Les drogues restent un sujet passionnel en France, ce qui rend les partis comme les élus particulièrement frileux quant à la réforme de nos politiques en la matière, et ce, malgré leur flagrante contre-productivité.Notre politique française – la plus répressive d'Europe –, montre clairement ses limites. La plupart des experts reconnaissent que comme la prohibition l'alcool aux Etats-Unis dans les années 1920, elle nourrit les trafics en tout genre, précarise les usagers les plus vulnérables et engendre des violences, que la simple présence de policiers sur le terrain ne permet plus d'endiguer. Dernier symptôme d'ineffcacité, et non le moindre, la France détient aujourd'hui un des taux records de jeunes utilisateurs de stupéfants en Europe.
En effet, malgré l'arsenal répressif mis en œuvre, les statistiques de l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies révèlent que même interdite, la drogue est facile d'accès et les drogues dites "dures" (cocaïne, héroïne, LSD, etc.) sont plus populaires parmi les jeunes qu'auparavant. Enfin, la répression entraîne une consommation de drogue forcément clandestine, qui précarise les usagers : la diminution des moyens mis en œuvre pour les accompagner et les aider au quotidien ont fait une fois de plus repartir leur mortalité à la hausse.
Depuis 2003, la politique gouvernementale a accordé la priorité à la criminalisation de l'usage des drogues, qui mobilise des milliers de policiers et de gendarmes, gèle des moyens très importants, coûte un temps précieux, et encombre souvent inutilement les douanes, les tribunaux et les prisons. Une politique de la drogue pacifiée permettrait de libérer de précieux moyens de sécurité, qui pourraient être ré-affectés à d'autres types de missions. Cela est d'autant plus nécessaire que la répression se trompe de cible : on estime que les interpellations pour stupéfiants concernent dans 90 % des cas les usagers de cannabis, alors que les interpellations pour trafic se montent à environ 9 %.
Quant aux condamnations, elles sanctionnent essentiellement l'usage et la détention-acquisition, délits associés à l'usage. Il s'agit le plus souvent d'amendes – mais contrairement à ce qui se dit, il y a aussi des incarcérations pour usage, soit en 2008 3 111 peines ferme pour usage illicite de stupéfant et 5 456 peines ferme pour détention-acquisition de stupéfants soit au total 8 567, les incarcérations pour usage étant plus nombreuses les incarcérations pour trafic.
Depuis plus de quarante ans, les gouvernements de droite comme de gauche ne se sont jamais détournés de la surenchère répressive comme le montrent les chiffres publiés la semaine dernière par l'OFDT : depuis 1970, la répression de l'usage a augmenté chaque année, parallèlement à l'augmentation régulière des moyens des services répressifs. Or des solutions alternatives existent ! En témoignent notamment les derniers rapports d'institutions aussi réputées pour leur sérieux que l'Organisation mondiale de la santé, l'Organisation des Nations unies ou encore l'Institut national de la santé et de la recherche médicale.
Une expertise confrontant les données internationales a en effet démontré que la répression de l'usage et détention était inefficace pour limiter les consommations et encore moins pour le trafic. Les chiffres récemment publiés sont clairs : la plupart de nos voisins en Europe ont déjà dépénalisé l'usage, soit de toutes les drogues (Espagne, Italie, Pays Bas) soit seulement du cannabis (Allemagne, Belgique, Autriche) au cours des années 1990, sans constater d'augmentation de la consommation. La même démonstration a été faite au Etats-Unis, avec les douze Etats qui ont dépénalisé l'usage et la détention du cannabis pour consommation personnelle.
CHANGEMENT RADICAL
Ce qui est efficace en matière de protection de la santé, c'est une information fondée sur la réalité des risques, information qui réduit effectivement les risques et s'accompagne aussi souvent d'une stabilisation des consommations. Le développement des salles de consommation s'inscrit dans la logique ces politiques de santé publique. Le consensus des experts est international, et certains pays – dont la Suisse, les Pays-Bas, le Portugal l'Allemagne, la Norvège et l'Espagne –, ont déjà réagi en autorisant l'ouverture de salles de consommations, en dépénalisant la consommation de cannabis voire en mettant en œuvre une distribution contrôlée d'héroïne dans certains cas très spécifques et très lourds de dépendance.
Les Jeunes Verts et Europe Ecologie – Les Verts insistent aujourd'hui pour que la France adopte à son tour des politiques de santé et de solidarité publiques qui soient basées non sur la peur et l'épouvantail sécuritaire mais sur l'humanisme, la lucidité et la responsabilité. Une politique des drogues efficace ne pourra faire l'économie à terme d'un changement radical d'orientation. Et nous avons le courage de dire que seule une légalisation contrôlée à tous les niveaux – autant en termes fscal, sanitaire, qu'en terme de prévention et de sécurité pour tous –, est nécessaire, voire urgente. Cela induirait de changer les traités internationaux ? Alors engageons la réfexion pour ce changement ! Mais agissons dès aujourd'hui, localement, et appliquons des mesures capables de sauver des vies, en commençant par l'installation de salles de consommation à moindres risques !
https://www.circ-asso.net/img/1970-2010_40_ans_prohibition.jpg[/img]Plus généralement, nous devons nous engager sans attendre dans un changement des pratiques, pratiques de santé publique d'une part, pratiques répressives d'autre part. Dans un cas comme dans l'autre, il s'agit de se donner des priorités : la protection de la santé exige le développement de politiques de santé qui intègrent la réduction des risques ; la protection de la sécurité impliquerait que la définition de priorités, la lutte contre la violence, le blanchiment et la corruption. Le développement de mafias internationales représente une réelle menace pour la démocratie : les services de police et justice doivent s'y consacrer au lieu de s'épuiser à lutter contre l'usage de la drogue. Ce détournement de moyen est inutile et contre-productif : plus les usagers sont interpellés, moins les trafiquants le sont !
Nous espérons qu'Europe Ecologie – Les Verts, parti actuellement très seul à réfléchir sans démagogie sur ce terrain très controversé, ne le restera pas longtemps : examiner les solutions que représenteraient la dépénalisation de toutes les drogues, la production locale en circuits courts de cannabis, la distribution médicalisée de certaines drogues dans des cas bien précis, et le recentrage de la répression sur le démantèlement des mafias… est aujourd'hui de l'ordre de l'urgence et de la responsabilité collective.
Aujourd'hui, nous fêtons les quarante ans d'un système législatif à bout de souffle : il est temps d'en finir, non ? De nombreuses pistes existent, et nous invitons nos responsables politiques à les explorer, plutôt que de s'obstiner dans l'impasse dans laquelle les politiques des drogues françaises se sont engagées.
Anne Souyris, co-responsable du projet 2012 d'Europe Ecologie – Les Verts, et Marine Tondelier, porte-parole des Jeunes vert
La justice européenne a confirmé jeudi la légitimité des autorités
communales de Maastricht à interdire aux gérants locaux de coffee-shops la vente de
cannabis à des clients ne vivant pas aux Pays-Bas, malgré les règles européennes de
non-discrimination sur base nationale.
https://www.rtlinfo.be/pics/div/2010_12_16/217x_/easygoing.jpg[/img]16 Décembre 2010 12h25
Le 20 décembre 2005, afin de lutter contre le tourisme de la drogue et des nuisances qu'il engendre dans la ville, le bourgmestre de Maastricht avait interdit à tout tenancier de coffee-shop d'admettre dans son établissement des personnes n'ayant pas leur résidence effective aux Pays-Bas.
Un commerçant juge cette interdiction discriminante
Constatant que ces règles n'étaient pas respectées par le patron de l'"Easy Going", le bourgmestre avait, en septembre 2006, ordonné la fermeture de l'établissement, une décision immédiatement contestée par le gérant au nom de la législation européenne. Selon lui, le règlement local crée une "discrimination injustifiée" entre citoyens de l'Union, une pratique illégale au regard des traités européens.
70% de la clientèle perdue
Dans un arrêt rendu vendredi, la Cour européenne de Justice a toutefois confirmé la légitimité de la décision du bourgmestre, étant donné qu'elle vise à lutter contre le tourisme de la drogue, un "objectif se rattachant tant au maintien de l'ordre public qu'à la protection de la santé des citoyens, et ceci tant au niveau des États membres qu'à celui de l'Union", souligne la Cour. Selon des chiffres apportés par la ville de Maastricht, les quatorze coffee-shops établis sur la commune attiraient jusqu'il y a peu environ 10.000 visiteurs par jour, soit un peu plus de 3,9 millions par an. Sur l'ensemble de ces visiteurs, 70 % ne résidaient pas aux Pays-Bas.
AUDIENCE PUBLIQUE : "LA REGLEMENTATION DES DROGUES, UNE MESURE CONTRE LA CRISE ?"
BRUXELLES - L’Union Européenne ne s’opposera à aucune initiative des Etats Membres de l’UE qui pourrait aller dans le sens de la réglementation du cannabis et d’autres drogues illicites. Dana Spinant, la nouvelle Coordinatrice de l’Unité Anti-Drogues de la Commission Européenne, l’a maintes fois répété lors de l’Audience Publique sur les Politiques des Drogues en Europe qui a eu lieu aujourd’hui au Parlement Européen.L’audience a été organisée par l’eurodéputé Michael Tremopoulos (Verts, Grèce) et ENCOD ( coalition de citoyens en faveur d’une réf orme de la politique des drogues). Des représentants de la société civile, parmi lesquels on pouvait compter le fervent activiste espagnol pour la légalisation du cannabis, Martin Barriuso ; le porte-parole de la Fédération des Coffee-shops de Hollande, Marc Josemans et Richard Cowan, l’ancien directeur de NORML, la plus grande organisation réformiste des Etats-Unis, ont exposé leurs expériences. Les eurodéputés Rui Tavares (GUE/NGL, Portugal) et Dennis de Jong (GUE/NGL, Hollande) ont aussi participé au débat.
L’audience a tout d’abord fait une estimation des conséquences financières que provoqueraient la dépénalisation des drogues et la réglementation du cannabis aux dépenses publiques. Si l’on se base sur une extrapolation de données de l’OEDT, le budget global qui pourrait être produit par un ensemble de mesures est estimé entre 35 et 60 milliards d’euros par an, ce qui représente de 70 à 120 euros pour chacune des 500 millions de personnes qui résident dans l’Union Européenne.
En mars 2009 la Commission Européenne a publié "Le Rapport sur le Marché des Drogues Illicites de 1998 à 2007" (rédigé par Peter Reuter et Franz Trautmann). Les conclusions de ce rapport ont montré que les politiques actuelles ont échoué dans leur objectif principal : la réduction de l’offre et de la demande de drogues illicites, et qu’il est possible qu’elles soient le facteur le plus important des dégâts occasionnés aux consommateurs de drogues, à leurs proches et à la société en général.
Martín Barriuso et Dana Spinant
"La prohibition est une bénédiction pour le crime organisé", a dit Dennis de Jong, eurodéputé du Parti Socialiste néerlandais (SP). "Malheureusement mon propre gouvernement veut appliquer un répression plus importante aux coffee-shops. Au lieu d’une politique plus raisonnable orientée vers une réglementation, les autorités veulent maintenant exclurent les touristes étrangers par l’introduction d’une carte d’adhésion aux coffee-shops, ce qui aurait pour effet de développer le marché noir".
Les témoignages de Barriuso, Cowan y Josemans attestent que la réglementation du cannabis progresse dans plusieurs pays du monde et qu’elle produit des résultats satisfaisants. La dépénalisation de la consommation de drogues comme en Hollande ou au Portugal ne favorise pas l’augmentation de la consommation mais elle offre des conditions plus sûres aux consommateurs de drogues, et une plus grande efficacité de l’interdiction. C’est aussi le cas en Espagne : "Au Pays Basque, le modèle des Clubs Sociaux du Cannabis, une forme de culture collective de cannabis pour usage personnel a été reconnu par les autorités y demeure un modèle qui fonctionne très bien et dont on ne doute plus", a expliqué Martin Barriuso.
Durant l’audience Encod a demandé à la Commission Européenne d’évaluer les coûts de la prohibition des drogues et les bénéfices que pourraient générer des politiques alternatives mais Dana Spinant a répondu que la Commission n’a pas compétence pour prendre des initiatives qui ouvriraient le débat sur la réforme des politiques des drogues. "La responsabilité appartient entièrement aux Etats Membres, c’est dans cette direction que vous devez vous diriger" a-t-elle dit.
COMMUNIQUÉ DE PRESSE Encod du 8 Décembre 2010
SOURCE: ENCOD
relayé par .bob
Voir le vidéo de l’audience
En Allemagne, un homme de 68 ans utilisait comme sapin... un plant de cannabis, décoré aux couleurs de Noël.
A Coblence, en Allemagne, un homme préparait les fêtes avec comme arbre de Noël... un plant de cannabis, en lieu et place du traditionnel sapin ! En effet, il avait commencé à décorer son "beau sapin", de guirlandes, et d'illuminations de Noël. Lors de son arrestation, l'homme a dit aux policiers que "l'arbre" n'avait pas encore reçu toutes ses décorations, et que d'autres cadeaux devaient venir prendre place sous celui-ci.
Image: Cannaweed.com
La police a fait cette drôle de découverte alors qu'elle intervenait chez ce particulier pour un contrôle de routine. L'arbre, d'une hauteur de deux mètres de haut environ, était posé dans un pot et aurait pu passer inaperçu ainsi décoré. L'homme de 68 ans chez qui se trouvait cette plante verte a été mis en examen pour possession de drogue. A noter que les policiers de Coblence n'ont pas manqué d'humour face à cette affaire, en intitulant le communiqué de presse "All you need is love, ou comment les hippies fêtent Noël".
Bruxelles, Correspondant - Un projet du gouvernement néerlandais visant à soumettre l'achat de cannabis dans les "coffeeshops" à l'obtention d'un document officiel (le "wietpas") suscite une polémique croissante aux Pays-Bas.
Le ministre de la justice, Ivo Opstelten (libéral), a annoncé, peu de temps après sa récente entrée en fonction, qu'il entendait imposer aux coffeeshops de cinq villes du Sud du royaume – Eindhoven, Breda, Tilburg, Den Bosch et Helmond – l'introduction d'un tel "passeport". La mesure devrait ensuite être étendue à tout le pays. La ville d'Amsterdam a, comme quelques autres municipalités, indiqué qu'elle s'opposerait à cette mesure. Des maires du Sud du pays, confrontés aux nuisances liées au commerce de la drogue, en sont, en revanche, d'ardents partisans.
Le gouvernement entend éviter que des consommateurs étrangers continuent à s'approvisionner en masse dans la zone proche des frontières belge et allemande. Appuyé par des responsables locaux, il affirme aussi que le "passeport" permettra de réglementer, outre la vente, la production du cannabis.
UNE OPTION CONTESTÉE
A l'inverse, pour certains spécialistes, le commerce se déplacera des coffeeshops vers la rue et encouragera des groupes criminels, avec, à la clé, un développement de la violence. Ces opposants évoquent une décision "purement symbolique".
Une étude conduite par une chercheuse de l'université de Tilburg et évoquée, lundi 6 décembre, par le quotidien Trouw confirme cette analyse. Selon Nicole Maalsté, les "touristes de la drogue" trouveront toujours - comme les Néerlandais qui refuseront de s'enregistrer - à s'approvisionner sur des marchés clandestins.
Mme Maalsté suggère plutôt un système de contrôle basé sur l'examen des passeports et une légalisation de la culture du cannabis, un secteur en bonne partie contrôlé par des groupes mafieux à l'heure actuelle.
Les autorités néerlandaises sont en attente d'un jugement de la Cour européenne de justice qui doit se prononcer, le 16 décembre, sur la légalité, au regard du droit européen, d'une mesure qui exclura de fait tous les étrangers de la vente légale de cannabis.
« Tolérer la consommation, c’est favoriser le travail des trafiquants », lançait en 2003 le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy aux Sénateurs l’auditionnant sur les dangers du cannabis. Et de tirer à boulets rouges sur la « complaisance » de la gauche en la matière. Un rapport du même Sénat dénonçait une « dépénalisation de fait », regrettant que:
« les simples consommateurs de produits stupéfiants, notamment de cannabis, sont de moins en moins souvent poursuivis. »
Politiquement porteur, ce discours sur le trop grand laxisme dont bénéficieraient les consommateurs de stupéfiants pourrait être mis à mal par l’étude du très officiel Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT) publiée la semaine dernière qui montre au contraire que la « pénalisation de l’usage atteint des niveaux jamais égalés ».
137 000 personnes ont ainsi été interpellées pour usage simple de stupéfiants en 2009, dont 125 000 pour du cannabis. Elles étaient moins de 2000 il y a quarante ans. Mais surtout, les arrestations d’usagers augmentent deux fois plus vite que celles des trafiquants. Même constat du côté de la justice, les condamnations pour usage simple (13000 en 2008) augmentant plus vite que les autres. Seules les incarcérations restent stables (1360 usagers simples en 2008), les réponses pénales variant de plus en plus, du stage de sensibilisation à l’injonction thérapeutique en passant par les amendes.
Pourquoi ce regain d’intérêt pour les usagers alors que la consommation de cannabis stagne depuis dix ans? Parce qu’il est beaucoup plus simple de débusquer un fumeur de pétard que Pablo Escobar, et que, statistiquement, les deux sont équivalents. Comme le rappelle l’auteure de l’étude, Ivana Obradovic :
« Élucidées au moment même où elles sont constatées, les infractions d’ usage améliorent mécaniquement le taux d’ élucidation des unités de police. »
Rien de tel qu’un fumeur de pétard gardé à vue pour faire planer son commissaire et donner aux politiques un motif de satisfaction publique. Un thème d’autant plus porteur que, comme le montrait notre sondage du mois de septembre, deux-tiers des Français restent opposés à la dépénalisation des drogues douces.
Et la hausse des chiffres justifie à son tour la hausse des budgets. En 2003, selon un précédent rapport de l’OFDT, l’Etat a alloué 637 millions d’euros à la répression. Contre 36 à la prévention. Or, conclue la chercheuse de l’OFDT:
« Une comparaison entre les législations des pays européens montre qu’il est impossible de faire un lien entre répression et niveaux de consommation en population générale ».
Résultat, quarante ans après l’adoption de la loi de 1970, la France présente la double caractéristique d’être l’un des pays européens les plus répressifs et d’avoir l’une des jeunesses les plus friandes de cannabis.
Chaque année, le cannabis gagne davantage de parcelles et de jardinières en France. Et c'est, selon des spécialistes de la lutte contre les stupéfiants, dans le Grand Sud, notamment en Midi-Pyrénées, en Languedoc-Roussillon et en Provence, que ces plantations seraient les plus nombreuses.Dans son rapport annuel, rendu il y a quelques jours, l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) fait état que 50 % de l'herbe fumée dans l'hexagone est produite dans notre pays. Pour mieux comprendre l'ampleur du phénomène, il faut savoir qu'en 2009 ce sont 2 106 plantations qui ont été démantelées et quelque 56 000 plants détruits par la police.
Mais, « cela n'est rien comparé au nombre de plantations qui existeraient réellement dans notre pays » considèrent des spécialistes de l'Observatoire qui fondent leur estimation sur des témoignages recueillis auprès de fumeurs : « l'herbe française est la plus fréquente sur notre marché, puisqu'un usager sur deux (47,7 %) estime consommer de l'herbe made in France ».
Si les pieds de cannabis fleurissent toujours sur des balcons et dans des jardins, « l'émergence de la culture du cannabis dite indoor est la plus répandue ». Toulouse a été précurseur en la matière. « Cela fait plus de 20 ans que des gens produisent ainsi dans la Ville rose ».
Cette production révolutionne le marché. Elle offre au « consommateur » l'avantage de permettre une offre toute l'année et d'être moins coûteuse que l'achat auprès d'un dealer. Elle explique peut-être en partie les tensions entre revendeurs.
Selon David Weinberger, de l'Institut national des hautes études de sécurité et de justice (INHESJ), « cette nouvelle variété made in Europe s'installe durablement en France et tend désormais à rivaliser avec la résine marocaine ». L'herbe représente à présent 40 % de la consommation française alors que la résine constituait 90 % du marché jusqu'au milieu des années 1990.
Si beaucoup produisent pour leur simple consommation, d'autres se sont professionnalisés, pour ne pas dire industrialisés, en transformant de grands hangars en serres éclairées de lumière artificielle.
Les « cannabis factories » à la française n'ont cependant pas encore atteint la taille des plantations du sud de l'Italie, par exemple, où la police a dû incinérer dans l'une d'elles plus d'un million de plants.
C'est de plus en plus souvent à l'intérieur que le cannabis est cultivé en France./ Photo DDM, N. T.
Mais David Weiberger met en garde : « C'est l'idée même que la France puisse abriter des plantations de grande ampleur financées par des groupes criminels organisés qui s'impose désormais, battant en brèche l'image caricaturale du « cultivateur hippie » du Larzac ou des Pyrénées. »
Par Guillaume Atchouel
Le chiffre : 200 000 cannabiculteurs
> En France. Selon l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies, c'est, au minimum, le nombre de personnes qui font pousser chaque année du cannabis en France.
La phrase
« Plus de 40 % du cannabis fumé en France est produit dans l'Hexagone alors qu'auparavant la drogue venait surtout des Antilles et du Maroc ». David Weinberger, spécialiste de l'Observatoire national de la délinquance
témoignage arrestations
Des saisies toujours plus nombreuses
Si faire pousser du cannabis chez soi peut laisser penser que l'on échappera à tout contrôle, ce n'est qu'une idée reçue. Chaque année relève son lot de saisies.
La police et plus particulièrement l'Office centrale de la répression du trafic illicite des stupéfiants ont plusieurs tours dans leurs sacs pour déceler ces jardins privés d'un genre particulier.
Ils survolent les propriétés en hélicoptère pour repérer les plantations extérieures.
Des cultivateurs aux profils variés
Ou parfois lors des interventions chez les personnes, ils ont appris à reconnaître une installation d'intérieur destinée à la culture du cannabis.
En septembre 2007, les policiers de Castres découvrent 2 400 pieds de cannabis pour une production d'une tonne d'herbe. Rapportant au propriétaire de la maison où les plants étaient cultivés un revenu mensuel de 10 000 € par mois ! Cet été, plusieurs saisies de moindre importance ont eu lieu à Toulouse et ses environs ainsi que x dans plusieurs départements de Midi-Pyrénées. En Haute-Garonne, L'un de ces jardiniers faisait pousser sous serre à Bouloc tandis qu'un autre, à Mons, a expliqué que ses 60 pieds d'herbe « étaient destinés à soigner sa maladie ». à l'automne les policiers toulousains avaient saisi 3 kg d'herbe en train de sécher et de nombreux plants en train de pousser sous des lampes à iode dans une demeure familiale de la banlieue de Gaillac.
Dans les Landes, en juin, ce sont plusieurs maisons dans différentes villes (Tyrosse, Tartes, Mées et Montfort) qui servaient de hangar pour la culture intérieure.
Nombre de saisies sont aussi faites chez de petits cultivateurs.
Des personnes qui ne font pousser que pour leur consommation personnelle. Comme ce jeune homme, arrêté en 2009 pour avoir cultivé 11 plants de cannabis… dans sa baignoire !
Certains n'ont même pas le profil habituel du délinquant. C'est le cas de ce musicien que la police a interpellé chez lui, à Cahors en possession de 29 plants de cannabis. Fait remarquable, l'artiste payait l'Impôt de solidarité sur la fortune (ISK).
Selon l'article 222-35, la production ou la fabrication de cannabis ou de résine de cannabis sont punies de vingt ans de prisons et de 750 000 € d'amendes. Les cultivateurs risquent donc de voir la cabane au fond de leur jardin.
G.A. et E.M.
Des commerces spécialisés
On compte en France près de 400 magasins spécialisés dans la vente de matériels voués à « la culture de plantes en appartement ». Ces commerces légaux ont également pignon sur rue dans la Ville rose où un kit complet pour amateur est proposé à partir de 350 € : terreau, éclairage adapté, chambres de culture de toute dimension, système d'irrigation… Après, le « jardinier » choisit l'espèce qu'il souhaite produire. La vente très subversive de ces « jardins spécialisés » peut à première vue étonner au regard des dispositions légales. En effet, les devantures de ces échoppes annoncent clairement la couleur et les commerçants assurent « Tout ce qui est vendu ici est autorisé ! Après, ce que vous faites pousser, ça, c'est votre problème ! ».
La clientèle ne s'y est pas trompée et dans la file d'attente, on ne trouve pas que des amateurs de persils. Loin s'en faut !
O.S.
« Un moyen d'éviter le dealer »
expert : Michel Gandilhon, Observatoire français des drogues et toxicomanies:
Quelle est la quantité de cannabis produite en France ?
Nos études permettent d'estimer à 32 tonnes la production annuelle d'herbe de cannabis sur le territoire français. La majeure partie de cette quantité est produite par de petits cannabiculteurs qui consomment directement leur récolte et n'en font pas commerce. Mais depuis une dizaine d'années, le phénomène a pris de l'ampleur jusqu'à intéresser le crime organisé. De plus en plus de saisies de cannabis concernent des cultures intensives dont la récolte devait être revendue dans la rue. Cette tendance reste, cependant, marginale en France comparée à des pays comme les Pays-Bas, la Belgique et l'Angleterre.
Justement, cette production a-t-elle une influence sur le marché de la drogue ?
Oui. Ce phénomène nouveau modifie considérablement le marché. Les consommateurs achètent de moins en moins de résine de cannabis. Cela oblige les importateurs à varier leur offre. Du coup on voit beaucoup plus de cocaïne arriver en France à des prix nettement moins élevés qu'avant. Il s'agit d'un marché plus lucratif parce que moins concurrentiel.
Est-ce que certains producteurs français de cannabis exportent à l'étranger ?
Non. On pense que tout ce qui est produit sur le territoire est consommé ici, à la différence des Pays-Bas et de la Belgique dont 90 % de la production est exportée dans le reste de l'Europe.
Pensez-vous que la production française va encore augmenter ?
Il est difficile d'anticiper les tendances futures mais il est probable, effectivement, que ce phénomène s'accentue d'autant que les consommateurs veulent éviter de prendre des risques en achetant à des dealers.
Selon une étude, les interpellations et les poursuites pénales ont fortement augmenté depuis vingt ans.
Quarante ans après son entrée en vigueur, la loi qui punit la consommation de drogue suscite toujours la controverse, mais elle est plus appliquée que jamais. «Contrairement à ce que l'on entend souvent, la pénalisation de l'usage de stupéfiants atteint des niveaux jamais égalés en France. Au point d'être devenu un contentieux de masse», souligne l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), dans une étude analysant l'évolution des statistiques pénales et policières depuis les années 1970.
Premier indicateur de cette tendance, les interpellations ont connu une hausse continue. En 2009, près de 140.000 personnes ont été arrêtées pour usage, contre 20.000 vingt ans plus tôt. «C'est un taux particulièrement élevé», note Ivana Obradovic, auteur de l'étude parue en novembre dans la revue Tendances. Le cannabis est en cause dans plus de neuf cas sur dix, devant l'héroïne (5%) et la cocaïne (3%). Dans le même temps, les poursuites se sont diversifiées et sont devenues quasi systématiques. En région parisienne par exemple, le taux de réponse pénale atteint désormais 92%, alors qu'il était encore de 70% quelques années plus tôt.
https://www.sudouest.fr/images/2010/11/16/240488_14853395_165x110.jpg[/img]«Ce résultat a été rendu possible par un travail de simplification et d'accélération des procédures», analyse Étienne Apaire, président de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt). Les tribunaux piochent dans une palette de sanctions sans cesse élargie: avertissement, rappel à la loi, orientation vers une consultation spécialisée ou stage de sensibilisation obligatoire et payant. Conséquence: les classements sans suite sont devenus très rares. «Quant aux condamnations, elles suivent aussi une courbe à la hausse , ajoute Ivana Obradovic. Ce n'est pas anodin parce que l'inscription au casier judiciaire entraîne l'impossibilité d'accéder à certains métiers, comme la fonction publique ou la sécurité.» En 2008, près de 13.000 usagers ont écopé d'une amende, de travaux d'intérêt général ou même d'une peine de prison ferme -soit trois fois plus que dix ans plus tôt.
Interminable polémique
En se penchant sur l'application de la loi du 31 décembre 1970, qui a créé le délit d'usage en France, l'OFDT ne va pas manquer d'alimenter une interminable polémique. Alors que la loi aura bientôt quarante ans d'existence, plusieurs associations demandent en effet son abrogation. «On a donné trop de place à la contrainte, plaide Jean-Pierre Couteron, président de l'Association nationale des intervenants en toxicomanie et addictologie. Du coup, l'école et la famille se sont désinvesties du champ de la prévention: 60% des jeunes qui consultent sont aujourd'hui orientés par la justice, avec de fortes inégalités selon les villes ou les quartiers.»
Modifiée par petites touches, la loi de 1970 n'a jamais été réformée en profondeur. Les peines prévues à l'époque -jusqu'à 3.700 euros d'amende et un an d'emprisonnement- sont toujours d'actualité. En 2003, une modernisation avait été souhaitée par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, mais le gouvernement avait finalement renoncé.
Selon Ivana Obradovic, de l'OFDT, «une comparaison entre les législations des pays européens montre qu'il est impossible de faire un lien entre répression et niveaux de consommation en population générale» . Étienne Apaire, de son côté, relève toutefois que «la consommation a commencé à baisser à partir de 2003 en France», au moment, selon lui, où l'interdit devenait «plus clair».
Chaque jour on produit, on consomme et on abuse de nouvelles drogues dans le monde entier. Quand arrive une nouvelle drogue qui devient populaire dans un pays la tendance est de considérer son interdiction. Les cas "d’euphories légales" et des champignons aux Pays-Bas sont un exemple de nouvelles prohibitions. Des drogues ou des substances qui n’ont jamais été classées sous contrôle des Conventions de l’ONU sont ajoutées par des gouvernements locaux dans un effort motivé par la peur de l’inconnu, et renforcé par la constante nécessité du soutien des médias et de l’opinion publique pour les politiciens.
Malgré ce climat de prohibition, on voit des libéralisations spécifiques de lois concernant les drogues. L’usage médical de "drogues illégales" telles que le cannabis, et l’usage traditionnel de plantes psychédéliques comme l’ayahuasca sont réglementés dans un nombre de pays croissant. L’usage médical et les potentialités thérapeutiques de substances considérées illégales ont déjà été discutés lors de déclarations d’ENCOD. Nous allons maintenant discuter de la législation des drogues en relation avec l’usage ritualiser de "drogues" psychédéliques et en particulier sur l’exemple de l’ayahuasca.
L’ayahuasca ( "liane de l’âme"), une infusion psychédélique faite de plantes de l’Amazonie, est un mélange qui contient des inhibiteurs MAO et diméthyltryptamine (DMT), deux substances qui,quand elles sont ingérées oralement, génèrent une synergie biochimique capable de produire des altérations de conscience ( Enthéogènes et Intelligence Existentielle : L’Usage de Plantes Maîtresses comme Outil Cognitif-Kenneth W.Tupper).
Le Santo Daime est un des trois groupes religieux (églises syncrétiques) originaires du Brésil qui utilisent l’infusion d’ayahuasca lors de cérémonies qui peuvent durer de six à douze heures.
Alors que la majorité des 4000 membres de Santo Daime vivent aux Brésil, se déroulent en ce moment des cérémonies de Santo Daime sur presque tous les continents. Après qu’elle soit arrivée en Europe dans les années 80, l’église de Santo Daime ( ainsi que d’autres groupes religieux qui s’organisent autour de l’ayahuasca) s’est étendue dans au moins 15 pays de l’UE.
L’expansion multinationale de ces religions de l’ayahuasca représente un défi aux nations européennes alors qu’elles luttent pour maintenir les principes de liberté religieuse ; de fait, en accord avec les actuelles lois sur les drogues il est interdit de posséder et/ou d’ingérer la principale substance chimique psycho-active présente dans l’ayahuasca ( diméthyltryptamine, DMT, qui se trouve sur la liste des substances contrôlées par la Convention des Substances Psychotropes de l’ONU de 1971).
En 1987 la consommation religieuse d’ayahuasca par des personnes non-autochtones a été légalisée au Brésil ( Edward MacRae- Le développement des politiques publiques brésiliennes sur la consommation médicinale de l’ayahuasca à Labate et Araujo- L’Usage Rituel de l’Ayahuasca). Aux Etats-Unis les Hautes Cours de Justice ont toujours jugé en faveur des groupes religieux qui consomment de l’ayahuasca, et récemment, des décisions de justice ont été prises au Canada d’exception légale pour les églises de Santo Daime qui officient dans ce pays. Pour le moment, l’unique pays européen qui a légalisé l’ayahuasca à des fins religieuses est la Hollande, où l’église de Santo Daime a gagné le droit de consommer l’infusion en 2001.
En revanche, en 2005 la France est devenue la seule nation dont la justice s’est opposée aux droits religieux de consommer de l’ayahuasca. Au mois de septembre dernier, deux membres de l’église de Santo Daime ont été arrêtés en Angleterre et la police leur a confisqué une grande quantité d’ayahuasca. Alors que les membres britanniques de Santo Daime prennent l’infusion comme un "saint sacrement", la police anglaise parle de saisie de "drogues illicites de Catégorie A".
A ce niveau, l’avenir de l’ayahuasca en Europe est incertain. Les gouvernements semblent douter de la persécution radicale de Santo Daime, par peur d’affaiblir leurs propres politiques qui cherchent à assurer les droits des citoyens à la liberté religieuse. Leur point faible étant le manque de connaissance, pour lequel autant le public en général que les législateurs européens restent ignorants de tous ce qui peut concerner l’ayahuasca, une relative nouveauté par rapport à des substances "psychédéliques" plus familières.
La façon de voir dominante des codes légaux occidentaux, qui dans leur majorité ont conclu que ces substances sont "hallucinogènes", implique que les expériences qui en résultent sont une distorsion de la vrai nature de la réalité et de la conscience, contraste de manière importante la perspective de ceux qui se dédient à Santo Daime. Ces derniers considèrent l’ayahuasca comme un "enthéogène" qui ouvre des domaines spirituels qui normalement sont invisibles, une substance qui permet de révéler "le divin de l’intérieur". Ce désaccord sur la terminologie marque le dilemme idéologique d’où devrait commencer les futurs débats sur la place de l’ayahuasca dans l’Europe d’aujourd’hui.
Tout comme celle d’autres substances psychédéliques, la consommation de l’ayahuasca comporte des risques. Il est reconnu par ailleurs que si l’ayahuasca se consomme dans un environnement sûr et structuré, comme le sont ses cérémonies, les risques sont moindres et les bénéfices potentiels sont réels. A la lumière de nombreuses publications scientifiques (Références scientifiques et informations sur les cérémonies de l’ayahuasca en Europe de Marc Blainey, anthropologue et candidat PH.D de l’Université de Tulane, Nouvelle Orléans,USA) et au nom des droits fondamentaux à la religion et à la culture, il est très clair que ces substances nécessitent une classification légale plus nuancée ( Marchés des Drogues Réglementés en Pratique- Psychédéliques- TRANSFORM- Après la Guerre aux Drogues : propositions pour une régulation).
Par Marisa Felicissimo
PS : Taita Juan Bautista Agreda, un chaman colombien, a été arrêté le 19 octobre 2010 à l’aéroport international Bush à Houston, Texas,USA. Il était en possession de sa médecine ayahuasca pour des cérémonies dans l’Orégon. Ci-joint des informations le concernant et sur un moyen de l’aider.