambrissé, tandis que les jeunes des quartiers se feront poursuivre dans les cages d'escalier.
Débat anachronique
Cet anachronique débat sur la contraventionnalisation repousse d'autant celui que nous devrions ouvrir sur la légalisation. On a épuisé depuis longtemps la litanie des arguments rationnels, que la plupart des responsables politiques admettent d'ailleurs en privé. Fondamentalement, je n'accepterai jamais l'idée de crime sans victime : je m'en tiens à l'excellente définition de notre déclaration des droits de l'homme, dont l'article 4 stipule que « la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ».
En ce sens, c'est la prohibition qui me semble criminelle, en nourrissant trafic et délinquance, tandis que la légalisation respecterait les choix personnels de citoyens adultes.
Mais sans même en appeler aux libertés individuelles, de simples considérations de santé publique devraient suffire à emporter la conviction : avec la légalisation vient la régulation, qui permet le contrôle du produit, la protection du consommateur et le déploiement de politiques de prévention (en particulier à l'égard des mineurs).
Sans compter les bienfaits de l'innovation dans un marché concurrentiel : les e-cigarettes au THC que j'ai pu tester au Colorado procurent le même effet relaxant sans le véritable poison qu'est la nicotine souvent contenue dans le joint. Et quand je vois l'hystérie qui se propage aujourd'hui sur les réseaux sociaux, je ne peux m'empêcher de penser qu'un usage raisonné du cannabis serait un bienfait pour le débat public.
Hypocrisie vertueuse
Mais puisqu'un régime qui se revendique pourtant « libéral » semble incapable de prendre à bras-le-corps un tel sujet de société, je plaiderai aujourd'hui pour le statu quo. Face à de mauvaises lois, la société a développé une forme d'hypocrisie vertueuse.
Les cinq millions de consommateurs annuels de cannabis ne sont, à de regrettables exceptions près, pas inquiétés par la police et encore moins par la justice. Avant de les reconnaître, voire de les dédommager comme c'est aujourd'hui le cas en Californie (où les licences de vente au détail sont réservées en priorité aux victimes de la prohibition !), laissons-les vivre.
Par Gaspard Koenig / philosophe et president du Think Tank Generation Libre
Source: lesechos.fr
Le maire (EELV) de Grenoble, Eric Piolle a appelle le gouvernement à revoir la proposition d'un rapport parlementaire de sanctionner les usagers de cannabis par une amende délictuelle ou une contravention. Il dénonce une approche du « tout sécuritaire ».
Éric Piolle, maire (EELV) de Grenoble et partisan de la légalisation du cannabis, a appelé lundi le président Macron et son gouvernement à abandonner les « vieilles recettes » du « tout sécuritaire ».
L'écologiste, à la tête d'une ville moyenne en proie à des trafics de drogue comparables à ceux de Paris, Lyon ou Marseille, a qualifié de « demi-mesure » la proposition d'un rapport parlementaire de sanctionner les usagers de cannabis par une amende délictuelle ou une contravention. La loi prévoit actuellement jusqu'à 3 750 euros et un an de prison.
« Cette mesure ne cherche pas à lutter contre les trafics. Or les trafics gangrènent nos villes, pourrissent la sécurité et la vie des habitants, avec un pendant de santé publique important », a dit M. Piolle.
« En pratique, ça serait une sorte de demi-mesure qui essaie juste de réguler la charge de travail de la police, voire d'améliorer le confort du client puisqu'il sait ce qu'il risque », a-t-il renchéri.
Approche « sécuritaire »
L'élu déplore surtout que l'on « reste dans une approche totalement sécuritaire, or cette stratégie est en échec, ici en France comme ailleurs »: « il ne faut pas que le président Macron et son gouvernent restent prisonniers de l'ancien monde en appliquant de vieilles recettes! ».
L'élu cite l'exemple du Portugal. « Au bout de presque 20 ans de légalisation, dit-il, ils ont réduit de moitié le nombre de toxicomanes et il y a un effet sur le trafic aussi ». « Les premiers chiffres qui émergent aux États-Unis dans les états qui ont légalisé montrent une baisse importante de la délinquance », ajoute-t-il.
Quant au procès en « banalisation » du cannabis fait aux partisans de sa légalisation, Éric Piolle rappelle que « la banalisation » existe de fait: « on a le record d'Europe des fumeurs de moins de 16 ans », dit-il, une situation imputable selon lui à « la politique des dernières décennies ».
« Il faut une solution moderne qui répondent aux enjeux de sécurité et de santé publique », a-t-il plaidé. Il demande d'ouvrir « vraiment le débat » et « pas uniquement aux amis de M. Macron et de M. Wauquiez », en allusion aux deux auteurs du rapport qui reste dans une « logique de prohibition totale ».
« Pendant qu'on ne fait rien, le monde des trafic se structure: à Grenoble, on trouve des offres d'emplois de guetteur passées sur Snapchat », affirme le maire.
Le président de la Fédération française d'addictologie regrette l'absence de débat entre autorités et professionnels de santé sur la question de la consommation du cannabis en France.
INTERVIEW lien audio
Ni dépénalisation ni législation : un rapport parlementaire remis mercredi prochain préconise de sanctionner les consommateurs de cannabis d’une simple amende, allant de 150 à 200 euros. Une solution qui ne répond pas au problème selon l’addictologue Amine Benyamina, président de la Fédération française d’addictologie. "C’est une réponse qui a sa propre logique. Le ministère de l’Intérieur a ainsi souhaité alléger le travail de ses administrés, mais ce n’est absolument pas la réponse que nous attendions du gouvernement", a regretté sur Europe 1 Amine Benyamina.
"Une question de santé et de société". D’après le rapport, cette mesure permettrait en effet de concentrer les efforts des forces de l’ordre sur le trafic de cannabis. Or, "la question du cannabis est une question de santé et de société, qui touche les jeunes. La France est championne (d’Europe) en matière de consommation de cannabis chez les jeunes", a rappelé le professeur, pour qui cela fait plus de 30 ans que les gouvernements repoussent le débat de la consommation de cannabis en France.
Pour un débat avec des professionnels. Amine Benyamina regrette qu’avec ce texte, "on a loupé l'occasion de vraiment poser la question du cannabis dans tous ses aspects", que ce soit de la qualité de la drogue consommée ou du profil du consommateur. Le président de la Fédération appelle ainsi à "un vrai débat, à la manière de celui pour la loi de bioéthique, avec des professionnels de santé, la justice, la police, les enseignants, etc.", assurant que "la France va devoir légiférer en urgence".
Source: europe1.fr
A lire aussi: France - Pas de contravention, sans dépénaliser l’usage de stupéfiants ! un retour sur la Mission d’information parlementaire de l'été dernier
POLITIQUE - Un rapport parlementaire, porté notamment par un député LREM, préconise de sanctionner les usagers de cannabis par une simple amende...
T.L.G.
Emmanuel Macron a prononcé un discours sur la justice, le 15 janvier 2018,
à l'occasion de la rentrée solennelle de la Cour de cassation.
— ludovic MARIN / AFP
Un rapport parlementaire préconise de sanctionner les usagers de cannabis par une simple amende.
Emmanuel Macron était resté flou sur la dépénalisation du cannabis pendant la campagne.
L'exécutif pourrait trouver une solution «d'entre-deux» sur ce sujet clivant.
« Dis donc, il y en a qui ne fument pas que des cigarettes. J’ai encore du nez… » En visite dans un quartier sensible de Guyane en octobre, Emmanuel Macron avait relevé une odeur de cannabis. Visiblement fin connaisseur, le chef de l’Etat s’était pourtant montré fluctuant sur ce dossier polémique pendant la campagne présidentielle.
Le président devrait de nouveau avoir à se pencher sur la question : un rapport parlementaire, présenté en commission des lois mercredi, préconise de sanctionner les usagers par une amende. Le texte, qui pourrait relancer le débat sur la dépénalisation, préconise deux solutions : une « amende forfaitaire délictuelle » comprise entre 150 et 200 euros assortie éventuellement de poursuites, et la simple contravention.
Macron flou sur la dépénalisation pendant la campagne
Le gouvernement ira-t-il jusqu’à supprimer le volet pénal ? Dans l’entourage du président, on botte en touche, renvoyant au programme : « La position d’Emmanuel Macron n’a pas dévié depuis la campagne. Notre objectif est de tenir nos engagements. C’est dans cette optique que la Garde des sceaux et le ministre de l’Intérieur sont engagés dans une réforme de la procédure pénale ». Mais voilà, pendant la campagne, le candidat Macron avait une fois de plus donné du « en même temps » sur cette thématique :
En septembre 2016, le presque-candidat expliquait que « la légalisation du cannabis a des intérêts [et] une forme d’efficacité ».
Dans son livre-programme Révolution, le candidat évoquait le régime des contraventions pour les petites quantités : « il faut écouter les professionnels [qui expliquent qu’il] est vain de pénaliser systématiquement la consommation de cannabis »
En février 2017 dans le Figaro, il disait cependant ne pas croire « à la dépénalisation des « petites doses » ni aux peines symboliques. Cela ne règle rien ».
Dans la foulée, plusieurs membres de l’équipe du candidat mettaient en avant un nouveau terme : la contraventionnalisation, c’est-à-dire la mise en place d’amende forfaitaire sans suite pénale pour les petites doses de cannabis. Une forme de dépénalisation qui ne disait pas son nom, donc.
« L’opinion française est relativement partagée sur le sujet »
Le gouvernement pourrait finalement opter pour une solution d’entre-deux : « L’amende forfaitaire permettra de mettre une amende mais aussi d’engager des poursuites judiciaires » contre les trafiquants, en gardant le volet pénal, a indiqué l’un des rapporteurs, le député LREM Éric Poulliat à l’AFP. Une solution louée ce dimanche par Bruno Le Maire.
Évoquée par François Hollande, Nicolas Sarkozy, et bon nombre de personnalités politiques, la dépénalisation est une arlésienne de la classe politique. Comment expliquer qu’une fois encore, l’exécutif semble marcher sur des œufs ?
« C’est un serpent de mer depuis vingt ou trente ans. Depuis longtemps, l’opinion française est relativement partagée sur le sujet. Notre enquête publiée en janvier dans l’Express montrait que 59 % des Français sont encore opposés à la dépénalisation des drogues douces comme le cannabis », relève Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l’Ifop. « Cela dit, le gouvernement ne devrait pas prendre beaucoup de risque dans l’opinion car c’est un sujet qui traîne depuis trop longtemps. D’autant que l’exécutif n’a pas franchi la ligne rouge de la dépénalisation et ne laisse donc pas beaucoup de marge de manœuvre pour les possibles accusations en laxisme venant des Républicains ou du FN », poursuit le sondeur.
« La proposition parlementaire pourrait permettre à Emmanuel Macron de trouver une forme d’entre-deux sur ce sujet explosif. Symboliquement, il ne s’agit pas d’une dépénalisation au sens strict mais une manière de changer les sanctions pour plus d’efficacité », abonde Stéphane Rozès, politologue et président de la société de conseil CAP. « Après Notre-Dame-des-Landes, tout signe qui montrerait un affaiblissement de l’Etat ne serait pas un bon signe pour l’exécutif ».
Les tests salivaires, en vigueur depuis août 2016, permettent désormais de suspendre automatiquement et immédiatement le permis d'un automobiliste ayant consommé des drogues, comme le cannabis. Reportage à Bordeaux.
Comme chacun le sait, il est interdit de conduire sous l'emprise de l'alcool (la limite autorisée étant de 0,5 g par litre de sang soit 0,25 mg par litre d'air expiré) mais également sous l'emprise de la drogue et notamment du cannabis. Afin de détecter la moindre trace de substances illicites chez les automobilistes, la mise en place de tests salivaires permet désormais, depuis la nouvelle législation d'août 2016, de sanctionner les fautifs directement et sans attendre une éventuelle prise de sang comme c'était le cas auparavant.
"Zéro tolérance !"
La procédure s'en trouve donc accélérée au grand dam des usagers qui auraient eu le malheur de consommer des drogues plusieurs heures avant de prendre le volant. C'est l'amer expérience qu'a fait Zino, le patron d'une petite entreprise bordelaise de dépannage, qui, pour un joint fumé la veille, a perdu son permis de conduire, son principal outil de travail. Lors d'un test salivaire positif au cannabis, ce dernier, qui s'est confié à l'un de nos journalistes, s'est ainsi vu notifier un retrait de permis par la gendarmerie. "Une fois qu'il (le gendarme) m'a fait le test, il m'a dit 'vous êtes positif'. Il m'a retiré le permis de suite et huit jours plus tard, j'ai reçu une lettre recommandé qui me dit que j'ai un retrait de 6 mois", nous explique-t-il. "Je ne sais pas quoi faire car maintenant je dois fermer mon entreprise à cause de ça" ajoute-t-il désemparé, des sanglots dans la voix.
Une sanction immédiate et exemplaire qui traduit la volonté étatique d'éradiquer ce genre de comportement sur la route. Le tout sans faire de distinctions entre un fumeur régulier ou un fumeur occasionnel et qu'importe si l'automobiliste n'est plus sous l'emprise des produits consommés quand survient le test, comme nous le confirme Michel Chouippe (Secrétaire adjoint du syndicat SGP Police de la Gironde).
"Il est évident que pour un fumeur occasionnel, si le joint a été fumé dans les 24 heures, le test sera positif. Sur le THC et d'autres drogues, à la différence de l'alcool où l'on a des barèmes avec des taux, c'est la présence et non pas le taux qui est important. C'est zéro tolérance !", nous confirme ainsi le fonctionnaire.
Notons qu'au-delà de la procédure administrative propre au permis de conduire, les contrevenants encourent également des poursuites judiciaires auxquelles s'ajoutent une amende de 4 500 euros.
Propos recueillis par Christophe Bernard à Bordeaux
Par Mathieu D'Hondt
Source: sudradio.fr
pour mémoire : France - Drogue au volant : tolérance zéro et nouveaux tests salivaires du 17 avril 2017
A LIRE AUSSI parce qu' il est essentiel de se défendre, de ne pas se résigner aux poursuites de conduite du fait de stupéfiants. CONDUITE SOUS L’EMPIRE DE STUPÉFIANTS, Pourquoi la contre-expertise
Les deux créateurs de la société Kanavape, qui commercialisait des vapoteuses au CBD, une molécule du cannabis, ont été condamnés par le tribunal correctionnel de Marseille.
Lors du procès, le 4 décembre, le parquet reprochait aux deux prévenus d'avoir "clairement positionné leur produit dans un champ médical.
afp.com/Joe Raedle
Ils ont quasiment écopé de la peine maximale. Ce lundi, les responsable de la société Kanavape ont été condamnés par le tribunal correctionnel de Marseille pour avoir commercialisé en France la première cigarette électronique au cannabidiol (CBD), une molécule du cannabis partiellement légale.
En décembre dernier, les juges du parquet de Marseille avaient requis dix-huit mois de prison avec sursis et une amende de 15 000 euros à l'encontre des deux responsables. Sébastien Beguerie, 33 ans, et Antonin Cohen, 31 ans, ont finalement été condamné à 18 et 15 mois de prison avec sursis, 10 000 euros d'amende et 5000 euros de dommages à verser au Conseil de l'ordre des pharmaciens qui s'était porté partie civile.
Ils ont été reconnus coupables de plusieurs infractions à la législation sur le médicament, mais ont été relaxés du délit de provocation à l'usage de stupéfiants. Leurs avocats ont annoncé leur intention de faire appel.
Du liquide d'e-cigarette au CBD, mais sans THC
Ils avaient lancé leur cigarette électronique, dont ils vantaient la qualité de "première vaporisateuse thérapeutique 100% légal, déstressante et relaxante", en 2014. Elle fonctionnait avec une huile de chanvre composée de CBD, mais dépourvue de tetrahydrocannabinol (THC), la molécule aux effets psychotropes. Les deux hommes ont toujours affirmé la légalité de leur produit, le Kanavape, dont le lancement avait été annoncé en 2014 après une consultation d'avocats spécialisés.
Face à la volonté de la ministre de la Santé de l'époque Marisol Touraine de prononcer son interdiction, la distribution de Kanavape avait été suspendue avant même son lancement. En janvier 2015, l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) avait mis en garde les promoteurs de cette cigarette électronique, leur produit pouvant recevoir la qualification de médicament, avant de changer d'avis en juillet 2016. Elle avait alors estimé que Kanavape n'en était pas un, mais était un simple objet de consommation courante. Cette cigarette électronique avait finalement été très peu distribuée.
CBD, légal ou pas légal, le flou juridique continue
Kanavape a fait l'objet de nombreux contrôles et "personne ne l'a interdite", a souligné Me Ingrid Metton, avocate de Sébastien Beguerie. "Le tribunal sanctionne pénalement un produit qui n'a pas été reconnu illégal" par les autorités publiques, a également déploré Me Matthieu de Vallois, défenseur d'Antonin Cohen. "On a été à l'avant-garde, on nous a pris pour cible car quand on est pionnier, on paie les pots cassés", a déclaré Sébastien Beguerie qui s'est dit "dérouté par ce jugement".
Lors du procès, le 4 décembre, le parquet reprochait aux deux prévenus d'avoir "clairement positionné leur produit dans un champ médical, en faisant notamment le lien entre Kanavape et l'Union francophone pour les cannabinoïdes en médecine" (UFCM), association oeuvrant pour la reconnaissance de l'usage médical du cannabis. "Ces faits demeurent graves car ils touchent à la santé publique et banalisent la consommation de stupéfiants", avait-il insisté.
INFO RMC - Dans son livre-programme paru l'an dernier, Emmanuel Macron, se disait favorable à la dépénalisation du cannabis. Depuis, le chef de l'Etat a revu ses positions et le gouvernement s'apprête à trancher pour une solution d'entre-deux.
Photo Yohanne Lamoulère pour Libération
Dans son livre-programme paru fin novembre 2016, Emmanuel Macron se prononçait en faveur d'une dépénalisation du cannabis. Puis, en février dernier, premier recul, il se disait favorable à une "contraventionnalisation", soit une simple amende contraventionnelle, dans tous les cas, sans possibilité de renvoyer devant le juge un petit usager de cannabis, sans risque de prison.
Le gouvernement s'apprête finalement à trancher pour une solution d'entre deux: l'amende forfaitaire à caractère délictuel.
Concrètement, face à un usager de cannabis, les forces de l'ordre décideront soit de lui mettre une amende, soit de l'envoyer devant le juge comme c'est le cas aujourd'hui s'il est en situation de récidive ou s'ils le soupçonnent d'être un trafiquant.
Vers une amende "autour de 150 euros"?
Le montant de cette amende pourrait être d'un montant "autour de 150 euros" a préconisé le député LR Robin Reda, corapporteur de la mission d'information sur les stupéfiants.
"C'était la proposition du président Sarkozy à l'époque, c'est ce qu'Emmanuel Macron avait mis dans son programme et c'est ce sur quoi le gouvernement tente de reculer par peur d'affronter ce débat", juge-t-il.
Robin Réda s'est aussi prononcé pour le "maintien de l'interdit" de la consommation de cannabis. "Qui est l'ennemi de la société: le lycéen qui fume un joint à la sortie du lycée pour impressionner les copains, la famille qui utilise du cannabis pour soigner son gamin atteint de crises d'épilepsie ou est-ce que ce sont ceux qui nourrissent un trafic et un marché noir? C'est contre les trafiquants qu'il faut mobiliser la police et la justice", a-t-il expliqué.
Jean-Baptiste Durand (avec P.B.)
Vidéo : Le député LR Robin Reda, corapporteur de la mission d'information sur les stupéfiants
Sur le même sujet: France - Pas de contravention, sans dépénaliser l’usage de stupéfiants !
Source: rmc.bfmtv.com
Au mois de décembre, la douane a inspecté une boutique montpelliéraine de produits naturels à base de chanvre. Dans le stock, un carton de 2 500 graines de cannabis. Après analyse, il s'avère que la marchandise est légale.
Au cours du mois de décembre, les douaniers décident de se rendre dans la boutique de Romain et Aurélien dans le quartier Saint-Denis à Montpellier. Les deux hommes vendent des produits à base de chanvre mais aussi des graines de cannabis.
Celles-ci, provenant des Pays-Bas sont automatiquement inspectées par la douane. Oui mais voilà, il s'avère que leur détention n'est pas illégale... Après analyses effectuées, il est démontré que les graines ne contiennent pas ou très peu de THC, une substance interdite en France. Du coup, et c'est très rare, la marchandise doit être restituée.
Des graines destinées aux collectionneurs
"Mes clients ont pris toutes les précautions consistant à s'interroger sur la teneur de leurs produits en effet psychotrope et elle est nulle", affirme l'avocat Me Martinez.
Même s'il n'existe pas d'effet psychotrope dans les graines, une fois cultivée, la plante pourrait contenir un taux élevé de THC. Selon les deux responsables de la boutique ces boites contenant les graines de cannabis, vendues entre 15 et 150 euros, sont destinées uniquement à la vente... pour des collectionneurs.
Est-ce un hasard si, tandis que l’Observatoire français des drogues et de la toxicomanie (OFDT) publie son rapport annuel toujours plus accablant pour ce qui est de la politique française des drogues, l’Office centrale de répression du trafic illicite de stupéfiants (OCRTIS) annonce, elle, des saisies records de cannabis en ce mois de décembre ?
Pas moins de 11 tonnes de résine auraient ainsi été interceptées par la vénérable institution policière elle-même impliquée dans l’une des plus rocambolesque affaire de corruption connue à ce jour.
S’agirait-il là d’une nouvelle manœuvre visant à occulter les minables résultats d’un dispositif répressif n’ayant jamais atteint ses objectifs sauf s’il s’agissait de dynamiser le crime organisé. Jamais celui-ci n’a autant prospéré, appuyé désormais par tout un panel de milliers de petites mains employant les outils que la technologie numérique met désormais leur disposition, leur permettant d’assurer la fourniture des millions d’usagers que compte notre pays.
En à peine 10 ans, nous sommes passés du vulgaire deal de rue au « four » ces véritables centres commerciaux des drogues où peut venir s’approvisionner tout un chacun. Des lieux bien connus d’une police impuissante, extrêmement bien organisés aussi et dont les « gérants » semblent n’attendre qu’une réforme de la loi pour mener leur activité en toute légalité.
Un simple coup de fil permet dorénavant de commander les substances de votre choix, en toute quiétude, livrées à domicile en scooter. La banalisation de ce négoce est telle que la plupart des revendeurs propose cartes de fidélité et autres « petits cadeaux » aux client(e)s les plus régulier(e)s. Un commerce s’apparentant à un service, délivré par une multitudes de « start-up » dédiées à cette filière. La vente sur Internet à travers le « Dark Web » demeure, elle, anecdotique. Dénoncée dans les médias, elle ne sert que d’outil de propagande pour stigmatiser ce qui reste de libre sur le réseau numérique mondial.
Ces saisies records ne peuvent nous faire oublier le formidable échec de la prohibition que certain(e)s persistent cependant à soutenir. Il en est ainsi du gouvernement de notre sémillant Président qui, plutôt que de suivre la voie du téméraire Premier Ministre Canadien, M. Justin Trudeau, a décidé de confier au très sécuritaire Ministre de l’Intérieur, un domaine dévolu normalement à celui de la Santé. Joli coup de pression opéré par les services judiciaires, policiers et militaires à l’occasion d’une autre imposture, la prétendue « mission d’information parlementaire relative à l’application d’une procédure d’amende forfaitaire au délit d’usage illicite de stupéfiants » pour laquelle les associations d’usagers et autres acteurs de la réduction des risques, ont été écoutés sans pour autant être entendus courant septembre.
Cette mainmise des forces de l’ordre est d’autant plus préoccupante que celles-ci ne devrait avoir d’autre rôle que d’appliquer le Droit et non d’en débattre. Leur témoignage est précieux certes, mais à bien y réfléchir, il n’a d’intérêt que pour souligner le naufrage du système répressif en place, son incapacité à juguler l’offre et la demande de stupéfiants. Leur avis est en cela purement anecdotique et ne devrait par conséquent pas interférer dans un débat n’intéressant que la santé et les libertés publiques. Il n’en est pourtant rien, ce que l’ensemble des organisations antiprohibitionnistes déplorent.
En attendant, ce sont toujours les mêmes qui trinqueront, les jeunes que l’État prétend protéger tout en encourageant leur stigmatisation à coup de contrôles policiers incessants menant parfois à de retentissantes bavures. Des jeunes des quartiers populaires le plus souvent, principalement issus des « minorités visibles ». Pas un mot sur les millions de cannabinophiles intégrés, de tous âges et de toutes catégories socio-professionnelles. Cette multitude d’individus invisibles aux yeux des autorités mais qui constituent cependant la principale substance du peuple de l’herbe.
Viendra bien un jour où les Droits et les libertés individuelles prévaudront sur une approche morale anachronique complètement dépassée. Mais malgré cette évidence, il faudra faire preuve d’un courage politique à toute épreuve tant le terrain est minée depuis près d’un siècle de « guerre à la drogue ». Un déminage que seul un débat serein, exempt de passion et d’irrationalité, peut apporter. Mais encore faudrait-il que les croisé(e)s de ce dogme, bien que dépourvus d’argumentation raisonnable, ne viennent le polluer avec leurs habituels messages anxiogènes.
À suivre donc…
C’est une pratique qui, bien que légale en Espagne, est totalement interdite en France. Il n’empêche que les observateurs voient l’émergence, ces dernières années, de Cannabis Social Club dans la Ville rose. C’est en tout cas ce que révèle une étude menée par l’antenne toulousaine de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT).
Guillaume Sudérie, auteur de cette étude, explique à Actu Toulouse :
"On constate que de petits producteurs se mettent en coopérative pour produire du cannabis."
Comme un jardin partagé
Le principe de ces Cannabis Social Club est assez simple : à la manière d’un jardin partagé, ses membres cultivent les stupéfiants pour leur propre consommation et pas au-delà. Cependant, à Toulouse, la production ne se limiterait pas aux cercles des seuls consommateurs, mais serait revendue.
L’herbe passe devant la résine
Le cannabis a toujours été très présent dans la Ville rose. Et l’est encore. C’est cependant l’herbe qui aurait désormais la préférence des consommateurs, et non plus la résine. C’est une première à Toulouse. L’observateur l’affirme : « Jamais sur le site (Toulouse, ndlr), les observateurs n’avaient fait ce constat ». Ici, la résine est vendue 6 euros et l’herbe 8 euros par gramme, c’est moins cher qu’au niveau national.
Des Cannabis Social Club à Toulouse ?
Autre nouvelle pratique : l’émergence souterraine de systèmes qu’on pourrait comparer à des Cannabis Social Club. Les membres de ces « clubs » gèrent généralement seuls la production et la distribution de cannabis pour leurs propres besoins et non au-delà, sans en faire commerce. On pourrait comparer cela à un jardin partagé, dont les produits ne pourraient aller qu’à destination de ses jardiniers. C’est une pratique qui est illégale en France, mais qui est autorisée dans la Catalogne voisine par exemple.
À Toulouse, note l’ORSMIP, ces « apprentis producteurs » peuvent, grâce à la la mutualisation de leur matériel de production, « cultiver des quantités relativement importantes de cannabis ». Ces producteurs ne se limiteraient cependant pas au cercle fermé des producteurs… L’observatoire précise :
Une priorité des autorités
Toujours est t-il que la drogue reste interdite en France, tant sa production, sa vente ou sa consommation. Et la lutte à son encontre est une priorité des autorités. Arrivé en septembre 2017 à la tête de la sûreté départementale, le nouveau commissaire Karim Fillali le confirmait à Actu Toulouse. Quelques mois plus tôt, c’était le procureur de la République à Toulouse, Pierre-Yves Couilleau, qui annonçait sa volonté d’agir dans ce domaine. À suivre…
En 2000, le Portugal a décriminalisé la consommation individuelle de toutes les drogues. 17 ans plus tard, les résultats sont concluants.
lien vidéo
Du cannabis à la cocaïne en passant par l’héroïne, toutes ces drogues sont autorisées au Portugal. En 2000, à rebours du reste du monde, le pays lusophone a dépénalisé l’achat, la détention et l’usage de stupéfiants pour la consommation individuelle. Le trafic reste toutefois interdit, mais les consommateurs de drogues sont désormais considérés comme des malades plutôt que des criminels.
Aider et accompagner plutôt que sanctionner
Cette politique unique s’explique par l’histoire du Portugal. En 1973, à la fin de la dictature, le pays devient une plaque tournante du trafic international avec l'ouverture des frontières. Le nombre de consommateurs explose malgré la mise en place de politiques répressives. A la fin des années 90, près d’1% des Portugais étaient accros à l'héroïne et le pays avait le record de morts du SIDA liés à la drogue dans l’Union européenne. La lutte contre la toxicomanie est alors devenue la préoccupation principale des Portugais.
Pour João Goulão, directeur de l’Institut des drogues et de la toxicomanie, « la classe moyenne, la classe aisée, les gens ont commencé à dire “mon fils n’est pas un criminel, c’est quelqu'un qui a besoin d’aide“. » Dos au mur, la société portugaise s’est mise à considérer la toxicomanie comme une maladie à soigner, plutôt qu’un crime à punir. Selon João Goulão, « le plus important, c’est la relation que le sujet entretient avec la substance et non la substance elle-même. »
L’usage de drogue a fortement diminué
Alors en 2001, une nouvelle politique est mise en place. Le système de santé public prend dorénavant en charge gratuitement les toxicomanes. Avec le recul, l’expérience est un succès. Aujourd’hui, le Portugal compte 50 000 heroinomanes, c’est deux fois moins qu’en 1999. Le taux de décès liés à la drogue a chuté, il est cinq fois plus faible que la moyenne de l’Union Européenne. Quant au taux de nouvelles infections au VIH, il a été divisé par 18 en 11 ans.
Néanmoins, le trafic de drogue reste illégal, et pour la police, il est parfois difficile de différencier dealers et toxicomanes.
Le «joint» électronique «apparaît comme légal» , affirme le ministère de la Santé
Le ministère de la Santé estime que les cigarettes électroniques au dérivé du cannabis CBD bénéficient d’une dérogation à la législation. Des contrôles vont néanmoins être lancés.
C’est un véritable coup de tonnerre… Alors que l’agence du médicament se positionnait clairement, mardi dans nos colonnes, sur l’interdiction de e-liquides au cannabidiol (CBD), une molécule du cannabis, en vente partout, le ministère de la Santé, lui, prend la position inverse. Selon lui, ce composant ajouté à certains liquides, carburant de la cigarette électronique, « apparaît comme légal ». Le ministère explique qu’il s’agit d’une dérogation à la législation.
En France, la détention, la fabrication, le transport de cannabis et de ses dérivés dont le CBD ne sont pas autorisés. Mais… la commercialisation de variétés de cannabis, dépourvues de propriétés stupéfiantes, peuvent l’être, ce qui est le cas du cannabidiol. En effet, le cannabis contient un cocktail de molécules. Contrairement à son principe actif le THC, le CBD joue sur la vigilance mais ne provoque pas d’effets de défonce. Le ministère met toutefois des conditions à cette utilisation. Ces produits qui connaissent un succès fulgurant depuis l’été, en ligne et dans les magasins de cigarettes électroniques, doivent être réservés exclusivement au vapotage. Obtenus par extraction, ils ne doivent pas contenir, non plus, une teneur en THC supérieure à 0,2%. Ce qui est déjà le cas selon les fabricants et les vendeurs.
Des contrôles mis en place
Enfin, les professionnels n’ont pas le droit de présenter le cannabis sous « un jour favorable », sinon ils peuvent être poursuivis. Le ministère a saisi l’Agence du médicament (ANSM) et la Répression des fraudes pour mettre en place des contrôles. Objectif : faire respecter ces conditions. Mais de nombreuses questions restent en suspens. Quels sont les effets du CBD ? Le ministère reste vague : « Ses effets psychoactifs sont encore mal connus, bien qu’on lui prête des effets sédatifs ». Dans les magasins électroniques, certains vendeurs présentent le CBD comme un anti-stress, utile aussi contre les douleurs et l’insomnie. Qu’en est-il vraiment ? La revue scientifique « Le Courrier des addictions » indique que dans le cadre d’expérimentations, il réduirait l’anxiété. Mais ces essais cliniques ne concernent pas les e-liquides. « Sous cette forme, rien n’est prouvé », rappelle la Mildeca, la mission interministerielle de lutte contre les drogues.
Ce n'est pas un substitut
D’autres vapotent aussi du CBD pour arrêter leur consommation de cannabis. Sur ce point, l’agence du médicament rappelle qu’il ne peut absolument pas être considéré comme un substitut. « C’est extrêmement grave, dangereux et archifaux ». Laurent Karila, psychiatre à l’hôpital Paul-Brousse, à Villejuif, spécialiste des addictions, reçoit certains de ces patients en consultation. « On sait que cette molécule a des propriétés tranquillisantes mais on ne peut pas la recommander, on n’a pas assez de recul médical », indique-t-il. Il se dit inquiet par l’apparition de ces produits à des dosages très variés, de 30 mg à 1000 mg.
10 % du chiffre d’affaires en quelques semaines
Selon Olivier, le responsable du Petit Fumeur, « Une personne qui vapoterait du 1000 mg pour la première fois se prendra une sacrée claque, je ne vous le cache pas ». Il le rappelle les boosters, en vente, ne doivent pas être considérés comme des e-liquides mais ils doivent être dilués. Profitant du flou juridique qui demeurait jusqu’à présent, ce marché du CBD est devenu une véritable manne financière. « Ces produits, commercialisés en septembre, représentent aujourd’hui près de 10% de notre chiffre d’affaires ».
Et le site du Petit Fumeur compte bien en profiter. « Ah oui, autant que possible. Si je peux être numéro 1 sur le marché... ». Cdiscount, lui, a choisi de faire marche arrière : le site nous a annoncé mardi qu’il allait retirer de sa plateforme les produits au CBD « non-repérés » par leur robot. Celui-ci ne décèle que le mot « cannabis » et non « cannabidiol ». « Les vendeurs, qui ont mis en ligne ces fioles, seront bannis », précise, intransigeant, Cdiscount.
Intensification de la lutte contre la cannabiculture : fermeture d’un commerce rennais proposant du matériel de jardinage utilisé dans la culture « indoor » de plants
Fin septembre 2017, deux gérants et sept vendeurs d’une chaine de magasins de jardinage d’intérieur ont été interpellés par la gendarmerie de Rennes. Leur enseigne de vente d’outils de jardinage proposait à la vente du matériel pouvant servir à cultiver des plants de cannabis. Dans un contexte de banalisation de la pratique, la MILDECA revient sur la vente détournée de ce type de matériel pouvant être utilisé pour la cannabiculture.
Dans le cadre de récentes directives de lutte contre la cannabiculture émises par la Direction Générale de la Gendarmerie Nationale (DGGN), la gendarmerie de Rennes a initié une enquête sur un commerce rennais qui a permis l’interpellation d’individus impliqués dans la vente de matériel de culture de cannabis. Ils prodiguaient des conseils pour la culture de plants en échange d’une rémunération à l’issue de la récolte.
Ainsi, 800 000 euros d’avoir criminels ont été saisis et la fermeture définitive de quatre commerces de vente de matériel de jardinage indoor a été prononcée. Les deux dirigeants des enseignes ont quant à eux été mis en examen pour incitation à la culture de cannabis. De plus en plus, les enquêteurs s’intéressent à ces commerces de type « grow shop » fréquentés par les cannabiculteurs. Accroissement des pratiques d’auto culture du cannabis en France
En 2010, plus de 80 000 personnes âgées de 18 à 64 ans, ayant consommé du cannabis dans l’année avaient déclaré se le procurer en ayant uniquement recours à l’autoculture (sources OFDT).
Sur les cinq dernières années, les saisies d’herbe de cannabis issue de la culture en intérieur (indoor) ou en extérieur (outdoor) ont fortement progressé en France métropolitaine et outre-mer. En effet, 55 000 pieds ont été saisis en 2010 contre 125 000 en 2016, soit une hausse de 127 %. Dans près de 95 % des affaires réalisées en métropole, les plantations ont été découvertes indoor et les autocultures de « petite taille » (moins de 10 pieds) sont majoritaires (sources OCRTIS).
L’essor important ces dernières années, de saisies de cannabis issues des pratiques d’autoculture montre la nécessité d’une stratégie de lutte adaptée. C’est pourquoi la MILDECA soutient le ministère de l’Intérieur dans une démarche de lutte contre ce type de trafic, notamment par le biais de l’intensification des moyens d’actions.
Ce que dit la loi Le cannabis est un produit stupéfiant. L’article 222-35 du code pénal dispose que sa culture est considérée « comme un acte de trafic grave dont la peine peut aller jusqu’à vingt ans de réclusion et 7 500 000 euros d’amende quelle que soit la quantité ».
Le cannabis est trop bon marché. Invitée aux Journées de l’économie de Lyon, la professeure de la Toulouse School of Economics Emmanuelle Auriol défend sa légalisation, notamment pour contrôler l’offre.
Les Français sont les plus gros fumeurs de cannabis d’Europe (avec les Tchèques). Parce que l’offre et les prix sont contrôlés par les mafieux, qui sont trop nombreux et se font trop de concurrence, selon l’économiste Emmanuelle Auriol.
Interrogée dans le cadre des Journées de l’économie 2017, elle explique dans L’Autre Direct (vidéo ci-dessous) les raisons économiques qui justifient la légalisation de ce stupéfiant. D’ailleurs, Emmanuelle Auriol n’a jamais rencontré d’économistes qui y soient opposés.
Le médecin de santé publique Nicolas Prisse s’oppose à la légalisation du cannabis. Y compris pour des raisons économiques. Pour le président de la Mildeca, c’est la prévention qui compte, notamment pour les mineurs.
Pour répondre aux économistes qui la défendent, telle Emmanuelle Auriol (entretien vidéo ici), Nicolas Prisse, qui préside la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca), lance : “Le cannabis n’est pas un produit du marché.”
Pour le médecin de santé publique, “les personnes qui consomment du cannabis ne sont pas dans une rationalité économique, comme quand on va faire ses courses au supermarché, parce que ce sont des personnes dépendantes”. Autre argument développé par Nicolas Prisse dans l’entretien vidéo à visionner ci-dessous : la légalisation ne régulerait pas la consommation des mineurs. “C’est la prévention qui compte”, répète le médecin.
Pas de contravention, sans dépénaliser l’usage de stupéfiants ! C’est en substance ce qui pourrait ressortir en une formule des conclusions d’un rapport honnête et franc vis-à-vis de l’opinion publique et des projets du gouvernement.
Depuis le 2 août, une Mission d’information parlementaire relative à l’application d’une procédure d’amende forfaitaire au délit d’usage illicite de stupéfiants se réunit régulièrement. Quelques médias s’en sont fait l’écho. Comme par exemple l’article de Louise Fessard sur Médiapart (réservé aux abonnés), il est intéressant de lire l’article de La Croix du 12 septembre reproduisant les propos de Julien Morel d’Arleux, directeur de l’OFDT devant la Mission parlementaire qui l’auditionnait.
Deux jours plus tard, une table-ronde réunissait plusieurs organisations dont on retiendra cette intervention du représentant de NORML France :
Il va sans dire que l’objet de cette Mission parlementaire n’a pas d’autre but que de rajouter un gros tuyau -une forme de racket des usagers de cannabis- dans l’usine à gaz répressive qui depuis 1970 tient lieu de politique de santé publique. Mais avec l’optimisme que suscite une « assemblée renouvelée et rajeunie » comme le soulignait le président de Cannabis Sans Frontières, il n’est pas interdit de penser qu’au pays de Descartes et Pascal, la raison et le génie l’emporteront bientôt pour sortir de l’obscurantisme.
Pour retrouver le programme de la Mission d’information et les enregistrements vidéos des auditions publiques :
Audition du général Pierre Sauvegrain, adjoint au directeur des opérations et de l’emploi / Audition de M. Emmanuel Barbe, délégué interministériel à la sécurité routière : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.4870280_59afa0d3be435.usage-illicite-de-stupefiants–general-pierre-sauvegrain-6-septembre-2017
Audition de M. Rémy Heitz (directeur des affaires criminelles et des grâces), M. Pierre-Mathieu Gaite (rédacteur au bureau de la politique pénale générale) et Mme Soizic Iroz ((DACG du ministère de la Justice) : / http://videos.assemblee-nationale.fr/video.4871097_59aff6539899d.usage-illicite-de-stupefiants–auditions-diverses-6-septembre-2017
Audition de M. Michel Delpuech (préfet de Police de Paris), de M. Thierry Huguet (chef d’état-major à la Direction régionale de la Police judiciaire), et de Mme Valérie Martineau : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.4871569_59b0f3187ed51.usage-illicite-de-stupefiants–auditions-diverses-7-septembre-2017
Audition de M. Julien Morel d’Arleux (dir de l’OFDT) et de Mme Ivana Obradovic / Audition de M. Nicolas Prisse (pdt de la MILDECA), de Mme Fanny Huboux, et de Mme Charlotte Defremont / Audition de Mme Katia Dubreuil (Syndicat de la magistrature) et Mme Anaïs Vain : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.4874179_59b78e00d68eb.usage-illicite-de-stupefiants–auditions-diverses-12-septembre-2017
Audition de M. Jean-Paul Jean, professeur associé à l’Université de Poitiers, pdt de chambre et dir du service de documentation, des études et du rapport de la Cour de cassation : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.4876001_59b7ce86f0c02.usage-illicite-de-stupefiants–m-jean-paul-jean-pdt-de-chambre-a-la-cour-de-cassation-12-septembre-2017
Audition de M. Jean-Pierre Couteron, président de la Fédération Addiction / Audition de Mme Christine Lazerges, pdte de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), et de Mme Cécile Riou-Batista, sec. gén. adj. / Table ronde réunissant des associations d’usagers du cannabis (ASUD, Cannabis Sans Frontières, CIRC, NORML France, techno+) : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.4888994_59ba751dadf4b.usage-illicite-de-stupefiants–auditions-diverses-14-septembre-2017
Audition de M. Nicolas Simon, pdt de l’Association nationale de prévention contre l’alcoologie et l’addictologie (ANPAA) et de M. Bernard Basset, vice-pdt de l’ANPAA : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.4904121_59ca3fa37fc64.usage-illicite-de-stupefiants–auditions-diverses-26-septembre-2017
Audition M. Alain Blanc (vice-président de l’Association française de criminologie) / Audition de M. Jean de Maillard (secrétaire général adjoint de FO) et Mme Michelle Guillo (Syndicat des magistrats, FO) / Audition de M. Benoît Vallet (dir. gl de la santé), Mme Magali Guegan, et M. Pierre-Yves Bello : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.4923087_59cca2cb59a4a.usage-illicite-de-stupefiants-auditions-diverses-28-septembre-2017
Audition de M. Vincent Le Beguec (chef de l’OCRTIS) / Audition de Mme Françoise Mathe et Mme Clotilde Lepetit / Table ronde réunissant des syndicats de gradés et gardiens de la paix de la police nationale (Unité SGP police – FO, UNSA Police, Alliance Police nationale) / Table ronde réunissant des syndicats d’officiers de la police nationale (SCSI, Synergie Officiers) / Table ronde réunissant des syndicats de commissaires de la police nationale (SICP, CSPN) : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.4926262_59ccea8918eaf.usage-illicite-de-stupefiants–auditions-diverses-28-septembre-2017
Audition de M. Jacky Coulon, secrétaire national de l’Union syndicale des magistrats (USM) / Audition de M. Serge Lebigot, président de l’association Parents contre la drogue, et de M. Guillaume Jeanson, avocat : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.4932187_59d232e506476.usage-illicite-de-stupefiants–auditions-diverses-2-octobre-2017
Audition de M. Paul-André Breton, Premier président de la Cour d’appel de Rouen : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.4933013_59d25fe609b70.usage-illicite-de-stupefiants–m-paul-andre-breton-2-octobre-2017
Audition de M. Bernard Leroy, rapporteur de l’Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) / Audition de M. Christophe Mackowiak (vice-président de la Conférence nationale des présidents de tribunaux de grande instance, président du tribunal de grande instance de Versailles) et de de M. Ollivier Joulin (président du tribunal de grande instance de Rennes) : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.4951619_59d4ee0fbcc1c.usage-illicite-de-stupefiants–auditions-diverses-4-octobre-2017
Audition de Mme Ruth Dreifuss, présidente de la commission globale de politique en matière de drogues, M. Michel Kazatchkine, membre et M. Khalid Tinasti, sec. exécutif : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.4959426_59d6020513b44.usage-illicite-de-stupefiant–commission-globale-de-politique-en-matiere-de-drogues-5-octobre-2017
La transformation du délit d’usage illicite de stupéfiants » en simple PV dissimule la volonté de faire porter un peu plus le poids de la répression sur les plus vulnérables.
Nous représentons les drogués ! Oui, c’est possible et c’est même légal. Nous sommes à des titres divers engagés, parfois depuis de longues années, dans une joute publique pour faire reconnaître comme légitime le droit de se droguer, un peu , beaucoup et même à la folie si le cœur nous en dit.
En France, il existe de nombreuses associations[1] qui défendent l’idée iconoclaste que la consommation de drogues est légitime au regard des libertés individuelles tout en dénonçant une prohibition- le mot est lâché- attentatoire aux droits des gens, car directement responsable d’une cascade de fléaux à la fois sanitaires économiques et sociaux. L’idée n’est pas nouvelle et surtout de plus en plus partagée. La longue liste des pays réformateurs en matière de drogues ne cesse de s’accroitre. Des Etats Unis au Canada, de l’Uruguay au Portugal, ce qui relevait hier de l’utopie soixante-huitarde devient aujourd’hui une option étudiée par des experts internationaux dépourvus de toute fantaisie.
Oui l'usage de drogues, à commencer par le cannabis, pose la question de la légitimité morale d'un phénomène qui relève intéresse le marché à défaut des cours de justice et la guerre à la drogue résonne symétriquement comme un air désuet chanté par l'"ancien monde".
Et en même temps …
C’est donc dans ce contexte plutôt favorable à nos idées que l’annonce nous a cueilli au retour de congés comme un dernier rayon de soleil estival: le gouvernement planche sur un projet de contraventionalisation des sanctions prévues par l’article L. 3421-1 du code de la santé publique qui criminalise l’usage de stupéfiants. La contravention c’est un peu la tape sur les doigts en lieu et place des coups de ceinture.
Tout un chacun est amené à payer une amende après avoir brûler un feu rouge ou s’être abstenu de déclarer au cadastre la construction d’une cabane de jardin. Plus de prison donc, ni surtout de gardes à vue humiliantes, de contrôles musclés sources de tensions multiples entre la police et la jeunesse française. La nouvelle ayant filtrée via l’interview du Ministre de l’Intérieur, nous étions plutôt intéressés par une annonce que l’on pouvait déposer dans la balance humaniste du double plateau « en même temps » qui régit notre vie publique depuis le triomphe du parti « et de droite et de gauche ».
Une bonne nouvelle n’arrivant jamais seule, la commission parlementaire constituée ad hoc au cœur du mois d’août a spontanément répondu favorablement à nos demandes d’audition, une attitude qui tranche avec les habitudes du passé où la voix des principaux intéressés que nous sommes n’est que rarement prise en compte par le Prince ou ses conseillers. Hélas, la découverte des détails du projet gouvernemental nous a fait déchanter au point même que l’apparence de libéralisme qui enveloppe cette marchandise proposée subrepticement ressemble furieusement à de l’arnaque, à du plâtre ou du glucose, bref à ce que l’on appelle communément une carotte !!!
Si l’on prend la peine d’analyser à froid le projet tel qu’il figure dans les dossiers de la mission parlementaire il revient à creuser l’écart entre les usagers selon qu’ils appartiennent à la classe des puissants ou à celle misérables .
Monopolice
En fait, il n’est nullement question de toucher à la sacro-sainte loi de 1970 qui régit en France la délicate question de l'usage de stupéfiants. Les députés Eric Poulliat (REM) et Robin Reda (LR), rapporteurs de la commission, nous ont clairement indiqué que leur feuille de route était réglementaire plutôt que pénale.
En clair l'hypothétique contravention ne vient pas remplacer le délit d'usage, mais s'ajouter au millefeuille juridique déjà conséquent qui prétend faire le bonheur des usagers de drogues. Second point, sur le terrain l'idée est de permettre aux policiers d'extraire arbitrairement certains consommateurs de la procédure, sans pour autant abolir le délit. Finalement, du point de vue des usagers, le gain effectif reste maigre voire inexistant, au regard des pratiques judiciaires actuelles qui généralisent déjà les peines de substitution (travaux d’intérêt général, injonction thérapeutique etc…) en matière de simple usage de stup.
En l'état, le mot-clé c'est "police" en lieu et place de celui de "justice". En déplaçant le curseur du Garde des Sceaux vers la Place Beauveau, la "contraventionalisation" fait du policier, le maitre de votre destin. Aujourd’hui vous avez déjà toutes les chances d'échapper à une sanction si vous répondez aux bons critères de faciès et de profil social, mais tout cela reste de l'ordre du tacite, de l’informel . En vous laissant "filer " le policier magnanime ne s'appuie sur aucun réglement mais se conforme à une pratique. La multiplication de situation de ce genre pose évidemment un problème pour le gouvernement quel qu’il soit. La loi n’est pas ou peu appliquée, mais il reste que la répression de l’usage est une épée de Damoclès bien utile.
Les policiers eux-mêmes en conviennent, les stupéfiants sont une entrée pratique pour mater la petite délinquance de rue disent-ils…Entendez les « racailles de cité » qui font le sale boulot de fournir notre société en produits stupéfiants divers. Le point positif de cette réthorique c’est le tranquille cynisme avec lequel se matérialise un acteur habituellement absent de l’imaginaire nos gouvernants, le consommateur, mais un consommateur propre sur lui, un consommateur auquel on puisse s’identifier, un consommateur dont on pourrait dire « cela pourrait être mon fils (ou ma fille) ». Ceux-là se verront proposer de régler séance tenante une amende de 3ecatégorie dont le montant devrait être raisonnable tout en restant prohibitif pour le tout venant, par exemple entre 150 et 300 € .
Moyennant quoi les heureux élus échapperont aux affres d’une interpellation suivie d’une possible garde à vue, quand les autres, tous les autres, se verront reconduit à la case départ ou la case prison du « mono police » , le jeu de société qui régit les relations de la jeunesse des « quartiers » avec les forces de l’ordre.
Nul besoin d’être grand clerc pour comprendre que sans réforme du terrible article L. 3421 qui punit d’une peine d’un an de prison et de 3750 euros d’amende quiconque s’est rendu coupable du délit d’usage de stupéfiants, la grande majorité des usagers interpellés sur la voie publique avec quelques grammes de shit ou de beuh ne verra pas son sort s’améliorer. De là à penser qu’il s’agit d’une loi cosmétique uniquement préoccupée par la situation des quelques uns qui ne devraient décemment pas figurer dans une statistique judiciaire, il n’y a qu’un pas que nous franchissons à la lecture de la chronique judiciaire de ces derniers mois.
Les mauvaises langues prétendent que les arrestations de certains enfants d 'élus ayant eu le mauvais goût d’être pris dans le filet de la maréchaussée, auraient fortement pesé dans ce retour de la contraventionalisation. Pour mémoire, l’épisode savoureux qui vit le fils de la présidente du conseil régional d’Ile de France, personnalité particulièrement attentive à l’application ferme de la loi sur les stupéfiants, être épinglé lui-même par la patrouille anti cannabis.
Nous avions les « bavures », celles qui conduisent nos agents de la force publique devant les tribunaux, nous avons aujourd’hui les « bévues », ces méprises policières qui troublent la conscience de nos citoyens les plus éminents contraints de venir chercher leurs rejetons au commissariat pour cause de zèle intempestif de la maréchaussée . La « contraventionalisation » ne serait donc qu’une carotte déguisée en bâton et en même temps un remède contre les « bévues policières » ? Voir.
La toute récente vague de réformes économiques qui positionnent fermement à droite le gouvernement Philippe pourrait susciter prochainement un prurit de libéralisme sociétale chez tous les anciens socialistes En Marche et quoi de plus libéral justement que de s’attaquer au juteux marché du cannabis sativa!
"J'ai encore du nez", a ironisé le chef de l'Etat alors qu'il était pris en photo avec des habitants d'un quartier sensible de Cayenne.
Photo d'illustration: Emmanuel Macron en visite dans le quartier de Cogneau Lamirande,
à Matoury en Guyane, le 27 octobre 2017.
REUTERS/Ronan Lietar
POLITIQUE - C'est une séquence filmée par le compte Facebook de l'Elysée. En visite surprise dans deux quartiers sensibles de Cayenne, Emmanuel Macron a été confronté très directement au problème de la drogue qui y sévit.
Alors qu'il se laissait prendre en photo avec de habitants de la Crique, le chef de l'Etat a été interpellé par l'odeur qui l'entourait à ce moment. "Il y en a parmi vous qui ne fument pas que des cigarettes. J'ai encore du nez", a lancé le président de la République au milieu des effluves de cannabis dans un échange repéré par LCI et visible dans la vidéo ci-dessous.
S'adressant aux plus jeunes, Emmanuel Macron leur a fait remarquer que "Ca ne va pas vous aider à bien travailler à l'école, vous voyez ce que je veux dire." Et de conclure: "Il faut le dire aux plus jeunes!"
Source: huffingtonpost.fr
"Se confronter à la réalité du terrain"
Le président souhaitait "se confronter à la réalité du terrain", dans des quartiers où vivent une majorité de clandestins. Au Rond-Point des 100 boîtes aux lettres, dans le quartier de Cogneau Lamirande, à Matoury, le chef de l'Etat a créé la surprise en se présentant à plusieurs dizaines de jeunes, rassemblés sur le bord de la route.
Accompagné de la maire de Cayenne Marie-Laure Phinera-Horth, le président de la République a ensuite arpenté La Crique, un quartier dont la réputation de dangerosité n'est plus à faire. "C'est là qu'il y a des problèmes de drogue, c'est un quartier chaud. Il y a des dealers, du trafic de stupéfiants, de la prostitution", a expliqué l'élue.
La «forfaitisation du délit d'usage des stupéfiants » sur laquelle travaille une mission d'information de l'Assemblée Nationale ne fait pas l'unanimité. Une commission parlementaire se penche sur la possibilité de sanctionner l'usage de drogue par une simple amende afin de désengorger les tribunaux.
Illustration. Selon l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies,
on comptabilise environ 4,6 millions de consommateurs occasionnels.
LP/JEAN-NICHOLAS GUILLOT
Le constat est sans appel : la consommation de cannabis est en progression. Selon l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies, on comptabilise environ 4,6 millions de consommateurs occasionnels et 700 000 consommateurs quotidiens. C'est un échec cuisant pour les politiques de prévention et de répression. Une mission d'information de l'Assemblée nationale se penche sur la possibilité de sanctionner l'usage de drogue par une simple amende, alors qu'il est aujourd'hui passible d'un an de prison et de 3 750 € d'amende.
La commission est pilotée par les députés Eric Poulliat (LREM) et Robin Reda (LR). L'idée est portée par le ministère de l'Intérieur et la chancellerie. Leur constat est simple : les tribunaux croulent sous des procédures qui se terminent rarement par une sanction. Sur plus de 100 000 par an, 45 000 aboutissent à un simple rappel à la loi.
La forfaitisation du délit de l'usage de stupéfiants n'est pas une idée neuve. Recommandée dès 2003, elle avait fait l'objet d'une proposition de loi au Sénat en 2011. Dans un rapport de 2016, la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) l'avait aussi recommandée pour l'usage du cannabis chez les primo-délinquants. Alors, faut-il instaurer une simple amende pour les fumeurs de cannabis ? Eléments de réponse, avec Pacal Lalle et Béatrice Brugère.
Oui, pour Pascal Lalle, directeur central de la sécurité publique
AFP/Matthieu Alexandre
« Aujourd'hui, il n'y a pas de réponse pénale dissuasive pour limiter la consommation de stupéfiants. En revanche, la procédure mise en oeuvre pour constater l'usage est lourde en raison de l'évolution du Code de procédure pénale.
Cela implique une mobilisation importante des policiers, sans efficacité réelle en termes de répression. Il faut savoir que la police comptabilise environ un million d'heures pour le simple traitement des usagers de stupéfiants. Ils sont interpellés, placés en garde à vue — elle peut durer jusqu'à douze heures —, une enquête est ouverte, et au bout il n'y a pas la garantie d'une sanction concrète. Ce qui tend à décourager les policiers, même si cela ne les démobilise pas dans les faits. L'idée de forfaitiser le délit d'usage de stupéfiants pour les détenteurs de quelques barrettes de haschisch ou de doses d'héroïne me paraît pertinente. Cette amende sera délivrée aux intéressés en temps réel avec un montant qui reste à déterminer.
Il appartiendra au policier de s'assurer bien sûr de la réalité du produit stupéfiant, de l'identité de l'usager et de l'adresse de son domicile. Il pourra dresser un procès-verbal électronique à partir d'une tablette avec transfert de fichier pour connaître les antécédents. Il faudra que l'amende continue à se référer à un délit pouvant faire l'objet de poursuites judiciaires : il faut laisser aux policiers la possibilité d'apprécier s'ils préfèrent dresser une amende ou lancer une procédure classique, notamment pour les personnes qui n'en sont pas à leur première infraction.
Tout ça devra être référé à une politique pénale dans chaque parquet avec les responsables des services d'investigation. Ce sujet n'est pas le même dans une petite ville de province que dans les grandes agglomérations. La forfaitisation du délit d'usage de stupéfiants ne pourra s'appliquer ni aux mineurs ni aux récidivistes. La forfaitisation a pour seul but une procédure simplifiée qui permettra une répression garantie. Ce qui aura un effet dissuasif. » Non, pour Béatrice Brugère, secrétaire générale du syndicat FO-Magistrats
DR
« Cette idée de forfaitisation nous paraît aventureuse et dangereuse. Aventureuse car au lieu de s'attaquer aux causes, on essaie de réguler les conséquences. Dangereuse parce que loin de régler le fléau de la consommation massive de cannabis en France, elle contournera et favorisera sans doute le marché juteux du trafic. On parle de près de 1 Md€ dans le seul département de la Seine-Saint-Denis. La situation est trop grave pour être traitée de manière légère et administrative.
Certes, le constat de la lutte depuis la loi de 1970 est un échec pour ne pas dire un fiasco, car nous sommes passés de 4 000 personnes interpellées par an à 200 000, 50 fois plus sans rien enrayer. Aujourd'hui, police et justice sont saturées. Il faudrait donc commencer par faire un bilan de l'échec de toutes les mesures mises en place en termes sanitaire et judiciaire. Or, le ministère de l'Intérieur, qui porte ce projet, raisonne exclusivement en termes de contentieux de masse et d'absorption de flux. Les services de police sont submergés face à la consommation exorbitante de cannabis et la lourdeur de la procédure pénale. Du coup, le timbre-amende semble la solution.
Nous sommes en totale opposition car c'est une dépénalisation qui ne dit pas son nom et qui fragilise nos procédures, qui s'appuient sur des auditions de consommateurs pour remonter les filières de trafiquants. Il n'y a dans ce projet ni vision alternative ni plan d'envergure. Or on sait que la consommation de cannabis (parfois très concentré en THC ce qui le rapproche des drogues dures) entraîne des conséquences multiples : absentéisme, échec scolaire et parfois troubles psychiatriques, mais aussi délinquance (vols, violences, accidents de la route, etc.).
La priorité doit être recentrée sur les trafiquants et les revendeurs, accompagnée d'une politique d'envergure de prévention. En réalité, l'amende forfaitaire symbolisera le renoncement à une politique de santé publique. Elle permettra peut-être d'augmenter les recettes budgétaires... et ainsi Bercy figurera sur la liste des administrations pleinement satisfaites du projet. »