STUPEFIANTS Quatre ministres présentaient ce mardi à Marseille le plan antistupéfiant du gouvernement, mais il ne devrait pas révolutionner la lutte contre les trafics à Marseille
- Parmi les mesures annoncées lors de la présentation du plan antidrogue, certaines sont déjà testées à Marseille depuis 2015.
- Pour de nombreux observateurs de cette problématique des trafics, la méthode du tout répressif n’est pas efficace pour combattre ce fléau.
Un plan national de lutte contre les stupéfiants annoncé à Marseille, mais qui ne devrait pas changer grand-chose localement. Le gouvernement a sorti l’artillerie lourde ce mardi matin pour présenter son plan antidrogue, avec la présence dans la deuxième ville de France du ministre de l’Intérieur Christophe Castaner, de son secrétaire d’Etat et ancien préfet de police des Bouches-du-Rhône Laurent Nunez, de la ministre de la Justice Nicole Belloubet, et du ministre des Comptes publics Gérald Darmanin.
Suppression de l’Octris (Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants) au profit de l’Ofast (Office antistupéfiant) « sur le modèle de la DGSI en matière de lutte contre le terrorisme », développement des cellules du renseignement opérationnel sur les stupéfiants (CROSS), création d’une plateforme d’appel pour signaler les points de vente, ou encore mise en place d’une amende de 200 euros pour tous consommateurs de produits stupéfiants en 2020 font partie des 55 mesures annoncées par les ministres.
« Marseille, laboratoire de la lutte contre les stup' »
Alors que trois règlements de comptes en trois semaines viennent de s’ajouter aux six personnes déjà tuées dans les Bouches-du-Rhône depuis le début de l’année en lien avec des trafics de stupéfiants, aucune des annonces ne semble pouvoir inverser la tendance à Marseille. Les CROSS y sont déjà expérimentés depuis 2015, à travers la méthode dite du « pilotage renforcé », où différents services de police, de gendarmerie ou de douanes, collaborent. « Marseille est un laboratoire des initiatives pour la lutte contre les stupéfiants », a d’ailleurs souligné Christophe Castaner.
Avec des résultats statistiques probants puisque en 2018, 68 réseaux ont été démantelés, contre 18 en 2015. Le nombre de personnes écrouées a bondi de 71 à 177 sur la même période, quand les saisies de cannabis sont passées de 147 kg en 2015 à plus de 4.500 kg en 2018.
« On a tout essayé »
Mais les statistiques ne traduisent pas toujours la réalité, et pour beaucoup de points de deal démantelés, une guerre de succession s’engage, quand la police estime leur nombre à plus de 110 rien qu’à Marseille. Malgré cette politique du tout répressif, dénoncée par un avocat pénaliste du barreau de Marseille, la situation ne semble pas s’améliorer : « On a tout essayé, notamment avec l’exécution du tout répressif au niveau judiciaire mais ça ne marche pas. Il faut trouver autre chose, réclame-t-il. Un gamin a pris 18 mois de prison pour quatre pochons de cocaïne alors qu’il y avait encore quelque chose à faire : le sortir du quartier avec une domiciliation chez sa tante et des obligations de soin. »
Samia Ghali, sénatrice des quartiers Nord, réclame depuis des mois plus de moyens. Selon elle, ce ne sont pas ces plateformes d’appels qui devraient changer grand-chose. « Nous passons notre temps à donner ce genre d’information à la police, mais rien ne change », regrette-t-elle. C’est pourquoi elle souhaite également plus de prévention. « Il faut apporter une réponse sociétale et sociale. Ces gamins ne partent pas en colonie, et les dealers deviennent bien souvent les animateurs sociaux en leur offrant des piscines. Ce plan anti stup' est une approche nationale, nous avons désormais besoin d’une approche globale au niveau local », estime-t-elle.
Laurent Nunez s’est engagé à revenir rapidement à Marseille pour apporter des réponses, même si Christophe Castaner estime que « Marseille est loin de l’image que l’on veut lui
donner ».
Peace
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