Alors qu’on croyait Macron finalement opposé à la dépénalisation, comme il l’expliquait (de façon particulièrement confuse) au «Figaro» la semaine dernière, son lieutenant Gérard Collomb a semblé affirmer l’inverse ce matin sur RTL. De fait, comme nous le confirme son porte-parole, Macron est bien en faveur de la dépénalisation… mais préfère employer un autre terme.
Emmanuel Macron à Carpentras, le 17 février. Photo Yohanne Lamoulère pour Libération
On a (enfin) compris ce que veut Emmanuel Macron sur le cannabis
Gérard Collomb l’assure : Macron a une «vision très claire» concernant le cannabis. Problème : il est sans doute le seul à le penser. Invité de la matinale de RTL, Gérard Collomb a tenté d’expliquer à Elizabeth Martichoux le détail de la politique pénale d’Emmanuel Macron concernant la dépénalisation. Et la tâche est loin d’être aisée.
Vidéo: Gérard Collomb, Emmanuel Macron et le cannabis par libération
Que propose Macron ? Expliquant qu’il est «vain de pénaliser systématiquement la consommation de cannabis», le candidat d’En Marche estime dans son livre Révolution qu’on «pourrait tout à fait considérer que le régime des contraventions serait suffisant pour sanctionner ces comportements».
Macron souhaite donc que les forces de l’ordre puissent mettre une amende «immédiate» de 100 euros, qu’il juge «plus dissuasive et efficace» qu’une «réponse pénale plus tardive et théorique» ou que les «peines symboliques» que sont les rappels à la loi, comme il l’expliquait dans une interview au Figaro jeudi 16 février. Entretien dans lequel il expliquait également «ne pas croire à la dépénalisation des "petites doses"». Dépénalisation douce
Les propos ont été largement commentés, y compris dans Libé, comme fumeux voire contradictoires. Macron veut-il, ou pas, dépénaliser ? En fait, la confusion n’est pas le seul fait du candidat : elle tient aussi au fait que tout le monde ne met pas la même chose derrière le terme de «dépénalisation».
Si l’on s’en tient à un sens strict, voire étymologique, on peut estimer que la dépénalisation du cannabis conduirait à lever toute sanction pénale pour la consommation de cannabis, qui ne serait plus considéré comme un délit, un crime, ou une contravention.
En fait, on parle de dépénalisation du cannabis dès que la consommation n’est plus constitutive d’un délit, même si elle reste sanctionnée d’une contravention. Il existe donc plusieurs «degrés» de dépénalisation – et on parle dans ce cas précis de contraventionnalisation –, à ne pas confondre avec la légalisation, où la consommation mais aussi la vente ou la production de cannabis sont autorisées. Passer à une simple amende, comme souhaité le faire Macron, constitue bien une mesure de dépénalisation. «Subtilités»
«Juridiquement, effectivement, c’est bien une dépénalisation» que propose Macron, dit d’ailleurs son porte-parole, Benjamin Griveaux. «Mais on a préféré parler de contraventionnalisation, pour qu’on comprenne bien, parce que tout le monde n’a pas forcément en tête toutes les subtilités dépénalisation/légalisation», explique-t-il à Libération. Mais pourquoi alors Macron a-t-il affirmé «ne pas croire à la dépénalisation» au Figaro la semaine dernière ? Une confusion, argue Griveaux : «En fait, il ne croit pas à la légalisation. C’est ça, son propos.»
A la décharge de Macron, on peut noter que, pour appuyer sa proposition, il se base sur un rapport remis par la Mission interministérielle de la lutte contre les drogues et les conduites addictives en 2016. Or celui-ci estimait que l’option de la contraventionnalisation avec une amende forfaitaire sans suite pénale était la meilleure piste, mais n’utilisait pour autant jamais le terme de «dépénalisation».
Reste que la mise en place octobre 2015 de la transaction pénale permet déjà, en théorie, aux policiers de faire payer directement une amende en cas de petit délit pour éviter un passage devant un tribunal. En théorie, puisque la procédure, jugée trop lourde, n’est que très peu voire pas du tout utilisée. Par Vincent Coquaz photo Yohanne Lamoulère
« C'est parce que je pense qu'il est dangereux de se droguer qu'il faut légaliser ». Cette phrase paradoxale émane d'un candidat à l'élection présidentielle : Benoît Hamon.
En déplacement au Portugal, qui a décriminalisé l'usage du cannabis, le candidat socialiste a réitéré son souhait de légaliser le cannabis, interdit depuis la loi de 1970. C’est l'occasion de se demander si la dépénalisation de l’usage du cannabis est inéluctable en France, première consommatrice en Europe...
Pourquoi légaliser un produit considéré comme dangereux en terme de santé publique ? Quels sont les effets sur l'organisme de la prise de cannabis ? Son impact psychologique. Quels sont les éventuels bienfaits d’un usage thérapeutique du cannabis ? Nous avons demandé à deux psychiatres addictologues de nous éclairer sur tous ces sujets. Etes-vous ou non favorable à la dépénalisation de la consommation ?
avec le point de vue de deux addictologues :
Pr Amine Benyamina, psychiatre et addictologue, responsable du centre d’addictologie de l’hôpital Paul Brousse à Villejuif.
Dr Laurent Karila psychiatre, médecin à l'hôpital Paul-Brousse, spécialisé dans l'addictologie et porte-parole de l'association SOS Addictions.
Oui, vous avez bien lu. Les 10,11 et 12 mars, la Fira de Cornellà accueillera le Spannabis à l’occasion de sa 14ème édition. Une fête du cannabis qui promet d’en faire voir de toutes les couleurs et surtout des vertes.
Au programme de ce week-end, les participants pourront assister à des expositions et des conférences avec la présence de spécialistes du cannabis. 230 stands au total, c’est le minimum pour recevoir le festival du cannabis pendant trois jours. Les visiteurs profiteront du cadre de la Fira pour arpenter les stands, tout en écoutant les artistes reggae du moment venus des quatre coins du monde.
Une nouveauté s’invite cette année puisque c’est également la 3ème édition du World Cannabis Conferences. Aux stands habituels réservés à l’utilisation du cannabis seront donc ajoutées des conférences. Des personnalités scientifiques, médicales et politiques seront présentes pour débattre autour des effets de cette herbe.
A travers, entre autres, la diffusion d’oeuvres audiovisuelles, les professionnels expliqueront les dimensions et l’évolution du cannabis. 15 artistes sont également prévus et répartis sur les trois jours. Parmi eux, le festival reçoit Little Pepe, Zoro et DreamTrip. Pour ceux qui ne seraient pas là le week-end du 10 mars, le Spannabis sera aussi à Madrid, les 13,14 et 15 octobre.
Informations pratiques
Dates: les 10,11 et 12 mars
Horaires: de 11h à 20h30 et le dimanche de 11h à 20h
Prix: Entre 18€ et 43€ pour les 3 jours
– Entrée exclusivement réservée aux personnes de + de 18 ans
– Interdiction de fumer à l’intérieur de l’établissement
Site officiel du Spannabis
Adresse: Fira de Cornellà, Carrer Tirso de Molina, 34, 08940 Cornellà de Llobregat
Par Lauriane Huguet Journaliste et chroniqueuse Equinox Radio Barcelone
La légalisation du cannabis est imminente au Canada, mais les effets de cette drogue au volant ne sont pas toujours bien connus. À quel point le cannabis nuit-il aux facultés de conduite? Quelle devrait être la limite permise? Et surtout, comment débusquer les conducteurs intoxiqués?
Une personne s’allume un joint de marijuana. Photo : Radio-Canada/Nicolas St-Germain
Le cannabis est prisé pour son effet euphorisant et relaxant, mais la molécule responsable de ces sensations – le tétrahydrocannabinol ou THC – affaiblit aussi des facultés cognitives, soit la concentration, l’attention, la mémoire, la coordination et la perception du temps.
Ces facultés sont toutes essentielles à la conduite automobile. Plus la concentration de THC est élevée, plus ces effets seront importants.
Des recherches démontrent que la concentration de THC dans le cannabis a doublé depuis les 30 dernières années. La marijuana, soit les fleurs séchées de cannabis, contient aujourd’hui en moyenne 15 % de THC, tandis que le haschisch — soit la résine provenant des fleurs — en contient environ 30 %. Certains produits plus concentrés peuvent même contenir jusqu’à 90 % de THC.
Par contre, un autre cannabinoïde connu sous le nom de cannabidiol, ou CBD, a la propriété d’atténuer les effets du THC. En raison de ses propriétés anti-inflammatoires, il se retrouve en concentration élevée dans le cannabis médicinal. Mais comme il ne procure pas d’euphorie, on en trouve rarement dans le cannabis récréatif.
Une conduite au ralenti
Les Pays-Bas ont une longue expérience avec le cannabis au volant. La substance n’y est pas officiellement légale, par contre sa consommation est tolérée depuis plus de 40 ans.
À l’Université de Maastricht, le psychopharmacologue Johannes Ramaekers étudie la conduite avec les facultés affaiblies depuis plus de 30 ans.
Johannes Ramaekers, psychopharmacologue à l’Université de Maastricht, aux Pays-Bas Photo : Radio-Canada/Nicolas St-Germain
Dans le cadre de ses recherches, les participants consomment du cannabis ou de l’alcool, ou les deux à la fois, avant d’effectuer un test de conduite sur une autoroute, dans des conditions réelles. Un instructeur de conduite, assis du côté passager, est prêt à freiner en cas d’urgence.
Tout au long du test, une caméra installée sur le toit enregistre la position de la voiture par rapport à la ligne blanche au centre de la route. « Cela nous permet de calculer la déviation de la voiture sur une période de temps donnée, explique Johannes Ramaekers. Ce mouvement est une bonne indication du niveau de contrôle que le conducteur a sur son véhicule pendant un long trajet. »
Le chercheur Johannes Ramaekers utilise une voiture équipée d’une caméra sur le toit. Photo : Radio-Canada/Nicolas St-Germain
Les participants sont également soumis à des tests informatisés en laboratoire pour mesurer certaines facultés cognitives, comme leur attention, leur prise de décision et leur impulsivité.
Le constat de Johannes Ramaekers : l’effet du cannabis sur la conduite automobile est différent de l’effet de l’alcool. « Les deux substances nuisent à la performance au volant et aux facultés telles que l’attention, le contrôle moteur et la prise de décision.
Mais l’alcool augmente aussi la prise de risque. Je crois que c’est pour cela que les gens prennent le volant même lorsqu’ils sont complètement ivres. Ils sont prêts à prendre ce risque. Ils perdent leurs inhibitions. »
Sous l’effet du cannabis, au contraire, les conducteurs sont conscients de leurs limites, ils conduisent plus lentement, et ils tentent d’être plus prudents. Mais cela ne les rend pas moins dangereux, insiste le psychopharmacologue.
Un des plus grands mythes à ce sujet est que les conducteurs sous l’effet du cannabis ne sont pas dangereux sur la route, car ils savent que leurs facultés sont affaiblies et ils s’adaptent. C’est vrai qu’ils sont conscients de leur état et qu’ils essaient de compenser, mais ils échouent. Ils demeurent intoxiqués.
Johannes Ramaekers, psychopharmacologue, Université de Maastricht
Les conducteurs qui ont consommé du cannabis réagissent plus lentement en cas d’imprévu et sont moins attentifs à leur environnement. Ils ont aussi plus de difficulté à rouler en ligne droite que les conducteurs qui ont consommé de l’alcool.
Les tests de salive à l’étude
Plusieurs pays européens, dont la Belgique, utilisent des tests de salive pour détecter la présence de THC chez les conducteurs. Le plus populaire d’entre eux est le DrugWipe, de la compagnie allemande Securetec. Il permet aux policiers de recueillir un échantillon de salive, au moyen d’une languette, et au bout de quelques minutes, une ligne rouge apparaît si le résultat est positif.
Un policier belge tient un test de dépistage de drogues dans la salive. Photo : Radio-Canada/Nicolas St-Germain
Le médecin Alain Verstraete, chercheur à l’Université de Gand en Belgique, a mené des études sur l’efficacité de ces instruments. « Le grand avantage de ce dispositif, c’est que la prise d’échantillons se fait très, très rapidement. Et c’est pour ça que la police aime bien utiliser ce dispositif », souligne-t-il.
Le médecin Alain Verstraete, chercheur en toxicologie à l’Université de Gand en Belgique. Photo : Radio-Canada/Nicolas St-Germain
Le Canada évalue présentement l’efficacité du DrugWipe, ainsi que d'un dispositif de la compagnie Alere, qui fonctionne selon un principe similaire.
Comment connaître le niveau d’intoxication?
Le niveau d’intoxication d’un conducteur dépend de la quantité de drogue ou d’alcool dans son cerveau.
Pour l’alcool, la détection est simple. « L’alcool est une molécule qui est soluble dans l’eau, explique le Dr Verstraete. Elle va se diffuser dans toute l’eau qu’il y a dans l’organisme, donc ce sera une distribution uniforme dans tout le corps. »
Pour cette raison, en mesurant la concentration d’alcool dans l’haleine à l’aide d’un éthylomètre, on peut en déduire la concentration d’alcool dans le sang, et par le fait même, dans le cerveau.
La détection de THC est beaucoup plus complexe que celle de l’alcool. Les tests de salive indiquent si la substance a été consommée dans les heures précédentes, mais ne permettent pas de connaître la concentration de THC dans le corps.
Pour cette raison, les policiers doivent emmener les automobilistes suspects à l’hôpital pour subir des analyses sanguines.
Un autre obstacle se pose alors. Contrairement à l’alcool, le THC s’élimine rapidement du sang et s’accumule plutôt dans les zones du corps riches en graisses, comme le cerveau. « Les effets maximaux du cannabis, on les voit quand la concentration est déjà [en train de] baisser dans le sang », souligne le médecin.
Quand on fait un contrôle au bord de la route, c’est important de ne pas perdre trop de temps entre le moment où il y a eu l’accident, ou le moment où l’on a arrêté le conducteur, et la prise de sang, parce que chaque heure, la concentration va diminuer de moitié.
Dr Alain Verstraete, chercheur en toxicologie à l’Université de Gand
Ainsi, après quelques heures, le THC a presque entièrement disparu du sang, mais il est toujours présent dans le cerveau et le conducteur est toujours sous l’effet de la drogue.
Pour que les analyses sanguines soient fiables, les experts estiment qu’elles doivent être faites moins de deux heures après la consommation.
Fixer une limite
Un policier de Portland, en Oregon, effectue un test de sobriété. Photo : Pond5/night_stringers
Certaines études indiquent qu’une concentration de 5 nanogrammes de THC par millilitre de sang (ng/ml) pose un risque d’accident comparable à une alcoolémie de 0,08 %.
Les premiers États américains à avoir légalisé le cannabis, soit le Colorado et l’État de Washington, ont d’ailleurs fixé leur limite légale de THC à 5 ng/ml. Le Nevada a cependant adopté une limite plus basse, soit 2 ng/ml.
« Même une toute petite quantité de cannabis peut déjà vous amener à cette limite-là, souligne le Dr Verstraete. Il y a par exemple une étude qui a montré que de tirer une fois sur un joint, ça donne une concentration maximale entre 7 et 18 nanogrammes par millilitre. »
D’autres États américains, comme l’Oregon et l’Alaska, ne fixent quant à eux aucune limite légale et évaluent plutôt l’intoxication à partir de signes physiques, comme le mouvement des yeux ou l’équilibre.
Probablement qu’un joint ou même un demi-joint peut déjà doubler les risques d’accident, certainement chez une personne qui n’a pas l’habitude de fumer du cannabis.
Dr Alain Verstraete, chercheur en toxicologie à l’Université de Gand
Lorsqu’un joint entier est consommé, il faut donc attendre plusieurs heures avant de prendre la route.
Si l’on inhale le cannabis, par exemple en le fumant, les effets se font sentir dès les premières minutes et ils s’estompent au bout de quatre heures. Mais si on l’ingère, par exemple sous forme de gâteaux, les effets prennent parfois une heure avant de se manifester et ils peuvent durer plus de huit heures.
Des joints de cannabis et des gâteaux à base de cannabis, dans un « coffee shop » d’Amsterdam. Photo : Radio-Canada/Nicolas St-Germain
Cependant, pour ceux qui consomment du cannabis de manière quotidienne, l’intoxication dure encore plus longtemps, car le THC s’accumule dans les graisses du corps et continue de se libérer durant les jours suivant la consommation. « Il y a certaines études qui montrent que des gens qui ont beaucoup consommé et qui arrêtent ont encore des effets après 28 jours », souligne le Dr Alain Verstraete.
Si vous fumez quotidiennement, plusieurs fois par jour, vous êtes dans un état constant d’intoxication au cannabis.
Johannes Ramaekers, psychopharmacologue, Université de Maastricht
Comme plusieurs experts, Johannes Ramaekers considère que ceux qui consomment du cannabis quotidiennement ne devraient jamais prendre le volant.
Derrick Bergman, militant pour la légalisation du cannabis aux Pays-Bas Photo : Radio-Canada/Nicolas St-Germain
C’est d’ailleurs la décision qu’a prise le militant pour la légalisation du cannabis Derrick Bergman. « Personnellement, je n’ai pas de permis de conduire, je fais tout en transport en commun, à vélo, ou bien j’embarque avec d’autres personnes, confie-t-il. Si vous commencez à fumer, ne combinez pas ça à la conduite. Trouvez un autre moyen de transport. »
Alors que plusieurs candidats à l’élection présidentielle se sont prononcés en faveur de la légalisation du cannabis, la question plus large de la politique à mener en matière de conduites addictives – qu’il s’agisse d’usage d’alcool, de tabac, de drogues qualifiées de "dures" ou encore d’addictions sans produit – reste encore largement absente ou traitée superficiellement. Pourtant, l’enjeu en termes de santé publique ne peut plus être ignoré.
La politique à mener en matière de conduites addictives reste encore largement absente ou traitée superficiellement. / sakura/Fotolia
Un coût annuel de 249 milliards pour la société
La consommation de drogues, licites et illicites, est à l’origine, chaque année en France, de près de 130 000 décès prématurés (79 000 liés au tabac, 49 000 à l’alcool et 1 600 aux drogues illicites).
Le tabac, avec 13 millions de fumeurs quotidiens dont 30 % des adolescents, est ainsi la première cause de mortalité évitable, l’alcool étant la seconde. Si la consommation moyenne d’alcool baisse depuis 50 ans, on observe une augmentation préoccupante des ivresses alcooliques chez les jeunes (au moins 3 par an pour 30 % des 18-25 ans).
À lire : Primaire PS, la légalisation du cannabis au centre du débat
Cette hécatombe a un coût pour la société estimé à près de 249 milliards d’euros par an – dont 122 milliards pour le tabac et 118 milliards pour l’alcool – répartis entre la prise en charge des soins, le coût de la prévention et de la répression, la perte de production pour les entreprises et les administrations (arrêts maladies, accidents du travail) ou encore la valeur des vies humaines perdues (1).
Le paradoxe de la politique actuelle
Trop souvent, on entend dire que les drogues légales rapporteraient plus qu’elles ne coûtent. Une simple analyse des chiffres montre que c’est faux. Chaque année, le tabac et l’alcool rapportent 13,6 milliards d’euros de taxes à l’État (respectivement 10,4 et 3,2 milliards d’euros). Or L’État doit, dans le même temps, débourser plus de 33 milliards d’euros pour couvrir le coût des soins engendrés par des maladies liées au tabac et à l’alcool (respectivement 25,9 et 7,7 milliards d’euros). La taxation sur les alcools ne représente ainsi que 37 % du coût des soins tandis que les taxes sur le tabac n’en couvrent que 40 % (2).
Déni de réalité face au coût social des drogues licites, aveuglement idéologique sur le sujet des drogues illicites, c’est tout le paradoxe de la politique actuelle. On compte aujourd’hui 1,4 million de consommateurs réguliers de cannabis et un niveau d’usage chez les 16 ans largement supérieur à 15 %, le plus élevé d’Europe. Et pourtant, la France est l’un des pays qui a la politique la plus répressive en la matière.
Symptomatique d’une politique du chiffre, la répression touche d’abord les simples consommateurs (120 000 interpellations pour usage simple contre 15 000 interpellations pour usage-vente ou trafic en 2010 – derniers chiffres connus), pour un coût estimé à plus de 300 millions d’euros. À cela, s’ajoute la question préoccupante de la qualité des produits en circulation sans contrôle sur leur composition, avec une concentration croissante en THC et l’ajout d’adjuvants divers, augmentant d’autant les risques pour la santé.
Aborder d’une manière cohérente l’ensemble des conduites addictives
Il est temps d’admettre qu’il n’y a pas de société sans drogue et que la politique actuelle est un échec.Finissons-en avec les représentations et les partis pris idéologiques qui ne font que nier le problème et retarder l’adoption de mesures de prévention et de réduction des dommages réellement efficaces !
Osons aborder d’une manière cohérente l’ensemble des conduites addictives, qu’il s’agisse de l’alcool, du tabac, des jeux de hasard et d’argent ou encore du cannabis !
Afin de peser dans ce débat, l’ANPAA a développé 5 propositions à l’occasion de l’élection présidentielle. Basées sur des constats simples et des données chiffrées objectives, ces propositions invitent à la mise en œuvre d’une politique au bénéfice tant de la santé publique que de la sécurité publique et de la réduction des coûts pour l’ensemble de la collectivité :
1 – Adopter un programme interministériel ambitieux sous l’égide du ministère de la Santé avec, notamment, la mise en œuvre d’un plan national de réduction du risque alcool, la poursuite du programme national de réduction du tabagisme ainsi que le développement de l’offre en matière de réduction des risques et des dommages auprès des usagers de drogues ;
2 – Organiser un débat public sur la légalisation du cannabis fondé sur une appréhension objective des données ;
3 – Réduire la consommation d’alcool chez les jeunes en instaurant un prix minimum de l’alcool ;
4 – Assurer l’information des consommateurs sur les boissons alcoolisées (composition et apport calorique, teneur en sulfites et en résidus de pesticides, pictogramme femmes enceintes plus visible) ;
5 – Renforcer la prévention et l’éducation à la santé à tous les âges, dans tous les contextes et sur tous les territoires, et lutter ainsi contre les inégalités d’accès à la prévention.
Ces propositions ont été envoyées à l’ensemble des candidats à l’élection présidentielle. Nous voulons croire qu’ils saisiront l’urgence et qu’ils se montreront prêts à apporter des réponses à la hauteur des enjeux.
Par Dr. Alain Rigaud, président de l’Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie* et Dr. Bernard Basset, vice-Président de l’ANPAA.
(*) L’Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie est un acteur majeur du secteur français de l’addictologie avec plus de 90 établissements et équipes de prévention, de soins et d’accompagnement sur l’ensemble du territoire national. Notre domaine d’action couvre l’ensemble des produits, activités et conduites addictives : usage, usage détourné et mésusage d’alcool, tabac, drogues illicites et médicaments psychotropes, pratiques de jeu excessif et autres addictions sans produit.
(1) Le coût social des drogues en France, de Pierre Kopp, OFDT 2015.
(2) Idem.
Le candidat socialiste à la présidentielle Benoît Hamon a évoqué samedi à Lisbonne la dépénalisation du cannabis, appliquée avec succès au Portugal depuis le début des années 2000, même s'il souhaite sauter le pas de la légalisation.
Benoît Hamon (D) et João Goulão, directeur de la Sicad, à Lisbonne au Portugal, le 18 février 2017 (AFP/FRANCISCO LEONG)
"La légalisation du cannabis est un moyen de tuer les trafics, plutôt que les trafics tuent", a déclaré M. Hamon à l'issue d'une rencontre d'environ une heure avec João Goulão, directeur de l'organisme qui chapeaute l'opération, la Sicad.
Se disant "déterminé sur ce sujet", mais aussi respectueux et prudent, M. Hamon a expliqué que "cela supposera un travail spécifique, auquel le ministère de la Santé devra se consacrer" et qu'il ne se lancerait pas dans le processus "la fleur au fusil".
"C'est bien de dire moralement +non+. Mais encore ? On laisse notre jeunesse en contact avec des dealers qui peuvent leur vendre des drogues dures, dans un système qui ne protège pas, mais qui impose", a-t-il détaillé.
Le candidat prône, comme l'a fait le Portugal, une politique d'accompagnement doublée d'un gros effort de prévention.
"Ce n'est pas en 2018 qu'on aura des débits de cannabis partout sur le territoire", s'est-il amusé en mimant un claquement de doigts.
Le Portugal a choisi en 2001 de décriminaliser aussi les drogues dures en raison d'une très forte consommation - notamment d'héroïne - qui concernait alors jusqu'à 1% de la population. Concrètement, a expliqué M. Goulão, l'usage n'est plus illégal et les consommateurs disposent de possibilités de prise en charge, médicale, ou sociale et psychologique.
Outre une division par deux des consommateurs d'héroïne, le Portugal compte aujourd'hui selon cet ancien médecin, devenu une référence sur la question dans le pays, seulement quelque 5.000 personnes hors du système de prise en charge. Soulignant l'unanimité politique, il s'est félicité que ce soit le fruit d'une "politique d'État, davantage qu'une politique de gouvernement".
"La légalisation du cannabis, c'est un État qui dit : +nous avons un problème de santé publique, avec une augmentation de la consommation, notamment chez les jeunes, il faut une prise en charge plus forte et libérer les forces de police pour des tâches plus importantes+", a argumenté l'ancien ministre de l'Éducation, qui n'envisage pas d'étendre sa proposition à l'ensemble des drogues.
"C'est parce que je pense qu'il est dangereux de se droguer qu'il faut légaliser", a-t-il ajouté.
Interrogé sur les débats pendant la primaire autour de cette question, M. Hamon a rappelé qu'il l'avait "emporté avec près de 60% des voix". "Maintenant, je suis dans la présidentielle, je veux me projeter vers l'avant, ce qui m'importe aujourd'hui, c'est de parler aux Français, pas aux dirigeants du Parti socialiste", s'est-il agacé.
En novembre, le candidat d'En Marche était pourtant favorable à la dépénalisation de la détention en petite quantité.
Philippe Wojazer / Reuters
Emmanuel Macron est finalement hostile à la dépénalisation du cannabis.
POLITIQUE - Il a longtemps cherché sa réponse. "Je crois que la légalisation a une forme d'efficacité", disait Emmanuel Macron en septembre 2016 à propos du cannabis. Dans son livre Révolution sorti deux mois plus tard, il se disait favorable à la dépénalisation de la détention en petite quantité du cannabis afin de désengorger les tribunaux.
Mais voilà, à l'approche de la présidentielle et alors qu'il doit dévoiler samedi 18 février ses propositions en matière de sécurité lors d'un meeting à Toulon, le candidat d'En Marche fait un revirement à 180 degrés. Il n'est plus question pour lui de toucher à la loi sur la question.
Dans un entretien au Figaro, l'ancien ministre de l'Economie plaide pour la "tolérance zéro" pour la délinquance "du quotidien". Cela concerne aussi les stupéfiants: "Je ne crois pas à la dépénalisation des 'petites doses' ni aux peines symboliques. Cela ne change rien", affirme Emmanuel Macron.
Sur Twitter, son porte-parole Arnaud Leroy sème pourtant le doute. Répondant à un journaliste qui évoque un revirement d'Emmanuel Macron, le député affirme que le candidat propose de passer du délit à la contravention. En clair, tous les consommateurs pris risquerait une amende au lieu d'un passage devant le tribunal correctionnel. Pour tous les spécialistes, ce passage est pourtant analysé comme une dépénalisation.
Un sondage Ipsos dévoilé en octobre montrait que 84% des Français trouvent la législation actuelle inefficace. Une courte majorité des personnes interrogées se prononçait même pour une autorisation de consommer pour les majeurs, autrement dit pour la légalisation.
Jean Marie Le Guen souhaite, lui aussi, un débat sur la prohibition du cannabis. Médecin de profession, il milite désormais pour une législation contrôlée de la drogue la plus consommée dans l’hexagone.
Jean Marie Le Guen
Invité par nos confrères de « BFM TV », le secrétaire d’Etat aux Relations avec le Parlement estime que la prohibition du cannabis doit être discutée. Pour lui : « La prohibition n’amène pas la diminution de la consommation. Notre pays est l’un de ceux qui consomment le plus dans la jeunesse« . Un avis partagé par de plus en plus de ténors du parti socialiste mais aussi par de nombreux politiques de gauche.
Se battre contre la consommation de cannabis chez les jeunes
Le secrétaire d’Etat estime qu’il « faut réfléchir aux meilleures politiques publiques. Il faut discuter des modalités. Moi, je ne veux pas arriver avec une solution toute faite. Je dis que la situation actuelle ne marche pas, que ce soit au niveau des trafics et de la culture de ‘gangsterrorisation’ en quelque sorte que cela crée. Je pense qu’il faut peut-être aller vers des mécanismes de légalisation contrôlée mais surtout avec des politiques d’éducation et de santé publique« .
L’ancien médecin précise : « Je suis un homme de santé publique. Je me suis toujours battu contre la consommation d’alcool, de tabac, et je me battrai toujours contre la consommation de cannabis chez les jeunes. Mais la prohibition n’est pas efficace. Il faut armer les jeunes pour véritablement les convaincre, il faut pouvoir leur tendre la main pour qu’ils ne restent pas dans cette consommation qui est dangereuse. C’est donc une approche sanitaire que je propose, et non pas une approche morale ou juridique« .
Dire enfin la vérité
Jean Marie le Guen n’a pas mâché ses mots et « propose que le Parti socialiste dise enfin la vérité, propose une vérité. L’interdit moral ne crée rien du tout, il crée beaucoup de dégâts dans la société française« .
Pour le secrétaire d’Etat, la solution passerait par une levée sélective des interdits pour les adultes de plus de 21 ans et ce dans un cadre privé et une législation contrôlée. Aux fervents défenseurs de la pénalisation de la consommation de cannabis, il les somme d’expliquer pourquoi les mesures appliquées depuis trois décennies ne fonctionnent pas. Un tel débat sera cependant difficile à concrétiser tant le sujet reste tabou.
Dimanche 12 février, la police arrête à Siliana Mohamed Amine Hammami et Dhia Jalladine, deux futurs bacheliers, pour délit de consommation de cannabis
Les 2 élèves de Siliana, Dhia et Med Amine,
arrêtés, dimanche 12 février 2017, pour consommation de cannabis, resteront en détention.
La demande de libération des 2 élèves de 18 ans, en terminale au lycée Mongi Slim, présentée par leur comité de défense composé de 10 avocats, a été refusé par le juge, qui a décidé de les maintenir en détention et reporté le verdict pour jeudi prochain.
Une forte mobilisation des élèves, enseignants et activistes de la société civile a été organisée en faveur des 2 jeunes hommes, arrêtés à quelques mois du passage de l’examen du baccalauréat.
Des appels à leur libération avaient été lancés, aujourd’hui, lors d’un rassemblement, devant le tribunal de Siliana. La société civile estime qu’une erreur de jeunesse ne doit pas détruire l’avenir des jeunes et que la loi 52 ne doit plus être appliquée pour les primo-consommateurs de cannabis, car elle est jugée très répressive: elle ne fait pas la différence entre consommateurs et détenteurs pour lesquels elle prévoit une peine d’emprisonnement de 1 à 5 ans et une amende de 1000 à 3000 dinars.
infographie@
nawaat.org
Notons qu’un projet d’amendement de ce texte est débattu, actuellement, à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), qui vise notamment à épargner la prison aux consommateurs qui acceptent de se faire soigner.
Y. N
Le président du Pérou veut légaliser le cannabis médical
Le président du Pérou a présenté à la législature du pays un projet de loi qui légaliserait le cannabis à des fins médicinales. Un projet qui donnerait l’accès médical (à la marijuana) pour certains cas particuliers. Mais le Président n’a pas toutes les voix nécessaire pour l’instant. Le pays croule sous la division politique, le combat pour la légalisation ne fait que commencer.
Proposition du Pérou
Le projet de loi présenté par le gouvernement du président Pedro Pablo Kuczynski permettrait l’utilisation légale du cannabis médical dans le traitement des «maladies graves et terminales». Toutefois, la mesure stipule que l’usage récréatif du cannabis – sans parler du trafic de la substance – resterait interdit.
Un gouvernement divisé
Les perspectives pour le passage du projet de loi ne sont pas claires. Ainsi, le Congrès du pays est dirigé par le parti d’opposition conservateur le Fuerza Popular (Force Populaire), dirigé par la principale rivale politique au président, Keiko Fujimori. Le parti détient un 72 des 130 sièges au Congrès du pays, assez pour bloquer l’une des initiatives législatives du président.
Fuerza Popular opposé à la marijuana médicale
Fujimori critique les propositions de gauche, comme celles entourant le mariage homosexuel. Ainsi que l’adoption par les couples homosexuels etc… Comme si cela n’était pas suffisant, ces derniers mois ont vu une rupture des communications entre les deux parties sur l’éviction de la Fuerza Popular du ministre de l’éducation. Ceci conduit donc à une instabilité politique et un avenir incertain pour des initiatives telles que le cannabis médical légalisé…
La descente
Le président Kuczynski a affirmé ne pas être parvenu à la décision de soumettre le cannabis par accident. Il dit qu’il a été inspiré à rédiger la loi après une opération contre le cannabis qui a été perquisitionné dans la capitale du pays, Lima.
Culture associative considérée comme illégale au Pérou
Les cultivateurs n’étaient pas des trafiquants de drogues stéréotypés. En effet, ils se sont révélés être des parents, qui prétendaient que leur but était de fabriquer de l’huile de cannabis pour soigner leurs enfants malades, dont l’un souffrait d’épilepsie…
Parmi le groupe de parents, une femme nommée Aida Farfan, qui prétend que les enfants malades de 80 personnes qui sont membres du groupe de « cannabis-growing ». Et qui ont accessoirement bénéficié de la culture… Elle a également prétendu avoir essayé pendant des années de plier l’oreille des législateurs sur la question. Mais ses efforts sont passer inaperçus…
Commerce de drogue au Pérou
Il y a quatre ans, la nation sud-américaine fabriquait et distribuait plus de cocaïne chaque année – 325 tonnes – que n’importe quel autre pays de la planète… Au total, les syndicats du crime organisé du pays tirent plus de 1 milliard de dollars de ventes annuelles.
Prise standard de cocaïne au pérou…
Le problème ne semble que s’aggraver, avec la corruption endémique. En effet, la production de cocaïne du pays atteint des niveaux aussi stupéfiants que la dépénalisation de la substance…
Le Pérou embourbé dans la culture de la Coca
C’est sans doute avec cette arrière pensée que le Président du Pérou, veut en finir avec les cartels, et passer à quelque chose de plus … médical ^^
by Mist_eGreen