Les deux fondateurs de l'association nantaise (dissoute) qui militent pour légaliser cette drogue ont été condamnés hier.Après le petit round médiatique du printemps 2013, voici le temps juridique. Hier, était examiné le cas du Cannabis social club de Nantes. Les deux fondateurs du Cannabis social club, une association, aujourd'hui dissoute, répondaient hier d'incitation à la consommation de stupéfiants devant le tribunal correctionnel. Il leur est reproché d'avoir voulu « promouvoir » les vertus « de l'usage thérapeutique » « d'un chanvre bio de bonne qualité ».
« On a juste participé à un mouvement de désobéissance nationale », lance un des deux jeunes hommes. Mais l'opération a fait pschitt, explique le cofondateur : « Le 25 mars 2013, à la suite d'un appel national, il était prévu qu'il y ait beaucoup de clubs à se créer partout en même temps, comme une manifestation. Mais on s'est retrouvé à six seulement... » Les deux hommes qui se sont rencontrés sur internet, ont déposé les statuts de leur association en préfecture. Sa création a même été publiée au Journal Officiel.
Les deux jeunes gens défendent notamment les vertus thérapeutiques du cannabis. L'un d'entre eux, hyperactif et souffrant de troubles du sommeil, aurait trouvé dans le cannabis un apaisement que ne lui apportaient pas les médicaments. Comme sa grand-mère, qui souffrait d'une sclérose en plaques. Ils précisent qu'ils ne souhaitaient pas accueillir d'adhérents et qu'ils voulaient rester un club fermé.
« Ce sont purement et simplement des faits de délinquance », oppose le procureur, s'appuyant sur le texte de loi qui interdit la promotion des drogues. Il demande des peines de 2 et 4 mois de prison contre les deux jeunes gens.
Eux se voient militants, pas délinquants. L'un a été condamné à 800 € d'amende (dont 500 avec sursis). L'autre à un mois de prison avec sursis et 300 € d'amende. Mais chez lui, les policiers ont découvert deux plans de cannabis.
Sources : https://www.ouest-france.fr/justice-le-cannabis-social-club-face-au-tribunal-2546621 0 commentaire En savoir plus… ›
Tout commence en mai 1973 quand des centaines d’étudiants venus de tout le pays envahissent la petite bourgade de Nimbin, à quelques kilomètres au Sud de Brisbane. Ils entendent faire de « l’Aquarius Festival » un véritable Woodstock australien, dont la marijuana n’est alors qu’un accessoire. L’ambiance est aux cheveux longs et aux vans multicolores dans lesquels artistes et utopistes s’empressent de rejoindre la côté Est du pays. La plupart d’entre eux décident de s’établir durablement dans la région où les terres restent très abordables. Nimbin devient la capitale « hippie » du pays, une capitale qui mue rapidement en temple national du cannabis.
A l’origine, l’utopie d’un mode de vie alternatif
Dans les années 1970, une multitude de communautés émergent dans la région, dont la plus importante reste « Tuntable Falls » avec ses 200 habitants et son système scolaire et politique autonome. Les principes d’auto suffisance et d’harmonie sont au fondement de ces collectivités qui disposent de leurs propres cultures potagères, de panneaux solaires et de sources d’eau à proximité.
Elles mettent les questions environnementales, les droits de l’homme et les droits des aborigènes sur leur terre au cœur de leur réflexion. Sur le plan économique, des sociétés comme Rainbow Power Company, spécialisée dans l’énergie solaire ou encore Ecosik Bags, dans le textile recyclable, y prospèrent durablement.
Derrière l’artifice, une ambition politique certaine
Derrière les « fées ganja », les olympiades, les ateliers roulage et la parade du « big joint », le festival Mardi Grass affiche une véritable ambition politique : « Cet événement annuel est une manifestation contestataire à caractère politique » (site officiel du festival). Depuis 1993, cette ode annuelle au cannabis entend protester contre « l’invraisemblable et stupide guerre contre la drogue » à coup de slogans du type « We are the 420% Abongamous ». Avec un pass payant entre 30$ et 50$, l’événement accueille des profils variés, y compris des participants venus célébrer l’herbe magique en famille.
Nimbin est aussi le siège du HEMP Party (Help End Marijuana Prohibition), un parti fondé en 1993 dont le leitmotiv principal reste de « légaliser le cannabis pour usage personnel, médical et industriel pour tous les australiens ». Une entreprise politique qui a naturellement trouvé un certain écho aux dernières élections fédérales de 2013 (0,71%), alors qu’on sait que plus d’un tiers de la population australienne a déjà expérimenté le cannabis et que près d’un million d’Australiens en font une consommation hebdomadaire.
Un contrôle policier difficile : une poche hermétique à la législation
Nimbin, où l’on trouve partout de quoi fumer, reste une exception. En Australie, l’utilisation, la possession, la culture et la vente de cannabis est illégale même si les peines encourues diffèrent selon les Etats. Dans le New South Wales, où se trouve Nimbin et sa région, la politique à l’égard du cannabis est dite « citoyenne » avec un système d’avertissements et d’informations avant la sanction. Elle peut aller de la simple amende à la peine d’emprisonnement en fonction des quantités saisies.
A Nimbin, le respect de la loi reste difficile tant l’habitude de consommation est ancrée dans la culture locale. Pour le commandant de la police locale Greg Moor (pour news.com), « Nimbin a sa propre culture » - sans jeu de mots douteux. L’afflux incessant de bus « rend complexe de faire respecter la loi comme c’est le cas dans le reste de l’Etat. ». L’intensité du trafic et le manque d’effectif policier rendent quasiment impossible le travail de la police.
Une utopie transformée en juteuse attraction touristique
La rue de Nimbin. Crédit DR
Au fil des années, l’utopie des pionniers de Nimbin a tôt fait de muer en simple attraction touristique. Un spectacle juteux pour ses habitants dont la plupart vivent de la vente de la drogue et échappent aux taxes. Si la marijuana est la plus « médiatisée », les dealers de la ville proposent aussi une multitude de produits (champignons hallucinogènes, ecstasy) tous plus rentables les uns que les autres. Les 15% de chômage (selon le recensement gouvernemental de 2011), soit deux fois plus que la moyenne nationale, témoignent bien de la foison de ces jobs non déclarés.
Pour Mr Hopkins, créateur du Mardi Grass (pour ABC Australia), l’événement n’a pas réussi à changer la législation et l’image actuelle de la ville est une « honte ». Pour lui, « le commerce de la drogue à Nimbin est un marché de plusieurs millions de dollars, un marché pour touristes ». Touristes qui chaque année sont de plus en plus nombreux à venir observer l’étrange spectacle de cette rue colorée.
Sous ces airs de festival altermondialiste, Mardi Grass s’apparente davantage à une simple occasion de faire la fête en consommant l’esprit tranquille. L’afflux des bus touristiques remplis de « backpackers » est venu ternir l’image du village alternatif qu’avaient imaginé les pionniers de l’Aquarius Festival. En somme, une utopie trop vite partie en fumée.
Cet ancien député a introduit mi-avril une pétition auprès de la Chambre des députés grand-ducale. L’objet de la pétition : légaliser le cannabis à usage médical. Si le texte recueille 4.500 signatures d’ici fin mai, un débat sur la question devra être organisé au sein de la Commission des pétitions, avec la ministre de la santé Lydia Mutsch. Rappelons que l’usage du cannabis médical est une réalité aux Pays-Bas, en Allemagne, en Espagne ou encore dans certain états américains. En Belgique, l’Agence fédérale des médicaments étudie la question, mais on est encore loin d’aboutir à un consensus.
Le docteur Colombera est l’un des fers de lance de la lutte pour la légalisation du cannabis médical au Luxembourg, et même à plus large échelle en Europe. Il est d’ailleurs le président de L’Union Francophone pour les Cannabinoïdes en Médecine. L’homme a d’ailleurs été traîné devant les tribunaux luxembourgeois pour avoir prescrit du cannabis à de nombreux patients qui devaient subir des traitements thérapeutiques lourds (chimiothérapie, etc.). « On m’a reproché de favoriser l’importation de cannabis sur le territoire car je prescrivais cela à certains de mes patients qui allaient se fournir en Hollande... Mais finalement il y a eu un non-lieu », explique-t-il.
Étonnamment, le Dr Colombera se montre plutôt pessimiste quant aux chances de voir sa pétition atteindre les 4.500 signatures. « Car les personnes qui auraient le plus besoin de cannabis, c’est-à-dire des personnes âgées, n’ont pas accès à internet pour signer la pétition en ligne. De plus, au sein du monde politique, cela fait peur aux autres partis de s’afficher pour le cannabis médical. Ils seront peu nombreux à soutenir cela. Le cannabis renvoie encore trop souvent à une image de drogués. »
Mais selon lui, l’introduction de la pétition auprès de la Chambre des députés aura au moins eu le mérite de relancer le débat, « et de rappeler aux gens qu’il existe une alternative aux traitements traditionnels pour soulager les effets secondaires d’un traitement lourd ».
Quant à la Ministre de la Santé Lydia Mutsch, elle nous a confié que « en matière d'usage à des fins thérapeutiques du cannabis ou de certains de ses composants, ma priorité porte sur les médicaments à base de canabinoïdes, dûment autorisés et mis sur le marché et dont je suis le développement avec intérêt».
Elle précise toutefois que «en tant que Ministre de la Santé, je serais disposée à analyser, avec une certaine méfiance et ensemble avec les milieux médicaux les plus concernés (oncologie, prise en charge de la douleur) l'opportunité de prévoir un régime d'usage exceptionnel licite du « Cannabis médicinal » s'inspirant du modèle en place en Allemagne. ».
En fonction de l'issue de la pétition publique n°345, le sujet visé pourrait également être abordé et débattu au sein des commissions parlementaires compétentes.
Alors que l’enthousiasme des États-Unis concernant la guerre contre la drogue faiblit, cette dernière ayant coûté cher pour peu de résultats, les experts observent un véritable revirement à l’échelle de la politique mondiale.
Ce virage s’est caractérisé par de fortes pressions exercées par certains pays d’Amérique latine et d’Europe et des associations oeuvrant dans le domaine de la politique antidrogue pour l’adoption d’une nouvelle politique mondiale relative à la drogue. Cette question devrait en effet être abordée lors d’une session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies en 2016.
Les États-Unis en ont assez de voir leurs prisons engorgées de toxicomanes et de petits trafiquants et certains États du pays expérimentent de nouvelles approches de dépénalisation du cannabis. Les pays partisans d’une ligne dure risquent donc de n’obtenir qu’un maigre soutien à leur cause. D’autant plus que l’opinion publique réclame de plus en plus l’adoption d’une nouvelle politique mondiale accordant plus de liberté aux pays afin que ceux-ci puissent décider de leurs propres stratégies et notamment privilégier la santé publique plutôt que des politiques de prohibition et d’interdiction.
La dernière initiative en faveur d’une révision de la politique en la matière est la publication, cette semaine, par le Projet international de politique antidrogue de la London School of Economics et l’Open Society Foundation, d’un rapport de grande portée intitulé Ending the Drug Wars (Mettre un terme aux guerres contre la drogue). Soutenu par cinq économistes titulaires du prix Nobel, le rapport sera utilisé par le gouvernement guatémaltèque dans les négociations internationales concernant la politique antidrogue.
Le rapport appelle à l’adoption de nouvelles stratégies de lutte antidrogue basées sur des preuves scientifiques plutôt que sur des arguments moraux. Il recourt au langage économique des analyses coût-bénéfice pour étudier les conséquences importantes des efforts de prohibition et d’interdiction sur les pays producteurs de drogue et les pays de transit – en Amérique latine, en Asie et en Afrique. Il analyse également les bénéfices des approches de « réduction des méfaits » appliquées aux toxicomanes, davantage axées sur la santé publique, par opposition aux arrestations et aux mises en détention. Les résultats du rapport sont nuancés et parfois contradictoire, preuve peut-être qu’il n’y a non seulement pas de réponse facile, mais surtout pas de solution universelle à cette épineuse question qu’est la politique antidrogue.
Selon John Collins, éditeur du rapport, les informations ne manquent pas sur les conséquences désastreuses de la guerre contre la drogue – des violentes guerres de cartels aux incarcérations de masse, en passant par les déplacements de population et la hausse des taux d’infection au VIH - mais l’heure est venue pour les pays de mener leurs propres expériences et recherches sur ce qui fonctionne ou non.
« De nombreux pays s’accordent sur le fait que la guerre contre la drogue repose sur la supposition fondamentalement erronée que lorsque l’on s’attaque à l’offre, on s’attaque à la demande, alors qu’en réalité cela entraîne seulement une inflation des prix de la drogue », a dit M. Collins. Les interdictions ont perturbé les flux sur le marché de la drogue, entraînant une montée en flèche des prix de la drogue et une escalade des guerres de cartels, car les produits de contrebande comme la cocaïne et l’héroïne ont acquis une valeur méritant d’être défendue pour les barons de la drogue et les trafiquants.
L’une des études présentées dans le rapport analyse « l’effet ballon », qui veut que lorsque l’offre de drogue est interdite et supprimée dans un pays, le problème ne fasse que se déplacer aux dépens d’un autre.
Selon Peter Reuter, auteur d’un chapitre du rapport intitulé The Mobility of Drug Trafficking (La mobilité du trafic de drogue), la répression de trafiquant par les autorités néerlandaises à l’aéroport de Schiphol au début des années 2000 pourrait avoir poussé les cartels à trouver d’autres itinéraires, en passant par exemple par l’Afrique de l’Ouest pour atteindre l’Europe.
M. Reuter avertit cependant que si l’effet ballon est une « métaphore convaincante » qui comporte « au moins un brin de vérité », il existe bien d’autres exemples qui montrent que la répression n’a pas toujours entraîné de changements évidents dans de nouvelles régions. Il déplore le manque de témoignages « en l’absence d’entretiens avec les trafiquants ». L’insuffisance de preuves tangibles est en effet l’un des principaux obstacles pour les personnes qui tentent de mener des recherches scientifiques sur l’industrie illégale de la drogue qui se chiffre en milliards de dollars.
M. Collins estime cependant que « les politiques scientifiques commencent à prendre le pas » sur l’idéologie dans les débats sur la question de la drogue.
Rejet des gouvernements latino-américains
Les statistiques sur le trafic de drogue restent floues. Il est plus facile de quantifier les énormes coûts humains et sociaux des guerres de la drogue sur les pays producteurs et de transit comme la Colombie, le Mexique, le Guatemala et le Salvador. Les dirigeants latino-américains se déclarent donc de plus en plus franchement contre les politiques prohibitionnistes.
Dans leur chapitre, intitulé Why is Strict Prohibition Collapsing? (Pourquoi l’interdiction absolue ne fonctionne pas ?), Daniel Mejia et Pascual Restrepo soutiennent que les gouvernements latino-américains rejettent cette politique parce que le coût élevé des tentatives de réduction de l’offre de drogue – qui entraînent des violences, favorisent la corruption et déstabilisent les institutions – est bien supérieur aux 400 à 500 millions de dollars par an d’aide que ces pays reçoivent des États-Unis et d’autres pays pour les efforts menés contre les trafiquants et les cartels. Le pays producteur et de transit ne sont plus disposés à « hypothéquer leur sécurité nationale » à cette fin, affirment-ils.
D’autres déclarent n’avoir rien à reprocher aux nouvelles politiques de dépénalisation de la consommation, qui traitent la toxicomanie comme un problème de santé plutôt que comme un crime et qui s’attaquent davantage au problème de la demande. Ils mettent cependant un bémol en soulignant que pour des pays comme la Colombie et le Mexique, fortement déstabilisés par les guerres de la drogue, une politique progressiste axée sur la santé ne sera pas suffisante pour résoudre le problème de l’érosion de la loi et de l’ordre, de la corruption, du crime organisé, des trafiquants et des déplacements massifs d’habitants hérités de la guerre contre la drogue.
« De nombreux pays s’accordent sur le fait que la guerre contre la drogue repose sur la supposition fondamentalement erronée que lorsque l’on s’attaque à l’offre, on s’attaque à la demande, alors qu’en réalité cela entraîne seulement une inflation des prix de la drogue »
Malgré l’assouplissement de l’interdiction des drogues dures, les réseaux illégaux renforcés par le commerce lucratif de la drogue ne vont pas disparaître – même si leurs marchandises les plus précieuses, comme l’héroïne et la cocaïne, perdent de leur valeur. Dans l’économie illicite mondialisée d’aujourd’hui, les criminels organisés font preuve d’une flexibilité remarquable. Ils sont en effet capables de se reconvertir pour intégrer d’autres marchés lucratifs comme le trafic d’êtres humains, de matières premières, d’animaux menacés d’extinction, etc. Dans l’État du Michoacán, au Mexique, le cartel des Chevaliers templiers s’est lancé dans le commerce de citrons verts, par exemple, en ayant recours à la violence pour prendre le contrôle des entreprises exportatrices légitimes. Les groupes d’autodéfense, qui se sont créés pour lutter contre les cartels en l’absence d’intervention efficace du gouvernement, signalent une autre triste conséquence des guerres de la drogue : l’émergence de groupes paramilitaires qui pourraient bientôt tomber dans le trafic, comme cela s’est produit avec les Forces d’autodéfense unies de Colombie (AUC).
M. Mejia maintient cependant que l’assouplissement de l’interdiction des drogues représente au moins un début de solution : « Oui, ce trafic sera en partie substitué par d’autres activités illégales, mais si la [politique de] prohibition est abandonnée, les rentes exorbitantes obtenues par ces organisations criminelles diminueront de manière non négligeable. »
« Avec la prohibition, les drogues ont atteint une valeur astronomique »
Sanho Tree, directeur du Projet de politique antidrogue de l’institut d’Études politiques de Washington, partage l’avis de M. Mejia. Selon lui, les cartels participent au trafic de stupéfiants « parce que les drogues sont les fruits les plus accessibles » – le narcotrafic est le moyen le plus facile de gagner d’importantes sommes d’argent de manière illégale, car il suffit de transporter la drogue d’un pays à l’autre. « La prohibition de drogues équivalait à offrir aux criminels des distributeurs automatiques de billets », a-t-il dit. « En faisant simplement pousser quelques mauvaises herbes et en les transformant, on peut faire fortune rapidement ».
La marche à suivre est complexe et il n’y a clairement pas de solution facile. Cependant, comme le dit M. Tree, « avec la prohibition, les drogues ont atteint une valeur astronomique. L’idée que l’on puisse maîtriser ces organisations en s’attaquant à l’offre est fausse et dangereuse. L’effet sur les prix des drogues est inverse. »
M. Tree préconise d’abandonner le discours opposant les drogues licites aux drogues illicites. Selon lui, cela crée une fausse dichotomie. « Nous devons disposer de tout un éventail de réglementations et de sanctions. Nous avons besoin de différentes catégories », a-t-il dit. Le cannabis pourrait intégrer la même catégorie que l’alcool et les drogues plus dures pourraient faire partie d’un groupe différent, soumis à davantage de restrictions. « Il n’y a pas de solution universelle », a-t-il ajouté.
« Nous n’essayons pas de présenter cela comme un problème unique avec des solutions simples, a dit M. Collins. Nous soulignons la complexité de la question tout en affirmant que nous pouvons améliorer considérablement la politique mondiale en matière de lutte antidrogue. Des sommes trop importantes ont été dépensées pour appliquer des politiques préjudiciables et trop peu de fonds ont été alloués à des politiques prouvées efficaces. Nous affirmons qu’il faut expérimenter de nouvelles méthodes et les évaluer. La plupart des États ont évité cette stratégie. »
Bien que les experts aient détecté un « profond revirement » politique maintenant que les États-Unis ne sont plus aussi déterminés à contraindre d’autres pays à les suivre dans la guerre contre la drogue, de nombreux pays continuent à défendre une ligne dure. C’est le cas de la Russie, de la Chine et de l’Iran, par exemple, mais aussi de plus en plus du Canada, d’après certains. Avec le « gel diplomatique » actuel entre la Russie et les États-Unis au sujet de la crise ukrainienne, la coopération en matière de lutte antidrogue semble cependant lointaine. Selon le média Russe RT, le directeur par intérim de l’Agence antidrogue américaine, Michael Botticelli, aurait refusé une invitation à une rencontre pour discuter de la lutte antidrogue à Moscou plus tard ce mois-ci et l’un de ses homologues russes, Viktor Ivanov, a été interdit d’entrée sur le territoire américain, car il fait partie des personnes frappées par les sanctions américaines.
Mais en l’absence de consensus mondial, comment les pays vont-ils établir ensemble une politique antidrogue ?
Les Nations Unies doivent laisser leur rôle de responsable de l’application des traités internationaux pour endosser celui de facilitateur, soutient M. Collins. Cependant, rares sont ceux qui s’attendent à ce que la session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies de 2016 débouche sur une nouvelle convention. Le slogan de la session extraordinaire de 1998, « Un monde sans drogue – c’est possible ! » et la déclaration faite alors en faveur du développement de stratégies visant à éliminer la culture illégale de pavot à opium, de cocaïers et de cannabis avant 2008 semblent ridiculement naïfs aujourd’hui et ont peu de chance d’être repris dans la prochaine déclaration mondiale relative à la lutte contre la drogue.
A Paris, les manifestants se sont réunis place de la Bastille, à l'appel d'associations d'usagers, dont Cannabis sans frontière, au cri de «libérez Marie-Jeanne!» (surnom donné à la marijuana, ndlr). Musique reggae en fond sonore, ils ont rejoint la place de la République, brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire «légalisez pour l'égalité» ou «un joint pour le trou de la Sécu».
«En France, les responsables politiques font de l'idéologie»
«On souhaite dans un premier temps la légalisation du cannabis à usage thérapeutique. Et au-delà, on veut la fin de la prohibition», a expliqué à l'AFP Farid Ghehiouche, fondateur de Cannabis sans frontière. «Dans beaucoup de pays, le débat évolue. Mais en France, les responsables politiques font de l'idéologie, ils font preuve d'irrationalité», estime Farid Ghehiouche.
La «marche mondiale du cannabis», créée en 1999, était programmée cette année dans une soixantaine de pays. Dans beaucoup d'entre eux, dont le Canada, les Etats-Unis ou l'Allemagne, les rassemblements ont eu lieu le 3 mai.
En France, où la manifestation était organisée pour la 13ème année consécutive, 13 villes devaient participer à l'évènement, en métropole mais aussi en Martinique et à l'Ile de la Réunion.
Parler de «l'utilité thérapeutique»
«En France, le cannabis et le chanvre sont victimes d'une propagande diffamatoire. Nous on essaie de parler de leur utilité thérapeutique, mais aussi industrielle et écologique», a déclaré à l'AFP Louis Behr, 24 ans, venu participer à un rassemblement d'une quarantaine de personnes à Metz. «Les politiques répressives en France font plus de mal que la substance elle-même», ajoute cet étudiant en art du spectacle, citant «les règlements de comptes entre trafiquants, la consommation des mineurs et les produits frelatés». A Lyon, comme à Rennes ou Lille, seuls une vingtaine de militants ont fait le déplacement, sous la pluie.
Selon l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies, 1,2 million de personnes fument régulièrement du cannabis (plus de dix fois par mois) en France. Le chiffre d'affaires du trafic est estimé entre 700 millions et un milliard d'euros.
Selon la mission interministérielle de lutte contre les drogues et la toxicomanie (MILDT), le cannabis entraîne des difficultés de concentration et peut engendrer ou aggraver, chez certaines personnes vulnérables, des troubles psychiques comme l'anxiété ou la dépression.
Source: https://www.20minutes.fr/societe/1371689-20140510-manifestations-plusieurs-villes-france-legalisation-cannabis
Toulouse, France – « L’augmentation croissante des complications cardiovasculaires associées à la consommation de cannabis et leur caractère extrêmement grave (avec un taux de décès de 25,6%) montre que le cannabis est un facteur de risque de maladie cardiovasculaire chez les jeunes adultes ; ce qui confirme les données déjà disponibles. »
Telle est la conclusion plutôt alarmiste d’une étude française rapportée dans le Journal de l’American Heart Association (AHA) [1,2].
Pourtant, à y regarder de plus près, l’étude émet certes un signal, en particulier chez les sujets à risque cardiovasculaire mais, elle ne permet ni d’affirmer un lien de causalité entre la consommation de cannabis et le risque d’accidents cardiovasculaires ni d’écarter le rôle du tabac dans cette association.
« L’étude n’a pas la prétention d’établir un lien de causalité. Elle montre un signal mais on peut s’attendre à ce que les complications cardiovasculaires associées au cannabis soient rares », a relativisé l’auteur principal de l’étude Emilie Jouanjus (Docteur en pharmacie, INSERM UMR1027, Centre Hospitalier Universitaire de Toulouse) pour Medscape France.
Pourquoi, il faut étudier la question
En Europe, la consommation de cannabis est élevée : 14,9% des 15 à 24 ans et la France y fait figure de mauvais élève. Elle se positionne en troisième position après la République Tchèque et l’Espagne. La question de la toxicité cardiovasculaire du cannabis mérite donc d’être posée.
C’est en prenant connaissance de quelques cas d’hospitalisations d’origines cardiovasculaires (IDM, AVC, thromboses) inexpliquées chez des jeunes, grands consommateurs de cannabis, que les auteurs ont décidé de pousser plus loin les investigations [3].
« Ces données inattendues méritaient des analyses approfondies, en particulier parce que l’utilisation de cannabis à usage thérapeutique est devenue plus fréquente et que certains gouvernements légalisent son usage », a expliqué Emilie Jouanjus.
Sur l’ensemble des complications, 2% étaient d’origine cardiovasculaire
L’équipe de Toulouse a analysé les notifications spontanées de complications liées à la consommation de drogues au réseau national d’addictovigilance entre 2006 et 2010. Pendant cette période, 1979 complications liées à la consommation de marijuana ont été rapportées.
Sur ces 1979 cas, principalement psychiatriques, 35 (2%) étaient des problèmes cardiovasculaires graves frappant des hommes autour de 34 ans.
Sur les 35 cas, les chercheurs ont recensé 20 infarctus du myocarde, 10 artériopathies des membres inférieurs et trois accidents vasculaires cérébraux. Neuf patients sont décédés (25,6%) des suites de leurs problèmes cardiovasculaires.
L’exposition au cannabis était occasionnelle (au moins une fois dans l’année) pour près d’un quart des victimes (n=8), récente (entre une et neuf fois dans les 30 derniers jours) pour 6 d’entre elles et régulière (au moins 10 fois dans les 30 derniers jours) pour près de la moitié (n=16). Cinq cas n’étaient pas renseignés. La durée d’exposition n’était connue que pour 5 cas.
Les chercheurs ont aussi constaté que les complications cardiovasculaires liées à la consommation de cannabis avaient triplé entre 2006 et 2010.
Pour les auteurs, ces chiffres sont probablement sous-estimés car « actuellement, 5% des cas de réactions au drogue sont rapportés à la pharmacovigilance ». Or, en France, il y aurait 1,2 million de consommateurs réguliers de cannabis…
Oui mais…
Oui mais…à la lecture de l’article, il est clair que les données rapportées sont entourées d’un certain flou inhérent à ce type d’étude. Il est donc important de ne pas tirer de conclusions hâtives.
Les auteurs concèdent même que « leur travail est quelque peu limité par le manque d’informations disponibles. »
Ils indiquent « […] que les événements étaient trop peu nombreux pour évaluer statistiquement si les complications cardiovasculaires étaient dues à la consommation de cannabis ou à d’autres facteurs de risque. »
On note, par exemple, que les informations concernant les antécédents cardiovasculaires et les facteurs de risque des fumeurs de cannabis victimes d’accidents cardiovasculaires ne sont disponibles que dans 16 cas sur 35 (46%). Or, sur ces 16 cas, 9 personnes avaient des antécédents personnels de maladies cardiovasculaires et 7 des antécédents familiaux de maladies cardiovasculaires.
Il semble donc que les cas répertoriés touchent principalement des personnes à risque cardiovasculaire. On peut regretter que cette précision ne figure pas explicitement dans les conclusions des auteurs.
Autre source potentielle de biais, 21 des 35 sujets (60%) étaient également des fumeurs de tabac dont 6 avaient des antécédents personnels de maladies cardiovasculaires.
Interrogée par Medscape France, Emilie Jouanjus explique que « le tabac est évidemment un facteur à prendre en compte mais que cette question n’est pas abordée dans l’étude de par sa méthodologie. L’étude ne permet pas de discriminer l’impact propre du cannabis de celui du tabac. En revanche, une étude publiée en 1975 qui a comparé directement cannabis et tabac montre que chez des patients coronariens soumis à un exercice physique ceux qui fumaient du cannabis ont fait plus d’angors que ceux fumaient du tabac [4]. »
L'étude ne permet pas de discriminer l'impact propre du cannabis de celui du tabac. Emilie Jouanjus
Enfin, les données sur l’utilisation d’autres substances illicites associées à un risque cardiovasculaire accru sont, elles aussi, incomplètes.
Les analyses toxicologiques sont fournies dans 13 cas (37%).
Elles confirment la présence de Δ9‐tetra‐Hydrocannabinol (THC) dans tous les cas, mais elles rapportent aussi la présence d’alcool en plus dans un cas, et d’alcool, plus opiacés, morphine, salicylates et phénothiazine (antipsychotique) dans un autre cas. Chez les autres patients non testés (22), deux autres patients ont rapporté consommer également de la cocaïne et d’autres drogues (ecstasy, benzodiazépines, opiacés).
Un signal cardiovasculaire à surveiller
En conclusion, cette dernière publication et plusieurs travaux réalisés auparavant [3-7] incitent à surveiller ce signal cardiovasculaire chez les jeunes hommes fumeurs de cannabis, en particulier chez ceux qui ont des facteurs de risque cardiovasculaires. Mais, d’autres études sont nécessaires pour évaluer l’existence réelle d’un lien de causalité.
Pour approfondir le sujet, Emilie Jouanjus a pour projet d’analyser, parmi les jeunes hommes hospitalisés au CHU de Toulouse pour des complications cardiovasculaires, lesquels ont consommé des substances illicites et, en particulier, du cannabis.
En parallèle, elle souligne que de nouvelles études fondamentales de pharmacologie sont nécessaires pour tenter de mieux comprendre les mécanismes d’action qui pourraient expliquer que la consommation du cannabis provoque des accidents cardiovasculaires.
Mécanismes impliqués : des hypothèses à vérifier
Les récepteurs spécifiques aux dérivés cannabinoïdes sont présents dans le système nerveux central mais aussi au niveau des vaisseaux et du cœur. Cependant, reste à savoir si l'effet des dérivés cannabinoïdes sur ces récepteurs est plutôt protecteur ou délétère. Les études sont pour l'instant contradictoires.
« Il existe clairement un effet au niveau du système nerveux autonome mais, il varie selon le niveau d'exposition. Les effets d'une exposition en aigu sont très différents de ceux observés avec une consommation chronique. Pour l'instant, en l'état actuel des connaissances on ne connait pas précisément les mécanismes impliqués », explique Emilie Jouanjus.
Les auteurs n'ont pas rapporté de liens d'intérêts. L'étude a été financée par la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et toxicomanies (MILDT) et Agence Nationale de Sécurité des Médicaments (ANSM).
Références
Communiqué AHA. Marijuana use may increase heart complications in young, middle-aged adults. American Heart Association . Rapid Access Journal Report. 23 avril 2014
Jouanjus E, Micallef J, Lapeyre‐Mestre M. Cannabis Use: Signal of Increasing Risk of Serious Cardiovascular Disorders. J Am Heart Assoc. 2014; 3: e000638 originally published April 23, 2014, doi: 10.1161/JAHA.113.000638
Jouanjus E, Leymarie F, Tubery M, Lapeyre‐Mestre M. Cannabis‐related hospitalizations: unexpected serious events identified through hospital databases. Br J Clin Pharmacol. 2011; 71:758-765.
Aronow WS, Cassidy J. Effect of smoking marihuana and of a high‐nicotine cigarette on angina pectoris. Clin Pharmacol Ther. 1975; 17:549-554.
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Beaconsfield P, Ginsburg J, Rainsbury R. Marihuana smoking. Cardiovascular effects in man and possible mechanisms. N Engl J Med. 1972;287:209–212.
Attendus depuis le vote en décembre de la loi régulant le marché du cannabis en Uruguay, les décrets d'application ne seront publiés que mardi mais leur contenu a été rendu public par Diego Canepa, président du Bureau national des drogues (JND), lors d'une conférence de presse à Montevideo.
Après inscription sur un registre national, les usagers pourront acquérir «un maximum de 10 grammes par semaine», a-t-il notamment déclaré.
Le gouvernement lancera un appel au privé «dans un délai de moins de deux semaines après l'entrée en vigueur des décrets» pour accorder entre deux et six licences de production, selon lui.
Le cannabis pourra être cultivé par des particuliers résidant en Uruguay pour leur usage personnel et par des clubs de consommateurs ou bien acheté en pharmacie, mais dans ce cas, pas avant le mois de décembre, compte tenu du temps nécessaire à sa récolte.
Le prix public sera de 20 à 22 pesos le gramme (environ un dollar).
Selon Julio Calzada, secrétaire général du JND, le volume total consommé dans ce pays de 3,3 millions d'habitants «tourne autour de 18 à 22 tonnes» de cannabis par an, en conséquence de quoi «il n'y aurait pas besoin de plus de 10 hectares» de cultures pour satisfaire la demande.
Ces précisions étaient attendues avec impatience par les usagers contraints jusqu'alors de s'approvisionner illégalement, seule la consommation étant autorisée.
«Ca a été un soulagement quand la loi a été approuvée parce que je n'aurai plus jamais à aller me fournir dans une +boca+ (point de vente illégal)», a ainsi confié à l'AFP Claudia, une employée de 36 ans, mère de trois enfants.
L'obligation de figurer sur un registre pourrait toutefois dissuader certains usagers de rentrer dans la légalité.
«Il y a des gens qui ont peur de s'enregistrer à cause du travail. Et si un autre gouvernement anti-marijuana arrive, il pourra utiliser cette base de données contre les gens», a ainsi estimé Juan Pablo Tubino, propriétaire d'un magasin spécialisé dans la culture du cannabis, à Montevideo.
- Expérimentation à la fois critiquée et observée -
Cette loi unique au monde a été portée à bout de bras par le président Jose Mujica, un ancien guérillero septuagénaire et iconoclaste dont le mandat s'achève cette année, qui a affronté de nombreuses réticences, jusqu'au sein de sa majorité de gauche, le Frente amplio (FA).
Les principales incertitudes concernent la capacité des autorités à contrôler une production illégale dans tous les pays voisins et des dizaines de milliers de petits cultivateurs répartis dans tout le pays.
La consommation de cannabis s'est multipliée ces dernières années, selon le JND qui estime ses usagers à 128.000 personnes. Mais les associations de consommateurs revendiquent elles 200.000 fumeurs, pour 3,3 millions d'habitants.
Des craintes sont également exprimées par ces autocultivateurs, qui voient déjà se multiplier les vols de plants.
«Désormais, on voit plus les autocultivateurs, on sait qu'il y a beaucoup de gens qui plantent, c'est pour cela qu'il y a des vols. Moi, on m'a volé, mes amis et des connaissances, aussi. Et ça se passe dans tout le pays», a ainsi assuré Juan Andres Palese, producteur et co-propriétaire d'une autre boutique dédiée à la culture de cannabis, un secteur en plein essor.
En raison des restrictions d'accès au produit pour les mineurs, les étrangers, ceux refusant de s'enregistrer, etc., la possibilité d'éradiquer totalement le marché noir semble également illusoire.
Les forces de l'ordre affirment en être conscientes. La nouvelle loi pourrait «modifier le marché» illégal de la marijuana, a admis à l'AFP le commissaire César Manuel Sosa, directeur de la Direction générale de répression du trafic de drogues. «La possibilité existe que (le marché) puisse dévier (vers d'autres drogues) ou violer cette loi, alors, nous devrons agir», a-t-il ajouté.
Notamment critiquée par l'Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) des Nations unies, cette expérimentation est toutefois observée avec intérêt par des pays, organisations ou anciens dirigeants estimant que la politique essentiellement répressive menée depuis plusieurs décennies sous la houlette des Etats-Unis, plus gros marché de consommateurs au monde, a été un échec.
«Il y a un consensus entre de nombreux pays pour reconnaître que ce que nous faisons contre les drogues ne fonctionne pas mais il n'y a pas d'accord sur ce que sera la réponse correcte», a reconnu pour l'AFP Hannah Hetzer, de l'ONG américaine Drug Policy Alliance.
Légaliser le cannabis, oui, mais dans quelles limites ? L’exemple pourrait bien venir de ceux que l’on surnomme volontiers les « drogues légales » : le tabac et l’alcool. La suggestion émane de la RAND Corporation. Cette organisation dédiée à la recherche de solutions pour les défis de politique publique a consacré un article à ce sujet dans l’American Journal of Public Health ce 17 avril.
Elever les prix et limiter les variétés
Depuis novembre 2012, l’usage récréatif de marijuana est légal dans les Etats américains de Washington et du Colorado. Une décision sans précédent puisque même les Pays-Bas n’en sont qu’à la dépénalisation. Les lois se sont donc créées ex nihilo. Les autres Etats envisageant de suivre l’exemple s’inspireront certainement de ces « modèles. » Mais ils pourraint aussi regardeer du côté des législations régissant production, vente et consommation d’alcool et de tabac, selon la RAND Corporation. Car les questions, bien que moins épineuses, se ressemblent fortement : comment autoriser au mieux les différents aspects de la commercialisation, tout en travaillant à une réduction des problèmes qui en découlent ?
« Les leçons des dernières décennies de régulation de l’alcool et du tabac offrent quelques pistes aux décideurs qui envisagent des alternatives à l’interdiction du cannabis, et qui s’intéressent à une approche de santé publique », estime Beau Kilmer, co-directeur du Centre de Recherche sur les Politiques en matière de Drogue et co-auteur de l’article. Dans les faits, plusieurs approches semblent judicieuses. Les membres de la RAND Corporation citent notamment le maintien de prix élevés pour limiter la consommation de cannabis, la mise en place d’un monopole d’Etat des ventes et de la distribution, la limitation des variétés disponibles à la vente et de la publicité, la restriction de l’usage dans les lieux publics.
Des législations variables
Les Etats de Washington et du Colorado n’ont pas attendu ces conseils pour adapter les législations. Dans les deux Etats, l’achat de marijuana est limité aux citoyens de plus de 21 ans. Les quantités aussi sont limitées : 28,3 g de cannabis réutilisable, 452 g d’infusion de marijuana solide et un peu plus de 2 kg d’infusion de marijuana liquide pour l’Etat de Washington. La production et la vente sont soumises à licence dans les deux Etats. Si le Colorado autorise toutes les formes, l’Etat de Washington semble plus restrictif.
L’exemple du Colorado n’inspire d’ailleurs pas les spécialistes de la RAND Corporation. « En se basant sur l’expérience nationale fournie par l’alcool et le tabac, il semble prudent – d’un point de vue de santé publique – d’ouvrir progressivement le marché du cannabis […] et de prévenir une commercialisation trop rapide, tout en le rendant disponible aux adultes responsables », détaille Rosalie Liccardo Pacula, co-directrice du Centre de Recherche et co-auteur de l’article. Il est clair que la vente de cannabis au Colorado a été tout sauf progressive : quelques mois après l’autorisation effective, des distributeurs automatiques de cannabis sont déjà disponibles. Sans contrôle d’identité ou de limitation de quantité.
De l'extérieur, le magasin de marijuana récréative de Jan Cole à Boulder, au Colorado, a l'air accueillant. De grandes baies vitrées laissent entrer la lumière naturelle, et les murs sont peints dans des tons apaisants. Cole a utilisé son expérience en gestion de spa pour construire un atelier "chaleureux et accueillant" un cannabis-shop qui met les clients à l'aise.
En fait, le nom de la boutique, The Farm, est tellement discret, "que nous avons beaucoup de gens qui viennent à penser que nous pourrions être un épicier d'aliments biologiques," dit-elle.
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Et c'est exactement ce que Cole veut: un sac fourre-tout, une conscience sociale, la foule de l'alimentation naturel. Elle fait la promotion de son cannabis, organique et, bien sûr, cultivés localement sans pesticides.
"Je ne pense pas que nous serons jamais aussi grand que Whole Foods, mais Whole Foods est un bon exemple du type de clientèle que nous attirons," dit-elle.
Cela reflète tout la tentative de Cole de rompre avec la meute. Avec l'utilisation de la marijuana récréative maintenant légal dans le Colorado, les entreprises de marijuana se retrouvent en concurrence pour des clients dans des marchés serrés.
Environ 200 magasins de marijuana de loisirs ont ouvert dans le Colorado depuis le 1er janvier. Et le marché devient de plus en plus saturé, tout le monde est à la recherche d'un avantage.
Aller au-delà "les premiers adoptants»
Jennifer DeFalco est directeur de la création pour Cannabrand, une agence de marketing nommé pour un mashup de "cannabis" et "l'image de marque." DeFalco et son partenaire d'affaires misent sur l'industrie de la marijuana du Colorado devenant une grosse affaire - un besoin de logos flashy, slogans mémorables et des annonces accrocheuses.
"Le cannabis est là pour rester. Ça ne va pas n'importe où. L'industrie ne fait que commencer», dit-elle.
Parce que c'est tellement nouveau, DeFalco dit que la plupart des gens qui ont déjà surgi dans un magasin de cannabis de loisirs sont les premiers adoptants - des gens qui ont essayé la marijuana avant. Mais toute la question du marketing est de faire croître une entreprise pour atteindre des personnes qui sont sur la ligne à essayer la marijuana.
"Donc, une partie de la nouvelle image du cannabis est simplement de rendre les dispensaires plus attrayant et plus accueillant», dit-elle.
Mais quand il s'agit de publicité, ce n'est pas aussi simple que d'acheter des annonces sur les télévision ou la radio. Les règles de l'État du Colorado interdisent les commerces de faire de la publicité sur les médias, où plus de 30% de l'auditoire visé est plus jeune que 21ans. Ce genre de données d'audience n'est pas facilement disponible. En cas de contestation, il pourrait être difficile pour les entreprises de la marijuana de prouver que des enfants ne voient pas une annonce particulière.
"Une chose qui est intéressante et importante pour l'industrie est la question de l'exposition aux enfants», explique Margaret Campbell, professeur de marketing à l'Université du Colorado à Boulder. Pour atteindre de nouveaux marchés, dit-elle, l'industrie dans son ensemble a besoin de dépouiller l'utilisateur de sa stigmatisation sur la marijuana.
«[Les entreprises] vont essayer d'aller au-delà de leur "cœur" entre guillemets d'"utilisateur stoner» pour développer et le rendre acceptable dans les cocktails, "dit-elle.
Le propriétaire de la ferme, dit que l'esthétique du magasin est conçu pour plaire aux consommateurs qui achètent des produits organiques cultivés localement.
Perdre la stigmatisation du stoner
Lors d'un récent cocktail dans une galerie dans le quartier des arts de Denver, Amy Dannemiller essaie de faire cela: construire une nouvelle entreprise et retirer le stéréotype du stoner.
La marijuana est vendu pour usage récréatif à Denver. La légalisation du cannabis a déclenché une «ruée verte» d'investissement parmi les capital-risqueurs.
Chaque mois, Dannemiller, qui utilise l'alter ego Jane Ouest lors de la planification des réunions du cannabis, projette des soirées classieuses où les participants apportent leur propre marijuana et payent une taxe de 95 $ pour des hors-d'œuvre chics et un open-bar.
"C'est juste fondamentalement un grand événement social où tout le monde peut apprécier le cannabis comme ils le feraient d'un verre de vin," dit-elle.
Mais même les participants des fêtes disent que, culturellement et juridiquement, la marijuana n'est pas encore identique à un verre de vin - les employeurs peuvent encore effectuer des tests de drogue. Une femme à la fête, par exemple, refuse de donner son nom, disant que son travail pourrait être en cause.
"C'est l'obstacle. Les gens ne peuvent être associées avec elle,» dit-elle. «Tout le monde le fait, mais ils ne peuvent en parler à personne."
C'est un obstacle juridique délicat qui prendra beaucoup plus que de la publicité et de l'image de marque à surmonter.
Le cannabis va-t-il valoir plus que les métaux précieux pour les exploitants de mines canadiens ? Plusieurs compagnies minières locales se sont tournées vers la culture légale de cannabis.
Au Canada, l'utilisation médicale de la marijuana est en effet légale. Mais, depuis le 1er avril, la production personnelle, elle, ne l'est plus. Les industriels doivent donc prendre le relais, mais en se soumettant à des exigences réglementaires strictes, comme le rappelle la presse locale.
Mais comme le relève le Figaro, ce mardi 22 avril, ce qui attire les investisseurs se situe en fait aux Etats-Unis, puisque deux états américains, celui de Washington et le Colorado, en ont légalisé l'utilisation l'année dernière. De plus, la consommation médicale est légale dans vingt autres Etats.
Hausse des cours de bourse
Résultat, le marché explose depuis le début de l'année et pourrait dépasser les 10 milliards de dollars en 2018, contre 1,43 milliard en 2013, selon une étude du cabinet San Francisco ArcView.
Les entreprises minières espèrent faire oublier leurs mauvais résultats dans leur cœur de métier grâce à ce nouveau marché, surmédiatisé outre-Atlantique. Pour l'instant, les cours de bourses des minières converties en productrices de chanvre bondissent systématiquement.
Stratégie de la dernière chance pour les mines canadiennes? Le secteur, crucial pour l'économie du pays, subit la chute des cours de métaux de plein fouet. Le 15 avril, deux mines ont annoncé leur fermeture en Colombie-Britannique, mettant au chômage près de 600 employés.