Big Marijuana : Une enquête sur "l’industrie du cannabis"
Par mrpolo, dans Ce que nous avons retenu...,

Le marché du cannabis légal augmente rapidement. Canopy Growth, leader du secteur, est coté à Wall Street. La journaliste Stéphanie Loridon a enquêté sur ce secteur en plein essor.
Photo: Stéphanie Loridon était l'invitée de franceinfo lundi 13 mai.  (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)
 
Le cannabis sort de l’ombre. De plus en plus de pays autorisent cette drogue, et le marché "légal" croît de manière spectaculaire. Avec Xavier Deleu, Stéphanie Loridon publie Big Marijuana, quand le deal devient légal (Hugo Doc). Le "big marijuana", explique-t-elle, c’est l’idée "qu’une industrie de la marijuana s’est créée très rapidement, d’autant plus qu’elle utilise tous les outils du capitalisme financier. Elle arrive maintenant à la bourse de New York". Aux États-Unis, où plusieurs États ont franchi le pas, le cannabis "légal" génère un chiffre d’affaires de 10 milliards de dollars environ, chaque année.  
 
Le Canada précurseur
Le Canada est le premier grand pays à avoir légalisé le cannabis, dans son usage récréatif, en octobre dernier. Selon Stéphanie Loridon, cinq groupes seulement se partagent 70% des ventes : "Ils sont partis très tôt dans la course, et ont pu construire très vite des usines". Le leader, Canopy Growth, a des visées mondiales.  
 
 
Alcooliers et fabricants de tabac ont compris tout l’intérêt de ce marché, notamment aux Etats-Unis : "Constellation, un grand groupe d’alcool américain, a pris une participation importante dans Canopy Growth, leader canadien du cannabis. Et maintenant Canopy est en train de racheter un groupe américain de cannabis, Acreage".   
Là où le cannabis est rendu légal, la consommation de cette drogue augmente-t-elle ou recule-t-elle ? "Dans les états américains précurseurs comme le Colorado, la consommation est à peu près stable, notamment chez les jeunes. C’est une préoccupation de santé importante", explique Stéphanie Loridon, qui poursuit : "Au Canada, d’après une enquête récente, il y a eu une petite hausse de la consommation. Mais c’est beaucoup trop tôt pour dire ce qui va se passer. Il faudra probablement une génération pour mesurer l’impact pour des jeunes qui grandissent dans un environnement où le cannabis est légal". 
 

Source: francetvinfo.fr
 
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France - 16 % des consommateurs conduisent après avoir fumé du cannabis
Par mrpolo,
Une enquête démontre que 16 % des consommateurs de cannabis ont reconnu conduire sous l'emprise de drogue. Un chiffre inquiétant qui peut avoir des conséquences dramatiques.   Photo: Le cannabis diminue les temps de réaction au volant. Photo AFP   Boire ou conduire, il faut choisir. On pourrait y ajouter depuis longtemps : fumer du cannabis ou conduire, il faut choisir. En 2017, 439 personnes qui avaient fumé du cannabis ont provoqué un accident mortel sur les routes françaises. Il faut dire que 16 % des consommateurs de cannabis reconnaissent conduire après avoir fumé, d'après une enquête de 2016. C'est plus que la moyenne européenne de 11 %.
  Si les jeunes ont longtemps été les seuls concernés, ce  n'est plus le cas aujourd'hui. "Les jeunes sont concernés mais la consommation perdure après 25 ans", explique Anne Lavaud, la déléguée générale de l'association Prévention Routière, au Figaro. 
  Quoi qu'en pensent les adeptes du pétard, conduire après avoir fumé représente un risque. "Contrairement à l'alcool, où les risques au volant sont intégrés, les consommateurs de cannabis pensent rouler sans danger. Ils disent adopter une conduite cool", explique le délégué interministériel à la sécurité routière Emmanuel Barbe. Pourtant, c'est prouvé, le cannabis diminue les temps de réaction et entraîne une perte de coordination des mouvements.
 
Détecter ces conducteurs s'est généralisé au cours des contrôles des forces de l'ordre avec un test salivaire. En 2017, 233 586 contrôles ont été menés. 23 % des tests étaient positifs. Et contrairement à l'alcool, où il existe un seuil à ne pas dépasser, la simple présence de drogue chez le conducteur constitue un délit. La loi prévoit 2 ans de prison, une amende de 4500 € et le retrait de 6 points sur le permis. En cas de mélange drogue/alcool, l'amende est de 9000 € et la peine de prison de trois années.
 
titre source corrigé
Source: ladepeche.fr
 
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Sauvons nos enfants du cannabis, il y a urgence !
Par penacho,
Tribune 
Pr Jean-Pierre Pujol, Pr émérite de l’université de Caen, membre du Centre national de prévention, d’études et de recherches sur les toxicomanies (C.N.P.E.R.T).
La Croix  le 06/05/2019 à 14:31   

 
À l’heure où le marché florissant du cannabis suscite la convoitise de lobbys sans scrupule qui prêchent pour sa légalisation, il est urgent de rappeler quelle est la situation de ce fléau dans notre pays et les ravages qu’il génère chez nos ados.
Le cannabis n’est pas une « drogue douce », comme certains voudraient le faire croire à notre jeunesse. Déjà 300 000 enfants de 12 à 15 ans ont expérimenté ce produit et souvent son usage est associé au tabac et à l’alcool, ce qui aggrave encore les méfaits sur l’organisme.
Il faut savoir que la consommation du cannabis est responsable de 300 morts de la route et que le risque d’accidents mortels est 14 fois plus grand lorsque l’alcool est associé.
 
De plus, les troubles physiques et psychiques sont nombreux, menant souvent à la violence, à une forte tendance suicidaire et parfois même à la schizophrénie. À cet égard une étude Néo-Zélandaise montre que sur 1 000 adolescents qui avaient commencé à consommer au collège, 100 d’entre eux (10 %) étaient devenus schizophrènes à 18 ans.
Perte irréversible du Quotient Intellectuel
Fumer du cannabis provoque une perte d’attention chez les élèves, une difficulté à suivre les cours, à mémoriser les données, et compromet gravement le parcours scolaire. Les enseignants nous disent qu’ils ont affaire à des individus complètement apathiques, démotivés et parlent de la « drogue de la crétinisation ». Une perte irréversible de 9 points de Quotient Intellectuel (Q.I.) est d’ailleurs observée chez les consommateurs permanents.
Ce tableau ne fait que s’assombrir avec l’augmentation du taux de THC (tétrahydrocannabinol) dans les produits actuels. Il faut ajouter que l’addiction au cannabis, surtout lorsqu’elle apparaît très tôt chez les adolescents, conduit parfois à la recherche de drogues encore plus néfastes, comme la cocaïne et l’héroïne.
 
Comment, dès lors, peut-on plaider en toute conscience pour une légalisation du cannabis dans notre pays ? L’argument de certains serait d’invoquer les vertus thérapeutiques potentielles de cette drogue, et c’est le truchement par lequel sont passées les nations qui ont choisi cette option, comme le Canada récemment. Mais les données expérimentales dont nous disposons actuellement ne permettent pas de considérer le cannabis comme un médicament car il se montre très inférieur aux substances déjà mises sur le marché et utilisées dans les pathologies concernées, avec par contre des effets secondaires importants, notamment sur la sphère cardio-vasculaire. On peut admettre que les recherches sur certaines substances présentes dans la feuille de cannabis puissent se poursuivre mais ceci n’implique pas pour autant de passer à la légalisation.
Une crise sanitaire nationale
Contrairement à des pays comme la Suède, qui a mis en place une politique efficace de lutte contre la toxicomanie, basée à la fois sur la répression et sur la prévention, les pouvoirs publics français ne se montrent pas à la hauteur d’un problème qui s’apparente à une crise sanitaire nationale. D’ailleurs, la France est classée en tête des 28 états européens pour la consommation de cette drogue. Combien de temps faudra-t-il pour que l’on prenne conscience de l’urgence d’intégrer dans les programmes scolaires, et ce dès l’école primaire, une information auprès de nos enfants sur les dangers de cette drogue « lente » ? Il faut absolument que Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, associé à la ministre des solidarités et de la santé, Agnès Buzyn, mette en place de façon urgente un plan scolaire d’information dont l’exécution serait supervisée en région par les recteurs d’académie.
Des structures d’accueil pour les parents
Enfin, avec la demande pressante de nos concitoyens d’une plus grande proximité des services publics, il serait intéressant de prévoir des structures d’accueil pour les parents touchés par ce problème et qui vivent un drame familial de façon silencieuse. Ces derniers, bien souvent considèrent comme déshonorante la situation de leur enfant atteint par le fléau et refusent d’en parler. Ils ne savent pas à quel service s’adresser pour trouver des spécialistes qui soient à l’écoute et leur permettent de « tirer d’affaire » leur enfant. Seul un soutien médical et familial peut laisser espérer un retour à la normale avant qu’il ne soit trop tard. Pourquoi ne pas prévoir de telles structures au sein des maisons « France Services » proposées par le président de la République ?
 
https://www.la-croix.com/Debats/Forum-et-debats/Sauvons-enfants-cannabis-urgence-2019-05-06-1201019941
 
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Space cake, tisanes et plants bio : la débrouille des patients consommateurs de cannabis thérapeutique
Par mrpolo,
L'Agence nationale de la sécurité du médicament doit rendre un avis avant l'été sur les modalités de distribution du cannabis thérapeutique. Entre 300 000 et un million de personnes pourraient être concernées. Ceux qui l'utilisent déjà font comme ils peuvent, dans l'illégalité, pour soulager leurs douleurs.
 
Illustration: Franceinfo a interrogé des malades ayant recours au cannabis thérapeutique, sur lequel l'Agence nationale de la sécurité du médicament doit bientôt rendre un avis. (AWA SANE / BAPTISTE BOYER / FRANCEINFO)
 
"Ma vie s'est considérablement améliorée." Atteint d'une myopathie depuis plus de quarante ans, Jean est invalide à 80%. "J'ai une rétraction des jambes, les miennes sont toujours pliées, même la nuit. Mais avec le cannabis, je dors très bien, les douleurs musculaires s'apaisent", confie cet homme de 52 ans. "Je ne vais pas me relever sur mes jambes, relativise-t-il, en fauteuil roulant depuis dix ans, mais j'ai le moral. Je vais de l'avant". Le cannabis a favorisé un retour de son appétit et du sommeil, ce qui, selon lui, réduit les risques de voir sa maladie progresser.
 
Comme Jean, ils seraient entre 300 000 et un million de Français à consommer du cannabis thérapeutique, selon les informations du Parisien. La consommation du chanvre, l'autre nom de la plante, est pourtant illégale en France car les molécules de delta-9-tétrahydrocannabinol (THC) qu'elle contient sont inscrites dans la liste des stupéfiants. Néanmoins, en décembre 2018, un comité scientifique nommé par l'Agence nationale de la sécurité du médicament (ANSM) a validé sa pertinence médicale : la plante a, entre autres, des vertus antalgiques, antiépileptiques, antispasmodiques et de décontractant musculaire. 
 
L'ANSM se dit d'ailleurs favorable à son utilisation lorsque les thérapies classiques ne viennent plus à bout des douleurs. Quelques centaines de patients ont déjà pu bénéficier, à titre exceptionnel, d'autorisations pour pouvoir consommer des médicaments à base de cannabis thérapeutique. D'autres pourraient suivre puisque l'ANSM évalue actuellement les modalités de mise à disposition sur le marché d'autres traitements à base de cannabis thérapeutique. 
 
La piste peu fructueuse du cannabis classique
Certains médecins sont conscients depuis longtemps de son utilité. Ce sont parfois eux qui, à court de solutions, font germer l'idée chez leurs patients. C'est ce qu'il s'est passé pour Frédéric, atteint d'une maladie orpheline qui se manifeste sous la forme d'une pancréatite chronique. "Drogué sans en avoir conscience" à la morphine, cet ancien chef d'entreprise raconte s'être habitué à ce puissant dérivé de l'opium... jusqu'à un arrêt cardiaque en 2007. Quelques mois plus tard, son spécialiste lui lance : "Ce serait peut-être bien, Fred, que tu essaies le cannabis thérapeutique. Ca peut fonctionner." Sans son médecin, ce patient assure qu'il n'y "aurait jamais pensé". Lui qui se rappelle avoir "détesté le joint" lors d'une soirée étudiante, se met désormais à faire des recherches sur internet pour se procurer du cannabis.
 
En attendant l'avis définitif de l'ANSM, qui doit être rendu courant 2019, les malades glanent des informations où ils le peuvent et s'essayent à différentes méthodes de consommation. La première expérience consiste souvent à fumer du cannabis coupé avec du tabac, et trouvé grâce au "trafic de rue". Françoise Maillard a ainsi demandé à son fils de lui faire fumer un joint pour lutter contre la spasticité (contractures imprévisibles des muscles), conséquence de sa sclérose en plaques. En vain : "Il m'a dit 'Maman, ce n'est pas la peine, tu crapotes, tu n'avales pas la fumée'." D'autres ont renoncé à cette solution à cause de l'effet psychotrope provoqué par une part trop importante de THC dans le cannabis vendu illégalement.
"J'ai essayé d'acheter pendant un temps dans la rue mais c'est coupé avec n'importe quoi." Jean, atteint d'une myopathie, à franceinfo
"Sur le marché noir, c'est du cannabis récréatif avec une dose très importante de THC, ce qui provoque une ivresse et qui n'est pas adapté pour les malades", explique Fabienne Lopez, de l'association Principes Actifs, qui regroupe des "citoyens concernés qui ont pour seul délit la production minimaliste [de cannabis] pour se soulager". A l'inverse du cannabis "récréatif", le cannabis thérapeutique repose sur un "équilibre" entre les molécules de THC et de CBD. Le psychiatre et président de la Fédération Française d'Addictologie, Amine Benyamina, millite depuis quinze ans pour "pour la libération du cannabis thérapeutique afin de le distinguer du festif et afin que ses détracteurs cessent d'empêcher sa préscription chez des gens qui en ont vraiment besoin." 

 
Après s'être détournés du cannabis récréatif, les consommateurs malades essaient parfois des produits à base de molécules de cannabidiol (CBD). La loi française l'interdit, mais pas la loi européenne, ce qui a permis à des boutiques d'ouvrir en France, à condition de vendre des produits avec un taux de THC inférieur à 0,2%. Mais, à en croire Eva et d'autres malades interrogés, les effets ne sont pas suffisants pour apaiser leurs douleurs. La jeune femme de 20 ans, atteinte d'une fibromyalgie, une maladie auto-immune qui exacerbe chaque douleur quotidienne, s'est laissée tenter par des bonbons et des gélules au CBD. Leur "goût infect" et la persistance de ses douleurs l'ont convaincue de ne pas renouveler l'expérience. Sa seule alternative reste des produits avec du THC, disponibles "en deux clics" sur internet. "Mais qu'est-ce qu'on me vend vraiment ?", s'inquiète-t-elle. 
 
"Au cinquième morceau, j'ai décollé"
Isolés, les malades cherchent donc leurs propres solutions. Revenue du joint, Françoise a ainsi tenté la piste du gâteau au chocolat au cannabis. "Un super goût, se remémore-t-elle, mais le problème, c'est qu'on ne connaît pas les quantités qu'on met... Au cinquième morceau, j'ai décollé, décrit l'ancienne médecin pour l'industrie pharmaceutique. Je planais dans un état secondaire, un peu comme une anesthésie générale. C'est ingérable." 
 
Au fil des années et des expériences décevantes, la majorité des malades consommateurs interrogés par franceinfo se sont donc mis à cultiver leurs propres plants de cannabis. Beaucoup ont consulté des livres et des vidéos en ligne pour devenir de vrais experts. Comme les taux de CBD et de THC ne sont pas les mêmes selon les variétés, il faut parvenir à déterminer quel mélange va soulager au mieux ses symptômes. Pour les tester, ces chimistes en herbe se font parvenir par voie postale des boutures de différentes variétés.
 
Séropositif depuis trente ans, Bertrand Rambaud ne supporte pas ses traitements antirétroviraux. "Le cannabis me permet de les prendre, les effets secondaires me pourrissent trop la vie sinon", explique le président de l'association UFCM I Care, sujet aux douleurs digestives, à une perte d'appétit et à plusieurs troubles du sommeil. Il a fini par trouver le dosage qui lui convient : moins de THC le matin pour ne pas "ressentir dès le matin l'ivresse du cannabis" ; davantage le soir, "quand les douleurs commençent à se réveiller" et "pour ouvrir l'appétit". 
 
Des expérimentations "maison"
Ensuite, à chacun sa méthode pour s'administrer la substance. "Je fais des gélules, à placer sous la langue, ou des liquides pour e-cigarette, grâce à un extracteur d'huile", détaille Bertrand Rambaud. "Pour moi, c'est [une tisane] avec du lait entier ou de la crème car le THC se fixe avec de la graisse", explique Mado, atteinte d'une syringomélie qui lui donne des "symptômes étranges". Par exemple "une sensation de brûlure sur la main alors qu'on n'est pas près d'un feu". A 64 ans, elle a mis au point une recette d'infusion à base de fleurs de cannabis, pour ne pas aggraver son état en fumant.
"Des malades atteints de syringomélie qui sont vegan font 'ma' tisane avec du lait d'amandes et de la noix de coco." Mado, atteinte d'une syringomélie, à franceinfo
Une recette aussi appliquée par Catherine pour sa fille atteinte d'une neurofibromatose. Cette dernière lutte contre des tumeurs présentes dans tout son corps mais aussi sur son système nerveux, ce qui provoque des "souffrances terribles". Catherine stocke pour elle la tisane dans un bac à glaçons et un cube suffit, tous les quinze jours.
"Je [la] revois sourire. Elle était éteinte et d'une tristesse à pleurer toute la journée", souffle cette mère. Elle assure que sa fille a réussi à diminuer d'un tiers sa dose quotidienne de morphine. "Elle n'ose pas en prendre davantage car elle ne sait pas ce que ça pourrait donner, avec le cocktail de traitements qu'elle prend".
 
En effet, ces expérimentations "maison" des malades avec le cannabis sont loin d'être sans danger sans le suivi d'un médecin. "La manière avec laquelle le produit est préparé dans les pays où il est légalisé n'entraîne aucun risque. En tout cas, cela n'a pas plus d'effets qu'avec les opiacés et les benzodiazépines", rappelle quant à lui le docteur Amine Benyamina. Face à des témoignages de patients sans "recours" et "isolés", l'addictologue souhaite que le corps médical sorte "des postures idéologiques" vis-à-vis du cannabis thérapeutique, ce qui limite les études scientifiques sur ses effets. 
 
Des solutions coûteuses
En l'absence de régulation, ces expérimentations représentent aussi un certain coût pour ces patients. "Je dois investir dans des graines mais sinon je fais des boutures", raconte Jean. "Ca me coûte bien moins cher que si c'était dans la rue", assure-t-il, et ce malgré le coût des éclairages nécessaires, qui font gonfler sa facture d'éléctricité. De son côté, Frédéric chiffre "en milliers d'euros" les dépenses consenties. "J'essaie de faire en bio pour m'intoxiquer le moins possible, mais c'est vrai que ça me revient assez cher."
 
Et la facture peut vite monter lorsqu'on décide de s'approvisionner à l'étranger en médicaments à base de cannabis, plutôt que de cultiver ses propres plants. Ainsi, un médicament agit sur la spasticité de Françoise : le Sativex. Ce spray buccal a obtenu une autorisation de mise sur le marché français en 2014. Mais faute de consensus sur le prix, il n'est toujours pas disponible dans nos pharmacies.
 
Depuis la région parisienne, Françoise a donc décidé d'aller jusqu'en Suisse, où le médicament est autorisé, moyennant 300 euros par mois, sans compter les frais de déplacement. "Ça fait trois ans que je fais ça (...) j'étais désespérée de voir que le [Sativex] n'arrivait pas en France, je me suis résolue à trouver des alternatives." Pour ne pas alourdir la facture, cette dynamique soixantenaire étale sur deux mois son traitement prévu pour un mois. 
 
Vivre avec la maladie, l'illégalité et la "parano"
Si la prise de cannabis thérapeutique adoucit le quotidien des malades interrogés, cette consommation, pour l'heure encore illégale, inquiète souvent leurs proches. "Mon entourage me dit que je vais avoir une descente de la police chez moi", confie Françoise. Les malades qui produisent leurs propres plants, comme ceux qui recourent à d'autres méthodes pour s'en procurer, vivent dans l'illégalité. Plusieurs confient qu'il est difficile de ne pas "virer parano". Ceux qui s'approvisionnent à l'étranger doivent passer les douanes. Il y a quelques années, Jean s'est fait arrêter à la frontière en possession de cannabis. L'amende de 80 euros qu'il a dû régler l'a décidé à faire pousser du cannabis chez lui.
 
"Je ne me sens pas délinquante. Parce que, pour moi, je ne ramène pas du cannabis mais je ramène un médicament avec du cannabinoïde." Françoise, qui souffre d'une sclérose en plaques, à franceinfo
 
Pressés de sortir de l'illégalité, les consommateurs de cannabis thérapeutique guettent l'avis de l'ANSM et la moindre avancée vers la mise sur le marché de nouveaux traitements. "Depuis 2013, on attend toujours. L'Etat traîne les pieds. C'est presque de la non-assistance à personne en danger", témoigne Jean. Selon ce père de famille, aucun traitement existant ne le soulage de sa myopathie, excepté le cannabis. "On empêche les gens d'accéder aux soins alors que nos voisins européens le font !", tonne-t-il. 
Une incompréhension que partage également Frédéric, atteint d'une maladie orpheline qui le clouait quotidiennement au lit jusqu'à ce qu'il se décide à prendre du cannabis thérapeutique. Depuis, ce quinquagénaire revit : "Avant, quand je faisais simplement quatre cents mètres, j'étais trop content. Aujourd'hui, je me remets au VTT !" Mais cette nouvelle vie ne l'apaise pas totalement, dans l'attente d'une vraie solution, légale : "Je n'ai aucune culpabilité à rester en vie. Par contre, la vie est assez compliquée comme ça, donc si on peut éviter de rajouter des ennuis judiciaires, ce serait pas mal."
 
Source: francetvinfo.fr
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Contre la pénalisation des usagers de drogues
Par Invité,
Des policiers et diverses associations signent un appel à réformer la législation de la répression de l’usage de stupéfiants.
Tribune. La question des drogues se place avec force arguments sur le plan de la santé et celui, essentiel, de la réduction des risques, laissant entre les lignes du débat la réalité de la répression, son mécanisme et ses non-dits. Or, c’est une question centrale. La politique des drogues est policière avant même d’être judiciaire. Comment l’oublier alors que figure aujourd’hui dans la loi l’amende forfaitaire délictuelle ? Ce dispositif met à mal les droits des usagers justiciables, il fait des forces de l’ordre une autorité de constatation, de poursuite et de jugement, au mépris de la séparation des pouvoirs, et bien que figurant dans le code de la santé publique et s’appliquant à une conduite individuelle et à risques, il brise le lien avec… la santé publique.
 
Exactement calibrée pour constituer un appel d’air à la politique du chiffre, l’amende forfaitaire renforce l’arsenal répressif et compliquera l’action des forces de l’ordre par une exigence accrue de «résultats», au prix d’un surplus de tensions et d’hostilité réciproque dans les quartiers qu’on leur demande - selon les mots du gouvernement - de «reconquérir», alors qu’un apaisement police-population est urgent. Tandis que d’autres pays font évoluer leur législation, et qu’au nom de la santé et du droit, nombre d’experts appellent à lever les mesures répressives, la France, pays le plus répressif d’Europe, s’obstine dans une logique prohibitionniste (1). La consommation de cannabis et de cocaïne bat des records (2). La preuve est faite depuis longtemps que la sanction ne dissuade pas, et qu’à tous égards, la politique répressive menée depuis 1970 est un échec.
 
Cette répression est pourtant intense. Les forces de l’ordre consacrent plus de la moitié de leur activité d’initiative à interpeller et à mettre des usagers de drogues en garde à vue, pour un délit mineur, sans victime ni enquête puisqu’il est élucidé au moment où il est constaté. Le délit d’usage de stupéfiants n’est qu’un prétexte. L’utilisation de statistiques ethniques par d’autres pays indique un tout autre aspect de cette traque à l’usager. L’argument sanitaire est un alibi, et celui de la sécurité publique, un leurre. C’est une forme de contrôle social qui s’opère, et il est plus juste de parler de répression des usagers et de criminalisation de groupes sociaux et d’individus, que de stricte répression d’un délit. Contrairement aux autres infractions, l’action policière s’applique aux usagers de drogues pour ce qu’ils sont, et non pour ce qu’ils font ou ont au fond des poches.
 
Ce principe n’est pas nouveau. Aux Etats-Unis, les hippies ont payé le prix pénal de leur consommation de cannabis et de psychédéliques parce qu’ils contestaient la guerre au Vietnam ; la guerre à l’héroïne visait la communauté pauvre afro-américaine. Aujourd’hui, le prétexte de la répression des Noirs est le crack, bien plus sévèrement puni que la blanche cocaïne, alors que le principe actif est le même. Pendant ce temps, la classe moyenne blanche s’intéresse de trop près aux opioïdes et en meurt. Les overdoses se comptent par centaines de milliers. C’est pour ces usagers de drogues que l’Amérique aujourd’hui place la santé devant la sanction. Cherchez l’erreur.
 
En France, la loi de décembre 1970 a été votée sous pression du gouvernement, par des députés peu convaincus du bien-fondé de la répression de l’usage de drogues, en réponse et injonction morale aux contestataires de Mai 1968 qui n’avaient cessé de vouloir refaire le monde. Cette répression aux allures d’automatisme pavlovien s’inscrit donc dans une culture policière qui consiste en des pratiques discriminantes, injustes, parfois brutales. C’est la jeunesse visible dans l’espace public, les quartiers populaires, la précarité, l’origine immigrée, le faciès et l’apparence qui sont ciblés via des contrôles d’identité.
 
La politique du chiffre (3) - dont l’objet est de communiquer un bon indice d’activité des services, lui-même adossé à un système d’indemnités de performance qui implique toute la hiérarchie de la police et de la gendarmerie - ne peut pas se passer de la répression de l’usage de stupéfiants et du taux d’élucidation de 100 % que présente ce délit. Et cette répression ne peut exister qu’à la faveur d’un ciblage particulier et de contrôles d’identité, seule activité policière qui échappe à une comptabilité méticuleuse. Répression de l’usage de drogues, politique du chiffre et contrôles d’identité forment un système toxique qui ne sert ni la sécurité et la santé publiques ni le service public. Il n’est raisonnablement plus possible de mettre les forces de l’ordre sous pression, de leur répéter que «dix fumeurs de shit en garde à vue valent mieux qu’un trafiquant», et d’exiger d’eux une répression en laquelle plus personne ne croit, et des contrôles d’identité dont le seul but est de découvrir du stup, au seul motif de faire du chiffre.
 
La répression coûte 1,13 milliard d’euros par an au contribuable, soit 77 % de l’argent public alloué à la politique des drogues. Il est temps de rendre des comptes. Il n’est humainement plus acceptable que, pour faire du chiffre, des usagers de drogues soient soumis à la sanction pénale au risque d’exclusion sociale. Ils ne sont coupables que d’un plaisir ou, dans le pire des cas, d’un problème d’addiction, de santé. Le Portugal a dépénalisé l’usage de stupéfiants depuis 2001, et a aménagé une législation hors du champ pénal, dont le succès est total : la consommation de drogues est parmi les plus basses, et le taux d’overdoses le plus bas d’Europe.
 
Nous lançons un appel pour que la France mette fin à la prohibition, sorte d’un immobilisme aveugle, et qu’enfin les vrais enjeux des politiques publiques des drogues soient considérés. Que l’article L.3421-1 du code de la santé publique qui prévoit la répression de l’usage de stupéfiants soit abrogé, et remplacé par des dispositions privilégiant le droit, la santé et la réduction des risques. Que la mesure statistique de l’activité policière et de la criminalité n’ait plus à subir le biais de la politique du chiffre au détriment de la sécurité publique. Et qu’il soit alors envisagé que les indemnités attribuées aux cadres puissent rémunérer d’autres missions incombant à la hiérarchie (bien-être au travail, prévention des suicides…). Que les contrôles d’identité soient encadrés, par un récépissé ou un chiffrage au même titre que n’importe quelle mission des forces de l’ordre.
 
(1) http://www.emcdda.europa.eu/ countries_en (2) www.ofdt.fr (3) https://www.stoplaprohibition.fr/PCP/ politique-du-chiffre/
 
Signataires : Policiers et gendarmes du collectif Police contre la prohibition et du syndicat SUD-Intérieur, usagers de drogues des associations Asud, Circ, Norml France, Principes actifs, Psychoactif et Techno +, et la Ligue des droits de l’homme.
 
https://www.liberation.fr/debats/2019/05/09/contre-la-penalisation-des-usagers-de-drogues_1725966
 
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Cannabis, une liberalisation sur ordonnance ? [Public sénat]
Par Invité,
Durée: 37min Hasard des scrutins simultanés aux États-Unis, le même jour que l’élection de Donald Trump à l’hiver 2016, la Californie légalisait par référendum la vente de cannabis à des fins récréatives, plus récemment encore, le Canada a légiféré en ce sens… Plus frileuse, la France, teste actuellement une utilisation thérapeutique du cannabis. Quels sont les dangers réels ou supposés de la consommation de ce que l’on considère encore comme une drogue au même titre que l’héroïne ou la cocaïne ? A l’image de l’alcool, ou du tabac, la légalisation empêcherait-elle vraiment le marché noir, de mieux encadrer la consommation et de faire de la prévention ? Mais plus largement pourquoi la France, dont la législation est l’une des plus dure, reste-t-elle l’un des pays qui compte le plus de consommateurs ?   Invités:
 
Esther Benbassa
Sénatrice écologiste de Paris Amine Benyamina Addictologue à l’hôpital Paul Brousse, président de la fédération française d’ad Valérie Saintoyant Déléguée à la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les cond Jean-Claude Alvarez Chef de service de pharmacologie et toxicologie du CHU de Garches   https://www.publicsenat.fr/emission/un-monde-en-docs/cannabis-une-liberalisation-sur-ordonnance-140200     Ola   Suivre le lien pour accéder à la vidéo. Débat vraiment très intéressant.   Pour voir le documentaire ayant précédé le débat, c'est par ici. Peace
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«Quand le marketing du cannabis vise à faire oublier ses ravages chez nos adolescents»
Par Invité,
FIGAROVOX/TRIBUNE - Alors qu’a eu lieu la «journée internationale du Cannabis» le 20 avril dernier, le professeur Jean Costentin s’interroge sur l’image marketing que nombre d’intérêts privés donnent à cette drogue, et rappelle combien elle est nocive, notamment chez les adolescents.
Le professeur Jean Costentin est membre des Académies Nationales de Médecine et de Pharmacie, contributeur du CERU, le labo d’idées universitaire, et président du centre national de prévention d’études et de recherches sur les toxicomanies (CNPERT). Il est l’auteur de «Le désastre des toxicomanies en France» (Éditions Docis, 2018).  
La journée internationale du Cannabis du 20 avril dernier a tout de l’opération marketing réussie: depuis le nombre de prises de position favorables à la légalisation s’est envolé (députés, associations, journalistes…) et les entreprises qui ont misé sur le commerce légal du cannabis voient le cours de leurs actions s’envoler sur les marchés boursiers.
La pression médiatique, alimentée par d’énormes intérêts financiers n’a jamais été aussi forte pour prôner la légalisation du cannabis dans notre pays.
 
Parmi les arguments qui épaulent cette revendication de consommateurs et des «idiots utiles» qu’ils ont subverti, certains doivent être réfutés en priorité.
 
Le tabac et l’alcool, licites, seraient, selon eux, plus dangereux que le cannabis, qui est illicite ; «ne pouvant plus interdire ces premiers, il faut légaliser ce dernier». Ce statut licite du tabac et de l’alcool, a permis de recruter 13 millions de fumeurs, 4 à 5 millions de sujets alcoolo-dépendants et quelques centaines de milliers d’alcooliques. Pour le cannabis, on en est déjà à 1. 300.000 usagers réguliers. S’agissant d’une drogue prohibée, cela atteste de son fort pouvoir d’accrochage. Chaque année meurent en France 79.000 victimes du tabac ; il faut y ajouter de multiples handicapés ; l’alcool, lui, tue 49.000 des nôtres. Comparativement, la route, objet de grandes attentions, ne fait que 3.600 morts. Impuissants à arracher les sujets dépendants du tabac et de l’alcool, la folle idée serait d’y ajouter les drames prévisibles de la légalisation du cannabis.
 
Rappelons que le cannabis est plus dangereux que l’alcool ou le tabac, auxquels, en plus, il est souvent associé.
 
Il est toxique pour le corps. Comparé au tabac, sa combustion génère 5 à 7 fois plus d’oxyde de carbone (CO), qui restreint le transport de l’oxygène des poumons aux muscles, dont le cœur. Le cannabis est à l’origine d’artérites, d’accidents vasculaires cérébraux, il est la troisième cause de déclenchement d’infarctus du myocarde. Sa combustion engendre 5 fois plus de goudrons cancérigènes (pour la sphère O.R.L. et broncho-pulmonaire). Par son tétrahydro-cannabinol (THC), il diminue les défenses immunitaires. Il perturbe le déroulement de la grossesse et l’enfant qui en naîtra. Il vient d’être établi que les personnes en âge de procréer consommant du THC confèrent à leur progéniture, par un mécanisme épigénétique, une vive appétence pour les drogues qui s’exprimera dès leur adolescence.
 
La toxicité psychique du cannabis est considérable. Le THC induit une ivresse ; il incite à la consommation d’alcool ; leur association, par une potentialisation mutuelle, s’exprime sur la route et dans diverses activités professionnelles.
 
Perçu dans ses premiers usages comme anxiolytique et/ou antidépresseur, il incite à un abus qui induit une tolérance à ces effets ; alors anxiété et dépression réapparaissent plus intensément qu’à l’origine, avec de fortes tendances suicidaires.
 
Perturbant l’éveil, l’attention, le traitement des informations, la mémoire de travail sans laquelle ne peut se constituer une mémoire à long terme (une culture), suscitant un syndrome amotivationnel, c’est la drogue de la crétinisation: «la fumette ça rend bête» ; «pétard du matin, poil dans la main ; pétard du soir, trou de mémoire». Au long cours, le cannabis fait perdre irréversiblement 9 points de Quotient Intellectuel (Q.I.). Dans la compétition qu’est la mondialisation, à l’inverse du dopage, le cannabis sera un très lourd handicap.
 
Le THC a des liens irréfragables avec la schizophrénie/la folie (au sens commun de ce terme). Ce risque est d’autant plus marqué que sa consommation est plus précoce (dès le collège, 300.000 de nos adolescents s’en sont déjà approchés). Plus tôt l’essayer, c’est plus vite l’adopter et plus intensément se détériorer. Ce risque s’accroît d’autant plus que les doses sont plus élevées (or le taux de THC dans les produits en circulation a augmenté d’un facteur 6,5 au cours de ces 30 dernières années). Dans une étude Néo-Zélandaise, sur 1000 adolescents qui avaient débuté sa consommation au collège, 100 d’entre eux (10%) étaient schizophrènes à 18 ans! Une étude récente montre que 20% des schizophrénies seraient liées à la consommation de cannabis.
 
Tous les États ayant légalisé le cannabis sont passés par la «manip’» du cannabis dit thérapeutique. En l’état présent des connaissances, le rapport bénéfices/risques qui sert à adouber un médicament est très nettement en défaveur du cannabis.
 
Compte tenu de la gravité et du nombre importants de ses méfaits ; qui pourrait, en conscience, se déclarer favorable à sa légalisation?
 
http://www.lefigaro.fr/vox/societe/quand-le-marketing-du-cannabis-vise-a-faire-oublier-ses-ravages-chez-nos-adolescents-20190503
 
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Ola
 
Un petit baroud d'honneur de la part de l'ancien. Sa retraite fera plaisir à tout le monde du moment qu'il se tait à jamais.
 
Peace
 
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Au Portugal, le canadien Tilray cultive son cannabis au grand jour
Par mrpolo,
Le canadien Tilray, poids lourd du cannabis thérapeutique, a inauguré fin avril au Portugal sa première unité de production européenne.
 
Photo: Un employé vérifie les plants dans une serre au Portugal. (Pedro Fiuza/Sipa pour le JDD)
 
Sourire radieux et costume soigné, Brendan Kennedy saisit les ciseaux pour couper le ruban disposé devant la porte de ses nouveaux locaux. Il égrène fièrement les chiffres – 75.000 mètres carrés, 20 millions d'euros d'investissement – avant de se tourner vers un petit drapeau portugais, qu'il soulève théâtralement pour dévoiler une discrète plaque "Tilray, EU Campus". Rien qui déroge aux codes d'une inauguration d'usine. Si ce n'est que d'un entrepôt, à quelques dizaines de mètres de là, émane malgré la cloison une odeur à la fois âcre et fruitée, indescriptible mais reconnaissable entre toutes.
A Cantanhede, on cultive le cannabis au grand jour. Voici trois ans que cette ville de 35.000 habitants, à mi-chemin entre Lisbonne et Porto, a été élue pour accueillir l'unité de production. Plus si subversive, en fin de compte, à mesure que les pays d'Europe basculent vers la légalisation de la marijuana médicinale. Une évolution que Brendan Kennedy flaire et anticipe depuis une décennie. Tilray, l'entreprise canadienne dont il est le PDG, fut déjà le premier producteur nord-américain à exporter ses produits cannabi­noïdes sur le sol européen, en 2016 en Croatie. Le groupe espère faire du Portugal une nouvelle plaque tournante vers le reste du continent, jugé le plus prometteur parmi les nouveaux marchés, et le plus à même de concrétiser les espoirs fous soulevés par cette industrie.
 
A Wall Street, l'action s'envole de 900%
 
Tilray est un cas d'école de la bulle "cannabusiness" qui enfle sur les marchés boursiers nord-américains. Après son entrée à Wall Street en juillet dernier – une première pour un producteur de cannabis –, le groupe a vu son action s'envoler de 900% en trois mois. La raison? Son talent pour placer ses pions sur l'échiquier mondial de la légalisation. "Je parcours 300.000 miles aériens par an, 12 fois le tour du monde, raconte le PDG. Ce n'est pas une industrie dans ­laquelle on pénètre en restant derrière son ­bureau." Dans cette activité aussi florissante qu'incertaine, les investisseurs comme ­Brendan Kennedy jouent les prophètes : "L'enjeu est de prédire, pour chaque pays, si la légalisation va survenir – et quand."
En novembre 2015, l'homme d'affaires s'est envolé pour ­Berlin afin de s'entretenir avec des activistes, des parlementaires et des équipes médicales. "Le lendemain, on a commencé à embaucher des gens sur le terrain." Du lobbying? De l'anticipation, corrige-t-il. "Il serait idiot de dépenser de l'argent dans quelque chose qui est déjà en train d'arriver." En janvier 2017, ­l'Allemagne a légalisé la marijuana comme traitement de certaines pathologies.
 
Un agent en France pour "sensibiliser" les médecins
 
À l'heure de prendre les paris, Tilray a un temps fantasmé sur l'élaboration d'un modèle qui permettrait de prédire les prochaines vagues de libéralisation. En est ressorti un outil à 99 entrées, parmi lesquelles la religion dominante ou le statut du mariage homosexuel. Mais, admet volontiers Brendan Kennedy, c'est plus compliqué que cela. "En ce qui concerne l'usage thérapeutique, la communauté médicale pèse fortement, ainsi que les représentations globales qu'ont les gens du cannabis. La France semble évoluer plus vite que je ne le croyais." D'où l'embauche toute récente d'un nouvel employé, chargé de "sensibiliser les médecins généralistes" aux bienfaits de la marijuana.
Épilepsie, syndrome post- traumatique, nausées dues à la chimiothérapie : les pistes d'utilisation sont multiples. Les cannabinoïdes extraits de la plante sont non stupéfiants et non psychotropes. À chaque pathologie son conditionnement – fleurs séchées, gélules, huile –, tous testés et empaquetés sur le campus de Cantanhede. L'usage récréatif peut-il fournir, plus tard, un autre marché? Brendan ­Kennedy grimace. "Il devient de plus en plus dur de résister à la légalisation du cannabis médical. Dans quelques années on comptera 50, 60, 70 pays l'autorisant. Pour la marijuana récréative, on prévoit 20 nations maximum dans cinq ans." Pas de quoi intéresser le businessman, qui n'insulte pourtant pas l'avenir : "Nous ne sommes qu'au premier jour de cette industrie."
 
Source: lejdd.fr
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Marijuana: la compétitivité passe par l’efficacité énergétique
Par mrpolo,
Pour faire face à la chute des prix du cannabis, les producteurs officiels américains se tournent vers l’efficacité énergétique. Un article de notre partenaire, le Journal de l’environnement.
 
 
Photo: Le coût de l'énergie représente 20 à 40% du prix du produit final. [Shutterstock]
 
C’est peu de dire que la récente légalisation partielle de la production de marijuana, aux Etats-Unis, a bouleversé la donne. Une quarantaine d’Etats fédérés autorisent désormais la production de cannabis pour des usages récréatifs ou médicaux. Une soixantaine de millions d’Américains s’adonneraient ainsi, plus ou moins régulièrement, aux joies de la fumette.
Au plan climatique, le développement de la culture, sous serre le plus souvent, n’est pas totalement anecdotique. La production de plants de cannabis fortement dosés en principe actif impose des conditions de température et d’hygrométrie strictes, nécessitant le plus souvent l’emploi de puissantes lampes à UV et de climatiseurs. Deux véritables pompes à électrons, rappelle Utility Dive.
 
500 producteurs autour de Denver
 
Selon une étude du consultant New Frontier Data, les centaines de producteurs légaux consommaient plus d’un million de mégawattheures (MWh) d’électricité par an en 2017, contre près de 3 millions prévus en 2022. Les producteurs illégaux consommeraient en effet trois fois plus de courant que les officiels. Au niveau national, pareil soutirage relève de l’épaisseur du trait. Ce n’est pas le cas dans les régions de forte production. Dans la région de Denver (Colorado), les serristes du cannabis consomment près de 4% du courant local: autant que l’internet. Dans cet Etat, la demande d’électricité des 500 producteurs a été multipliée par 8 entre 2011 et 2016.
 
La sécurité de l’approvisionnement en électricité de certaines régions n’est pas le seul problème posé par le développement exponentiel du cannabis. En 2017, le chauffage et la climatisation des serres ‘légales’ émettaient 500 000 tonnes de CO2 par an. Ce chiffre pourrait tripler d’ici à 2020, estime New Frontier Data. En incluant la production illégale, le bilan carbone de la «beuh» américaine pourrait flirter avec les 5 Mt CO2 par an, à cet horizon. Pas terrible.
 
Chute des prix
 
Fort heureusement, l’économie veille. Avec le développement de la concurrence, les prix du marché des produits issus de la marijuana se sont effondrés. Dans le Colorado, toujours, la livre de cannabis était vendue 750 dollars (445 euros) en 2017, contre 500 dollars (296 euros) fin 2018. Cette année, les prix pourraient flirter avec les 300 dollars (178 euros).
Pour rester compétitifs, les producteurs doivent serrer les boulons, notamment ceux de l’énergie, dont les coûts peuvent représenter 20 à 40% du prix du produit final. Certaines institutions, comme l’Energy Trust de l’Oregon, commence à financer des systèmes d’éclairage et de chauffage à LED, nettement moins énergivores que des lampes de croissance à vapeur de sodium.
Entre fumette et planète, on pourra ne plus choisir.
 
Source: euractiv.fr
 
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Le cannabis aux Pays-Bas, voyage en «absurweed»
Par Frett,
Rencontre avec les tenanciers de coffee shops à Bréda, tous furieux contre la législation actuelle qui interdit la production du cannabis vendu dans leurs échoppes. « Une brèche pour les organisations criminelles », mais la commune est engagée dans une expérimentation qui doit tenter de couper l’herbe sous le pied des mafieux.
 
 
Photo: Les coffee shops aux Pays-Bas sont juste tolérés dans le droit hollandais. Pire : la vente au détail est acceptée, mais pas la production de cannabis. Les coffee shops doivent donc se fournir (secrètement) en marchandise illégale. - Sylvain Piraux
 
Il pleut ce midi sur Bréda, ville des Pays-Bas située à une heure de Thalys d’Anvers. Nous sommes en pleine semaine, à peine sorti de la torpeur de la matinée, mais le coffee shop Fly’n’hy est ouvert. Et bien rempli. Toutes les tables sont occupées, ainsi que le comptoir. Une odeur de cannabis s’échappe des portes grandes ouvertes sur la rue. Le parfum vénéneux de la « beuh » se mélange à l’atmosphère humide de la ville.
 
De petits groupes (surtout des hommes) fument des joints en sirotant des boissons sucrées dans une ambiance « lounge ». Un serveur nous prend à l’écart. Merlyn a un débit verbal de mitraillette. On le lance sur le sujet de la législation : « C’est fou ! On a faux du début à la fin. Nous, aux Pays-Bas, nous nous croyions progressistes. Mais ça, c’était il y a vingt ans. Aujourd’hui on se croirait de retour au Moyen-Âge », s’emporte le jeune employé du Fly’n’hy.
 
Dans le viseur de Merlyn, l’angle mort de la législation néerlandaise sur les drogues douces : la « back door », ou porte de derrière en français. Cette expression désigne « le » problème des coffee shops. Célèbres dans le monde entier – on se presse tous les week-ends à Amsterdam pour visiter la ville et parfois fumer un petit cône… – ils ne sont pourtant que tolérés dans le droit hollandais. Pire : la vente au détail par les coffee shops agréés est acceptée, mais pas la production de cannabis. Les coffee shops doivent donc se fournir (secrètement) en marchandise illégale. C’est le problème de la « back door » de ces établissements. Ce qui rentre par la porte arrière est frappé d’un tabou.
 
« On crée les conditions de notre illégalité »
« La “weed” est totalement illégale jusqu’à ce que je la vende à un client, à raison de cinq grammes maximum par jour et par personne. Ce faisant, nous créons des démons », analyse Merlyn. Amnesia, White Widow, Lemon Haze… la liste des variétés d’herbe est longue. Le prix est similaire pour toutes : de 10 à 15 euros le gramme. « Nous avons le droit de disposer de 500 grammes de stock dans les coffee shops. Mais nous en vendons environ 100 grammes par jour ici, c’est impossible de n’avoir qu’un si petit stock. On crée les conditions de notre illégalité. »
 
Les griefs s’accumulent : « Il n’existe aucun contrôle qualité », « les producteurs veulent seulement faire de l’argent »… N’en jetez plus, pour le serveur du Fly’n’hy, « cette législation est très étrange… »
La production est-elle vraiment illégale ? Poursuit-on réellement ces Néerlandais à la main verte qui alimentent les quelque 570 coffee shops du pays ? La réponse est oui, selon les autorités. « Chaque année, entre 4.000 et 5.000 plantations sont démantelées (4.670 en 2017, 3.913 l’année dernière…) », rapporte Pieter Tops, professeur en administration publique à l’Université de Tilburg et enseignant à l’Académie de Police des Pays-Bas.
 
« Et chaque année aussi, quelques centaines de personnes sont expulsées de chez elles pour culture illégale de chanvre. » « Les gouvernements régionaux et fédéral exercent un travail de sape », assure Eric Passchier, porte-parole de la police de Zélande / Brabant septentrional. « Notre travail de sape est un concept large qui dépasse la criminalité liée aux drogues douces. Cela concerne l’ecstasy et d’autres drogues dures, les gangs de motards, mais aussi les menaces envers les politiciens et bien plus encore… La police conduit naturellement ses propres recherches contre la production et l’import-export de drogues. » La simple possession de plus de 5 grammes d’herbe ou de haschisch sur soi est punissable de 3.500 euros d’amende.
Organisations criminelles
Les coffee shops eux-mêmes sont soumis à des règles strictes : un stock maximal, une prolongation des licences tous les cinq ans devant les autorités communales…
 
Margriet van der Wal et Ed Pattche nous reçoivent dans l’arrière-boutique du coffee shop « Het Paradijs », en plein centre de Bréda. La première préside l’association ABC, sorte de groupe de pression des coffee shops de la ville ; le second possède le « Paradijs ».
 
« Les pouvoirs politiques ne sont pas fiers du succès des coffee shops », embraye Margriet van der Wal. « Et pourtant c’est bien un succès : les consommateurs préfèrent la qualité du produit, être bien conseillés, ne pas être intimidés comme lorsqu’ils achètent à des dealers de rue. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle beaucoup de Français et de Belges préfèrent venir se fournir aux Pays-Bas. Les coffee shops sont un succès aussi du point de vue sanitaire, puisque leur création remonte aux années 1960, lorsqu’on a séparé dans la loi drogues douces et dures. »
 
 
La présidente d’ABC déroule les règles auxquelles s’attachent les coffee shops : « Pas de publicité, pas de vente aux mineurs, pas de nuisances pour le voisinage… » La présidente du groupe de pression en a assez du problème de « back door » : « Le gouvernement a tellement poursuivi les petits cultivateurs qu’il a créé une brèche pour les groupes criminels, capables avec leurs réseaux de gagner jusqu’à 300.000 euros par jour. » Tournant le dos aux écrans de surveillance de la boutique, sur lesquels on distingue le flot continu des échanges « argent contre Marijuana », Ed Pattche opine du chef. Le patron se roule un pétard. « Nous, on l’achète à des petits cultivateurs et à des sortes de représentants de commerce », se rassure le patron. Vraiment ? « La plupart, je suis sûr que ce ne sont pas des groupes criminels. » Tout est dans la locution « la plupart »…
« Je ne peux pas être certain des personnes à qui j’achète », finit par reconnaître le patron aux bras tatoués. « Mais les criminels produisent beaucoup de kilos et la conséquence directe est une baisse de la qualité de l’herbe, c’est pour cela que je ne pense pas être fourni par ces groupes. »
 
Projet test, « véritable challenge »
Consciente du problème, mais divisée sur la question du cannabis récréatif, la classe politique néerlandaise a enfin pris le chemin d’une réforme du système. Lors d’une phase de test qui doit débuter en 2020, dans une dizaine de villes des Pays-Bas (dont Bréda), la vente de cannabis sera encadrée du cultivateur au consommateur. Les coffee shops de la ville voient ce test d’un bon œil. Margriet van der Wal résume les attentes de chacun : « Le gouvernement espère frapper au portefeuille les groupes criminels et nous espérons que nos commerces deviennent enfin “normaux”  ». Elle reconnaît que la réussite de ce test sera « un véritable challenge ».
 
Le cannabis aux Pays-Bas, sur la route de la «back door»
  Les coffee shops des Pays-Bas sont autorisés à disposer d’un stock de 500 grammes de cannabis. - Sylvain Piraux  
Nous quittons l’arrière-boutique du « Paradijs » pour rejoindre un autre coffee shop de la ville, « Le Baron ». La vitrine est occultée par des cactus et une fumée blanchâtre flotte à l’intérieur. La porte donne sur un couloir qui mène droit vers le comptoir. La plupart des clients font la file (qui ne désemplit pas) et repartent avec quelques grammes sous forme de pacsons d’herbe, d’une barrette de hasch ou de joints pré-roulés. Le commerce est tellement entré dans les mœurs que l’on paye bien souvent par carte bancaire. Certains passent la porte de la salle attenante et fument avec des amis. C’est ici que l’on rencontre Pari, 23 ans, et son amie Eva, 19 ans seulement. « On aime bien venir ici se détendre après une journée stressante », affirme la plus jeune, étudiante à Bréda. Que pense-t-elle de l’absence de traçabilité du stupéfiant qu’elle consomme ? « C’est vrai qu’au début on se pose des questions, on craint que le cannabis qu’on achète enrichisse des mafias… Mais honnêtement vous tirez une taffe et vous n’y pensez plus ! », lance cette grande blonde dans un sourire. « Vous voulez essayer ? »
 
Touristes interdits
Le patron ici, c’est Rick Brand. Un type immense, sweat à capuche sur les épaules. 10 ans qu’il possède « Le Baron ». Il n’a ni peur des photographes, ni des journalistes, qu’il reçoit souvent dans son établissement. « Si vous écoutez les gens, 70 % sont pour réglementer la “back door”. Dans une vraie démocratie, il y a longtemps qu’on aurait changé la loi », râle le boss. Fervent partisan de la phase de test qui prévoit de légaliser tout le processus, l’homme a un discours militant. A ses yeux, le cannabis n’est même pas une drogue. Plutôt un médicament. Il a même financé à ses frais un documentaire vantant les vertus de cette plante contre le cancer.
 
Le businessman assure que « les politiciens exagèrent la criminalité » dans le milieu des producteurs. Ce qui lui importe plus que tout, c’est la qualité du produit qu’il revend : « Je ne peux pas vraiment garantir cette qualité, c’est un problème. J’ai investi dans des microscopes très onéreux (3.000€ pièce), c’est l’un des seuls moyens que j’ai trouvé pour vérifier. Souvent, le cannabis est trop fort. Et parfois, il est mélangé à des produits de coupe très mauvais. Je le fume aussi pour contrôler la qualité, mais c’est désastreux pour ma santé. »
 
Rick Brand peste aussi sur la décision de sa commune d’interdire aux coffee shops de vendre aux étrangers. Avant 2012, les Belges et les Français représentaient la majorité des clients ! « C’est absurde parce que si vous allez à Tilburg, à quelques kilomètres à peine, ils acceptent tout le monde. Le cannabis devrait être pour tout le monde ! » Parole de chef d’entreprise.
Paul Depla, maire de Bréda: «Mon message au bourgmestre d’Anvers»
Mis en ligne le 29/04/2019 à 06:00
Par Louis Colart et L.Co.
 
Le travailliste Paul Depla dirige la ville de Bréda. « Je ne fume pas de joints », assure l’édile. Il l’assure, « je suis très heureux que le gouvernement ait encadré la production et la vente d’alcool, je pense que nous devons faire de même avec le cannabis. »

Depla : « Penser que l’on peut interdire cette consommation, c’est la même chose que penser qu’on peut interdire l’alcool. C’est une illusion. » - Sylvain Piraux   Paul Delpa, le maire de Bréda plaide pour l’encadrement de l’ensemble du business du cannabis
Que pensez-vous du modèle néerlandais ?
Quand vous regardez le système, il est assez hypocrite. Vous donnez une licence aux coffee shops pour vendre du cannabis ; les citoyens sont autorisés à acheter ce cannabis ; mais il est interdit de produire du cannabis. Si d’un côté vous autorisez la vente de cannabis et de l’autre vous interdisez sa production, vous obtenez un résultat certain : vous aurez un marché noir. Le cannabis vendu dans les coffee shops ne tombe pas du ciel, il ne vient pas du paradis…
 
Il y a pourtant un coffee shop à Bréda qui s’appelle « Het Paradijs »…
 
(rire) C’est sans doute l’exception à la règle. Le résultat de ce système hypocrite du gouvernement néerlandais, c’est le développement rapide d’un marché dominé par des organisations criminelles, qui ne recherchent que l’argent et le contrôlent par la violence. De nombreux Néerlandais sont plus ou moins impliqués dans une organisation criminelle. Tout cela parce que le gouvernement a oublié de réguler la « back door » des coffee shops.
 
Concrètement, quels sont ces problèmes pour l’ordre public ?
Avant d’être le bourgmestre de Bréda, j’étais celui de Heerlen (commune située à l’est de Maastricht, à la frontière allemande, NDLR). Chaque année, je devais démanteler plus de 140 plantations de « weed ». Malgré notre détermination, nous savons que nous ne les démantelons pas toutes. Mais cela illustre l’étendue de l’infiltration du marché noir dans une ville comme Heerlen (90.000 habitants, NDLR). Si vous regardez à Bréda, l’année dernière, un jeune homme a été abattu dans l’appartement où il dealait. En 2015, dans notre région, il y a eu 15 meurtres par balle, neuf étaient liés à l’industrie de la drogue. Certains incendies sont causés par des plantations illégales : les assureurs estiment qu’un incendie de maison sur cinq est causé par une plantation illégale.
 
Votre ville est l’une des six à dix communes candidates pour faire partie de la phase de test pour légaliser l’entièreté de la chaîne de production.
En effet. Le gouvernement des Pays-Bas va délivrer, à environ 10 entreprises, des licences pour produire le cannabis. Ces firmes ne produiront que pour les coffee shops. Enfin, les coffee shops ne pourront vendre que le produit de ces entreprises. Le processus fonctionnera en circuit fermé.
 
Quand allez-vous commencer ?
Nous espérons que le Parlement autorisera l’expérimentation avant l’été 2019. Ensuite, nous aurons un temps de mise en place. Il faudra compter une année.
 
Quels sont les problèmes rencontrés au cours de la mise en place de cette expérimentation ?
Premièrement, la difficulté pour réunir un soutien politique suffisant. Au niveau national, certains partis sont diamétralement opposés sur la question des drogues douces. Au niveau local, nous voyons les choses différemment, car nous observons clairement les ennuis causés par le système actuel. Deuxièmement, ce qui est compliqué, c’est la préexistence du marché illicite. Ce marché offre à certains de très confortables revenus. Et les patrons de ce marché vont le perdre lorsqu’on va passer d’un modèle illégal à un modèle encadré.
 
Comment vont réagir ces « green mafias » ?
Les organisations qui profitent du système actuel vont forcément réagir aux changements que nous préparons en ce moment. Mais comment… ?
 
Vous êtes inquiets à ce sujet ?
Nous devons nous en inquiéter. Nous n’avons pas d’écho pour l’instant, mais on peut s’attendre à des réactions et il faut y être préparé.
 
Pourquoi avoir décidé, à Bréda depuis 2012, d’interdire la vente de cannabis aux étrangers ?
Nous estimons que les coffee shops sont destinés au marché local. En Belgique, le cannabis est interdit. Si les Belges peuvent venir acheter du cannabis chez nous, il n’y a plus d’intérêt à mettre en place des lois pour le consommateur belge.
 
Pourtant, c’est possible dans d’autres villes. À commencer par Amsterdam.
Oui, mais c’est une autre histoire. Amsterdam n’est pas une ville située à proximité d’une frontière. Les touristes passent le week-end à Amsterdam et ensuite entrent dans un coffee shop. Ce qu’il se passait à Bréda, mais aussi à Maastricht, c’était que des gens venaient en voiture d’Anvers, Gand ou Liège… pour se rendre dans les coffee shops et immédiatement repartir. Après avoir acheté ou fumé. Ce tourisme a causé énormément de problèmes dans nos villes. Les coffee shops répondent à un besoin local. Ils ne sont pas destinés à résoudre les problèmes belges. J’imagine bien que c’est intéressant pour les coffee shops d’avoir davantage de consommateurs, mais ce n’est pas ma priorité. Ils génèrent suffisamment de bénéfices, je n’ai pas à me soucier de ça.
 
La situation serait-elle plus simple si la Belgique décidait de légaliser le cannabis ?
Bien sûr ! Penser que l’on peut interdire cette consommation, c’est la même chose que penser qu’on peut interdire l’alcool. C’est une illusion. Tâchons de le contrôler plutôt que l’interdire. C’est aussi mon message au bourgmestre d’Anvers, Monsieur De Wever : il est installé en face d’une industrie nationale de bière, la Brasserie De Koninck ; si vous regardez à l’aspect de santé, boire de l’alcool est bien plus nocif que fumer du cannabis. Si l’on se soucie vraiment de la santé publique, entamons un débat sur les drogues les plus dangereuses : par exemple, le tabac et l’alcool. Pas le cannabis, qui est même un médicament. Soyons honnêtes : en Belgique, beaucoup de gens en consomment.
 
En France, Etat avec une tolérance zéro, beaucoup de gens fument de l’herbe. Bien entendu, le meilleur choix serait que personne n’en consomme, idem pour l’alcool. Mais quel est le meilleur deuxième choix ? Réguler la vente et la production pour que les organisations criminelles ne profitent pas de ce marché, ou bien le livrer aux criminels et à la rue ? Soyez honnêtes et regardez les problèmes en face, plutôt que de faire comme Don Quichotte combattant les moulins.
 
Pieter Tops: «La majorité du cannabis vendu dans les coffee shops est d’origine criminelle»
Mis en ligne le 29/04/2019 à 06:00
Par L.Co.
 
Pieter Tops est un professeur néerlandais d’administration publique à l’Université de Tilburg et enseignant à l’Académie de police des Pays-Bas. Il travaille principalement sur la démocratie locale et la lutte contre la criminalité.
Pieter Tops. - D.R.  
Pour Pieter Tops la façon d’encadrer au mieux le secteur du cannabis c’est un cadre au niveau international et « une lutte efficace contre les organisations criminelles du secteur ».
 
Quelle sont les connexions entre les organisations criminelles de Belgique et des Pays-Bas actives dans le secteur du cannabis ?
La production et le commerce de cannabis en Belgique sont sous contrôle des organisations criminelles néerlandaises depuis longtemps. Mais, plus récemment, des organisations belges en particulier ont repris en main la distribution sur le marché de leur pays, selon l’Institut de recherche international sur les politiques criminelles.
 
Le cannabis produit illégalement en Belgique alimente-t-il partiellement les coffee shops néerlandais ?
C’est tout à fait possible. D’autant plus si la production illégale en Belgique est sous contrôle des organisations criminelles néerlandaises.
Combien d’efforts et d’argent coûte la lutte contre la production illégale de cannabis à l’Etat néerlandais ?
Nous n’avons aucun chiffre fiable à ce sujet…
 
A-t-on une idée de la part du cannabis vendue dans les coffee shops qui serait issue d’organisations criminelles ?
C’est sans aucun doute la grande majorité du produit vendu, même si aucun pourcentage ne peut être avancé.
 
Les personnes qui militent pour un encadrement du secteur du cannabis par les Etats avancent que cela permettrait d’affaiblir le crime organisé. En est-on certain et sous quelles conditions cela fonctionnerait-il ?
Cela fonctionnerait si nous mettions en œuvre deux conditions indispensables. La première serait d’encadrer le secteur du cannabis récréatif au niveau international ; la seconde de lutter considérablement contre les organisations criminelles du secteur. Et ce malgré l’encadrement.
Jonathan Pfund, de la police fédérale: «Des organisations criminelles délocalisent en Belgique»
Mis en ligne le 29/04/2019 à 06:00
Par L.Co.
 
Jonathan Pfund est attaché de presse à la police fédérale belge.
Jonathan Pfund. - D.R.   Les marchés du cannabis aux Pays-Bas et en Belgique sont-ils liés ? Et comment ?
Les marchés sont bien entendu intrinsèquement liés, que ce soit au niveau de la production, de la distribution ou de la consommation du cannabis. En ce qui concerne la production, de nombreux producteurs néerlandais utilisent le territoire belge afin de produire du cannabis. Et ce, en raison notamment de la concurrence féroce entre organisations criminelles néerlandaises.
 
Les organisations criminelles qui font pousser du cannabis en grande quantité sur le territoire belge destinent-elles leur marchandise uniquement au marché belge ?
Il est certain qu’une partie importante de la production réalisée en Belgique est vouée à l’exportation, essentiellement vers les Pays-Bas. Il est très difficile d’estimer l’importance de cette production mais l’on peut encore raisonnablement affirmer qu’au plus grande est la taille d’une plantation, au plus grandes sont les chances que la production de cette plantation soit destinée à l’exportation, y compris en vue d’une distribution au sein des coffee shops, il s’agit d’une possibilité qui ne peut être exclue.
 
Le fait que les coffee shops soient tolérés aux Pays-Bas, mais pas la production de cannabis, complique-t-il le travail policier des pays voisins ?
Il est un fait que l’existence de ce réseau de distribution particulier a une influence en termes de criminalité en Belgique. Bon nombre de consommateurs belges se rendent ainsi aux Pays-Bas en vue d’y acquérir des stupéfiants, générant un flux illégal de drogues entre nos deux pays. Pour ce qui concerne la production, le marché du cannabis néerlandais fait l’objet d’une concurrence féroce ce qui conduit certaines organisations à délocaliser leurs sites dans les pays voisins, dont la Belgique.
 
Source: plus.lesoir.be
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