Le Président a réaffirmé sa promesse de laisser les Etats le souhaitant autoriser la marijuana médicale. Un premier pas encourageant.
"Vous serez étonné de savoir que ce que le Président a dit pendant la campagne, et bien nous allons le faire." Comme promis, et réaffirmé mercredi par son tout nouveau ministre de la Justice, Barack Obama devrait donc très prochainement mettre un terme à la campagne de la police fédérale contre la marijuana médicale.
Source: Rue89
En effet, alors que la loi fédérale américaine continue à punir toute culture ou cession de cannabis, dans 13 des 50 Etats, la loi locale autorise son usage à des fins médicales. Mais depuis des années, Washington déploie une énergie toute particulière pour faire fermer des cliniques un peu spéciales: on y délivre de la marijuana sur ordonnance.
"C'est une victoire et un grand pas en avant. [...] La campagne fédérale contre le cannabis thérapeutique a fait beaucoup de dommages collatéraux", a déclaré Steph Sherer, responsable de l'association American for safe access (principale association californienne réunissant patients et médecins pour le cannabis thérapeutique du cannabis). L'association antiprohibitionniste Norml appelle, elle, ses adhérents à remercier par mail l'attorney general.
Une petite révolution, donc, dans l'un des pays occidentaux les plus conservateurs en la matière et qui a connu près de quarante ans d'escalade ininterrompue dans sa guerre mondiale à la drogue. Le président Obama osera-t-il aller plus loin et mettre en place, comme il l'a évoqué, une véritable approche de santé publique? Ou renoncera-t-il dans un dossier où il a beaucoup à perdre et peu à gagner électoralement?
Pétards et cocaïne pour le jeune étudiant Obama
Nous sommes en 2004. Un jeune sénateur noir d'Illinois alors inconnu est interrogé sur la guerre à la drogue:
"Elle a été un échec total, nous devons repenser et décriminaliser notre législation sur les drogues. Mais je ne suis pas de ceux qui pensent qu'il faut légaliser la marijuana." (Voir la vidéo, en anglais)
https://www.youtube.com/watch?v=wQr9ezr8UeA&e
Dix ans auparavant, le futur président avouait dans ses mémoires, avoir non seulement fumé du cannabis (et avalé la fumée, lui), mais aussi sniffé de la cocaïne! ("Mais jamais d'héroïne)".
Investi candidat démocrate à la présidentielle, il déclare enfin en juillet 2008 à Jann Wenner, de Rolling Stones:
"Je crois qu'il faut changer de paradigme, de modèle, pour se concentrer sur une approche de santé publique. [...] Je commencerai par les consommateurs non-violents arrêtés pour la première fois. Le fait que nous les traitions comme des criminels et les envoyons en prison -véritable école du crime-, au lieu d'envisager des pistes comme les tribunaux spéciaux pour les drogues, qui essaieraient de les remettre sur le droit chemin, c'est très cher, contre-productif et ça n'a pas de sens."
Pour le très actif mouvement antiprohibitionniste américain, marqué par huit années de bushisme, ces déclarations suscitent un immense espoir. Obama élu, Ethan Nadelmann, responsable de la Drug policy alliance, se déclare même candidat au poste de Tzar antidrogues (responsable de l'ONDCP, organisme coordonnant la lutte contre les stupéfiants à la Maison blanche). Patatras, Obama choisit un policier et non un responsable de santé publique.
https://www.rue89.com/files/2009_03_01_gil_kerlikowske.jpg[/img]Certes, Gil Kerlikowske, chef de la police de Seattle, ne s'est jamais opposé aux nombreuses initiatives de réduction des risques de sa ville, en pointe sur le sujet, mais l'annonce a tout de même fait désordre. Nadelmann garde pourtant espoir:
"Bien que nous soyons déçus que le président Obama choisisse un policier et non un partisan de l'approche de santé pubique comme tzar antidrogues, nous sommes d'un optimisme prudent quant au fait que l'officier Gil Kerlikowske soutiendra l'agenda réformateur d'Obama en matière de drogues."
En fait, si personne ne semble remetre en cause la sincérité de l'engagement d'Obama sur ce sujet, la question est plutôt de savoir s'il aura le courage d'affronter une question éléctoralement si délicate, comme le redoutait récemment le Denver Post:
"On peut aisément imaginer que ses conseillers l'enjoindront d'éviter la question des drogues, qui pourrait être aussi périlleuse pour lui que l'a été celle des homosexuels dans l'armée pour Clinton."
https://www.rue89.com/files/2009_02_24_Obama_heroine2.jpg[/img]Des alertes ont en effet déjà eu lieu, comme lorsque, fin janvier, la police de l'Etat de New York a saisi des sachets d'héroïne à l'effigie du nouveau président Effet désastreux garanti.
La Commission des stupéfiants de l'ONU, une tribune internationale.
Un test-clé aura lieu le 11 mars avec la réunion à Vienne de la Commission des stupéfiants de l'ONU, chargée de surveiller l'application des conventions internationales en la matière. Une tribune que Washington utilise habituellement pour s'assurer que sa guerre à la drogue n'est pas remise en cause dans le monde. Obama enverra-t-il à la Commission des bureaucrates pour défendre le statut quo? Ou en profitera-t-il pour laisser des réformateurs y prêcher une approche plus modérée?
Pourquoi pas Tom Ammiano? Surfant sur la vague de l'Obamania, cet élu californien a déposé, pour la première fois dans l'histoire de cet Etat, une proposition de loi pour légaliser et surtout taxer la vente de marijuana. Une proposition qui tomberait à point pour renflouer les caisses de cet Etat au bord de la faillite, mais considéré comme l'un des plus gros producteurs mondiaux de marijuana.
Source: Rue89
Photo: Effigie d'Obama au carnaval de Dusseldorf (Ina Fassbender/Reuters)
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► Obama's take on the drug war, sur le Denver Post
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