La scénario de la nouvelle série Netflix, disponible ce vendredi 28 juin, coïncide de façon troublante avec l'actualité des débats sur la légalisation du cannabis.
SÉRIES - On n’aurait pas pu trouver meilleure date de sortie. La nouvelle production française de Netflix, “Family Business” –une comédie centrée sur une famille qui veut transformer sa boucherie casher en “beucherie”– est disponible ce vendredi 28 juin, alors que la légalisation du cannabis récréatif et thérapeutique est au centre de l’actualité politique depuis plusieurs jours.
Après “Marseille”, “Osmosis” ou “Plan cœur”, au tour du réalisateur et scénariste Igor Gotesman (“Five”, “Mon Inconnue”) de dévoiler une série made in France sur la plateforme de streaming aux 148 millions d’abonnés. Dans “Family Business”, il raconte l’histoire de Joseph (Jonathan Cohen), start-upper aux idées jusque-là un peu foireuses qui travaille dans la boucherie casher de son père (Gérard Darmon).
Mais lorsque Joseph croise une ancienne copine qui lui glisse que son paternel, futur ministre de la Santé, envisage de légaliser le cannabis, le trentenaire parisien a une idée de génie: transformer la boucherie familiale en “beucherie” et devenir l’un des premiers points de vente officiels.
Si les trois premiers épisodes que nous avons pu voir (sur les six de cette saison 1) mettent un peu de temps à installer l’intrigue, ils sont portés par un casting comique forcément crédible –difficile de rester de marbre devant Gérard Darmon fumant un joint avec Enrico Macias dans l’arrière-boutique d’une boucherie– et des dialogues plutôt efficaces.
Une série on ne peut plus d’actualité
Au-delà de l’humanité du scénario d’Igor Gotesman, la série “Family Business” pourrait être portée par une actualité particulièrement analogue.
Impossible de ne pas s’interroger sur la ressemblance troublante entre cette couverture du magazine L’Obs devant laquelle s’arrête le personnage de Jonathan Cohen dans la bande-annonce de la série, et la vraie couverture du numéro du 20 juin.
Une couverture fictive de "L'Obs" dans la série "Family Business".
La couverture du numéro du 20 juin 2019 de "L'Obs".
Jeudi 20 juin, le député des Bouches-du-Rhône François-Michel Lambert, porte-parole de l’Union des démocrates et des écologistes (UDE), déposait à l’Assemblée une proposition de loi cosignée par une quinzaine de députés arguant pour une “légalisation contrôlée de la production, de la vente et de la consommation de cannabis”.
Le texte prévoit notamment de “passer d’une politique du tout répressif à une politique d’encadrement régulé” du commerce du cannabis en confiant la production aux agriculteurs et la vente aux débitants de tabac.
Vers un business encadré
Et ce n’est pas tout. Le même jour, le Conseil d’analyse économique a remis un rapport à Matignon dans lequel il préconise là encore de mettre fin à 50 ans de répression infructueuse en légalisant de façon encadrée le cannabis. Ces économistes chargés de conseiller Édouard Philippe suggèrent de créer un “monopole public de production et de distribution du cannabis.”
Enfin, un comité d’experts mandaté par l’Association nationale de sécurité du médicament (ANSM) se réunissait en dernière séance ce mercredi 26 juin. L’occasion d’exposer les modalités d’une phase expérimentale de mise à disposition du cannabis cette fois à visée thérapeutique et d’en évaluer la faisabilité.
Si la série a été tournée en janvier dernier, Netflix a-t-il particulièrement veillé à calquer sa date de sortie sur cet agenda politique? Contacté par Le HuffPost, la plateforme de streaming n’a pas répondu à cette question. Hasard ou calcul, force est de constater que le slogan “Liberté, légalisé, fraternité” des affiches publicitaires de “Family Business” tombe à pic.
Alors qu'un rapport du Conseil d'analyse économique préconise de modifier la législation sur le cannabis, les pionniers de Chanvr'Bio Détente développent fortement leur activité dans l'Aveyron et misent sur l'avenir d'une véritable filière agricole. Retour chez CBD, à la ville et au champ, un an après…
Il a les cheveux blancs et porte des lunettes strictes. «Ce serait pour ma maman…», commence Patrice, 57 ans. Ton timide de celui qui s'étonne presque d'être là, au 15 de la rue du Bal, à Rodez : il est entré pour se renseigner sur l'huile CBD. CBD pour cannabidiol, la molécule relaxante du cannabis, légale en France. «Ma mère a 85 ans et elle est en soins palliatifs», précise Patrice… «Elle souffre et ne supporte pas la morphine ni les autres antalgiques. Concernant cet usage du cannabis, j'avais lu l'article dans La Dépêche et comme son médecin traitant m'a dit qu'on pouvait essayer…»
Formule obligée
Face à lui, Max Terrien répond par la phrase consacrée du magasin. «Nous ne sommes ni médecin, ni pharmacien, nous proposons des compléments alimentaires et du bien être…» Mais de chaque côté du comptoir, chacun mesure «l'hypocrisie» d'une formule déminant toute éventuelle accusation de «pratique illégale» ou vente de «cannabis thérapeutique», la France n'en étant pas encore là, à l'inverse d'un nombre croissants d'états américains, du Canada, de l'Uruguay.
Pour autant ? La majorité des clients de Chanvr'Bio Détente – acronyme CBD, évidemment – viennent pour cette huile qui leur apporte détente et… soulagement, raportent «Monsieur et Madame tout le monde». En l'occurrence les habitués du lieu, souvent frappés de «scléroses en plaques, parkinson, mal de dos ou spondylarthrite ankylosante», énumère Théo Giacomotto l'un des trois associés de CBD, qui lui, souffre de cette dernière maladie.
Cannabis garanti avec moins de 0,2 % de THC, donc non stupéfiant, donc autorisé, mais dont le cannabidiol et les terpènes relaxent… L'an dernier lorsqu'on les avait rencontrés, Max, Théo et Gwenael Albinet, troisième associé, venaient de se lancer avec l'énergie de la vingtaine. Pour vendre, mais aussi produire sur 1,7 ha avec en ligne de mire une véritable filière, à terme, «car les usages du chanvre sont multiples dans l'alimentaire, le textile, l'isolation, les bio-carburants». Et leur croissance semble vouloir répondre à leur intuition.
Cet été 2019 ? Entre Ségala et Causses, Thierry Grès, 58 ans, a contractualisé avec eux 9 ha de plantation de chanvre «CBD» sur la ferme familiale et cet après-midi, ils arpentent les rangs de la vaste parcelle avec son fils Renaud. «ça pousse superbien» : constat partagé devant des pieds qui vont encore tripler. «Les sommités serviront aux huiles, aux baumes, aux infusions et pour la tige, outre les qualités d'isolant, notre objectif c'est de développer de l'emballage biodégradable», précise Max. Tandis que pour Thierry et Renaud, «il est urgent d'innover».
La plante ? Thierry la connaît très bien : «j'ai récolté 1 500 ha de chanvre textile pendant dix ans. C'est une plante utile, tout est utilisable dedans. Là, je ne sais pas ce que ça donnera, mais je sais ce qu'on ne veut plus…» 70 ha de fourrage, de céréales : «fini la course aux rendements qui empoisonne les sols. Pour le chanvre, aucun pesticide et il nous permet de préserver et dépolluer nos terres», résume Thierry. Renaud soutient à fond. Père et fils savent que «les regards changeront après les premiers résultats, comme toujours». À la maison, le grand-père a jaugé en Saint-Thomas : arthrose des doigts, il a mis de l'huile… «et ça va mieux», assure Thierry. «Moi, c'est pour les épaules…», ajoute cette carrure racontant 40 ans de travaux de force.
20 hectares cultivés dans l'Aveyron
Un peu plus d'un an après sa création CBD déménage de… 20 mètres, pour presque tripler sa surface commerciale, à Rodez mais séduit aussi les professionnels en quête de diversification avec la culture de chanvre bio. Passant de 1,7 ha à 3,2 ha de plantations propres, les trois associés ont également contractualisé d'autres plantations avec 5 agriculteurs aveyronnais et creusois pour une surface totale de 20 ha.
Si la loi française se veut claire en matière de commercialisation de produits issus du cannabis, un flou persiste dans la pratique autour du cannabidiol.
Question posée par Nicolas le 28/06/2019
Photo: Des fleurs contenant du CBD, mais pas de THC, le 14 juin 2018 à Paris. Photo Geoffroy Van der Hasselt. AFP
Bonjour,
Vous nous avez posé cette question : «Est-ce que le commerce de la fleur de CBD est autorisé en France ? Quelles sont les règles à respecter ?»
Vous faites référence au CBD (cannabidiol), une molécule de chanvre contenue dans la plante de cannabis au même titre que le THC (tétrahydrocannabinol). A la différence du THC, molécule psychoactive du chanvre, le CBD n’a pas d’effet stupéfiant, mais «relaxant», disait l’addictologue Jean Pierre Couteron en août 2018 à Libération.
En clair, les effets psychotropes prêtés au cannabis qui provoquent un «effet défonce» sur le corps et le cerveau sont a priori absents d’un produit dont le THC aurait été retiré et qui contient uniquement du CBD. Avec cette réserve qu’il n’existe pas, à ce jour, de consensus scientifique sur la question.
L’an passé, de nombreux «CBD shops», magasins spécialisés dans la vente de produits contenant du CBD, que ce soit des cookies, des cosmétiques, des huiles ou de l’herbe pour certains, ont ouvert leurs portes. Une question avait alors été posée à CheckNews, afin de savoir si ces magasins de «cannabis light» étaient légaux. Si la législation qui entoure la commercialisation du CBD est claire, son application, encore aujourd’hui, ne l’est pas vraiment.
THC contre CBD
Contrairement au THC, considéré comme un stupéfiant qui tombe sous le coup de l’article 222-37 du code pénal, le CBD en tant que tel n’est pas considéré comme un produit stupéfiant et n’est donc pas interdit par la loi. En revanche, la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) précise à CheckNews, en s’appuyant sur une loi du 14 décembre 2018, qu’il «ne peut être commercialisé en France que sous les conditions cumulatives suivantes» : les variétés de chanvre cultivées doivent figurer sur la liste exhaustive inscrite dans l’article 2 de l’arrêté du 22 août 1990 ; la plante de cannabis doit avoir une teneur en THC inférieure à 0,2% (par comparaison, selon l’OFDT, la concentration moyenne du cannabis sous forme d’herbe circulant illégalement sur le marché français était en 2016 de 11%, rapportait Libération en 2018) ; seules ses graines et ses fibres peuvent être utilisées ; le produit fini (huiles, crèmes, biscuits, etc.) ne doit pas contenir de trace de THC, quel que soit le taux.
Une centaine de «CBD shops» ont ouvert leurs portes en France au cours de l’année 2018. Cette vague d’ouvertures a suscité la crainte du ministère de la Justice, entraînant dans la foulée quantité de fermetures. «A l’époque, il y a eu une véritable volonté des parquets de mettre un coup d’arrêt à ces CBD shops», explique à CheckNews Agnès Lowenstein, avocate au barreau de Paris et spécialisée dans ce type de contentieux.
Parmi les motifs invoqués : la présence de THC dans le produit fini ou la mise en avant d’un cannabis «thérapeutique». Or en France, «seuls les pharmaciens ont le droit de vendre des produits présentés comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard de maladies», rappelle la Mildeca.
«Aujourd’hui, les fermetures et les contrôles intempestifs se sont stabilisés. La vague est passée, nous sommes entrés dans une période de tolérance où l’on ne cherche plus la petite bête aux propriétaires, poursuit l’avocate. Le débat autour du cannabis thérapeutique, les lettres ouvertes pour la légalisation ou encore la mise en place d’une amende forfaitaire de 200 euros pour sanctionner l’usage illicite des stupéfiants [jusqu’alors réprimé par une peine de prison et une amende salée, ndlr] attestent d’un assouplissement général.»
Fleurs illégales… mais en vente
Dans les CBD shop, on trouve donc aujourd’hui des cookies importés de Californie, du thé glacé d’Amsterdam ou du chocolat suisse… Des territoires où la législation est plus souple, voire où la commercialisation du cannabis a été légalisée. Si elles ont le goût du cannabis, ces «friandises» contiennent également un taux de CBD oscillant entre 8% et 27%, «qui va jouer sur l’effet détente», assure un propriétaire de CBD Shop interrogé. Mais les vendeurs sont formels, il n’y a aucune trace de THC dans ces produits… Qui flirtent pourtant avec l’illégalité : «Il est difficile de commercialiser des produits dérivés légaux, car la plupart d’entre eux sont fabriqués à partir de fleurs et de feuilles», affirme l’une des membres de la Mildeca.
Des fleurs et des feuilles dont la vente, comme celle de leurs dérivés, est aussi théoriquement illégale, notamment parce que la teneur en THC y est bien plus importante que dans les graines et les tiges. Pourtant, CheckNews a pu le constater, on trouve facilement dans plusieurs boutiques parisiennes des fleurs et des feuilles. Et ce, malgré les risques encourus. Car les vendeurs «pourraient être poursuivis pour trafic de stupéfiants», assure la Mildeca.
Cela ne semble pas effrayer ce propriétaire parisien d’un CBD Shop, qui nous explique, un Tupperware rempli de pochons d’herbe dans chaque main : «Si vous achetez de l’herbe, le sachet est scellé. Concrètement, je l’agrafe et je glisse la facture à l’intérieur avec le taux de THC inférieur à 0,2% inscrit dessus.» Un procédé censé garantir qu’il ne s’agit pas d’un produit acheté à la sauvette. En cas de contrôle, le propriétaire conseille aux consommateurs interpellés de se rendre dans sa boutique en compagnie des policiers pour attester de la bonne foi du client. Quant à la manière de consommer «l’herbe au CBD», les vendeurs affichent en grosses lettres : «Ne pas fumer, mais infuser.»
Un flou persiste dans la pratique
Juridiquement, le consommateur de CBD risque-t-il quelque chose ? Si le produit (biscuits, boissons, cosmétiques…) acheté respecte les trois conditions cumulatives (moins de 0,2% de THC dans la plante et absence de la molécule dans le produit fini, chanvre autorisé par la loi et usage de graines et de fibres uniquement) invoquées par la loi, non.
Pour ce qui est des feuilles et des fleurs, si leur vente comme leur achat sont illégaux, on a vu qu’il était facile de s’en procurer en magasin. Mais alors comment se fait-il qu’un produit, considéré comme illégal et qui tombe sous le coup de la loi pour usage de stupéfiants, soit commercialisé en boutique ? Me Lowenstein tente d’éclaircir cette zone grise : «Certes, conformément à l’interprétation stricte de la loi, c’est illégal. Seulement, son application est à la discrétion du parquet, qui, en ce moment, en termes de politique pénale, n’a aucune intention d’embêter les consommateurs…»
Autre élément qui participe à la confusion : les disparités d’application de la législation sur le territoire. Une des membres de NORML (National Organization for the Reform of Marijuana Laws France) le confirme : «Un CBD Shop nantais expose des fleurs et des feuilles en vitrine, pourtant, il n’a jamais eu de problème. Tout dépend de la région et du procureur en place.»
Un rapport du Conseil d’analyse économique préconise de modifier la législation, comme l’ont fait le Canada, l’Uruguay et certains Etats américains.
Photo: Plantation de cannabis dans une serre en Californie. RICHARD VOGEL / AP
L’Uruguay en 2013, le Colorado et l’Etat de Washington en 2014, la Californie et le Canada en 2018… plusieurs pays ont fait récemment le choix de rendre légale la consommation de cannabis récréatif. En France, le débat ressurgit régulièrement. Il a jusque-là toujours été écarté d’un revers de main par les exécutifs qui se sont succédé.
La dernière offensive date du 20 juin : le Conseil d’analyse économique (CAE), un organisme chargé de conseiller le premier ministre, a plaidé pour une légalisation encadrée, alors que plusieurs députés de la majorité signaient un appel publié par L’Obs.
Pour comprendre le débat, nous avons étudié les différentes questions qui se posent.
Une consommation très répandue en France
La consommation régulière de cannabis est la plus forte d’Europe (11 % des 11-64 ans, et 21 % des 15-34 ans). Mais elle est en baisse depuis quelques années.
17 millions d’expérimentateurs, 5 millions d’usagers
Selon une enquête de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) menée en 2016, on compterait dans la population âgée de 11 à 64 ans près de 17 millions de Français ayant expérimenté le cannabis. Parmi eux, 5 millions en ont consommé au moins une fois dans l’année, et 1,4 million ont fumé au moins dix fois dans le mois. Parmi eux, 700 000 déclarent avoir fait usage de cannabis de manière quotidienne.
5 millions de Français ont fumé du cannabis dans l’année
L’étude pointe par ailleurs que l’expérimentation du cannabis est avant tout générationnelle : elle atteint un pic entre 26 et 34 ans. Parmi toutes les caractéristiques sociodémographiques, c’est bien l’âge qui demeure la principale variable pour distinguer la population concernée par le cannabis.
L’expérimentation du cannabis : un phénomène très répandu
Une consommation en baisse chez les jeunes
L’enquête Escapad menée auprès de tous les jeunes lors des journées d’appel et de préparation à la défense (JAPD) montre que l’usage du cannabis à l’âge de 17 ans en France est reparti à la baisse en 2017, et n’a jamais été aussi faible depuis la mise en place du dispositif d’analyse, en 2000 – que ce soit pour l’expérimentation, un usage intermittent ou régulier… Elle n’en reste pas moins élevée, puisque, à 17 ans, un jeune sur cinq (21 %) serait un usager au moins mensuel de cannabis.
L’enquête note par ailleurs que plus les utilisateurs les plus réguliers sont les adolescents masculins (9,7 %, contre 4,5 % pour les adolescentes). Mais le sexe n’est pas le seul facteur discriminant : la situation scolaire des usagers est particulièrement prégnante. Ainsi, 21 % des jeunes de 17 ans sortis du système scolaire fument de manière régulière. Soit 3,5 fois plus qu’un élève du même âge.
Les Français, champions d'Europe
La France est le pays de l’Union européenne où la consommation régulière de cannabis (définie comme supérieure ou égale à une fois l’an) est la plus importante, selon le Rapport européen sur les drogues. A contrario, les pays d’Europe de l’Est (Hongrie, Roumanie et Grèce) ont une prévalence d’usage du cannabis très faible.
Les Français, plus gros consommateurs de cannabis en Europe
Un décalage entre la loi et son application
Si la loi sur l’usage du cannabis, datant de 1970, est très répressive (jusqu’à un an de prison), le législateur a, depuis, eu tendance à trouver des solutions alternatives plus conciliantes avec l’utilisateur.
Depuis mars 2019, la loi permet le paiement d’une amende pour échapper à une peine plus lourde en cas d’usage simple du cannabis, et l’Etat a aussi ouvert la porte à un usage thérapeutique du cannabis.
Une loi répressive
La loi n° 70-1320 du 31 décembre 1970 « relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et à la répression du trafic et de l’usage illicite de substances vénéneuses » constitue le texte de référence en matière de lutte contre les stupéfiants. A ce titre, elle régit l’usage et le trafic de cannabis.
Concernant la consommation, la loi spécifie que « l’usage illicite de l’une des substances ou plantes classées comme stupéfiants est puni d’un an d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende ». Cette loi est régie par le code de la santé publique : en 1970, lorsque le texte est voté, le chapitre Ier prévoit notamment une injonction thérapeutique (faire suivre une cure de désintoxication à l’usager, par exemple).
En revanche, le trafic de cannabis – régi par le code pénal – peut mener à dix ans d’emprisonnement et à 7,5 millions d’euros d’amende. Les peines encourues pour la fabrication de stupéfiants atteignent jusqu’à trente années de détention en cas de commission en bande organisée.
Des aménagements successifs
La loi de 1970 ne distinguait pas les différents types de stupéfiants – le cannabis est traité d’un point de vue légal au même titre que l’héroïne ou les drogues de synthèse –, mais le ministère de la justice a fait en sorte de privilégier autant que possible les mesures alternatives aux poursuites en cas d’usage simple. Plusieurs circulaires ont ainsi vu le jour différenciant le cannabis des autres stupéfiants.
mai 1978 : la « circulaire Peyrefitte » préconise d’opérer une distinction entre le cannabis et les autres drogues ;
mai 1987 : la « circulaire Chalandon » introduit une différence entre usagers occasionnels et réguliers ;
juin 1999 : la « circulaire Guigou » recommande des mesures alternatives aux poursuites pour « simple usage » ;
avril 2005 : la « circulaire Perben » prône une réponse pénale systématique mais adaptée : en cas de possession simple, un rappel à la loi est préconisé ;
février 2012 : la « circulaire Mercier » recommande « un stage de sensibilisation [payant] aux dangers de l’usage de produits stupéfiants » dans le cas d’un premier usage simple ;
octobre 2015 : le décret d’application de la « transaction pénale » autorise les officiers de police judiciaire à proposer une amende pour les petits délits, payée immédiatement – une mesure destinée notamment à désengorger les tribunaux
Depuis mars 2019, « l’action publique peut être éteinte […] par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 200 euros » pour usage illicite de cannabis. La ministre de la justice, Nicole Belloubet, a insisté sur « la palette de réponses possibles », le ministère public conservant la possibilité de poursuivre l’infraction devant le tribunal correctionnel. Pour le gouvernement, « cette mesure permettra un recentrage des services sur le traitement des trafics ». Plusieurs associations – dont Aides, Médecins du monde et la Ligue des droits de l’homme (LDH) – ont déploré dans un Livre blanc l’« impasse » d’une mesure qui privilégie une réponse répressive plutôt que sanitaire. Certains députés de gauche ont aussi relevté l’aspect inégalitaire de cette mesure, tandis qu’à l’extrême droite, Marine Le Pen dénonçait une « hypocrisie » équivalent à <« autoriser la consommation ».
Un projet d'expérimentation à usage thérapeutique
La loi ne distingue pas la consommation du cannabis à des fins récréatives de son usage à visée thérapeutique, réclamée par de très nombreuses associations de malades. Néanmoins, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a jugé « pertinent », à la fin de décembre 2018, d’autoriser l’usage de la plante dans certaines situations cliniques. L’expérimentation, qui durera deux ans, pourrait ensuite déboucher sur une loi. Pour l’heure, seul un projet de cadre a été dévoilé par l’ANSM.
Une pénalisation qui alimente le trafic
Le fait que l’usage du cannabis soit pénalisé alimente avant tout les réseaux de trafiquants de drogue. Ceux-là gagnent des centaines de millions d’euros avec un trafic qui pourrait être légalisé par l’Etat, tandis que la plus grande partie des personnes interpellées le sont pour usage de cannabis.
Les trafics, bien implantés dans certains territoires, rendent la vie impossible à de très nombreux habitants, qui en appellent à la légalisation.
Le cannabis, un marché à 1 milliard d’euros
L’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ) a évalué, dans une note de 2016 le chiffre d’affaires du marché du cannabis en France en 2010. Il a donné une fourchette allant de 809 millions à 1 424 millions d’euros, ce qui représenterait la moitié (48 %) du chiffre d’affaires total du marché des drogues illicites en France. L’étude estime par ailleurs qu’il existerait plus de 230 000 personnes impliquées dans le trafic de cannabis (guetteurs, revendeurs, conducteurs de « go fast » ou encore têtes de réseau).
Des infractions en forte hausse, surtout pour les consommateurs
Le nombre d’interpellations pour infraction à la législation sur les stupéfiants (ILS) a fortement augmenté depuis 1995. Mais les personnes mises en cause le sont en grande partie pour usage : ce sont les simples consommateurs qui subissent de plein fouet la <« politique du chiffre », dénoncée au sein même de la police – au gré des successions entre les exécutifs.
S’il n’y a pas de chiffres récents des interpellations pour usage ou trafic de cannabis, un rapport de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales affirme que le nombre d’interpellés pour usage simple de cannabis a été multiplié par sept en l’espace de vingt ans (1990 à 2010).
Toutes substances illicites confondues, seule une minorité des condamnations pour ILS concernait en 2015 les vendeurs (4 %) ou les transporteurs (12 %). Pour les trafiquants, la proportion est encore plus basse, 2 % seulement des condamnations, alors qu’elle représentait 10 % en 1996.
Légaliser pour pacifier les territoires
Alors que les gouvernements successifs sont loin d’avoir fermé la porte à une quelconque politique répressive, la légalisation du cannabis permettrait de faire baisser la criminalité. Ainsi, une étude américaine sur la dépénalisation du cannabis et son effet sur le trafic de drogue dans les états frontaliers du Mexique, montre une baisse significative de la criminalité, particulièrement celle qui concerne le trafic de drogue : le consommateur se tourne vers la culture légale du chanvre plutôt que vers les cartels mexicains, les privant ainsi d’une manne financière essentielle à leur survie.
En France, dans certaines villes, le trafic de cannabis exaspère les habitants, au point que certains appellent à sa légalisation. A Villeurbanne, une majorité des résidents se sont prononcés pour la légalisation, que « ce soit par conviction ou par pragmatisme, face au constat d’échec de la répression », à la suite d’une consultation citoyenne opérée par le maire PS, Jean-Paul Bret. Un Livre blanc, qui a été versé au grand débat national voulu par Emmanuel Macron, synthétise deux mois de débat.
La légalisation de la marijuana était aussi un cheval de bataille de Stéphane Gatignon, l’ancien maire de Sevran, en Seine-Saint-Denis, qui assénait sur RTL en janvier 2017 que cela permettrait de « déstructurer pas seulement la délinquance, mais aussi la forme mafieuse qui sont en train de prendre le pas dans certains de nos territoires ».
Des effets sanitaires avérés
Le cannabis a des effets délétères pour la santé qui sont d’autant plus risqués que l’usager est jeune. Une utilisation régulière chez les jeunes peut même faire baisser le QI de plusieurs points. Par ailleurs, l’usage du cannabis, dangereux pour les conducteurs, l’est encore plus que le principe actif (le THC) a singulièrement augmenté en une dizaine d’années.
Certains prônent en revanche les bienfaits du cannabis thérapeutique, une proposotion à l’étude en France.
Les tenants de l’interdiction du cannabis se concentrent sur les arguments sanitaires : Valérie Boyer (LR) appelle à « protéger des vies », le Rassemblement national alerte contre le « cannabis [qui] détruit le cerveau des jeunes ».
Des effets psychoactifs certains
Le cannabis est un produit psychoactif, dont les principes actifs sont le tétrahydrocannabidiol (THC) et le cannabidiol (CBD). Il a plusieurs effets dont l’Inpes (Institut national de prévention et d’éducation à la santé) avait listé les plus fréquents en 2005 :
altération de la perception, de l’attention et de la mémoire immédiate (avec des conséquences sur les apprentissages ou la conduite de véhicule) ;
intoxication aiguë, autrement appelé « bad trip » pour certaines personnes : vomissements, hallucinations, panique… ;
troubles relationnels, scolaires ou professionnels (repli sur soi, perte de motivation) chez certains sujets, en cas de consommation importante ;
révélation ou aggravation de troubles mentaux, dans des cas rares, chez des personnes prédisposées (schizophrènes par exemple) ;
risque de dépendance pour 10 à 15 % des consommateurs réguliers, mais qui reste bien plus faible que pour le tabac ou l’alcool.
Par ailleurs, des perturbations broncho-pulmonaires (cancers, pneumonies…) chez les grands fumeurs, surtout liées à l’usage du tabac dans les « joints », ne sont pas à exclure.
Des risques spécifiques pour les jeunes
Même les tenants d’une légalisation du cannabis souhaitent en interdire l’usage aux moins de 18 ans, voire de 25 ans. En effet, la plupart des risques énumérés ci-dessus (perte d’attention et de mémoire, troubles scolaires, dépendance…) sont encore plus élevés pour des cerveaux en formation, comme le rappelle l’Inpes dans une brochure destinée aux parents.
Par ailleurs, il existe des risques spécifiques. Une étude effectuée sur une cohorte de Dunedin (Nouvelle-Zélande) a permis de comparer le quotient intellectuel d’un millier de personnes entre l’âge de 13 ans et de 38 ans, certains consommant du cannabis de manière occasionnelle ou régulière, et d’autres non. En vingt-cinq ans, l’écart allait jusqu’à six points de QI entre une minorité de consommateurs persistants et des non-usagers.
Pas de mortalité directe mais un danger en voiture
Contrairement à d’autres drogues dures, la substance ne provoque pas d’overdose. Comme le rappelle Drogue info service, « aucun décès n’a été rapporté après usage de cannabis ». En revanche, une étude sur la mortalité routière et les stupéfiants, réalisée entre 2001 et 2003, estimait que sur 6 000 accidents mortels par an, « le nombre annuel de victimes imputable au cannabis, soit directement par une plus fréquente responsabilité de l’accident, soit indirectement par une vulnérabilité spécifique du conducteur, serait de l’ordre de 230 tués. Comparativement, le nombre annuel de victimes imputable à l’alcool serait de l’ordre de 2 270 tués ». Depuis, la mortalité routière a été presque divisée par deux, mais les risques associés à ces deux produits perdurent, selon une étude de 2011.
Des produits plus actifs et de nouveaux usages
Les différents effets du cannabis cités ci-dessus pourraient bien être accentués par un phénomène nouveau : en une dizaine d’années, la teneur en principe actif de la résine ou de l’herbe de cannabis a augmenté, en raison de la sélection de plantes hybrides en Europe et au Maroc, selon une étude réalisée avec l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (EMCDDA, European Monitoring Centre for Drugs and Drug Addiction). Des études ont été lancées pour mesurer les effets de nouvelles formes de consommation : produits comestibles, e-liquides pour les cigarettes électroniques…
Les partisans de la légalisation du cannabis (comme Générations libres) assurent que la composition du produit sera davantage contrôlée et régulée s’il est légal, et que la prévention sera plus ciblée sur les jeunes, les personnes en fragilité psychologique ou à risque accru de dépendance. C’est aussi l’avis du professeur Bertrand Dautzenberg, favorable à la dépénalisation, qui estimait dans Le Parisien en 2016 que « le cannabis en France aujourd’hui, c’est l’alcool frelaté du temps de la prohibition ».
La théorie contestée du basculement vers d’autres drogues
La distinction actuelle entre des produits addictifs licites (alcool, tabac) et illicites (cannabis, cocaïne, héroïne, ecstasy, MDMA…) semble agréger les « drogues » comme un groupe homogène, et peut accréditer la thèse d’un basculement inévitable de l’une à l’autre.
Deux théories sont souvent citées : celle de l’« escalade », qui considère que les consommateurs de cocaïne ou d’héroïne ont presque tous commencé par le cannabis, donc que le cannabis mène inexorablement à ces drogues, ou celle de la « passerelle » entre les substances dont l’effet se renforcerait chimiquement. Dans les faits, c’est plutôt par le contact avec les dealeurs que les consommateurs peuvent être amenés à expérimenter des substances comme la cocaïne. La légalisation réduirait ce risque.
Les bienfaits du cannabis thérapeutique
Avant même d’être une drogue récréative, le Cannabis sativa était une plante médicinale utilisée dès l’Antiquité. Les principes actifs permettent par exemple de soulager la douleur, réduire les nausées et les tremblements, stimuler l’appétit ou dilater les vaisseaux (soin du glaucome). Il est d’ailleurs autorisé à des fins thérapeutiques dans une quarantaine de pays.
En France, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a considéré en décembre 2018 qu’il serait « pertinent d’autoriser l’usage du cannabis » dans cinq cas :
douleurs neuropathiques réfractaires ;
épilepsie sévères et pharmacorésistantes ;
soins palliatifs de certains cancers ;
spasticité douloureuse (contractions et tremblements) de la sclérose en plaques ;
autres pathologies du système nerveux central.
Une expérimentation de deux ans a été annoncée pour 2020 avec un protocole encadré : seuls des médecins volontaires pourrait en prescrire, le cannabis ne doit pas être fumé mais inhalé ou ingéré (sirop, capsules…).
La légalisation, une manne économique
Le cannabis coûte actuellement plusieurs centaines de millions d’euros à la France. Mais la légalisation de la marijuana pourrait apporter beaucoup d’argent dans les caisses de l’Etat, tant en recettes fiscales qu’en économies sur le volet répressif. Le Conseil d’analyse économique préconise de trouver un juste prix pour éviter de trop augmenter le nombre de consommateurs tout en affaiblissant le marché illicite.
Actuellement, une charge pour l'Etat
Dans le système actuel, le marché informel du cannabis est estimé entre 810 millions et 1,4 milliard d’euros, selon un rapport réalisé pour la mission interministérielle de lutte contre les drogues et conduites addictives. Pour l’Etat, c’est pourtant une charge :
les bénéfices financent des organisations criminelles ;
il est difficile de connaître précisément combien de personnes tirent des revenus du trafic de cannabis, ni ce qui est reversé dans l’économie réelle – le marché noir ne génère par définition aucune cotisation sociale ;
la répression coûte cher aux services de police (autour de 400 millions d’euros par an) et engorge les tribunaux ;
le cannabis ne génère aucune recette fiscale, contrairement à l’alcool ou au tabac, autres substances psychoactives, qui rapportent 18 milliards d’euros au budget de la sécurité sociale.
La répression du cannabis coûte 10 fois plus cher que sa prévention
Des scénarios plus ou moins rentables
Le cercle de réflexion Terra Nova a tenté d’estimer, dans un rapport publié à la fin de 2014, les gains financiers pour l’Etat de trois scénarios :
la simple dépénalisation de l’usage réduirait de moitié les coûts de la répression, ce qui économiserait plus de 300 millions d’euros ;
la légalisation de la production, vente et usage dans le cadre d’un monopole public, où le prix du cannabis serait fixé à un niveau assez élevé pour éviter une hausse de la consommation. Les recettes fiscales pourraient s’élever à 1,3 milliard d’euros, auquel s’ajoute une réduction de 500 millions du volet répressif ;
la légalisation dans un cadre concurrentiel : avec un prix en baisse, les volumes de vente augmenteraient, et les recettes fiscales seraient plus élevées encore, autour de 1,7 milliard d’euros, pour un gain total de 2,2 milliards d’euros. Mais les économies sur la répression seraient contrebalancées par des dépenses accrues de prévention sanitaire, liées au grand nombre de consommateurs.
Dépénalisation, légalisation concurrentielle, monopole : les effets d’une modification de la législation sur le cannabis
Pour des raisons de santé publique, le rapport de Terra Nova préconisait le scénario 2 (légalisation avec un monopole public), qui évite une explosion de l’usage du cannabis, et permet d’allouer une part des recettes fiscales à la prévention contre les drogues.
Le rapport publié en juin 2019 par le Conseil d’analyse économique, organisme de conseil du premier ministre, rappelle que la fixation du niveau de prix dépend des objectifs poursuivis :
un prix faible « assèche » le marché noir, mais augmente le nombre de consommateurs ;
un prix élevé limite l’engouement, mais maintient un marché illicite, donc des coûts de répression contre les trafiquants.
Des opportunités pour les entreprises
L’Etat n’est pas le seul à voir un intérêt économique à la légalisation du cannabis. Au Canada, les grandes entreprises s’y intéressent de près : le groupe Constellation Brands, propriétaire de la bière Corona, et Altria, qui détient les cigarettes Marlboro, investissent dans un marché qu’ils espèrent lucratif.
Anne-Aël Durand , Jérémie Baruch et Pierre Breteau
Source: lemonde.fr
Ps: je vous invite à vous rendre sur le site du Monde, car je n'ai pas réussie à intégrer leurs graphiques dynamiques ici.
Peace
INFO EUROPE 1
Et pourquoi pas légaliser le cannabis thérapeutique, mais aussi le cannabis de bien être et récréatif ? Vous ne connaissez sans doute pas la distinction entre ces trois usages, et pourtant la question de la légalisation déchaîne les passions. Selon nos informations, une mission d'information parlementaire va être lancée et annoncée ces jours-ci. C'était une demande des députés de la majorité.
"Personne ne sait ce qu'est le cannabis bien être"
Le but : dépassionner le débat. Et l'objectif est très clair : que la légalisation du cannabis puisse devenir une proposition de la campagne présidentielle pour 2022, selon plusieurs députés. Le modèle, c'est Justin Trudeau au Canada, qui l'avait promis durant sa campagne, et a fait passer la loi une fois élu. En l'état, le débat est piégé, avec trop de "positions dogmatiques, de caricatures", explique un parlementaire.
Pendant un an, l'idée est de plancher à la fois sur les usages thérapeutiques, de bien être, et récréatif du cannabis. "Personne ne sait ce qu'est le cannabis bien être", se lamente un marcheur. Il ne contient pas de THC, la substance euphorisante. C'est une autre molécule. Mais le sujet le plus clivant, c'est la légalisation du cannabis récréatif, avec des enjeux de santé publique. Comment calculer le seuil de consommation pour prendre le volant sans danger ?
Et il y a aussi des enjeux d'ordre public : un cadre de la majorité le dit sans détour, aujourd'hui le cannabis est un "stabilisateur des banlieues". Et il se pose la question : "Faut-il associer à la réflexion des petits délinquants, revendeurs, si on veut créer une filière économique ?"
A l’heure où le débat sur le cannabis se banalise en Europe, sa prohibition est toujours d’actualité en Turquie. Mais pour beaucoup, la loi est loin d’être un frein à sa consommation.
« Avant de commencer, je vous rappelle que je ne suis absolument pas responsable des torts que vous pourriez avoir en regardant cette chaîne. C’est précisé partout sur cette vidéo. A partir du moment où vous êtes en Turquie, c’est à vos risques et périls. » Derrière sa caméra, Sağlam Kafa souffle sur son joint. Le visage caché derrière un bec de corbin, celui qui se fait surnommer « Tête Robuste » a pris soin de remonter sa capuche jusqu’au bas de son front. Ses gestes sont ceux d’un habitué : cela fait plusieurs années qu’il s’est lancé sur Youtube. Assis sur son canapé, un décor nu, il s’adresse à sa communauté.
Il y a six ans, alors atteint du syndrome des jambes sans repos (RLS) il allumait son premier joint pour soulager la douleur. Aujourd’hui, il en a fait un usage quotidien qu’il partage avec ses internautes. Car Sağlam Kafa n’est pas que Youtubeur : depuis son compte discord, il préside tout un réseau de Turcs amateurs de cannabis. Ici, on se soutient, on parle affaire, techniques de passe-passe. Mais avec toujours un mot d’ordre : « Dans ce groupe, on parle entre adeptes. On n’incite pas. »
La punition : des tests de dépistage
On s’en doute, la répression du cannabis en Turquie n’empêche pas sa consommation. Historiquement, la caricature du derviche fumant son kenevir tient toujours la route. La loi pourtant est claire : tout achat ou consommation illicite est punissable d’un à deux ans d’emprisonnement. Bonus possible d’un an selon la bonne volonté des tribunaux. En 2014, le parti islamique a augmenté la sentence de prison maximum pour possession de drogue à 5 ans au lieu de 2 auparavant. Quant à la production ou le trafic, elle équivaut à une peine minimale de 10 ans. Mais dans les faits, les consommateurs minimisent les risques. « Je ne savais même pas qu’on pouvait passer autant de temps en prison » s’étonne Emine*. La jeune fille consomme depuis deux ans seulement, jamais en dehors de chez elle. « Personnellement, je n’ai jamais eu de problèmes. Deux de mes amis s’étaient fait prendre avec environ 15 grammes de marijuana et une balance. La seule punition qu’ils ont eue a été de faire des tests de dépistage de drogue régulièrement pendant neuf mois. »
Même son de cloche du côté d'Hassan, un jeune consommateur d'une vingtaine d'années. « En règle générale, être attrapé avec quelques grammes d’herbe sur soi ne mènera pas forcément à la prison. La seule chose qui peut être embêtante, c’est qu’on va t’inscrire sur la liste des addicts à la drogue. Mais je ne crois pas que ça puisse vraiment causer des problèmes. » Si le jeune homme savoure son insouciance, la liste dont il parle est utilisée par les avocats d’entreprise. Elle peut être un frein à la recherche d’emploi. Lui n’en est pas encore là : le joint fait partie de sa vie d’étudiant.
« Ils ont cassé ma porte ! »
« Les trafiquants de drogue devraient être traités de la même manière que s’ils étaient des terroristes. Les forces de sécurité ne doivent pas hésiter à leur casser les jambes. » En 2017, les propos du ministre de l’Intérieur Suleyman Soylu avaient fait polémique. Ils avaient été accompagnés de mesures accrues autour de la consommation de drogues : la même année, la police aurait saisi 217% de cannabis de plus que l’année précédente.
Sağlam Kafa, en a fait les frais. Il y a deux semaines, le youtubeur postait une longue vidéo suite à la descente de la police à son domicile. « Ils ont cassé ma porte ! » répète-t-il plusieurs fois en tapant sa cigarette sur sa table. Lui n’était pas présent à ce moment-là. Il raconte : « C’est ma copine qui était à la maison. Ils sont arrivés en disant qu’ils avaient eu mon nom, que quelqu’un avait senti l’odeur de l’herbe. » Sağlam Kafa éclate de rire en tirant sur son joint : « Ils n’ont trouvé que 10 grammes ! » Son témoignage n’a pas eu l'air d'inquiéter ses abonnés. Le débat qui pointait son nez le lendemain du témoignage a vite été balayé par un internaute : « Il n’y a pas de raisons qu’on se fasse prendre. Il suffit d’être discret et malin. On ne montre pas qu’on fume à tout le monde ! » Il ajoute : « Puis c’est bon, ton cannabis, tu le caches dans un pot de fleurs ! »
#FreeEzhel
Emine considère encore que la consommation de marijuana est un tabou en Turquie. « Par exemple, on utilise rarement le mot de weed, on emploie des connotations négatives comme esrar et kubar. » L’actualité de ces dernières années a pourtant témoigné d’un revirement sur cette consommation cachée. Et la fin de ce tabou a un visage : celui du chanteur Ezhel. De son vrai nom Sercan İpekçioğluun, le jeune rappeur turc de 28 ans ne se cache pas de chanter les bienfaits du cannabis. En 2017, son nouvel album Müptezhel (stone en argot turc) vogue entre critique du régime autoritaire, sexe, polarisation sociale… et cannabis. Dans ses chansons, il décrit la drogue comme derman, un vieux mot qui vient du farsi, signifiant à la fois « le remède » et « être en bonne santé ». Cerise sur le gâteau, il poste sur Instagram une photo où il apparaît avec une feuille de cannabis. Depuis 2018, le chanteur a été condamné plusieurs fois pour incitation à la consommation de drogue. Le simple fait de se montrer avec du cannabis serait suffisant pour une incarcération, selon İbrahim Seydioğulları, le chef de la police du Bureau des stupéfiants qui avait déclaré que « le partage de photos de drogue est punissable de cinq ans de prison ».
Le soutien du public pour Ezhel ne s’est pas fait attendre. Pendant plusieurs jours, le hashtag #FreeEzhel est resté dans le top des tendances sur Twitter. Des campagnes de pétition ont été mobilisées, des graffitis sont apparus à plusieurs endroits du pays et les musiciens ont manifesté leur soutien. Amnesty International avait même lancé une campagne en faveur de sa libération. Acquitté en juin 2018, il a été nommé cette année par le New York Times parmi les European Pop Acts que tout le monde devrait connaître.
*Tous les prénoms ont été modifiés
Charlotte Meyer
La proposition de loi pour la légalisation du cannabis fait replonger la France dans un débat qui n’en finit pas de reculer devant l’inéluctable : la légalisation du cannabis. En attendant, nous sont servis dans les médias, les invités les plus rétrogrades, parmi lesquels nos soi-disant élites, qui nous récitent leur litanie de poncifs les plus stupides.
Photo: Professeur Jean Costentin dans « Salut les terriens »
En voici quelques exemples :
- « Légaliser le cannabis, c’est bientôt légaliser le krak et l’héroïne »
- « La consommation de cannabis va décupler... »
- « On a déjà l’alcool et le tabac, pourquoi une autre drogue ? »
- « Si les dealers n’ont plus d’herbe à vendre, ils vont vendre des drogues plus dures... »
- « Les jeunes vont mélanger l’alcool et le cannabis et ça va être pire... »
- « On va avoir une jeunesse ramollie du cerveau... »
- « Si on peut en acheter facilement, tout le monde va se mettre à se droguer... »
Etc., etc., etc.
Là-dessus, on ressort des médecins qui alertent sur les dangers du cannabis sans jamais les comparer à ceux de l’alcool, du tabac, d’autres psychotropes, des opiacés ou même du sucre ou du café. Ils ne diront jamais, bien sûr, que personne n’est jamais mort juste à cause de la consommation de cannabis mais toujours par des causes indirectes dans une moindre mesure que celles provoquées par l’alcool. C’est ainsi que sur des sites qui se veulent sérieux, est affirmé que le cannabis est cancérigène alors que c’est le tabac fumé dans les joints qui l’est.
Et peu importe ce qu’ils racontent car il en restera bien quelque chose étant donné que les esprits sont déjà préparés depuis des lustres sur les pseudos réalités de la dangerosité du cannabis quand on se donne la peine de faire les comparaisons.
Nous sommes toujours sous le régime de la Loi du 31 décembre 1970, relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie, et à la répression du trafic et de l’usage illicite des substances vénéneuses. Rappelons deux ou trois petites choses à propos de celle-ci.
Elle ne fait aucune différence entre drogues douces et drogues dures laissant ainsi se développer la fausse information. Elle criminalise le consommateur alors que d’autres pays le traitent comme un malade et peuvent ainsi mettre en place une vraie politique sanitaire. Quant à la répression qu’elle organise, on voit bien son efficacité. Et le pire, c’est qu’elle écarte de sa liste de stupéfiants, des drogues très dures comme l’alcool et le tabac qui sont responsables de dizaines de milliers de morts en France chaque année alors que le cannabis n’en tue aucun directement.
Un peu d’histoire
La propagande anti cannabis s’est développée aux États-Unis à partir de 1933, après l’abolition de la prohibition de l’alcool. Le gouvernement pensait retrouver les mêmes recettes provenant des taxes sur l’alcool. Mais, à force de boire de l’alcool frelaté qui a fait des milliers de morts, beaucoup de gens s’étaient tournés vers la marihuana mexicaine et n’avaient, finalement, plus très envie de l’échanger contre de l’alcool. Ce qui, pour le gouvernement était insupportable car, l’Amérique sortait difficilement de la crise financière de 1929 et avait un besoin vital de trouver des recettes.
A partir de là, a été mise en place une véritable machine de guerre anti marihuana où tous les coups étaient permis. Hollywood s’y est mise ; les médecins et les laboratoires ont été mis à contribution pour fabriquer un discours scientifique, et c’est comme cela que le mensonge infernal s’est répandu aux États-Unis mais aussi en Europe.
Voici quelques exemples de ce qu’on pouvait entendre et qui n’a peut-être pas fini d’être relayé encore aujourd’hui :
« Prions pour les enfants contre la Nouvelle ‘Herbe tueuse »,
« Il n’y a qu’une fin pour le fumeur de marihuana confirmé, et c’est la folie ! »
« marihuana – assassin de la jeunesse, »
« Dans au moins deux douzaines d’affaires relativement récente des cas d’ assassinats ou d’agressions sexuelles graves, la marijuana s’est avéré être une des causes … Il doit y avoir application constante et d’éducation permanente contre cet ennemi, qui a dans des futurs dossiers judiciaires, connaîtrons la terreur en traversant les siècles. »
« Marihuana - l’herbe du diable, »
« Dans le passé, plusieurs meurtres, dont les jeunes ont été impliqués, ont été associés à ce médicament [marijuana]. »
Un médecin spécialiste en toxicologie, le Dr V.H. Vogel, prévenait que, sans exception tous les toxicomanes adolescents ont commencés a fumer de la marijuana avant de commencer à l’héroïne. Conclusion : la marijuana n’est pas un narcotique léger innocent, mais un cercle vicieux, ainsi qu’une drogue dangereuse !
Dans les années 30, 40, on n’hésitait pas à comparer l’héroïne et le cannabis avec des affiches anti-marihuana où l’on voyait quelqu’un se piquer avec une seringue. Saura-t-on un jour combien de gens sont passés aux drogues dures en constatant qu’on leur avait menti sur la dangerosité du cannabis ?
La bêtise est rendue à ce point qu’en France on se demande encore de l’opportunité d’utiliser le cannabis à des fins médicales alors même qu’on utilise les opiacés qui sont bien plus dangereux et même le curare pour les anesthésies générales !
Interview de Raphaël Mechoulam
Capture extraite du documentaire ‘The scientist’ @Youtube
A l’heure où la question de la légalisation du cannabis de loisirs se pose, il est cocasse de savoir que l’État français a produit et commercialisé l’opium jusqu’en 1959.
Je reproduis ici, l’extrait d’une interview de Raphaël Mechoulam, le père de la science médicale du cannabis (in Le cannabiste, le média qui vous veut du bien https://lecannabiste.com/cannabis-vrai-faux-avec-raphael-mechoulam/ ).
Affirmation 1 : Le Cannabis rend les gens idiots
R.M : A l’heure actuelle aucune preuve scientifique ne montre que le Cannabis affecte le QI des individus, d’une façon ou d’une autre, et ce de quelque manière que ce soit.
Affirmation 2 : Le Cannabis donne le cancer
R.M : Cette supposition n’est étayée par aucun argument scientifique. Il n’a jamais été démontré nulle part que le Cannabis avait le moindre pouvoir cancérigène. Pour moi c’est non, catégoriquement.
Affirmation 3 : Le Cannabis dérègle le fonctionnement du corps
R.M : Toutes les drogues affectent l’équilibre biochimique et physiologique des organismes. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle on les utilise n’est-ce pas ? Le Cannabis qui est un médicament, n’échappe pas à cette règle commune et fondamentale. Il faut donc le traiter comme tel.
Affirmation 4 : Le Cannabis conduit à consommer alcool et drogues
R.M : Encore une fois, il n’existe aucune donnée scientifique qui puisse étayer cette affirmation. Rien de ceci n’est prouvé. Et d’après ce que je connais sur la science des Cannabinoïdes, je dirais : probablement que c’est faux. Donc à mon avis la réponse est non.
#Affirmation 5 : Le Cannabis est un faux médicament
R.M : Un certain nombre de Cannabinoïdes ont démontré leur efficacité au cours d’essais cliniques validés par la communauté internationale. Le CBD qui soigne les cas d’épilepsie et de schizophrénie de manière très évidente. Mais aussi le THC a été étudié dans de nombreux cas de traitements de chocs post-traumatiques et la prise en charge de la douleur.
Le Cannabis est employé pour soulager et pour guérir comme médicament d’une manière très étendue et souvent très efficace. Il vous appartient d’en juger.
Affirmation 6 : Le Cannabis médical est une vue de l’esprit
R.M : ????
Affirmation 7 : Les fleurs de Cannabis ne sont pas un médicament. Il faut d’abord en faire des pilules des sprays etc…
R.M : En Israël les patients utilisent les fleurs vaporisées par inhalation. Certains les mangent dans des gâteaux. D’autres personnes préfèrent utiliser des extraits concentrés de Cannabis en gélule ou même sous la forme d’huile cela dépend.
D’ailleurs au moment où je vous parle 35 000 patients reçoivent quotidiennement du Cannabis en Israël, sous la forme de fleurs ou autres concentrés. Tout ceci fait l’objet d’un encadrement officiel et de prescriptions qui sont validées par le Ministère de la Santé Israélien.
Je dirais que manifestement la fleur de Cannabis brute et tous ses dérivés constituent bien un médicament. Pour moi il n’y a pas l’ombre d’un doute là dessus.
Mes conclusions
Je ne vais pas refaire le rapport des parlementaires qui prône la légalisation du cannabis médical et récréatif,
Je dis simplement ceci :
1) De tout temps, les humains ont eu recours aux psychotropes pour diverses raisons : médicales, religieuses, récréatives… Pourquoi laisser libre des drogues dures comme l’alcool et le tabac et interdire une drogue douce,
2) La prohibition de produits a toujours développé un marché noir de produits frelatés mortels et généré une délinquance importante.
3) L’encadrement d’une drogue libre permet de mettre en place une politique sanitaire efficace et réduit aussi l’activité policière qui peut ainsi se reporter sur d’autres secteurs.
"L’ignorance est mère de tous les maux." François Rabelais
Après la Regina, la quatre fromages ou la Hawaïenne, voici la “déesse verte”, une pizza relevée avec un filet d’huile de cannabis.
Une chaîne sud-africaine vient d‘étoffer son menu en profitant de la légalisation de l’huile de cannabis dans le pays.
“On a toujours cherché à être innovants avec nos menus et à offrir à notre clientèle loyale les dernières tendances saines”, a expliqué la fondatrice de la chaîne Col’Cacchio, Kinga Baranowska.
“On adore avoir un temps d’avance et nous sommes extrêmement fiers d‘être le premier restaurant en Afrique du Sud à lancer une pizza cannabis”, a-t-elle ajouté.
Avec les pizzas au cannabis, “vous n’allez pas planer (…), mais à la fin du repas, vous sentirez les effets calmants de l’huile”, a précisé dans la presse locale Mike Saunders, fondateur de la société d’huile de cannabis qui fournit la chaîne de pizzerias.
Ce nouveau menu est rendu possible grâce à l‘évolution récente de la réglementation en Afrique du Sud.
En septembre, la Cour constitutionnelle a légalisé la consommation du cannabis à usage personnel, épilogue judiciaire d’un dossier qui suscite la polémique depuis des années dans ce pays comme dans le reste du monde.
Et fin mai, le gouvernement a décidé de légaliser la consommation d’huile de cannabis, en limitant la dose quotidienne maximale à 20 mg par personne.
La chaîne Col’Cacchio propose deux pizzas arrosées d’huile de cannabis: une végétarienne – la “Green Goddess” (déesse verte), aux courgettes et à la feta pour 125 rands (8 euros) – et une au poulet et aux poivrons – la “Not-So-Plain Mary Jane” (littéralement “une beuh pas si nature”) pour 140 rands (9 euros).
L’avocat Ricky Stone, spécialisé dans la législation sur le cannabis, a toutefois conseillé à l’industrie de la restauration de rester prudente dans l’usage de l’huile de cannabis.
“Il s’agit d’un domaine relativement nouveau et il y a encore beaucoup de choses qui ne sont pas connues et claires”, a-t-il prévenu.
Source: africanews.com
Supplément Weekend^^
Lors des retrouvailles entre amis, ou encore une soirée passée devant la télé à regarder un match ou un film, une portion de pizza est toujours la bienvenue pour nous faire passer un moment agréable.
Pour savourer pleinement une part de pizza, pas besoin d’acheter une huile piquante. Avec il est plus intéressant de concocter soi-même son huile pour pizza. Voici alors une recette sympa pour faire de l’huile stonante pour pizza à la maison.
Nous vous proposons aujourd'hui de découvrir comment réaliser une délicieuse huile d'olive piquante et aromatisée à l'ail. Une préparation simple et rapide à réaliser mais qui nécéssite de bien marier les ingrédients pour obtenir des saveurs parfaites. N'oubliez pas d'utiliser une huile d'olive de qualité pour garantir la bonne diffusion des arômes dans votre huile piquante. N'hésitez pas à rajouter les herbes séchées de votre choix, ici du cannabis, ou à retirer l'ail si vous ne voulez pas avoir quelque chose de trop parfumé.
Avec la weed il est conseillé de la décarboxyler avant de l'ajouter au mélange à froid comme sur la vidéo
Mais vous pouvez aussi extraire le thc de quelques buds ou de manucure comme pour un Beurre de Marrakech directement dans l'huile avant de la pimenter^^
Bon appétit
Le cannabis compte parmi les plus anciennes plantes cultivées. Et des chercheurs nous apprennent aujourd'hui que certains peuples fumaient déjà du cannabis - à des fins rituelles - il y a au moins 2.500 ans.
Des agriculteurs et élus locaux misent sur le chanvre pour relancer l’économie du département.
Photo: Dans la ferme de Jouany Chatoux, à Pigerolles,
on se prépare à la légalisation de certains usages du cannabis. Des plants sont sélectionnés dans un conteneur. Photo Julie Hascoët pour Libération
Située à 900 mètres d’altitude dans le sud de la Creuse, la ferme de Jouany Chatoux, basée à Pigerolles, développe depuis quelques mois une nouvelle activité. Outre les vaches limousines, les porcs cul noir et les brebis, on y trouve désormais du cannabis. Cet agriculteur de 42 ans, favorable à sa légalisation, a spécialement aménagé un conteneur pour étudier les plants, sélectionner les pieds mères et les boutures qui pourront survivre à l’air libre.
Alors que ses bovins paissent l’herbe grasse du plateau de Millevaches, il désire montrer que le département est crédible pour la culture de cannabis, ou «cochon vert» comme on l’appelle sur le plateau : «Le conteneur nous a permis de nous positionner. C’est aussi pour montrer qu’on peut très bien faire ce que prévoient déjà les grosses multinationales canadiennes.» Depuis des mois, la Creuse attire les investisseurs étrangers, curieux de voir comment pourrait s’y développer la filière française. Moins de deux ans après la fermeture de l’usine automobile GM&S, l’Etat s’est en effet engagé à faire de ce département un laboratoire d’expérimentation territoriale des politiques publiques, notamment en «accompagnant la création et le développement d’une filière intégrée autour du cannabis à vocation thérapeutique».
Mentalités
Gilet sans manches élimé sur le dos, Jouany Chatoux, 42 ans, arrose avec minutie les dizaines de plants et les sélectionne progressivement. «La force du projet creusois réside dans le fait que sur un périmètre de 60 km, nous pourrons avoir la production, la transformation et la fabrication de médicaments. En termes logistiques, ça minimise les circulations de denrées encore considérées comme des produits stupéfiants», explique l’agriculteur. Pour lui, un hectare de cannabis thérapeutique représenterait entre 30 000 et 100 000 euros de chiffre d’affaires, pour un investissement frisant 1 million d’euros les 1 000 m2. A l’abri des regards indiscrets, sa production de cannabis grandit petit à petit. Et déjà, dans son champ, les premiers plants ont remplacé les épis de blé noir.
En un an, les mentalités ont évolué au pays des tourbières. Entre nécessité médicale et opportunité économique, le cannabis thérapeutique creusois a fait du chemin dans l’opinion publique. «Cette idée vient de Creuse et doit y rester», plaide Eric Correia, président de l’agglomération du grand Guéret. A l’origine du débat autour du cannabis dans le département, l’élu a lutté pour faire accepter son projet. «Lorsque j’ai eu l’idée d’inscrire le cannabis thérapeutique dans le plan de redynamisation du territoire, on m’a dit que j’étais fou et que je pouvais oublier les municipales de 2020.» Anesthésiste de formation, il a fait du cannabis à visée médicale son cheval de bataille pour l’intérêt des patients et la sauvegarde de son territoire. «A Guéret, un laboratoire pharmaceutique a suivi le projet et a embauché un biochimiste, un consultant spécialisé dans le cannabis et une pharmacienne, qui travaille uniquement sur cette question. Nous avons une offre complète en Creuse et nous sommes prêts.»
A la terrasse du Grand Café de Guéret, Vincent Turpinat, maire de Jarnages, une commune toute proche, et suppléant du député Jean-Baptiste Moreau (LREM), plaide aussi pour que le projet de culture du cannabis thérapeutique n’échappe pas à la Creuse. Avec l’espoir, également, qu’il serve à attirer de nouveaux habitants : avec moins de 120 000 personnes, le département possède une des plus faibles densités de population de l’Europe de l’Ouest. «Au niveau du thérapeutique, des industriels et des investisseurs pourront s’installer sur le territoire et créer de l’emploi dans les serres, dans les structures de transformation et dans le secteur tertiaire», déroule cet addictologue de formation.
«Bien-être»
Mais alors même que la légalisation du cannabis thérapeutique doit encore être actée par l’Etat, élus et agriculteurs creusois rêvent déjà d’une ouverture vers sa variante dite de «bien-être», moins dosée que le «récréatif». Soit des produits à moins de 0,2 % de THC (tétrahydrocannabinol, la substance qui déclenche les effets psychotropes) contribuant à une réduction du stress ou à l’amélioration du sommeil. Pour le député Jean-Baptiste Moreau, l’autorisation et la mise en place d’une filière bien-être pourrait être rapide et les retombées considérables pour les cultivateurs français. «Le thérapeutique ne concernera qu’un nombre réduit d’agriculteurs. Mais le bien-être permettrait une rotation intéressante dans la perspective d’une transition vers une agriculture plus durable et protectrice de l’environnement.»
L’ancien agriculteur, qui souhaite la mise en place d’une filière française, est à l’origine d’une mission d’information déposée en mars autour de cette culture, arguant des débouchés considérables pour son territoire. «Peu gourmand en eau et en engrais, le chanvre est un bon couvert végétal pour les sols. Cette culture rapporterait dix fois plus que la céréale. En termes de création d’emplois, de volumes de production et de revenus, les retombées seraient multipliées par 1 000 par rapport à la culture de cannabis thérapeutique.»
Non loin de la rivière de la Gioune, des traces d’une présence ancienne du chanvre sont encore visibles. A quelques mètres de l’exploitation de Pascal Lerousseau, président de la chambre d’agriculture du département, une parcelle de terrain porte le nom évocateur de la Chenevière. «Il y a quatre-vingts ans, le chanvre poussait comme du chiendent en Creuse. Il était partout. Aujourd’hui, notre terre est à 95 % consacrée à de l’élevage. Mais la consommation de viande baisse partout. Ce qui était notre force est devenu notre handicap. Il est temps de s’ouvrir. Ou bien on peut continuer à pleurer.»