Journée mondiale contre la drogue : le bilan de l'ONU

Par Invité ,

 

Cette année encore, comme tous les 26 juin, les Nations unies célèbrent la journée internationale contre l’abus et le trafic illicite des drogues. Mais, à un an de l’échéance fixée en 1998 lors de la Session extraordinaire consacrée au problème mondial de la drogue de l’Assemblée générale des Nations unies (UNGASS), la situation mondiale des productions agricoles de drogues illicites est loin d’avoir été résolue, que ce soit par voie d’éradication ou par voie de substitution.

 

Source : Rue89.com

En effet, ni la destruction physique des récoltes de coca, de cannabis ou d’opium, ni les programmes de développement alternatif n’ont permis de faire diminuer les superficies couvertes par chacune des trois plantes à drogue (cocaïer, cannabis, pavot).

 

Cent ans de prohibition mondiale de certaines drogues et, surtout, plus de trente ans de "guerre contre la drogue" ont justifié que soient dépensés des dizaines et des dizaines de milliards de dollars dans d’innombrables campagnes d’éradication forcée et dans de bien moins nombreux projets de développement alternatifs, en pure perte. Le recours aux campagnes d’éradication a été généralisé sur tous les continents, au cours des trente dernières années quels que soient les contextes et en dépit des conséquences contre-productives et des effets pervers engendrés.

 

Dans "The Politics of Heroin" (2003), Alfred McCoy, analyste de longue date des rôles joués par les économies politiques des drogues illicites dans le jeu des relations internationales, dénonce l’échec de la "guerre contre la drogue" et tout particulièrement le fait qu’elle s’est révélée être clairement contre-productive. Trente ans de "guerre" ont ainsi accompagné l’accroissement des superficies cultivées en coca et en pavot mais aussi, si le seul exemple du Maroc devait être considéré, en cannabis. Et, malgré un coût total estimé à 150 milliards de dollars, elle n’a pas seulement échoué à réduire les superficies cultivées et les quantités produites, mais a aussi déplacé et dispersé les productions agricoles dans l’espace mondial, tout en contribuant largement à la militarisation de certains contextes de production.

 

La production d’opium en Asie fournit un exemple éloquent de l’échec et même de la contre-productivité de la guerre contre la drogue. En 1906, la Chine produisait 85 pour cent des 42000 tonnes d’opium mondial. Certes, lors du siècle de prohibition qui s’est depuis écoulé, la production illicite d’opium s’est effondrée, avec en tout et pour tout 4620 tonnes en 2005. Mais cette baisse de production est toutefois bien plus complexe qu’il n’y paraît de prime abord puisque le niveau de production le plus bas a en fait été atteint au début des années 1970 à la suite de la suppression menée par les autorités chinoises au début des années 1950, et aussi grâce aux efforts de la politique multilatérale de la Société des nations puis de ceux des Nations unies.

 

De fait, en 1970, un an avant le lancement de la guerre à la drogue de l’administration Nixon, seules 1 066 tonnes d’opium étaient produites à l’échelle mondiale, soit quatre fois moins qu’en 2005. Pire encore, en 2006, l’Afghanistan produisait à lui seul 6100 tonnes d’opium, soit plus que la production mondiale en 2005, alors que dans le Pakistan voisin, vraisemblablement du fait des impératifs stratégiques de la guerre contre le terrorisme, la production connaissait une importante résurgence passée largement inaperçue.

 

Ailleurs, en Asie du Sud-Est, dans l’espace historique du Triangle d’or, les productions birmane et laotienne se sont certes effondrées au cours des dernières années, mais elles ont diminué à la suite de politiques locales de suppression forcée des cultures mises en place quasiment sans contrepartie et au risque d’un coût humain majeur. Ainsi, au Laos, où la production a chuté au cours des dernières années, seuls 5% des villages anciennement producteurs d’opium seraient concernés par des projets de développement alternatif.

 

Si l’on se fie aux objectifs fixés en 1998, les Nations unies devaient avoir résolu le problème de la production et de la consommation de drogues illicites, et donc a fortiori celui du trafic, en 2008. Elles devaient donc procéder à cette date à l'évaluation finale de la mise en œuvre des résultats de la session extraordinaire de 1998. Mais l’échec patent des dix dernières années rend cette évaluation d’autant plus délicate que de nombreux acteurs de la société civile tiennent, sinon à y participer, du moins à s’assurer de son objectivité.

 

Alors qu’un Forum mondial des producteurs de cultures classées illicites (FMPCI) doit se tenir en Espagne en 2008 pour débattre des contextes et des enjeux de paysanneries confrontées à l’illicéité et à la guerre contre la drogue, il semblerait désormais acquis qu’il n’y aura pas de session spéciale consacrée aux drogues en 2008.

 


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Bonjour,

 

en cette sainte journée prohibitionniste, je tiens à apporter un message de prévention, et citerait pour cela Timothy Leary :

« Les drogues sont des substances qui provoquent des comportements irrationnels et délirants... chez ceux qui n’en prennent jamais. »

 

++ Vyk

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Pas de session spéciale de l'ONU à Vienne en mars 2008 ? Ils essaient de noyer le poisson, c'est sûr. Déjà qu'ils fanfaronnent en disant que le volume de consommation de drogue est stabilisé, comme pour dire "tout est sous contrôle, braves citoyens, nous tenons nos promesses".

 

En tout cas, si quelqu'un a des infos sur un éventuel congrès en mars 08 à Vienne, qu'il (ou elle) les poste ! (J'irais bien m'y manger quelques saucisses..)

 

Sus à l'intolérance narcotique sectaire !

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