C'est la constatation de Patrick Bonvoisin, président de la chambre syndicale des buralistes du département
C'est une forme d'hypocrisie. La vente de cannabis est illégale, mais il se vend dans les tabacs un véritable arsenal de produits et de gadgets destinés à sa consommation. Dans la vitrine de "La Maison du fumeur", un débit de tabac avignonnais, on trouve une foule de bong (sorte de narguilé spécial cannabis), de feuilles longues aromatisées aux fruits, de "pipes à shit" ou encore de joints XXL déjà roulés (il n'y a plus qu'à le remplir... à droite sur la photo ci-dessous).
"Et on en vend de plus en plus" note sans tabou Patrice Bonvoisin, président de la chambre syndicale des buralistes de Vaucluse. "Imaginez qu'on vend 100 paquets de 32 feuilles longues chaque jour rien que dans notre magasin : faites le calcul du nombre de joints que cela représente! Aujourd'hui, les mentalités ont évolué. On se rend compte dans notre métier que c'est M.Toulemonde qui fume, la fumette du samedi soir s'est banalisée."
Et le buraliste de raconter une anectote éloquente: "Il y a quelques années lors d'un séminaire national des buralistes, aucun n'était d'accord pour vendre du cannabis en cas de légalisation. Cette année, lors du même vote, on était 98% à se dire prêt à le faire! Même s'il y avait un problème de conscience, je le ferais. Si ce n'est pas nous qui le vendons, d'autres s'en chargent."
Comme à "La maison du fumeur" de Patrick Bonvoisin, on trouve désormais chez les débitants de tabac, toute l’attirail du parfait consommateur de cannabis.
65 000 Vauclusiens veulent "sauver" leurs buralistes
Les Vauclusiens sont attachés à leurs buralistes. La preuve ? C'est dans le département que le plus gros pourcentage de la population a signé la pétition nationale lancée en janvier "Mon buraliste est menacé : je soutiens mon buraliste". Elle vient d'être remise aux parlementaires accompagnée de trois revendications : pas de nouvelle hausse du prix du tabac, pas de paquet générique (tout blanc avec la marque en petit) ni d'interdiction des linéaires (exposition des paquets derrière la caisse), et davantage de soutien face à l'insécurité.
Plus de 4 millions de signatures ont été récoltées et 65 000 dans le Vaucluse dont 1 000 dans "La Maison du fumeur", le débit de tabac avignonnais de Patrick Bonvoisin, président de la chambre syndicale des buralistes de Vaucluse. Ce dernier déplore les coups successifs portés à la profession.
Deux fermetures en 2012
Un exemple : lorsqu'il a commencé, il y a plus de 40 ans, le paquet de Marlobro coûtait 4,60 francs, aujourd'hui, il faut débourser 6,60 euros pour les mêmes cigarettes, en attendant une nouvelle augmentation prévue cet été. "Sur ce montant, à peine plus de 0,40 centime va réellement dans notre poche" grince Patrick Bonvoisin. Il assure que si la hausse du prix compense la baisse des ventes, le chiffre d'affaires global des buralistes en prend un coup. "Moins de cigarettes vendues cela veut dire moins de gens qui entrent dans la boutique et donc moins de clients pour les journaux, les chewing-gums, etc."
Moins de cigarettes vendues, mais pas moins de fumeurs pour autant, d'après le président de la chambre syndicale. "Les gens achètent des cartouches en Espagne, dans la rue, ou à leurs collègues de bureau, explique-t-il. Des cars partent tous les dimanches du Vaucluse pour les supermarchés de la frontière espagnole, comment peut-on lutter ?" Malgré tout, les buralistes vauclusiens résistent mieux que leurs collègues des départements frontaliers.
Seuls deux bureaux de tabac ont fermé en 2012 sur les 220 que compte le Vaucluse. Un moindre mal quand on sait que 10 000 ont disparu dans le pays ces dix dernières années. Largement de quoi tirer la sonnette d'alarme.
Romain Fauvet
Source: La Provence