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Bilan Macron. Cannabis : une dépénalisation douce, une répression forte
En 2017, Emmanuel Macron jouait encore sur deux tableaux concernant le cannabis, tantôt favorable à la dépénalisation, tantôt conservateur. Une deuxième tendance qui s’est vérifiée tout au long de son quinquennat, en effaçant la première.
3 mars 2022 à 20h16
Environ 18 millions de personnes, soit 44,8 % de la population adulte en France, ont consommé, au moins une fois dans leur vie, du cannabis, selon une étude de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) de 2017. En 2020, toujours selon l’OFDT, 11 % des personnes interrogées, âgées de 18 à 64 ans, ont déclaré avoir consommé du cannabis au cours de l’année. Si la France reste la championne européenne de la consommation de cannabis, le bilan d’Emmanuel Macron sur la question est en revanche ambigu.
En 2016, dans son livre programmatique Révolution (Éditions XO), le futur président de la République affirmait que « la légalisation du cannabis a des intérêts, une forme d’efficacité ». « Il est vain de pénaliser systématiquement la consommation de cannabis », estimait-il à l’époque. Une formule répétée à l’identique sur France Inter. Et amendée, dès février 2017, dans les colonnes du Figaro : « Je ne crois pas à la dépénalisation des “petites doses” ni aux peines symboliques. Cela ne règle rien. »
(Note de LiO : je ne sais pas intégré la vidéo au post, mais je vous mets un lien, y a rien de très intéressant de toute façon, il a fait le contraire ...)
https://www.youtube.com/embed/p-4TiULPcPQ
Emmanuel Macron : « Cannabis : je crois que la légalisation a une forme d'efficacité. » #QuestionsPol © France Inter
D’abord effective dans quelques villes, fin 2018, une solution mixte a été retenue et étendue à l’ensemble du territoire en septembre 2020 : l’amende forfaitaire délictuelle. La consommation de cannabis est désormais punie de 150 euros à 450 euros d’amende, avec inscription au casier judiciaire. En un an, environ 100 000 amendes ont été distribuées, selon le ministère de l’intérieur. Signe que la consommation n’est pas en baisse, malgré un durcissement de la politique institutionnelle.
En 2015, Christophe Castaner, aujourd’hui patron des député·es La République en marche (LREM), se demandait pourtant si « une organisation de la vente médicale en pharmacie, pour la culture personnelle de chacun chez soi, ne permettrait pas de casser cette spirale “délinquantielle” que l’on connaît dans nos quartiers ». Spirale contre laquelle il a souhaité renforcer la lutte en 2019.
Devenu ministre de l’intérieur, il avait présenté, lors d’un déplacement à Marseille (Bouches-du-Rhône), 55 mesures pour lutter contre le trafic, de « l’international à la cage d’escalier ». Sa propositions phare ? La création de l’Office anti-stupéfiants (Ofast), composé de 150 enquêteurs et 16 antennes territoriales. « Si je l’ai lancé à Marseille, c’est parce que je savais que c’était la mère des batailles que nous devions conduire », soulignait-il alors.
Je ne peux pas, en tant que ministre de l’intérieur, dire […] que l’on va légaliser cette merde.
Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur
Gérald Darmanin durcit encore le ton à son entrée Place Beauvau, en juillet 2020. Ce proche de Nicolas Sarkozy se veut extrêmement clair sur le sujet. « La loi de la République, c’est l’interdiction des drogues », affirmait-il sans sourciller à L’Union en septembre 2020. Dans la même interview, il déclarait aussi : « Je ne peux pas, en tant que ministre de l’intérieur, dire […] que l’on va légaliser cette merde. Et je dis bien “cette merde”. »
Le bilan d’Emmanuel Macron sur la question du cannabis reste ambigu. © Photo Romain Longieras / Hans Lucas via AFP
Emmanuel Macron saluera d’ailleurs son bilan en la matière à l’issue du Beauvau de la sécurité en septembre 2021 : « Rien que pour le premier semestre de cette année, c’est 37 % de saisies de cannabis, 91 % de saisies de cocaïne et 60 % de saisies d’héroïne en plus par rapport à 2020 », s’était ainsi félicité le chef de l’État, estimant que « les consommateurs de drogue sont des complices de fait » des trafiquants. Des propos qui faisaient écho à un entretien accordé au Figaro quelques mois plus tôt : « On se roule un joint dans son salon et, à la fin, on alimente la plus importante des sources d’insécurité… »
En ce qui concerne le trafic, on ne voit pas de nette évolution entre 2016 et 2021. © SSMSI - Ministère de l'intérieur
Le chef de l’État souhaitait faire de la lutte contre les trafics sa priorité. Les derniers chiffres publiés par le ministère de l’intérieur semblent toutefois ne pas aller dans ce sens. Le nombre de mis·es en cause pour trafic de stupéfiants en 2021 est en effet en hausse de 13 % par rapport à 2020 et en baisse de « seulement » 2 % par rapport à 2019. On retrouve le même niveau qu’en 2018. Même tendance du côté des usagers et usagères : la nouvelle amende forfaitaire représente plus de 50 % des procédures, signe d’une simplification administrative.
Plus récemment, la question du CBD (cannabidiol) a crispé l’exécutif. Ce dérivé du cannabis, contenant moins de 0,3 % de THC, est produit et commercialisé en France depuis 2018 sous forme d’infusions, de gâteaux ou encore d’huiles. Des commerces ont commencé à fleurir un peu partout dans le pays, la France maintenant toutefois l’interdiction de vendre des feuilles de chanvre.
La jurisprudence européenne étant plutôt progressiste sur ce sujet, Paris a été condamné par la Cour de justice de l’Union européenne en novembre 2020. Par un arrêté du 30 décembre 2021, le gouvernement a fini par encadrer la production des fleurs et feuilles de chanvre, tout en en interdisant la vente au grand public. Cette interdiction a été suspendue fin janvier par le Conseil d’État,au grand regret de Gérald Darmanin, qui a déclaré sur France Inter : « On n’a pas augmenté le prix du tabac à 10 euros pour qu’on accepte la légalisation, la dépénalisation du cannabis. »
Fin janvier, aux balbutiements de la campagne du chef de l’État-presque-candidat, les Jeunes avec Macron (JAM) avaient déjà leur avis sur la question : « Légalisons le cannabis afin de mieux protéger les Français. » Rien, dans les récentes prises de position du président de la République, ne laisse penser qu’il suivra cette ligne.
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