L'Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) accueille « avec préoccupation » le projet de légalisation du cannabis au Canada. Il prévient qu'une fois la marijuana légalisée, le gouvernement fédéral sera en violation des conventions internationales sur les drogues.
Malgré de nombreux avertissements, Ottawa n'a toujours pas confirmé comment il se conformerait aux traités qu'il a signés.
« L'OICS l'a déjà dit à plusieurs reprises, les dispositions du projet de loi C-45, en autorisant l'usage du cannabis à des fins non médicales, seraient incompatibles avec les obligations auxquelles le Canada est tenu », peut-on lire dans le dernier rapport annuel de cet organe des Nations unies, publié le 1er mars.
Le Canada est signataire de trois conventions de l'ONU qui interdisent la production, la possession et la consommation de stupéfiants sur leur territoire (y compris le cannabis), sauf pour des raisons médicales ou scientifiques.
« En ce moment, on a une absence totale de stratégie », s'inquiète Bruno Gélinas-Faucher, doctorant en droit international à l'Université de Cambrige et chargé de cours à l'Université de Montréal. Alors que le Canada tente d'effectuer un retour sur la scène internationale, cela risque de nuire à son image et à sa crédibilité, selon M. Gélinas-Faucher.
Pour le député néo-démocrate Matthew Dubé, le gouvernement Trudeau fait preuve d'improvisation. « On aurait dû faire nos devoirs à l'avance. Ce n'est pas quelque chose de nouveau. C'est un engagement que M. Trudeau a pris avant même la campagne de 2015. »
Quelles sont les options?
Plusieurs scénarios s'offrent au Canada. Il pourrait se retirer de ces conventions et revenir plus tard avec des restrictions. Cependant, il est déjà trop tard pour se retirer des traités avant la légalisation, puisqu'ils nécessitent des préavis de retrait de 6 à 12 mois.
Ottawa aurait aussi le choix d'interpeller l'Organisation mondiale de la santé (OMS) afin d'obtenir une reclassification du cannabis dans les traités internationaux. Une autre option serait de continuer d'adhérer aux conventions tout en choisissant de les enfreindre.
Matthew Dubé pense que le Canada pourrait justement « jouer un rôle de leadership » pour moderniser les accords.
Le gouvernement Trudeau tarde toujours à clarifier son approche. Un porte-parole de la ministre des Affaires étrangères, Adam Austen, affirme que des experts ont été consultés pour « déterminer la meilleure voie à suivre pour respecter nos engagements internationaux ».
Cependant, il reste muet sur les actions que le Canada prendra pour respecter ses obligations.
« Nous nous engageons à travailler avec nos partenaires mondiaux pour mieux promouvoir la santé publique et lutter contre le trafic des drogues illicites », a-t-il ajouté.
Le Canada s'expose-t-il à des conséquences?
L'OICS a le pouvoir d'entamer un dialogue avec le Canada pour l'encourager à se conformer aux règles internationales.
L'organisme pourrait aussi demander aux pays signataires d'interrompre leurs échanges de médicaments avec le Canada, puisque ces conventions encadrent le commerce de drogues licites, explique Bruno Gélinas-Faucher. Un autre pays pourrait aussi poursuivre le Canada devant la Cour internationale de Justice.
Cependant, ces deux derniers scénarios seraient extrêmes et peu probables. L'Uruguay, qui a aussi légalisé le cannabis, n'a pas fait l'objet de représailles semblables.
Les conséquences pourraient surtout être politiques.
Le Canada s'apprête à contrevenir à trois conventions internationales de l'ONU :
Convention unique sur les stupéfiants (1961)
Convention sur les substances psychotropes (1971)
Convention des Nations unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes (1988)
Source: ici.radio-canada.ca
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Start-uppers, politiques ou philosophes, ils ont tout prévu : coffee shops dans les cités, agences de pub spécialisées, taux de TVA...
Image : Flickr
Comme il semble loin le temps où le militant pro légalisation se résumait à un rasta blanc originaire de Rennes accompagné de son fidèle djembé et toujours prêt à répondre à « l’appel du 18 Joint » – sorte de 4.20 à la française. Alors que le sens de l’Histoire semble donner raison aux pro-weed (légalisations massives dans les États américains, légalisation thérapeutique en Allemagne…), leur profil a muté en France. Ils ont bien compris qu’ils devaient délaisser le champ de l’hédonisme pour investir celui du réel. Exit le plaisir, place au business.
Pour preuve, l’association Chanvre et Libertés a récemment changé de nom pour s’appeler… NORML. « Les usagers d’aujourd’hui ne se retrouvaient plus dans ce branding, qui jouait sur les stéréotypes libertaires, hippies, marginaux. Il était important de changer cette image », explique Olivier Hurel de NORML France, la branche française de l’influent réseau pro-légalisation américain. Chez NORML, on sait que le packaging sémantique est primordial. Du coup, on ne parle plus de légalisation – qui « a tendance à faire penser que c’est open bar », explique Hurel – mais de « régulation », un terme plus neutre mais qui revient globalement à la même chose, puisqu’il est question d’« encadrer légalement la production, la distribution et le contrôle des produits ». Usager occasionnel, diplômé en marketing et en ingénierie, Hurel est à l’image de ces nouveaux militants : déjà dans le coup d’après. Car à leurs yeux la légalisation (ou « régulation », donc) est inévitable.
« Le combat mondial est très clairement en passe d’être gagné », abonde Gaspard Koenig, philosophe à tendance libérale, figure médiatique et moderne de la légalisation du cannabis en France (et accessoirement sosie d’un des frères de JFK). « On voit bien que c’est un processus inéluctable. Quand la Californie s’y est mise, on a senti que c’était plié. » Puisque la question n’est plus de savoir si, mais quand cette légalisation aura lieu en France, les militants s’interrogent déjà sur les modalités de celle-ci, comme Koenig, qui ne fume pas de joints, mais vapote sa weed. Contre le monopole d’État, qui « créerait les mêmes défauts que tous les autres monopoles, comme les Télécoms, le tabac, ou la FDJ », Koenig prône la solution du marché et de la libre-concurrence – avec, tout de même, un régulateur qui fixerait des garde-fous. Mais il va falloir s’y mettre rapidement car, selon Koenig, « plus on vient tard, plus on sera soumis à des industries qui existent déjà. »
« On doit démontrer que c’est un business rentable et créateur d’emplois » - Laure Bouguen, canna-entrepreneuse.
Cette crainte d’arriver après la bataille, Laure Bouguen la connaît bien. Cette jeune entrepreneuse bretonne, dont les grands-parents cultivaient du chanvre, a lancé dès 2015 sa marque de cosmétique, HO KARAN, dont les produits contiennent de l’huile de cannabis, et bientôt du CBD. « En France, on est déjà passé à côté de la vague Internet, et on risque de passer à côté de celle du cannabis », redoute-t-elle. Dans le rôle du méchant briseur de rêves entrepreneuriaux français, on retrouverait une nouvelle fois les États-Unis, qui comptent imposer leurs normes au marché mondial de la weed, comme ils l’ont fait pour Internet. Du coup, pour éviter de se retrouver avec de la weed américaine bourrée aux OGM, il faut faire évoluer la législation. Bouguen est persuadée que cela se fera grâce au business. « On doit démontrer par A + B que c’est un business rentable qui crée de l’emploi. »
D’autant plus que les débouchés économiques potentielles ne manquent pas. C’est ce qu’affirme un autre pionnier du « cannabiz », Antonin Cohen, qui identifie deux secteurs à investir pour les start-ups françaises : les « ancillary businesses » (business auxiliaires), qui ne touchent pas directement à la plante de cannabis (matériel de culture, médias en ligne, agences de marketing spécialisées, voyages à thème…) et le chanvre industriel (une variété de cannabis qui contient moins de 0,2% de THC), dont les débouchées sont nombreuses dans le bâtiment et les compléments alimentaires. « C’est une manière de faire du cannabis sans rentrer dans la complexité réglementaire liée à la présence du THC, » pose l’entrepreneur.
Vu le labyrinthe légal qui entoure le business du cannabis en France, certains essaient d’envoyer la balle directement dans le camp de l’État. C’est le cas d’Éric Correia, conseiller régional de la Creuse, qui a proposé de faire de son département un laboratoire de la weed médicinale pour relancer l’activité de ce territoire en crise. L’affaire est très sérieuse : le préfet a déposé la demande de Correia au Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET) – sans réponse pour le moment. Mais l’idée fait déjà des émules. « On me contacte pour acheter des hectares dans la Creuse et produire du cannabis », se félicite Correia, qui précise que d’autres départements, comme l’Orne, essaient de lui piquer l’idée. « De toute façon, c’est sûr que ça va finir par arriver », assure le conseiller régional. « La question c’est : est-ce qu’on achète ailleurs ou est-ce qu’on le fait chez nous ? Il y a tout ce qu’il faut pour que cela puisse partir d’ici ! On a des organisateurs, des filières, des champs, des serres, et des fermes avec des unités de méthanisation. Ça aura une retombée directe dans l’économie de la région. »
« Les petits dealers deviendraient des vendeurs assermentés, soumis à la TVA » - Gaspard Koening, philosophe et militant pro-weed
Certaines régions particulièrement touchées par les trafics pourraient aussi profiter d’une légalisation pour éviter d’en subir les effets néfastes. C’est la conviction d’Éric Piolle, maire (EELV) de la ville de Grenoble, connue pour être une plaque tournante de la drogue en France. « Cela gangrène les quartiers populaires et pourrit la vie des habitants », explique-t-il. Si l’objectif du maire est clairement sécuritaire, il n’oublie pas les potentielles retombées économiques. « Cela permettrait de faire de la prévention, et du développement économique, dans ces quartiers en proie au trafic », ajoute-t-il.
Cette visée sociale de la légalisation du cannabis, qui découle directement de la question de l’économie des cités, est un argument de poids. Chez NORML France, on propose par exemple de s’inspirer des Cannabis socials clubs ou bien d’« imaginer des serres municipales dans les quartiers stigmatisés pour créer de nouveaux emplois, récupérer des taxes, et financer des actions de santé publique ou sociale. » Dans la même ligne, Gaspard Koenig regarde du côté de la Californie, qui a décidé de donner des microlicences aux personnes qui avaient été condamnés pour une infraction liée au cannabis. Ainsi, les victimes de la prohibition deviennent les premiers bénéficiaires de la légalisation. « Quand je transpose ça en France, on pourrait faire des petits dealers, des vendeurs assermentés soumis à la TVA », propose le philosophe.
Reste que la paralysie au niveau des autorités françaises reste totale. « En France, le blocage est surtout institutionnel », décrypte Koenig, qui rappelle que dans tous les pays où la législation a évolué, cela s’est fait par un référendum à initiative populaire. Une donnée importante car la France reste le pays d’Europe où l’on fume le plus de cannabis. Les 5 millions de fumeurs de weed tricolores seront-ils autant de militants potentiels ?
En ce qui concerne le cannabis récréatif, la loi est claire. La vente, la détention et la culture de cannabis sont interdites. Néanmoins, pour les deux derniers points, certaines conditions en font un objet de "faible priorité de la politique des poursuites" comme le note le site internet de la justice. Ces conditions, les voici : le détenteur doit être majeur, ses possessions ne doivent servir qu'à sa consommation personnelle en n'excédant pas 3 grammes ou une plante cultivée, et la détention ne peut être accompagnée de circonstances aggravantes. Les circonstances aggravantes sont assez floues, notamment celles liées au trouble à l'ordre public. Comme le résume bien le site Bruxelles-J : "Concernant les circonstances aggravantes et les nuisances publiques, tu remarqueras le caractère flou de certains mots qui font qu'il est difficile de savoir clairement si le policier va interpréter comme détention pour usage personnel ou pas...".
Quant aux amendes, elles vont de 15 à 25 euros en cas de première infraction, 26 à 50 euros en cas de récidive dans la même année, jusqu'à un emprisonnement de huit jours à un mois associé à une amende plus lourde s'il y a troisième récidive dans la même année. Dans la pratique, on remarque pourtant une forte tolérance de la part de la police pour le "petit fretin". Rien de vraiment neuf de ce côté-ci.
La médecine dans le flou
Là où les changements sont les plus notables, c'est en ce qui concerne le cannabis médicinal. Depuis "l'arrêté royal du 4 juillet 2001 concernant le cannabis médical", des médicaments à base de cannabis peuvent être prescrits. Les conditions sont strictes. Elles stipulent que seules les personnes souffrant de "nausées et malaise lors de chimiothérapie et de radiothérapie, glaucome, sclérose en plaque, syndrome lié au SIDA ou de douleurs chroniques après l'échec d'autres traitements de la douleur" peuvent prétendre à la médication. Cette dernière est le Sativex, un spray à base de cannabis créé et distribué par Bayer et GW Pharmaceuticals.
Malgré cette option existante, il semblerait pourtant que très peu de personnes, voire aucune, ait jamais pu s'en procurer. Pourquoi ? Comme le notait la RTBF début 2017, il semblerait que le spray soit peu connu des médecins. Ce qu'affirme d'ailleurs le docteur Rachid Ben Azzouz, anesthésiste à la clinique de la douleur de l'hôpital Tivoli à la Louvière, interrogé par la RTBF à l'époque : "On n'a jamais prescrit ce médicament ici. Parce qu'il y en a beaucoup d'autres à notre disposition et, qu'à mon sens, on a encore besoin d'étudier les médicaments à base de cannabis avant d'aller plus loin."
Une méconnaissance des bienfaits de la plante verte qui nuit aux débats, mais surtout aux patients. Le docteur Lossignol, spécialiste de la douleur à l'Institut Bordet interrogé par nos confrères, l'affirmait en ces termes : "Les effets antalgiques du cannabis sont connus depuis des siècles. Alors je ne vois pas pourquoi au 21e siècle des gens ne pourraient pas bénéficier de cela. In fine, on punit les gens deux fois. Ils ont mal et on ne leur permet pas de se soulager. D'un point de vue philosophique et moral, c'est très discutable."
Une légalisation encadrée comme solution
Un point de vue non partagé par le gouvernement. Alors que la tendance était auparavant à l'ouverture, la mise en place du gouvernement Michel a rebattu les cartes du débat. Le MR et la NVA ont toujours été contre la dépénalisation du cannabis. Des partis comme Ecolo, le PS, DéFi ou le PTB sont favorables à cette dernière, bien que certains veulent alors encadrer la vente et la consommation. Une position qu'ont récemment adopté les Pays-Bas en décidant d'autoriser certains agriculteurs à cultiver du chanvre. Cela permettrait à l'état d'engranger des profits tout en endiguant les trafiquants.
Une stratégie que les universitaires flamands Tom Decorte, Paul De Grauwe et Jan Tytgat défendent dans leur livre "Le cannabis sous contrôle. Comment ?". Au quotidien Le Soir, Tom Decorte s'exprimait ainsi : "L'État pourrait tirer des recettes nouvelles de cette libéralisation encadrée à travers la taxation du cannabis ainsi légalisé". Sébastien Alexandre, directeur de la FEDITO (Fédération bruxelloise des Institutions pour Toxicomanes) tire quant à lui la sonnette d'alarme en rappelant qu'un arrêté royal a été pris sans consultation populaire en septembre 2017. Ce dernier est bien moins tolérant envers le cannabis, et même envers les médecins qui en prescriraient trop à leurs patients.
Début février, Sébastien Alexandre en appelait donc à plus d'ouverture de la part des politiques belges, notamment au travers de la campagne "#STOP1921" . Cette dernière veut, selon ses termes, "sensibiliser le législateur et l'opinion publique à la nécessité de remettre en question la politique de prohibition des drogues, vieille de cent ans et dont les effets sont désastreux, notamment en matière de santé publique et d'engorgement du système judiciaire". Le gouvernement n'ayant fait aucune déclaration en ce sens, il semble que le combat ne soit pas gagné d'avance.
En juillet 2017, le ministre de l’Intérieur entendu par la commission des Lois fait le constat d’une répression de l’usage de drogues inefficace, sans effet dissuasif, et néanmoins très chronophage pour les forces de l’ordre (1.2 millions d’heures en 2016) L’idée est donc de mettre en place une procédure simplifiée en forfaitisant cette infraction, et de l’inclure dans la future loi de réforme de la procédure pénale.
Tous les chiffres et indicateurs sont éloquents : les interpellations pour usage ne cessent d’augmenter et ce, trois fois plus que celles pour trafic.
- Usage de drogues : 63,7 % en 2012 - 68,1 % des ILS* en 2016
- Trafic : 7,1 % en 2012 - 3,2 % des ILS en 2016
La France est pourtant le pays le plus répressif, et aussi le plus gourmand d’Europe en stupéfiants, notamment cannabis, opiacés, cocaïne et MDMA.
• Pour la dépénalisation de l’usage des drogues
La répression est sans effet sur l’usage de drogues, très peu compatible avec la prévention, l’action publique est en échec flagrant depuis la loi de prohibition de 1970, mais le gouvernement a décidé de persévérer dans une logique punitive.
Une mission d’information relative à l’application d’une procédure d’amende forfaitaire au délit d’usage illicite de stupéfiants a donc été créée pour évaluer ce dispositif, et alimenter sa réflexion de multiples auditions, experts et parties prenantes dans le débat (police, gendarmerie, justice, etc.) parmi lesquels les représentants de ce qui est relatif aux dispositifs sanitaires et sociaux, toxicomanies et addictions, prévention et réduction des risques, et les usagers de drogues, sont sous-représentés.
• Table ronde Fédération Addiction, CNDCH, et associations d'usagers et de réduction des risques
En préambule du rapport et après avoir indiqué que la loi de 1970 n’avait atteint ses objectifs ni en terme de santé publique, ni dans le registre de la répression, figure l’avertissement suivant :
« Cette mission n’a pas pour objet de réfléchir à la lutte contre la toxicomanie ou à la réforme de la loi du 31 décembre 1970... »
Ça peut sembler paradoxal et cynique, mais au moins c’est clair.
Amende forfaitaire : contravention ou délit ?
Les deux rapporteurs de cette mission se distinguent sur le genre de forfaitisation à mettre en place.
• L’un (Robin Reda, LR) préconise une contravention de 4è ou 5è classe (aux modalités et incidences judiciaires pourtant très différentes) et, si normalement celle-ci éteint l’action pénale, la police pourra toutefois user de solutions alternatives, ou simplement établir une procédure de détention de stupéfiants plutôt que d’usage. Les deux infractions étant concrètement indissociables, bien que figurant pour l’une dans le code pénal, et l’autre dans le code de la santé publique.
Aucune quantité n’étant fixée par loi, le délit de détention peut s’appliquer à tout usager.
• L’autre rapporteur (Éric Poulliat, LREM) plaide pour une amende forfaitaire délictuelle, celle qui a la faveur du gouvernement. Cette amende d’un nouveau genre, initialement créée en 2016 pour être appliquée à deux délits routiers, est restée en suspens, encore inopérante d’un point de vue technique, logistique et juridique.
Malgré cela, c’est l’option retenue en matière d’usage de drogues, infraction pour laquelle, en plus, des dispositions spécifiques annexes seraient nécessaires.
L’amende forfaitaire délictuelle sanctionne un délit via l’agent verbalisateur, elle s’inscrit dans le TAJ* et, de caractère optionnel, elle permet de conserver les possibilités de coercition et d’enquête propres à cette catégorie d'infractions.
La forfaitisation de l’infraction d’usage de drogues n’est qu’une réponse pénale de plus, qui s’ajoute à celles prévues par la loi, mais qui va permettre une répression accrue et systématisée.
(la DACG* prévoit déjà que ce dispositif entraînera une augmentation des interpellations)
Mise à jour 14 mars 2018
• Projet de loi de programmation pour la justice 2018-2022
Au chapitre Dispositions clarifiant et étendant la procédure de l’amende forfaitaire, il est indiqué (pages 40-41) que c’est l’amende forfaitaire délictuelle qui sera donc appliquée, et que l’article L. 3421-1 du code de la santé publique sera modifié par le rajout de l’alinéa suivant :
« Pour le délit prévu au premier alinéa, y compris en cas de récidive, l’action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 et suivants du code de procédure pénale, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 300 €. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 250 € et le montant de l’amende forfaitaire majorée de 600 €. »
(le rapport de la mission d'information avait préconisé une amende d'un montant compris entre 150 et 200 euros)
Sur le terrain, que fait la police ?
Le dispositif de l‘amende forfaitaire délègue donc la réponse pénale à l’infraction d’usage de drogues aux forces de l’ordre, plus que jamais en première ligne de la politique publique des drogues.
Pragmatique ?
Il conviendra d’équiper les patrouilles de smartphones et tablettes NEO pour un accès direct au TAJ (les antécédents judiciaires étant incompatibles avec l’amende forfaitaire) et de quoi éventuellement percevoir l’amende sur le lieu de l’infraction. Mais aussi de kits de détection, de balances de précision, d’un matériel avec scellés dédié aux saisies, afin de s’assurer et garantir la validité de la procédure - aussi indispensable en cas de contestation de l’amende, recours dont le traitement fait déjà partie des prévisions négatives de ce dispositif.
Les représentants des forces de l’ordre ont émis une réserve quant au fait que l’amende immédiate prive de la possibilité de relevé d’empreintes des usagers de drogue interpellés pour alimenter le FAED*. Qu’à cela ne tienne, il leur sera remis une convocation à se rendre au commissariat dans les 48 heures.
Simplification ?
• Les mineurs sont exclus de l’application de l’amende forfaitaire.
Leur cas sera examiné par une mission d’information ultérieure qui déterminera quel genre d’interdit pénal peut être approprié aux plus jeunes consommateurs de drogues.
(En 20 ans, le nombre de mineurs mis en cause pour ILS a été multiplié par 4 (x2 pour les majeurs). Dans le même laps de temps, les condamnations pour ILS des moins de 18 ans sont multipliées par six )
• Les usagers de drogues ayant des antécédents judiciaires et ceux en récidive sont exclus eux aussi. À ces cas, la procédure de droit commun (garde à vue, etc) s’applique.
Les notions de récidiviste et de primo-délinquant sont toutefois pratiquement un non-sens s’agissant de la consommation de drogue, qui par définition et dans les faits, désigne une conduite réitérée.
Logique et responsable ?
• Exclus aussi du dispositif, les usagers de drogue problématiques.
Il reviendra au procureur de définir ce qu’est un "usager problématique".
« il appartiendra aux parquets (via une circulaire générale du garde des sceaux), maîtres de l’opportunité des poursuites, de préciser dans le cadre de leurs instructions le "profil" des personnes susceptibles de ne pas se voir infliger l’amende forfaitaire. »
Et il incombera aux policiers et gendarmes de les identifier selon les instructions du Parquet, et d’appliquer la procédure habituelle.
Ce qui relève de la santé de l’usager de drogues, d’une conduite à risques qui pourrait faire l’objet d’une mesure spécifique, devra donc être évalué sur la voie publique dans le temps de l’interpellation.
Autant dire qu’il s’agit là d’une porte grande ouverte à l’approximation, l’erreur de discernement, voire à l’arbitraire.
Conséquences et incohérences
À la lecture de ce rapport, on se rend compte qu’au fur et à mesure que les modalités de ce nouveau dispositif sont décrites et discutées, autant de contraintes, de complications et de contradictions s’y ajoutent quand il s’agit de réprimer le simple usage de drogues.
Et à entendre les divers débats et tables rondes de cette mission d’information, même les deux parlementaires émettent des réserves, et semblent parfois douter de la validité de cette mesure…
Cette forfaitisation sera donc expérimentée sur un temps limité à une échelle locale.
Ce dispositif d’amende forfaitaire délictuelle n’a encore jamais fait ses preuves ni même été appliqué.
Le gain de temps pour la police et la justice, argument initial pour sa mise en place, est non seulement difficile à évaluer, mais vu les exceptions à cette nouvelle règle, et vu le nombre de recours qui s’annonce massif, il sera probablement dérisoire.
L’amende forfaitaire est la solution retenue car elle permettrait d’harmoniser la réponse pénale jugée illisible et disparate d’un parquet à l’autre.
Or, l’individualisation de cette réponse est pourtant indispensable s’agissant d’une conduite individuelle ayant une incidence sur la santé. C’est en tout cas ainsi - aussi incohérente et inefficace soit-elle - que la loi considère l’usage de drogue, infraction figurant dans le code de la santé publique.
Ce dispositif exclut donc de fait d’assortir une mesure sanitaire à la répression pénale.
Il est toutefois prévu la mention d'une adresse de structure prenant en charge les toxicomanies et addictions au verso de l’avis de contravention.
Ouf. L’esprit de la loi de 1970 est donc sauvé...
Il s’agit d’une sanction discriminante à plusieurs titres.
• Selon les modalités mêmes de cette procédure, un primo-délinquant redevable d’une amende pourrait être sanctionné plus sévèrement qu’un récidiviste, dirigé vers un magistrat qui lui ferait un rappel à la loi, ou ordonnerait une injonction thérapeutique.
• Cette procédure simplifiée s’appliquera sans surprise à une population bien spécifique : celle des quartiers populaires, jeune, la moins solvable, et surtout la plus vulnérable d’un point de vue sanitaire et social.
Les chiffres indiquent pourtant que les classes moyennes consomment davantage que les plus précaires. Et aussi que toutes les tranches d’âge sont concernées par l’usage de drogues.
Alors est-ce véritablement l’usage de drogues qui pose problème ?
La répression s’applique-t-elle à une conduite individuelle à risques, ou plus confusément, à un comportement ou à des individus ?
Le ministre de l’Intérieur donne une réponse sans ambiguïté à cette question.
Tout ça pour ça…
Après que le rapport de la mission d’information parlementaire lui ait été remis, le ministre n’évoque plus que le cannabis (Europe1 le 25 janvier 2018) Dans ce document, et de façon récurrente, les deux députés insistent pourtant sur le principe, important selon eux, de ne pas faire de distinction entre les stupéfiants, ce qui avait mis tout le monde d’accord.
« (les rapporteurs) considèrent, en outre, que cette procédure d’amende forfaitaire doit concerner tous les stupéfiants sans distinction juridique ou de politique pénale selon le type de substance en cause. En effet, l’évolution de la composition des différents stupéfiants, l’apparition de « nouveaux produits de synthèse » (NPS) et le développement de la poly-consommation font que la distinction entre « drogues douces » et « drogues dures » n’est plus pertinente aujourd’hui. Par ailleurs, cette distinction pourrait accroître le sentiment de « banalisation » du cannabis dans l’opinion alors que sa consommation atteint un niveau préoccupant en France, notamment parmi les jeunes, et que sa composition en THC a beaucoup évolué ces dernières années. »
Bref, plus personne ne parle de stupéfiants ni ne s’interroge de la subtilisation de ce mot dans le discours, c’est le cannabis qui fera recette sans qu’on comprenne pourquoi les autres drogues sont écartées de cette forfaitisation.
Les uns feront donc l’objet d’une amende, et les autres resteront sous le coup de la loi de droit commun. Rendant donc sans objet l’argument d’équité de traitement par la forfaitisation, et faisant du même coup perdurer le mythe de la drogue dure et de la drogue douce, au mépris de la réalité des usages de drogues.
Mais surtout, on apprend (BFM le 9 février 2018) que la contraventionnalisation de l’usage de cannabis fera partie d’un ensemble de forfaitisations de petits délits, manière de taper tout de suite au porte-monnaie pour travailler à la reconquête républicaine de certains quartiers, charge à la nouvelle police de sécurité du quotidien d’encaisser le jackpot contraventionnel, de préférence sur place et sans délai.
L’usage de drogues (de cannabis, donc) se trouve purement et simplement classé dans la catégorie des incivilités et ne serait in fine qu’un problème d’ordre public.
En 1970 la loi s’était fixé, en théorie, de sanctionner pénalement les seuls usagers se soustrayant aux soins. Avec le temps, le prétexte sanitaire de la répression est apparu de moins en moins évident, avec la contravention il est purement et simplement dissocié de l’usage de drogues.
Quant à la "police de sécurité du quotidien", on va se dépêcher d’oublier qu’elle aurait pu être le vecteur d’un apaisement et d’un rapprochement avec la population, notamment celle avec qui elle partage crainte et inimitié. Oubliée aussi, la prévention, celle qui fait partie des missions de police un peu trop négligées, qui ne connaît pas la politique du chiffre mais donne du sens au principe de service public.
Le ministre de l’Intérieur, parangon de la révolution numérique pour une police du XXIème siècle, fera de ces îlotiers équipés pour une optimisation du rendement, les artisans d’une police sans âme, et d’impopulaires collecteurs de taxes pour un État proxénète irresponsable.
Moralité de l’histoire : un rendez-vous manqué avec la raison
Avec cette grosse usine à gaz de forfaitisation, une fois de plus, la question impérative sur la politique des drogues et de santé publique est contournée.
La prohibition et la répression restent le principe, sourd à tous les signaux d’alarme qui s’allument les uns après les autres.
Le constat de l’inutilité de la répression de l’usage de drogues est unanime.
Les pays qui y ont renoncé en tout ou partie, n’ont pu qu’observer des résultats positifs, tant en matière de santé publique, de réduction des risques, et de sécurité.
En juin 2017, l’OMS et l’ONU dans un communiqué conjoint appellent à "Réviser et abroger les lois punitives qui se sont avérées avoir des incidences négatives sur la santé et qui vont à l’encontre des données probantes établies en santé publique (s’agissant de) consommation de drogues ou leur possession en vue d’un usage personnel".
La prohibition génère une insécurité incontrôlable liée au trafic, notamment celui du cannabis qui représente un important marché, à la mesure du nombre de consommateurs.
Le trafic n’a que faire de l'interpellation et la répression des usagers ou de la forfaitisation, les prix sont stables, signe qu’il se porte bien, et à force de réactivité et d’adaptation, il a souvent une longueur d’avance sur l’action policière.
La régulation du marché du cannabis est une question qui ne pourra d’ailleurs pas être évitée ad vitam aeternam.
Il y a urgence à changer de politique.
L’information et la prévention sont inaudibles, et quasiment clandestines, l’usager-délinquant privilégiant la discrétion à la réduction des risques.
L’interdit participe largement au problème de santé publique. De nouveaux produits apparaissent régulièrement, la cocaïne est de plus en plus pure, la festive MDMA s'invite dans les Samu, le taux de THC du cannabis de rue est élevé, le Fentanyl - qui a fait baisser l’espérance de vie aux USA, depuis deux ans, à coups d’overdoses est désormais un produit de coupe de l’héroïne en France. Etc.
Informer sans tabou, prévenir et soigner sont les seules options d’intérêt général. La dissuasion ne passe pas par la répression. Les mineurs n'ont que faire des interdits, bien au contraire. Et l’usage de drogues ne peut raisonnablement pas être résumé à un trouble à l’ordre public, et n’avoir qu’une approche sécuritaire après bientôt 50 ans de prohibition en échec.
Si le travail de la police et la justice doit être concentré sur le trafic - un autre prétexte sibyllin de la forfaitisation - qu’à l’instar du Portugal, les usagers interpellés avec une quantité de drogue limitée à une consommation personnelle, soient dirigés, via une procédure administrative, vers une commission qui se chargera d’évaluer leur situation sanitaire et sociale, et décider de la suite à donner.
Et que l’usage de drogues soit purement et simplement dépénalisé
Sans demi-mesure répressive.
Rapport de la mission d’information relative à l’application d’une procédure d’amende forfaitaire au délit d’usage illicite de stupéfiants - Assemblée Nationale 25 janvier 2018
ILS : Infraction à la Législation sur les Stupéfiants
TAJ : Traitement des Antécédents Judiciaires
DACG : Direction des Affaires Criminelles et des Grâces
FAED : Fichier Automatisé des Empreintes Digitales
Dans quelques mois, au Canada, fumer un joint sera légal. Promesse de campagne de Justin Trudeau, la mesure est censée lutter contre les trafics de drogues et rapporter presque 700 millions d'euros de taxes à l'État chaque année. Dès à présent, les Canadiens se préparent : dans la province du Nouveau Brunswick, on forme les futurs spécialistes de la marijuana.
Reportage : C. François, G. Landry, S. Hamel en vidéo sur TV5MONDE
Dans une salle de classe du Collège communautaire du Nouveau-Brunswick, à Moncton, dix étudiants échangent avec leur professeure en horticulture. Jusqu’ici, rien de très original : sauf que le sujet du cours ne porte pas sur la culture des roses ou des tulipes, mais sur celle du cannabis. Ces dix jeunes vont devenir des techniciens spécialisés en culture de cannabis dans le cadre d’un programme que le Collège a lancé à l’automne dernier. Une formation unique en son genre pour l’instant au Canada et qui a été très populaire.
Pénurie de main d'oeuvre
Le Collège communautaire du Nouveau-Brunswick est spécialisé dans la formation de techniciens en tout genre et il travaille en étroite collaboration avec les entreprises de la province pour offrir des programmes d’enseignement là où il y a manque criant de main-d’œuvre. L’industrie du cannabis qui, pour l’instant, est limitée à la culture de la plante à des fins médicinales, mais qui deviendra légale dans tout le Canada au cours de l’été, rentre dans ce cas de figure. Voilà pourquoi l’établissement a décidé de mettre en place cette formation en techniques de culture du cannabis.
Formation de douze semaines
Les cours ont commencé en décembre 2017 et se terminent le 9 mars prochain, soit un total de 12 semaines. Les étudiants ont appris les caractéristiques du cannabis, quels sont ses besoins en lumière, humidité, engrais, sa fragilité aux maladies, comment cultiver ses fleurs, etc... Cours théoriques et cours pratiques donnés dans les serres d’Organigram, entreprise de Moncton spécialisée en culture de cannabis à des fins médicinales. Ces étudiants devraient d’ailleurs y trouver un emploi une fois leur formation terminée, et si ce n’est chez Organigram, ce pourrait être dans les deux autres entreprises de Moncton qui cultivent du cannabis à des fins médicinales. C’est ce qui a motivé la majorité de ces étudiants.
« C’est une nouvelle industrie au Nouveau-Brunswick, les perspectives d’obtenir de bons emplois dans tout le Canada sont très bonnes » explique l’un d’eux, Shawn Stewart. « Oui il va y avoir beaucoup d'opportunités d'emplois, puis ça grandit ça grandit ! » renchérit Penny Richard, une mère de famille qui a décidé de reprendre ses études après avoir passé plusieurs années avec ses jeunes enfants à la maison. Scott Clark, lui, se dit très satisfait de l’enseignement reçu dans ce programme : « Trois mois, ce n’est pas assez c’est sûr pour tout apprendre sur le cannabis, mais c’est assez pour travailler dans ce domaine » dit-il. Une bonne base, en quelque sorte, que ces étudiants pourront approfondir par la suite avec d’autres études plus spécialisées ou autres enseignements complémentaires. Shawn par exemple envisage, dans un avenir lointain, d’avoir, qui sait, sa propre entreprise de culture de cannabis…
Secteur prioritaire pour le Nouveau-Brunswick
Le gouvernement du Nouveau-Brunswick a défrayé les frais de scolarité de ce programme, le premier du genre au Canada...
« La province a placé l'industrie du cannabis comme un secteur prioritaire de développement socio-économique pour la province » explique Pierre Clavet, Conseiller sectoriel au Collège communautaire du Nouveau-Brunswick
Cette province maritime de l’est du Canada a donc décidé d’amorcer le virage cannabis, prenant ainsi un peu d’avance sur les autres provinces.
Et l'expérience du Collège est suivie de près par d'autres établissements ailleurs au Canada qui veulent eux aussi mettre en place très prochainement des programmes identiques : « On a eu certaines discussions avec d’autres collèges oui et c’est toujours en cours, c'est vraiment une industrie émergente et il y a beaucoup d’actions dans ce domaine, notamment dans l’aspect formation du secteur, ça bouge beaucoup » souligne Pierre Clavet.
Les responsables du Collège poursuivent aussi leurs discussions avec les entreprises de la région qui cultivent du cannabis à des fins médicinales afin de vérifier leur besoin en main-d’œuvre et lancer un nouveau programme au cours des prochains mois au besoin. Ils envisagent également d’offrir la formation en français – cette première session ne s’est donnée qu’en anglais.
Prescrit aux personnes âgées, le cannabis thérapeutique aiderait à diminuer nettement les douleurs chroniques sans risque pour la santé. Une efficacité notamment prouvée chez des patients atteints de cancer par des chercheurs israéliens.
Dans quelle mesure le cannabis thérapeutique réduit-il la douleur sans induire d’effets indésirables ? Pour le savoir, des chercheurs israéliens* ont suivi 2.736 patients âgés de plus de 65 ans pendant 6 mois. Plus de 60 % d’entre eux ont bénéficié de cette prescription médicale dans le but d’apaiser une douleur, déclenchée dans la majorité des cas par un cancer. Au total, « 33 % ont pris cette molécule sous forme d’huile infusée, 24 % ont inhalé cette substance en fumant et environ 6 % par vaporisation ».
Une douleur de 4 sur une échelle de 10
A la fin de l’étude, « plus de 93 % des 901 répondants ont rapporté une baisse** de leur douleur, passant de 8 à 4 sur une échelle de 10. Pour plus de 60 % des patients qui à la base rapportaient une ‘mauvaise’ ou une ‘très mauvaise’ qualité de vie, cette donnée est passé de ‘bonne’ à ‘très bonne’. » Preuve que cette prescription s’est avérée globalement efficace.
Autres points, les rares effets secondaires se traduisaient dans 9,7% des cas par des vertiges, 7,1% par une sensation de bouche sèche. Le cannabis thérapeutique a par ailleurs permis de diminuer l’usage de médicaments : « après les 6 mois de prise, 18 % des participants ont réduit le dosage ou arrêté de prendre des analgésiques opiacés. » Ces molécules pouvant contenir de la morphine, sont prescrites sous ordonnance et exposent à un risque de dépendance. Un bienfait important pour alléger l’ordonnance des personnes âgées. « Ces résultats méritent d’être creusés », notent les scientifiques.
A noter : à ce jour, le cannabis thérapeutique est totalement légalisé dans 24 pays du monde. En France, le seul médicament à base d’extraits de cannabis (THC*** et cannabidiol) est le Sativex®, spray nasal mis au point pour réduire les douleurs des patients atteints de sclérose en plaques. Ce dernier dispose d’une autorisation de mise sur le marché depuis le 8 janvier 2014, mais n’est toujours pas délivré dans les pharmacies.
*Ben-Urion University of the Negev (BGU) and the Cannabis Clinical Research Institute of Soroka University Medical Center
**valeur médiane ***tétrahydrocannabinol
Le cannabis récréatif n’est pas encore légalisé, mais de nombreux Canadiens en profitent pour faire fortune.
Au moins 77 d’entre eux ont accumulé des millions de dollars en quelques mois seulement grâce à leurs investissements dans l’industrie, révèlent des données compilées par notre Bureau d’enquête.
«Je savais que le pot était un bon investissement, mais personne dans le milieu ne pensait que ça rapporterait autant si rapidement», s’étonne Chuck Rifici, patron du fonds d’investissement Cannabis Wheaton et ancien chef des finances du Parti libéral du Canada (PLC).
À 43 ans, celui qui est décrit comme le «parrain du pot» au Canada est assis sur une fortune personnelle qu’il estime lui-même à «plus de 100 millions», dont 47,7 M$ en actions de producteurs de pot, selon des documents financiers publics.
Il possède une Ferrari 458 rouge et une Tesla S.
Tout a commencé avec un premier investissement de 70 $ en actions dans sa compagnie Tweed, un producteur de pot (devenue Canopy Growth). «Je pensais que j’étais riche quand j’ai fait mes premiers 500 000 $», plaisante l’homme d’affaires d’Ottawa.
M. Rifici dit aujourd’hui continuer de travailler seulement «pour le plaisir». «C’est pas mal moins stressant».
Gros risques
De l’autre côté de la rivière des Outaouais, à Gatineau, Sébastien St-Louis, 34 ans, compte une fortune de 15,4 millions $.
Sa compagnie fondée en 2013, Hydropothecary, est évaluée à 660 millions $ à la Bourse.
Le chemin pour en arriver là n’a pas été facile. «J’ai passé à deux doigts de faire faillite au moins quatre fois. Ma carte de crédit était utilisée au maximum à 30 000 $».
Des histoires comme celle de Rifici et Saint-Louis, devenus millionnaires avant même qu’un seul gramme de pot récréatif ne soit vendu légalement, se comptent par dizaines dans l’industrie.
Établir la liste des Canadiens millionnaires du pot permet de faire les constats suivants:
- La grande majorité, soit 58% d’entre eux (45 sur 77), provient de l’Ontario.
- Seulement 4 viennent du Québec (5%).
- Sur 77 millionnaires, il y a seulement trois femmes.
- La richesse est extrêmement concentrée.
Bulle spéculative?
La valeur en bourse des entreprises de pot a explosé l’an dernier au gré des annonces du gouvernement Trudeau sur la légalisation à venir en 2018.
Le Néo-Brunswickois Denis Arsenault a, lui, racheté en 2014 un producteur de cannabis médical pour 1,7 million $. Son acquisition, la compagnie Organigram, vaut aujourd’hui un demi-milliard $.
«C’était comme aller au casino quand j’ai investi dans ça, au début», rit-il.
Même si les Canadiens sont encore divisés sur la question de la légalisation du cannabis et que les banques sont très réticentes à investir dans cette industrie, les investisseurs, eux, se bousculent maintenant aux portes au point que l’on craint une bulle spéculative.
Selon plusieurs experts, la frénésie actuelle s’apparente à la bulle des titres technologiques à la fin des années 1990, car ils sont extrêmement volatiles.
«Il y a des compagnies qui ne sont pas dans le cannabis, qui font juste dire qu’elles sont intéressées par l’industrie et boum, leurs actions triplent», souligne l’analyste en gestion de portefeuille Ken Lester, président de Lester Asset Management.
- avec la collaboration de Marie-Christine Trottier et Andrea Valeria
Les supporters étrangers pourront ramener en Russie pendant la Coupe du monde des drogues comme le cannabis, mais aussi de la cocaïne ou de l’héroïne, sous certaines conditions…
Photo@reuters
En Russie, les touristes sont autorisés à pénétrer dans le pays avec certaines substances interdites, s’ils possèdent une justification médicale.
Et d’après le Moscow Times, des drogues comme le cannabis, la cocaïne et l’héroïne font partie de cette liste et pourront donc être ramenées par des supporters étrangers durant la prochaine Coupe du monde, qui se déroule en Russie du 14 juin au 15 juillet.
Des justifications… en cyrillique
Les membres des forces de l’ordre qui officieront dans les différents enceintes du Mondial seront ensuite chargés de vérifier la validité des justifications médicales, qui devront être écrites en cyrillique.
Reste à voir si ces produits pourront être consommés dans les stades, puisque selon le règlement de la FIFA sur la sûreté et la sécurité des stades, les organisateurs peuvent "refuser l’accès ou expulser toute personne qui (…) présente un risque suite à la consommation d’alcool et/ou de drogues", même si le texte précise par ailleurs que cela doit être fait "en accord avec les exigences des autorités locales/nationales et dans le cadre légal du pays hôte."
Le Parlement grec a légalisé aujourd'hui la production de cannabis thérapeutique et de produits pharmaceutiques dérivés, une mesure dont le pays attend des retombées en terme d'investissements.
Le projet de loi, qui s'inscrit dans les réformes sociétales promues par le gouvernement d'Alexis Tsipras, a été soutenu par les députés de la majorité, alliant gauche radicale et droite souverainiste, et de l'opposition de centre gauche.
L'opposition conservatrice et néonazie, ainsi que le parti communiste KKE, ont voté contre. Le rapporteur de l'opposition conservatrice, Kostas Vlasis s'est notamment ému d'une réforme susceptible selon lui de mettre le pays au rythme d'un "joint interminable". Dans un pays où l'usage récréatif du cannabis reste prohibé, le texte soumet à de strictes conditions la culture de cette plante et la fabrication de produits pharmaceutiques en étant tiré.
Cette réforme doit "ouvrir la voie à des investissements grecs et étrangers", avait récemment expliqué à l'AFP Yannis Tsironis, ministre adjoint au Développement agricole. Le chiffre d'affaires qui pourrait être généré "est estimé entre 1,5 et 2 milliards d'euros", avait-il précisé, soulignant que des entreprises grecques mais aussi israéliennes et canadiennes étaient intéressées. Le climat et l'ensoleillement grec sont considérés comme très favorables au développement de cette culture, comme en atteste d'ailleurs la fréquente découverte par la police de plantations illégales de cannabis dans la campagne grecque.
L'année dernière, le gouvernement avait autorisé, sous certaines conditions, l'importation de certains produits pharmaceutiques à base de cannabis médical, ainsi que la culture du chanvre (cannabis sativa) à des fins industrielles. Le chanvre peut être utilisé dans la construction, le textile, la papeterie, l'alimentation ou encore dans la fabrication de matériaux composites. Une dizaine des pays de l'Union européenne ont autorisé le cannabis à des fins médicales.