"Soldes avant fermeture définitive". Voilà ce que l'on pourrait bientôt lire sur les portes des smartshops d'Amsterdam, ces boutiques où se pressent les touristes du monde entier pour s'offrir, en toute légalité, des champignons hallucinogènes.
Source : Rue89
Au terme d'un accord conclu vendredi entre les ministres de la Justice et de la Santé, les Pays-Bas ont en effet annoncé qu'ils mettraient fin au commerce de ces puissants psychotropes.
Le débat avait été tranché une première fois il y a cinq ans par l'interdiction des champignons séchés (plus puissants), c'est un fait divers qui l'a relancé. Fin mars, une écolière française de 17 ans avait en effet trouvé la mort en se jetant d'un pont après avoir pris des champignons. Après d'autres incidents, moins dramatiques, incluant invariablement des touristes à Amsterdam, une majorité des députés néerlandais se prononçait pour l'interdiction.
"Le nombre d'incidents après la consommation de 'paddos' est passé de 55 en 2004 à 129 l'année dernière. Cette année, nous avons déjà enregistré plus d'une centaine d'accidents, principalement à Amsterdam", a déclaré à l'AFP une porte-parole du ministère de la Santé, Karin Donk.
"Nous savons tout de la substance active des paddo’s (champignons en néerlandais), la psilocybine, a de son côté expliqué Peter Cohen, l'un des meilleurs spécialistes des drogues néerlandais. Il y a des milliers de tentatives de suicide chaque année; il est normal, statistiquement, que quelques-unes soient dues à la consommation d’une drogue. Mais les accidents avec des paddo’s sont relativement rares, justement à cause de l’ouverture de notre politique. Faut-il renoncer à une politique réussie parce qu’une école française n’a pas bien préparé ses élèves pour Amsterdam? C’est plus que de l’incohérence’."
Paul van Oyen, porte-parole des propriétaires de smartshops, regrette également cette décision: "Il s'agit d'un problème qui est confiné à Amsterdam, au centre ville, mais tous les smartshops des Pays-Bas en seront victime, et c'est triste." "Tous les deux mois, ils interdisent quelque chose. Ephedra, yohimbe, herbal ecstasy et maintenant les champignons. Je ne sais pas si nous y survivrons", explique Chloe Collette, propriétaire d'un smartshop à Amsterdam.
Quant à Murat Kucuksen, fondateur de Procare, qui fournit la moitié des champignons hallucinogènes néerlandais, il prédit que l'interdiction ne fera que gonfler le marché noir et donc multiplier les risques de se faire refourguer des produits plus dangereux car moins contrôlés: "Vous aurez une hausse des accidents, mais ils ne seront pas liés aux champignons et les politiciens seront satisfaits."
Que les amateurs se rassurent toutefois, l'interdit n'entrera en vigueur qu'après un vote du Parlement, qui devrait prendre plusieurs mois. De quoi s'organiser un ultime pèlerinage à Amsterdam.