Les habitants de Yammouneh lèvent leur sit-in de protestation contre la destruction des champs de cannabis par les autorités, suite à la visite du ministre de l’Intérieur.
Après une semaine de tensions entre forces de l’ordre et agriculteurs producteurs de haschisch à Yammouneh, dans la Békaa, la crise semble être sur le point d’être réglée.
Le ministre de l’Intérieur Marwan Charbel s’est rendu hier à Yammouneh et y a rencontré les habitants du village qui organisent depuis samedi un sit-in pour protester contre la destruction des champs de cannabis par les autorités. M. Charbel leur a promis d’évoquer cette question lors du Conseil des ministres qui est prévu aujourd’hui, lundi.
« Cette affaire sera sérieusement étudiée à partir de demain matin » (aujourd’hui), a promis le ministre aux protestataires. Il a précisé qu’il allait proposer trois idées au Conseil des ministres, dont celle des indemnités « à laquelle je tiens beaucoup », s’abstenant de donner des indications sur les deux autres. Il s’est prononcé dans ce cadre « pour une solution qui ménage la chèvre et le chou ». Il a ajouté qu’il suit l’affaire des plantations de cannabis depuis trente ans (il était alors officier des Forces de sécurité intérieure, FSI), qu’il a déjà rédigé un rapport à ce sujet et qu’il le transmettra bientôt au président de la municipalité.
Toutefois, malgré la levée du sit-in, la colère continue de gronder dans la région, et les protestataires ont promis de redescendre dans la rue si l’affaire n’est pas réglée d’ici à 48 heures. La famille Jaafar a publié sur ce plan un virulent communiqué suite à une réunion dans le village de Charawneh, à Baalbeck, à laquelle plusieurs hommes en armes ont participé. Le texte indique que la famille « fera face à tous ceux qui voudront détruire ces plantations dans la région, parce qu’elles sont une source de subsistance incontournable ». Les Jaafar refusent également « les promesses mensongères de ceux qui publient des communiqués au nom de Hussein Mohammad Jaafar, sachant que leur source est le bureau de lutte contre les stupéfiants, puisque cette personne est une employée de Adel Machmouchi (président de ce bureau) ».
« Yammouneh n’est pas sortie de l’autorité de l’État »
Samedi, les protestataires avaient bloqué les routes principales menant au village à l’aide de pneus enflammés pour dénoncer l’opération de destruction menée, depuis la semaine dernière, par l’armée libanaise et les FSI.
Le président du conseil municipal de Yammouneh, Mohammad Chreif, qui a participé au sit-in, a insisté sur le soutien des résidents du village à l’armée, aux forces de sécurité et à la « Résistance » (le Hezbollah). Il a également démenti les informations selon lesquelles 250 hommes armés se sont rendus au village pour affronter les autorités.
« Nous refusons les coups de feu tirés contre l’armée, mais nous mettons en garde les propriétaires des tracteurs contre leur entrée sur nos terres, sous peine de se trouver en danger, a-t-il poursuivi. D’un autre côté, nous appelons l’État et les hommes politiques à trouver des alternatives et visiter la région pour constater à quel point nous vivons dans la précarité. »
Pour sa part, l’ancien président du conseil municipal Talal Chreif a assuré que Yammouneh « n’est pas sortie de l’autorité de l’État ». « Ce problème est commun à toute la Békaa et nécessite une solution radicale et globale, a-t-il dit. L’agriculture est en très mauvaise posture. Les récoltes sont tantôt décimées par le gel, tantôt écoulées à des prix sacrifiés, sachant que le mazout est cher. Ce qui pousse les agriculteurs de la région à planter le cannabis est cet état de privation dans lequel ils se trouvent. »
Même son de cloche auprès de manifestants interrogés par l’ANI, Ali Chreif et Salim Rahmé (de Aïnata, venu soutenir le sit-in à Yammouneh). « L’agriculture est devenue un fléau pour l’agriculteur, nous aurions aimé que les hommes politiques viennent constater dans quelles conditions nous vivons », a dit Ali Chreif. Quant à Salim Rahmé, il a assuré que « nul n’a l’intention de tenir tête aux forces de l’ordre, mais nous devons défendre notre source de subsistance ».
Plusieurs opérations de destruction de champs de cannabis ont dégénéré, la semaine dernière, en clashs entre les forces de l’ordre et les agriculteurs producteurs de haschisch dans ce secteur de Yammouneh-Deir el-Ahmar. Deux soldats ont été blessés lors de ces affrontements.
Source: L'Orient le Jour
Suite des évènements au Liban...
Mise a jour du 10 Août 2012:
Cultures illicites : les agriculteurs libanais au cœur d’un projet de développement
Les violentes altercations des dernières semaines entre l’armée, chargée de détruire les champs de cannabis dans la Békaa, et les agriculteurs ont choqué, et pour cause. Sans culture alternative subventionnée, c’est le sort de centaines de familles qui est en jeu. Une commission ministérielle a été chargée de mettre en place un projet de développement agricole pour la région.
Le Premier ministre, Nagib Mikati, a présidé hier la première réunion de la commission ministérielle chargée de l’étude du projet de développement du mohafazat de Baalbeck-Hermel. Ont participé à la rencontre le ministre des Finances, Mohammad Safadi, le ministre des Affaires sociales, Waël Bou Faour, le ministre de l’Agriculture, Hussein Hajj Hassan, le ministre de l’Économie et du Commerce, Nicolas Nahas, le ministre de l’Intérieur et des Municipalités, Marwan Charbel, et les ministres d’État, Nicolas Fattouche et Panos Manjian.
Au terme de la réunion, M. Hajj Hassan a annoncé que les participants avaient mis en place un document de travail composé de deux parties. La première porte sur l’historique des problèmes de développement dans la région. « La dégradation du secteur agricole depuis des décennies est due à la négligence répétée et volontaire des différents gouvernements et a eu des conséquences dramatiques dans la région », a indiqué le ministre de l’Agriculture.
La deuxième partie du document porte, quant à elle, sur les coûts élevés de la production au Liban. Cette situation est directement liée à la hausse des prix des terrains, de l’électricité et toutes sortes de carburants ainsi que de la main-d’œuvre, plus chère que dans d’autres pays producteurs de fruits et légumes de la région.
Les cultures illicites
« La tendance qu’ont eue les différents gouvernements à considérer que les subventions publiques dans le secteur de l’agriculture allaient à l’encontre de la productivité économique est totalement erronée et infondée », a insisté le ministre de l’Agriculture. « Cette pratique, accompagnée de l’interdiction de la production des cultures illicites dans les années 1990, a eu des conséquences désastreuses dans le secteur », a-t-il ajouté.
« Les agriculteurs sont conscients de l’illégalité de leurs cultures, mais comme l’État ne leur offre aucune solution alternative, ils sont obligés d’y avoir recours pour survivre. » Le ministre a critiqué l’État qui, contrairement à d’autres pays, « n’a pas eu recours aux aides internationales pour compenser l’arrêt des cultures illicites depuis la fin de la guerre civile ». Selon lui, environ dix pays dans le monde reçoivent des milliards de dollars de la part des Nations unies pour lutter contre la production de drogues.
Le ministre de l’Agriculture a affirmé souhaiter une plus grande implication de l’État en faveur « d’un secteur agricole laissé à l’abandon, sans subventions ni compensations, depuis 1992 ». Il a expliqué qu’une association pour les cultures alternatives avait été créée en 1995, « mais elle n’a malheureusement pas vu le jour ». En 2000, les députés du mohafazat de Baalbeck-Hermel avaient demandé la création d’un conseil pour le développement de la région, projet qui avait également avorté au niveau du Parlement. Par ailleurs, en 2002, le gouvernement a supprimé ses subventions à la culture de la betterave, et en 2006 il a failli supprimer les subventions à la culture du blé.
« Au terme de la réunion, nous nous sommes mis d’accord sur une série de propositions que j’ai personnellement été chargé de transformer en projet de loi afin de les présenter au plus vite au Conseil des ministres », a annoncé M. Hajj Hassan.
Le ministre de l’Agriculture a enfin indiqué qu’une réunion avec le ministre de l’Intérieur se tiendra très prochainement, « afin de déterminer quelles seront les conséquences de la destruction des champs de cannabis dans la Békaa et de proposer des solutions aux agriculteurs concernés ».
De plus en plus d'Américains se prononcent en faveur de la légalisation de la marijuana selon de récents sondages. Si elle était légalisée, son coût de production serait tellement faible qu'elle pourrait devenir encore moins chère que la bière.
Cette donnée semble totalement échapper aux politiciens d’envergure, mais les sondages indiquent qu’un nombre croissant d’Américains sont favorable à la légalisation de la marijuana. L’institut Gallup a jeté un pavé dans la mare à l’automne dernier en publiant le PREMIER sondage indiquant que plus de 50% des Américains étaient favorables à la légalisation. Au mois de mai, une étude plus précise de Rasmussen, indiquait que 56% des personnes interrogées étaient favorables à « la légalisation de la marijuana et à son encadrement dans la lignée de l’encadrement actuel de l’alcool et de la cigarette. »
A ce stade, ces deux sondages font un peu exception, la plupart des études montraient plus de scepticisme sur le sujet. Mais comme les personnes âgées sont plus défavorables à la marijuana que les jeunes, le nombre de personnes favorables à la légalisation ne peut qu’augmenter ces prochaines années et se retrouvera donc, tôt ou tard, sur le devant de la scène politique.
On ne s’est que très peu demandé à quoi une industrie de la marijuana pourrait ressembler. Selon des recherches très convaincantes effectuées par Jonathan Caulkins, Angela Hawken, Beau Kilmer et Mark Kleiman et présentées dans leur livre Marijuana Legalization: What Everyone Needs To Know, un des points clés, et très rarement considéré, est qu’un joint légal serait très bon marché. De fait, l’herbe de qualité moyenne serait même si peu chère que l’industrie pourrait aussi bien la donner, comme les petits tubes de ketchups ou les cacahuètes de comptoir.
La pensée conventionnelle sur ce sujet est généralement dominée par les expériences des gens ayant acheté de la drogue légalement ou quasi-légalement dans des endroits comme des coffee-shops hollandais ou dans certains dispensaires de Californie. Mais pas plus la Californie que les Pays-Bas n’autorisent la culture de la marijuana. Si l’herbe était entièrement légale, la distribution et la vente en seraient totalement bouleversées.
Un coût de production très faible
Il existe de nombreux biens dont la conservation est coûteuse – soit parce qu’il sont vivants, comme les homards, soit parce qu’ils sont énormes, comme les camping-cars, par exemple – ce qui fait que leur prix est généralement élevé, ou que les achats ne peuvent être effectués qu’en certains lieux. Mais la marijuana est un bien non-périssable, comme le blé ou les lentilles. Pour de tels produits de consommation, le prix d’achat est dû - pour l’essentiel - au coût de production.
Essayez d’imaginer un monde dans lequel il est permis d’avoir des tomates chez vous, de les cuisiner, de ne pas être puni si des policiers vous arrêtent en possession de tomates et dans lequel vous pouvez même les acheter dans certains endroits spécialisés dans la vente de tomates – mais dans lequel il serait illégal de faire pousser des tomates. Leur prix risque de grimper en flèche.
Le problème n’est pas que les tomates vont disparaître des étals des supermarchés (ce qui va pourtant être le cas) mais que toutes les fermes qui en cultivent vont devoir fermer. Ce qui ne veut pas dire du tout que les gens vont arrêter de faire pousser des tomates. Car les gens aiment les tomates. Alors les tomates vont entrer en fraude aux Etats-Unis, depuis le Mexique. Les tomates seront cultivées en douce, dans les arrière-cours. Des gens vont utiliser des lumières et des systèmes d’arrosage pour les cultiver sous serre, à domicile.
Ces expédients vont permettre de cultiver des tomates, mais les tomates seront alors bien plus chères à produire que dans une ferme, avec tous les moyens économiques et logistiques dont dispose l’agriculture moderne.
Les fermes américaines font partie des plus productives du monde grâce, pour l’essentiel, à des apports technologiques et à des exploitations d’une taille suffisamment grande pour se permettre de l’utiliser. Ce que les Américains considèrent comme une petite exploitation agricole est une grande exploitation comparée à une unité de production de marijuana. Il n’existe pas de grande exploitation consacrée à la production de cannabis, mais si le cannabis était légal, il en fleurirait. Voilà qui fait toute la différence.
Moins de 10 dollars le kilo
Quel serait donc le coût de production du cannabis avec des méthodes avancées ? Un point de comparaison nous est offert avec l’industrie du chanvre, au Canada, avec un coût de production moyen de 500 dollars par acre (200 dollars par hectare). Si l’herbe qui circule majoritairement aux Etats-Unis (environ 80% du marché) était produite de la sorte, le coût de production serait, environ de 40 cents pour 1 kilo de marijuana: assez pour fabriquer plus de 1500 joints pour moins de 50 centimes! Ces chiffres sont très optimistes, car, dans les faits, la marijuana récréative est généralement issue de plants clonés et pas de simples graines.
Malgré cela, les auteurs notent que «les coûts de production pour des espèces nécessitant des transplantations, comme les tomates cerises ou les asperges, ont des coûts de production allant de 5000 à 20000 dollars par acres (2000 à 8000 dollars par hectare). » Ce qui signifie qu’une excellente sinsemilia coûterait environ 40 dollars le kilo, et moins de 10 dollars pour de la marijuana de qualité moyenne.
Une autre manière de considérer la question, comme le suggère le directeur du NORML de Californie, Dale Gieringer, est que l’herbe légale devrait coûter sensiblement le même prix que «les autres herbes vendues légalement, comme le thé ou le tabac», soit un prix près de «100 fois inférieur au prix actuel de 10 dollars le gramme – à peine plus de quelques cents pour un joint. »
Ce qui ferait de l’herbe le produit stupéfiant le moins cher du marché, bien loin devant la bière ou les alcool forts. Les joints coûteraient à peine plus cher que les sucrettes pour le café.
Transformer l'économie du marché de la marijuana
Que ces données militent en faveur ou contre la légalisation est matière à débat, selon votre point de vue. La marijuana circule très librement malgré sa prohibition est il est donc plus que probable qu’une baisse radicale de son coût entraînerait un surcroît de sa consommation. Mais on pourrait aussi surtaxer la marijuana pour faire en sorte qu’elle coûte peu ou prou le même prix qu’aujourd’hui. Mais une taxation trop importante entraînerait nécessairement des fraudes.
Actuellement, ceux qui font passer illégalement de la marijuana depuis la frontière mexicaine gagnent en moyenne une quinzaine de dollars par gramme, et une taxe plus élevée risque donc d’être difficile à appliquer. Mais une telle taxe serait trois fois supérieure à la taxation des cigarettes, tout an faisant du marché de l’herbe un marché très abordable.
Malheureusement la taxation de la marijuana ne changerait pas radicalement la politique fiscale. Les cigarettes rapportent environ 10 milliards de dollars par an. Même les plus gros consommateurs d’herbe ne consomment pas autant que les gros fumeurs et même avec une taxation trois fois supérieure, les revenus pour l’État ne seraient pas très grands – pas négligeables, mais pas suffisants pour avoir un impact sur le budget américain.
Pourtant, une transformation des structures économiques de la production de marijuana – avec des effets sensibles pour les bars, les casinos et tous les lieux et toutes les industries concurrents ou complémentaires de la consommation d’herbe - seraient énormes. L’inefficacité superficielle de la prohibition dissimule un impact immense sur une partie de la production qui, à tort ou à raison, est ce qui empêche aujourd’hui l’Amérique de planer pour pas un rond.
Frédéric Péchenard, l’ancien directeur général de la police nationale de Nicolas Sarkozy, était un temps pressenti pour le poste. Finalement, la présidence de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt) devrait se jouer entre l’élu PS Serge Blisko, médecin généraliste, et la psychiatre Sylvie Wieviorka.
Deux mois et demi que le gouvernement Ayrault fait attendre son monde. Deux mois et demi que la Mildt (Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie) vogue sans capitaine à sa barre, depuis le départ de son ancien président, Etienne Apaire, nommé le 5 mai dernier inspecteur général adjoint des services judiciaires. A ce stade-là, on ne pourra pas reprocher au gouvernement d’avoir pris le temps de choisir la personnalité la plus idoine pour ce poste exposé.
Etienne Apaire a passé cinq ans sous le feu des critiques, accusé de suivre à la lettre une politique gouvernementale qui accentuait la répression sans pour autant diminuer les risques. Dès lors, les acteurs de la prévention ont fait part de leurs craintes quant à la nomination à venir. La sénatrice communiste Laurence Cohen (Val de Marne), rapporteuse du budget de la Mildt dans le cadre du projet de loi de finances, a présenté une charte pour que s’ouvre “une nouvelle page de la prise en compte des addictions dans la société, une nouvelle façon de les appréhender“. Dans ce but, un site vient d’être ouvert au public avec un appel à signatures pour cette charte de recommandation.
Ces associations s’étaient déjà mobilisées quand, en mai, le nom de l’ancien directeur général de la Police nationale, Frédéric Péchenard, avait circulé pour occuper le poste. Une nomination qui n’aurait eu aucun sens selon la Fédération addiction : “nommer un fonctionnaire de police à la présidence de la Mildt viendrait en contradiction avec la priorité donnée à l’éducation et à la justice sociale“.
Aujourd’hui, deux candidats se dégagent. Pierre Blisko, député socialiste de Paris entre 1997 et 2012, ancien médecin généraliste. Très impliqué dans les questions de prise en charge des addictions, il a coprésidé une mission d’information Assemblée nationale – Sénat sur les toxicomanies en 2010-2011.
De l’autre côté, une femme, Sylvie Wieviorka, 62 ans. Elue municipale à Paris depuis 2001, membre du conseil de Paris et adjointe au maire de IIe arrondissement, cette psychiatre est spécialisée dans la toxicomanie. Elle a quitté en juin le poste de directrice du centre Pierre Nicole de Paris, pionnier dans la prise en charge des addictions et des traitements de substitution aux opiacés, où elle a exercé durant 22 ans. Sa position au sujet des salles de consommation à moindre risque, dont elle soutient l’expérimentation, séduit les milieux associatifs.
Dès 1999, alors membre du Conseil économique et social, elle produit un rapport qui recommande le financement des centres de soins spécialisés aux toxicomanes par l’assurance maladie. Contactée par Les Inrocks, elle confie ne rien savoir de la procédure en cours, si ce n’est que la réponse sera donnée fin août et qu’elle ignore les critères retenus par le premier ministre. Prudente, elle confie à mi-voix que cette nomination serait une formidable opportunité pour elle, dans la continuité de son engagement des vingt dernières années.
“Il est temps de redéfinir une politique précise”
Alors que la Mildt évolue sans président, sans porte-parole et sans ligne directrice depuis maintenant plus de deux mois, la date précise de nomination du nouveau président reste inconnue. Au grand regret de Laurence Cohen, qui espérait que le lancement de la Charte “pour une autre politique des addictions” inaugurerait un débat, voir des “Etats Généraux” autour de la politique de réduction des risques. Contactée par Les Inrocks, elle s’avoue aujourd’hui déçue.
” J’ai demandé à Jean-Marc Ayrault un entretien à ce sujet. Je suis surprise de n’avoir pas eu de réponse. Ce silence va à l’encontre des propos tenus qui promettaient la concertation. Le Premier ministre est sûrement très occupé, mais maintenant que son cabinet est formé, il devrait rencontrer les acteurs concernés”.
Pour elle, les querelles de personnes ne doivent pas occulter le débat sur la direction choisie. Ce qui compte, c’est l’orientation prise par la MILDT :
“
Sommes-nous dans un organe politique, comme sous la présidence de monsieur Apaire, qui accentue la répression ? Ou alors dans un travail de prévention, de réduction des risques ? Il est temps de définir une politique précise”.
Comme d’autres, elle attend d’être fixée sur ce point avant de se déclarer en faveur d’un des candidats.
Depuis plus d’un an, magistrats et policiers se sont accordés pour mettre la pédale douce sur les fumeurs de pétards. Un document que nous publions révèle que la solution inventée consiste à changer une garde à vue en audition “volontaire”.
“Il y a tant de mères qui élèvent seules leurs enfants, tant de parents qui ont du mal avec leurs adolescents tentés par la drogue, si la société envoie le message que fumer, se droguer, ce n’est pas un problème, que peut dire la famille, que peuvent dire les parents ? “, s’indigne sans sourciller Nicolas Sarkozy. A deux semaines du second tour de la présidentielle, l’encore candidat-président de la République réagit ainsi à une suggestion de François Rebsamen. Lors d’un meeting électoral à Dijon, l’ex monsieur-sécurité-de-Hollande a eu le malheur de proposer la transformation du délit de consommation de cannabis en simple contravention. “Irresponsable“, tonne alors Nicolas Sarkozy dans un micro d’Europe1.
Un petit hic entache cette indignation spontanée. Un document, que nous nous sommes procuré, indique que le parquet de Paris – soumis à l’exécutif – avait discrètement conseillé, depuis plus d’un an, d’éviter le placement en garde à vue (GAV) des fumeurs de joint. Récit d’une petite combine judiciaro-policière qui, de facto, ne fait plus de la fumette un véritable délit.
Interpellation volontaire
Mars 2012, porte d’Orléans, la luminosité de 21h oscille entre chien et loup. Bik*, jeune homme de 26 ans à l’oeil vif, débarque du côté de son plan dit “des pointeuses de Montrouge“, le long du stade Elisabeth. Comme à l’accoutumée, il achète “un vingt euros de teuteu (résine de cannabis)“. La barrette en poche, il repasse sous le pont du périphérique. Soudain, la brigade anti-criminalité (BAC) surgit et l’interpelle. Direction le commissariat du 114 avenue du Maine. Trois quarts d’heure d’attente et une demi heure d’entretien plus tard, Bik ressort.
“Je n’ai pas été en garde à vue, j’ai juste signé des papelards. J’ai pas regardé. Il était 10h30 du soir, je n’avais qu’une envie, c’était me casser.”
Sans le savoir, Bik a paraphé un document mentionnant qu’il a “accepté volontairement” de se rendre au commissariat. Une pirouette juridique soufflée un an plus tôt par Jean-Claude Marin, procureur de Paris.
Le 28 mars 2011, Marin s’est adressé à Christian Flaesch, patron de la police judiciaire (PJ). Dans sa missive intitulée “limitation du recours à la garde à vue lors de la constatation de délits présentant un caractère de gravité modéré“, le procureur souhaite développer les auditions “sans mesure de contrainte“. En guise de consigne, le boss de la PJ a diffusé quelques jours plus tard le document à ses services.
Lettre de Jean-Claude Marin à Christian Flaesch
Le but : faire dégonfler les chiffres des gardes à vue juste avant une petite révolution franco-française. Un mois plus tard, le 15 avril 2011, la Cour de cassation impose la présence d’un avocat pendant la garde à vue. Une décision qui ajoute un nouveau casse-tête : avec un avocat et un médecin à disposition, tous ces gardés à vue aux yeux rouges ne coûteront plus le même prix. Ni le même temps pour des policiers par ailleurs soumis à des réductions d’effectifs.
La “GAV”, french way of life
Pendant le quinquennat sarkozyste, les policiers ont pris la fâcheuse habitude de faire du chiffre. En 2010, un record avait été atteint : environ 800 000 personnes ont été placées en GAV, dont près d’un quart pour usage de stupéfiants. “Sous Sarkozy, le curseur de la politique des chiffres était effectivement placé sur les gardes à vue“, reconnait Patrice Ribero, secrétaire national du syndicat Synergie-officier. Cependant, à l’époque de Daniel Vaillant ou Jean-Pierre Chevènement, il y avait aussi des dérives.“ Un ex-agent de la BAC nous décrit sans ambages la méthode qu’il pratiquait pour remplir ses objectifs de GAV.
“En général, on arrêtait tous les shiteux** de notre secteur. C’est facile, t’es toujours sûr qu’ils ont un peu de matos** sur eux. T’en boucles une vingtaine la première semaine du mois. Comme ça, tu es tranquille sur tes chiffres et, ensuite, tu peux faire autre chose de plus intéressant.”
Le talon d’Achille du dispositif porte le nom barbare “d’état 4001“. Dans la statistique institutionnelle policière, arrêter un fumeur de shit revient à comptabiliser un “fait constaté” et un “fait élucidé“. Inconvénient : cela entraine une hausse de la délinquance. Avantage : le taux d’élucidation des délits augmente… “Cela trompe la cartographie réelle de la sécurité en France“, conclue un officier de police judiciaire.
Pour pallier le côté chronophage de ces dérives, le procureur de Paris propose de ne plus placer automatiquement en garde à vue les auteurs de certains délits, pourvu que leur identité ait été vérifiée, qu’ils possèdent un “domicile certain” et une absence d’antécédent. Parmi les cinq délits concernés, car présentant “un caractère de gravité modéré“, figurent “les usages de cannabis seul” et “les conduites sous l’influence de cannabis seul“.
Un système pas très éloigné de la contravention
Prévoyant, Jean-Claude Marin précise sa combine pour éviter d’éventuelles “nullité de procédures” qui pourraient venir sanctionner “la retenue d’un individu dans un service de police pendant quelques heures, sans statut juridique, ni possibilité d’exercer aucun droit“. Cet “obstacle“, assure Marin, pourrait être levé simplement. Il suffit de faire signer à l’interpelé un procès verbal indiquant que “la personne a accepté de se rendre volontairement dans les locaux de police“.
Cette idée présente un double intérêt. Officiellement, on ne touche pas au caractère délictuel*** – sensible politiquement – de la consommation de cannabis. En pratique, avec peu de poursuites et moins de garde à vue, le système n’est pas très éloigné de la contravention. Dans les Hauts de Seine, une méthode de “transaction douanière“, sorte d’amende à payer immédiatement, a même été testée.
Mais que se passe-t-il donc si la personne interpellée refuse de se rendre “volontairement” au commissariat ?
Le syndicaliste Patrice Ribero nous répond en toute honnêteté. “Et bien, il lui reste toujours la possibilité d’activer ses droits et de passer 8 à 12 h dans une geôle pourrie en GAV…”
Geoffrey Le Guilcher
* le prénom a été modifié
**Argot ou verlan : ”shiteux” : consommateur et/ou revendeur à la petite semaine, “matos” : resine ou herbe de cannabis,
*** D’après le code pénal : la détention, le transport, l’offre, la cession ou l’acquisition de stupéfiant, est puni d’une peine de prison d’une durée maximale de dix ans ou d’une amende pouvant atteindre 75 000 euros. D’après le code de la santé publique : le simple usage n’est normalement puni que d’une peine maximale d’un an d’emprisonnement ou d’une amende pouvant aller jusqu’à 3 750 euros.
En France, la loi stipule qu'il est interdit de présenter un stupéfiant sous un jour favorable et que les contrevenants s'exposent à une peine de cinq ans de prison et de soixante quinze mille euro d'amende (article L3421-4 du Code de la santé publique). Cette chape de plomb qui pèse depuis de nombreuses années sur le cannabis thérapeutique est sur le point de littéralement voler en éclat !
En effet le 19 octobre prochain se tiendra dans l'enceinte du parlement européen de Strasbourg la première conférence scientifique sur les propriétés du cannabis en médecine intitulée par ces organisateurs :
Avancées pharmacologiques et utilisations thérapeutiques des Cannabinoïdes en médecine.
Les organisateurs de cette conférence ( Action Sida Ville, I CARE et l'UFCM. ) donneront successivement la parole aux experts et aux intervenants suivants :
Docteur Marko Van de Velde du ministère de la santé des Pays Bas ( pays européen qui le le premier a réintroduit le cannabis dans la pharmacopée officielle ) exposera les 10 ans d’expérience hollandaise en matière de cannabis thérapeutique
Bernard Buchet du CNRS détaillera l'action des cannabinoïdes sur la douleur
Dr Millet de l'Institut de chimie pharmaceutique et Albert Lespagnol de Université de Lille aborderont les propriétés anti-inflammatoires des Cannabinoïdes dans les maladies inflammatoires de l'intestin.
Dr Claude Vaney, spécialiste de la sclérose en plaques, venu de Suisse, expliquera l’utilisation du cannabis dans le traitement des maladies neurologiques en particulier celles de la sclérose en plaques.
Tjalling Erkelens, horticulteur sous licence du ministère de la santé néerlandaise, directeur de Bedrocan B.V exposera les modes de production standardisée de cannabis médical et les quatres variétés de cannabis distribuées dans les pharmacies néerlandaises et européennes (Bedrocan Flos, Bedrobinol, Bediol et Bedica).
La société allemande Storz&Bickel Volcano présentera le premier appareil de soins pour l’administration de cannabinoïdes, certifié d’un agrément médical pour l’usage thérapeutique du cannabis médical.
Des patients français apporteront également leur témoignage
Bertrand Rambaud et Ludovic Brodusch co organisateurs de l’événement et membres de l'UFCM tiendront un discours de clôture ou ils exposeront leurs objectifs concernant le cannabis médicale en France.
Certes la tenue de cette conférence dans un lieu aussi symbolique ne signifie pas le retour dans un jour prochain du cannabis dans le Vidal comme c'était encore le cas au début des années cinquante. Toutefois elle représente un grand espoir pour nos concitoyens en souffrance qui ont pour le moment comme seule solution de se mettre hors la loi pour se procurer ce qui est considéré comme un médicament chez un grand nombre de nos voisins européens.
Par Végétalie@cannaweed
On en parle sur le forum....
Au Portugal la consommation et la détention d'une petite quantité de cannabis ( 2.5 gramme pour être précis ) ne sont plus passibles de poursuites judiciaires depuis dix ans maintenant. Cette approche a permis au pays de diminuer sensiblement le nombre de consommateurs.
Cette situation qui dure depuis une décennie n'a cependant pas permis de mettre un point d’arrêt à la criminalité liée à la vente de cette plante, les consommateurs ayant pour unique alternative pour leurs approvisionnements que de se tourner vers la filière criminelle.
Partant de ce constat le député portugais, João Semedo, siégeant à l'assemblée sous la bannière du bloc de gauche a décidé d'introduire une proposition de loi légalisant la culture de dix plans de cannabis par personne et la création de cannabis social club (des associations à but non lucratif dont l'objet serait de produire du cannabis pour leurs adhérents) .
Le projet de loi stipulera qu'il faudra être majeur et disposé de l'intégralité de ses facultés mentales pour s’inscrire dans un cannabis social club afin de ne pas encourager la consommation des mineurs et de protéger les personnes qui en ont besoin. Une limite d'achat sera également imposée, la quantité maximale que pourront se procurer les adhérents ne devra pas excéder un mois de consommation.
Conscient que sa proposition de loi a peu de chance d'aboutir, João Semedo souhaite par son intermédiaire ouvrir un grand débat national au Portugal sur cette question.
Par Végétaline@cannaweed
On en parle sur le forum....
Concernant l’usage de stupéfiants et, singulièrement, de cannabis,il y a le débat politique. C’est la polémique qui a suivi le rappel par Cécile Duflot, entre les deux tours des législatives, de la position des écologistes en faveur de la dépénalisation.
C’est aujourd’hui, la « Charte pour une autre politique des drogues », lancée par la sénatrice communiste Laurence Cohen et plusieurs centaines de spécialistes des addictions.
Et puis il y a la réalité policière et judiciaire – la «pire des situations», selon un commissaire :
« Officiellement, l’usage n’est pas dépénalisé, mais sur le fond, il l’est. » L’idée de punir d’une contravention la consommation fait son chemin chez les policiers, toujours farouchement opposés à la dépénalisation.
Place Beauvau, l’entourage de Manuel Valls affiche sa « fermeté sur la question des interdits», mais n’est pas « fermé au débat ».
Une proposition de loi a été adoptée par le Sénat, le 7 décembre 2011, pour sanctionner d’une simple amende le « premier usage illicite» de stupéfiants. Elle est entre les mains de l’Assemblée nationale.
Actuellement, la consommation de stupéfiants est punie d’un an d’emprisonnement et 3 750 euros d’amende. Plus de 184 000 personnes ont été mises en cause par les policiers et les gendarmes pour usage de stupéfiants en 2011. Mais mis en cause ne veut pas dire condamné, loin de là.
« Ça nous bouffe du temps, alors que la réponse pénale est incertaine», se désole un responsable départemental de la sécurité publique. A Créteil par exemple, sur3 600 nouvelles affaires d’usage en 2011, 1 770 se sont traduites par un rappel à la loi, 740 par une injonction thérapeutique et 120 par une orientation sanitaire.
Au final, seuls 40 mis en cause ont fait l’objet d’une comparution immédiate devant le tribunal correctionnel. «C’est résiduel et marginal»,reconnaît Nathalie Beccache, procureur à Créteil.
Dans les Hauts-de-Seine, sur 3 975 procédures en 2011, seules 516 ont abouti à des poursuites pénales.
Les magistrats et les policiers mettent en fait déjà en place, peu ou prou, ce qui s’apparente à une
« contraventionnalisation», par le biais de la procédure d’ordonnance pénale. « Quand il n’y a pas de réponse pénale adaptée plus sophistiquée, on en vient à la sanction pécuniaire»,explique Mme Beccache. A Créteil, sur 900 personnes poursuivies en 2011, la plupart ont bénéficié d’une ordonnance pénale, qui se solde en général à une amende.
Pour l’addictologue Jean-Pierre Couteron, l’amende ne convient pas aux plus jeunes, laissés seuls avec leur problème.
Dans les Hauts-de-Seine, en 2008, le parquet, la police et les douanes ont mis en place une méthode originale, encore plus efficace: la transaction douanière. L’article 343 bis du code des douanes permet à l’autorité judiciaire d’alerter les services des douanes d’une infraction au dit code. Or les douaniers ont des pouvoirs que les policiers n’ont pas…
Notamment celui de réclamer un recouvrement immédiat. L’expérience a été rendue possible par la création des groupes d’interventions régionaux (GIR), qui incluent un douanier. Le modus operandi est simple. Après son interpellation,le détenteur de cannabis est présenté à l’officier de police judiciaire. Celui-ci, en accord avec le parquet, appelle le douanier du GIR, qui vient avec son carnet à souches d’« arrangements transactionnels » établir l’amende pour transport de marchandises prohibées. Et là, il faut payer tout de suite.
Comme le dit malicieusement un policier, « pas le choix, il faut aller au distributeur de billets le plus proche ». « Il y a un aspect immédiat, qui frappe les esprits », juge Erwan Guilmin, directeur régional des douanes pour la zone Paris-Ouest. « Quand on commence à cibler une cité, ça se sait dans le quartier, les flics passent moins pour des cons », ajoute un haut responsable policier parisien, qui regrette que la méthode n’ait pas eu « le même succès» partout, notamment dans la zone des douanes Paris-Est (Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Seine-et-Marne): « Ils n’ont pas compris l’intérêt.»
Évidemment, l’expérience est limitée : il n’y a qu’un douanier référent dans chaque GIR, qui ne peut pas passer ses journées dans les commissariats.
Dans les Hauts de-Seine, cela donne une centaine de transactions chaque année, pour une centaine de milliers d’euros payés au fisc – le record national.
Mais le fait de taper au portefeuille un gros consommateur ou un petit trafiquant permet de déstabiliser les réseaux. Et tant pis si, en échange, le parquet abandonne les poursuites pénales pour ce menu fretin.
« Nous préférons éviter les dossiers à 30, 35 personnes, lourds à juger et où la cohérence
des acteurs est difficile à établir », explique le procureur de Nanterre, Philippe Courroye. « Il y a un effet dissuasif, mais le gros problème, c’est l’absence de réponse sanitaire », regrette toutefois le commissaire Thierry Huguet, patron de la brigade des stupéfiants parisienne.
Beaucoup de policiers estiment au contraire que l’injonction thérapeutique et les stages de sensibilisation ne marchent pas.
A Nanterre, on affirme qu’il y a «50% de déperdition» lorsque le stage est choisi: Les consommateurs disent qu’ils préfèrent payer une amende. Ou ils acceptent le stage mais ne s’y rendent pas. Alors, la contravention, trop répressive ou trop laxiste ? La mesure avait été rejetée par François Hollande lors de la campagne présidentielle, car il craignait la confusion avec la dépénalisation.
Pourtant, assure le radical de gauche Jacques Mézard, rapporteur (RDSE) de la proposition de loi du Sénat, « nous n’avons pas de volonté de dépénalisation mais d’avoir une réponse qui corresponde mieux à la réalité.
L’augmentation considérable de la consommation nous inquiète ». « Aujourd’hui, les sanctions sont différées et non dissuasives pour les jeunes. Une sanction immédiate sera plus efficace », ajoute l’auteur du texte, Gilbert Barbier (Jura), membre de l’UMP, mais rattaché au groupe RDSE.
Les sénateurs proposent des contraventions de 3e classe. Elles peuvent atteindre 450 euros maximum (68 euros si elles sont payées dans un délai de45 jours). Les deux sénateurs veulent croire qu’une amende aidera à « sensibiliser les jeunes au fait qu’il existe des drogues interdites ».
Mais ils le reconnaissent, cela ne suffira pas à « endiguer la diffusion du cannabis»
Laurent Borredon Le monde
«Dépénaliser la consommation privée tout en maintenant des interdits»
Jean-Pierre Couteron est psychologue clinicien et président de la Fédération Addiction, qui regroupe des intervenants du secteur. Il est l’un des initiateurs de la « Charte pour une autre politique des addictions», lancée le 13 juillet et qui a recueilli 850 signataires.
Pourquoi cette charte ?
Nous avions envie de poser la question de nouvelles orientations sur les drogues, alors que la politique répressive menée ces dernières années a montré ses limites. Nous voulions un texte grand public, à proposer à la signature des professionnels, et plus largement de toute personne qui s’intéresse aux addictions. Sur ce sujet, les choses sont compliquées à faire évoluer, car les politiques craignent des sanctions électorales. Nous voulons pousser le gouvernement à s’emparer de ces questions alors qu’il s’est fait discret jusqu’à présent sur ce que seront ses orientations.
Qu’est-ce qui caractérise le débat français sur les drogues ?
La focalisation sur le produit, notamment sur le cannabis, et non sur le comportement addictif et le niveau de consommation. A quoi s’ajoute une mythologie du licite et de l’illicite, qui fait qu’on peine à faire bouger les lignes. En France, nous sommes face à un moralisme qui empêche de réfléchir de façon pragmatique. Nous avons fixé un dogme, l’interdit, et tous ceux qui tentent de s’interroger sont taxés soit de laxisme, soit d’angélisme.
Pourtant, la question de la toxicomanie n’est pas qu’une question de pharmacologie, c’est aussi une question de culture, d’air du temps. Une vraie politique des drogues doit donc pouvoir s’adapter aux évolutions de la société, ce que le législateur français a échoué à faire jusqu’ici.
Faut-il faire évoluer la loi de 1970, qui pénalise usage et trafic quel que soit le stupéfiant ?
Clairement oui, car la répression des usagers de cannabis a montré son inefficacité. Il est temps d’en finir avec les interpellations arbitraires, qui ciblent sans cesse le même public, d’autant que cette stratégie coûte cher, comme l’a montré la Cour des comptes en dénonçant la politique du chiffre.
Mais cette évolution ne doit pas se faire n’importe comment, il faut assurer un équilibre. Nous pensons qu’il faut dépénaliser la consommation privée de produits et diversifier la prévention, mais sans laisser-faire. Il faut donc maintenir des interdits. Ils sont indispensables dans la société d’hyperconsommation, très addictogène, qu’est devenue la nôtre.
Ces interdits peuvent être nombreux: pour les adultes, consommer dans certains lieux et certaines circonstances comme la conduite d’un véhicule ou dans l’exercice de certaines professions. Et pour les mineurs, interdire toute consommation.
La contraventionnalisation de l’usage de stupéfiants ne serait elle pas une autre voie ?
Elle peut certes participer à une deuxième voie, mais ce n’est pas LA solution. Son intérêt, c’est principalement de faciliter le travail des policiers, et c’est d’ailleurs souvent de spécialistes des questions de sécurité que vient la proposition.
Dresser une contravention permet de donner des gages en matière d’ordre public et d’en finir avec l’emprisonnement des usagers de cannabis, mais cela laisse les familles et les consommateurs seuls avec leur problème.
Or il faut savoir que la consommation dès 14-15 ans augmente les risques d’usages problématiques par la suite. A cet âge, l’amende ne serait pas satisfaisante. Il vaut mieux faire réfléchir l’adolescent aux risques qu’il prend, comme dans le cadre des consultations mises en place pour les jeunes consommateurs.
Propos recueillis par Laetitia Clavreul
Source: le Monde Vendredi 20 juillet 2012
On en parle sur le forum...
L’Uruguay est un pays d’Amérique du sud situé au bord de l'océan atlantique entre le Brésil et l'Argentine. Ce petit pays peuplé d'un peu plus de trois millions d'habitants est réputé être l'un des plus sûr du sous continent américain et compte bien le rester.
Pour ce faire le gouvernement uruguayen de gauche a déjà légalisé la consommation de cannabis pour les 150 000 fumeurs que compte le pays mais ne tiens pas à en rester là! Cette année le pays légiférera sur la légalisation de la production et de la vente de cannabis afin d’éliminer toute la criminalité liée au trafic.
C'est l'état qui va prendre le relais en produisant et distribuant du cannabis, une plante jugée par l'écrasante majorité des experts moins dangereuse que l'alcool et qu'un grand nombre de psychotrope vendu en pharmacie.
Dans un interview accordé à la radio colombienne RCN le 5 juillet dernier, le président uruguayen José Murica a annoncé son intention de légiférer rapidement sur le sujet afin que l'état se réapproprie l'argent que génère le commerce de cannabis qui pour le moment finit encore malheureusement entre des mains criminelles.
José Murcia a déclaré que la consommation de cannabis était un problème sanitaire facilement contrôlable mais que la prohibition était un problème policier insoluble c'est pourquoi l'état devait faire preuve de pragmatisme et choisir de légaliser la production et la vente de cannabis.
Le projet de loi est encore au stade de la rédaction et il n'a pas encore était décidé à qui incomberait la production, toutefois deux pistes sont déjà à l'étude.
Cette tache pourrait être assurée par une plantation d'état géante d'une surface avoisinant les cent hectares ou par une myriade de petit producteur agréé. La vente quand elle sera assuré directement par l'état et les recettes générées iront à l'état.
Afin d'éviter le narcotourisme et de transformer le pays en plaque tournante du trafic de cannabis seuls les citoyens uruguayens pourront s'approvisionner légalement en cannabis en petite quantité.
José Murica a également insisté sur le fait qu'en aucun cas cette initiative ne déboucherait sur la légalisation d'autres drogues, l'argent dégagé par cette nouvelle politique ira d’ailleurs à la lutte contre le véritable trafic de drogue.
L’Uruguay va donc devenir dans un avenir proche le premier pays au monde à légaliser le cannabis.
L'ancien ministre de l’intérieur du gouvernement socialiste de Lionel Jospin, proche de notre président de la République François Hollande vient de publier sur sa page facebook un plaidoyer pour l'ouverture d'un grand debat public sur le cannabis.
Ce texte intitulé CANNABIS : LE LAXISME C'EST DE NE RIEN CHANGER et co signé par Annick Lepetit, Dominique Raimbourg, Gerard Bapt, Jeam-Michel Clement, Myryam El Khomri Henri Emmanueli, Catherine Lemorton, Genevieve Perrin Gaillard, Bernard Roman et Clotilde Valter est présenté par notre ancien ministre comme étant une contribution au prochain congrée du Parti Socialiste.
La légalisation du cannabis chère aux écologistes et aux militants du PRG va t elle aussi redevenir un thème chère aux socialistes ?
Dans ce texte, l'ex premier flic de France n'en démord pas, pour lui la prohibition du cannabis est un échec cuisant. La France ne déroge pas à la règle car le nombre de consommateur ne cesse de croître à l'inverse des pays qui ont choisi une approche sanitaire du problème axée non pas sur la répression comme c'est le cas en France mais sur la prévention comme c'est le cas au Portugal ou en Hollande.
Pour Daniel Vaillant Il est donc temps d'introduire un grand débat national ouvert à la majorité, à l'opposition et aux différents intervenants du secteur sur le sujet de la légalisation totale ou partielle du cannabis, voilà les 4 questions que posent essentiellement ce débat, question au quelle je vais tenter de répondre en tant que consommateur de cannabis et donc de principal concerné
Comment accroître l'efficacité de la prévention ?
Le discours désuet diabolisant le cannabis est un non sens scientifique, il est donc impératif de l'abandonner au profit d'un discours plus pragmatique.
Le cannabis n'est pas un produit anodin, c'est un psychotrope donc il va de soi que dans une filière de distribution légale les consommateurs devraient être majeurs et informés sur la composition des produits qu'ils achètent et des conséquences de leur consommation sur leur santé ou leur vie sociale comme c'est le cas pour le tabac, l'alcool ou les jeux d'argent. Le numéro de téléphone d'Ecoute Cannabis devrait également à mon sens figurer sur les emballages ainsi qu'une mention et qu'une photo choc comme c'est déjà le cas sur les paquets de cigarettes. Aucune publicité ne devra être tolérée, la légalisation ne doit pas rimer avec incitention
De plus, la légalisation permettrait de transférer une partie des sommes allouées jusqu'alors a la répression à la prévention et ainsi de véritable campagne d'information pourrait être menée.
Comment approvisionner le marché ?
L'organisation d'une filière de production locale semble être la meilleure garantie pour le consommateur de se procurer un produit de qualité, Les différents climats qui baignent la métropole et les dom tom sont plus que propices à l'élaboration d'une herbe de qualité il serait donc dommage en cette période de crise économique d'importer des produits agricoles que les paysans français sont parfaitement capables de cultiver.
L'importation de cannabis rendrait difficile la traçabilité du produit et compliquerait les contrôles de qualité au stade de la production ce qui nous obligerait de dépendre d'organisme certificateur de pays tiers, organisme qui n'existe pas à l'heure actuelle ! C'est pourquoi en l'état des choses cette solution n'est pas applicable ;
L'auto production qui conciste à autoriser les consommateurs de cultiver un nombre de plantes déterminé contre le paiement d'un timbre fiscal est aussi une piste envisageable. L'état n'aurait qu'à dresser l'inventaire des espèces autorisé et qu'à créer un permis de planter du cannabis sur le modèle du permis de pêche ou de chasse. Avec cette approche le cannabis perdrait une grande partie de sa valeur marchande ce qui aurait pour avantage de faire perdre aux mafias l’intérêt qu'elle porte à cette plante.
Comment contraventionnaliser les conduites à risques ?
Il est déjà interdit de conduire un véhicule ou d'exercer certaine profession en étant sous l'emprise de cannabis et les sanctions sont extrêmement lourdes, les renforcer n'a donc pas de sens à mes yeux. Quoi de pire à l'heure actuelle que de perdre son permis de conduire ou se faire licencier.
La privation de liberté ne devrait plus figurer dans les sanctions liées à l'usage de cannabis, ces textes ne sont de toutes façons plus appliqués, si la prohibition devait perduré une simple amende me semble être plus dissuasive si elle est systématiquement appliquée qu'une hypothétique convocation devant le tribunal.
Doit on réprimer plus sévèrement le trafic ?
Pourquoi diable cette méthode qui n'a fonctionné dans aucun pays du monde ces 50 dernières années se mettrait à fonctionner demain en France, cette hypothèse de travail semble surréaliste ne peut séduire qu'un Xavier Rauffer ou un énergumène de son acabit , je laisse donc à un de ces derniers le soin d'épiloguer sur le sujet.
Par Végétaline @ cannaweed
On en parle sur le forum....
Changement de majorité présidentielle oblige, le vieux débat sur la légalisation du cannabis a refait surface. Les arguments en présence sont toujours les mêmes. Est-il possible de sortir de cette confrontation par une politique innovante ?
Selon les partisans de la dépénalisation, les drogues illégales posent de graves problèmes de santé publique. Les légaliser permettrait d'économiser le coût de la répression en éliminant les mafias, et générerait des recettes fiscales supplémentaires.
Les partisans de la prohibition insistent quant à eux sur les ravages engendrés par la consommation de drogue et s'insurgent contre l'encouragement implicite que représenterait une politique de légalisation. Les Français donnent d'ailleurs massivement raison à ces derniers : selon un récent sondage IFOP, ils sont 70 % à être opposés à la légalisation, en hausse par rapport à 2011.
Pourtant les politiques actuelles qui combinent prohibition et répression sont impuissantes à éliminer les mafias. Au regard des coûts de la répression, de l'ordre de 42 milliards de dollars (34,3 milliards d'euros) par an aux Etats-Unis, selon Jeffrey Miron et Katherine Waldock (The Budgetary Impact of Ending Drug Prohibition, Cato Institute, septembre 2010), beaucoup pensent que la guerre contre la drogue est un échec. Le problème, c'est que les effets de politiques alternatives, telles que la légalisation, sont inconnus.
Une étude récente (Sale of Visas : A Smuggler's Final Song ?, Emmanuelle Auriol et Alice Mesnard, Center for Economic Policy Research, document de travail, mai 2012) élabore, à propos du marché criminel de l'immigration clandestine, un modèle de légalisation pouvant être utilisé pour éliminer une mafia.
UN PRIX SUFFISAMMENT BAS
L'étude montre qu'on ne peut pas gagner sur tous les tableaux à la fois. Si on veut éliminer les trafiquants en légalisant le cannabis, par exemple, ces derniers ayant des réseaux bien établis, ils livreront une bataille de prix pour conserver leurs parts de marché.
Le seul moyen de les détruire est alors d'établir un prix suffisamment bas pour assécher la demande qui leur est adressée. Le gouvernement est ainsi contraint de limiter le poids de la fiscalité afin de pousser les dealers hors du marché. On se trouve alors face à un dilemme : éliminer les trafics, ou contenir les consommations.
Une politique plus innovante, qui combinerait mesures répressives avec une politique de légalisation au prix d'éviction, permet d'échapper à ce dilemme. L'idée est d'utiliser les recettes fiscales générées par la légalisation pour intensifier la répression contre les réseaux mafieux.
En augmentant leurs coûts, on limite leur capacité à casser les prix. On ne réalise certes pas les économies fiscales promises par les partisans de la légalisation, mais on limite le poids des mafias tout en contenant les consommations.
Une telle politique est-elle applicable ? Oui, si on se fie à l'exemple des Pays-Bas qui tolèrent la consommation de cannabis chez ses ressortissants et ont, en même temps, le plus gros budget de répression d'Europe (0,66 % de son produit intérieur brut contre 0,08 % pour la France en 2000).
Pour les jeunes Néerlandais, les bénéfices sont doubles. Ils fument moins de cannabis que les Espagnols, les Anglais ou les Français, et ils ne courent pas le risque de croupir en prison pour leur consommation.
Par Emmanuelle Auriol, Ecole d'économie de Toulouse
Crédits photo: Jerry Lampen/Reuters
source: Le Monde