Consommer du cannabis ne serait pas lié au développement de troubles anxieux
Par Marie-Caroline Cabut
Un fumeur de cannabis. Photo Thomas Wirth. AFP
Si des précédentes études estimaient qu'un consommateur de marijuana avait plus de chances de développer des troubles psychologiques et neurologiques, un rapport de l'Université de Columbia affirme le contraire. A noter : la schizophrénie n’a pas été prise en compte.
Consommer du cannabis ne serait pas lié au développement de troubles anxieux.
Fumer du cannabis n’augmenterait pas les risques de troubles anxieux ou d’humeur. C’est ce qu’affirme une étude - très sérieuse - de l’Université de Columbia, publiée dans le journal JAMA Psychiatry et relayée par le Washington Post. Un constat plutôt surprenant quand on sait que de nombreuses études montraient le contraire.
34 653 participants américains, âgés de plus de 18 ans, ont pris part à cette étude. A trois années d’intervalle (2001-2002 et 2004-2005), les chercheurs ont comparé l’état mental des différents patients. Au début de l’expérience, la consommation de cannabis, les critères socio-démographiques, l’histoire familiale et l’historique des troubles psychiatriques des patients avaient été pris en compte et étudiés par l’équipe de recherche. Selon les résultats publiés mercredi, cannabis et troubles anxieux ne seraient donc pas liés. Il faut cependant préciser que la schizophrénie n’a pas été prise en compte dans cette étude.
D’autres risques ne sont pas exclus
Attention, les pro-cannabis ne doivent pas crier victoire trop vite. Les chercheurs ont en effet trouvé une connexion entre la consommation de cannabis et l’abus de substances addictives. Un fumeur de cannabis a ainsi plus de chance de développer une addiction à la nicotine, à l’alcool ou même à d’autres drogues.
Avec toujours plus de consommateurs et de pays légalisant la marijuana récréative et thérapeutique, les inquiétudes concernant les effets de cette drogue sur la santé mentale perdurent. Les chercheurs insistent cependant sur l’importance des campagnes de prévention pour les addictions. Si l’on prend l’exemple de la France, la consommation de tabac et d’alcool sont les deux premières causes de morts évitables.
Des chercheurs britanniques ont isolé un gène qui serait responsable du déclenchement de psychose chez les fumeurs de cannabis. Un phénomène qui concerne 1% des consommateurs mais qui est très grave.
1% des consommateurs seraient concernés.
Photo: Sojka Libor/AP/SIPA
Vous connaissez une personne qui fume son joint tous les jours mais qui n' a aucun problème psy et une autre qui fumait mois souvent mais qui a déclenché des troubles psychotiques très graves. Nous ne sommes pas tous égaux devant le cannabis.
Si l'on sait aujourd'hui qu'en consommer a toujours des conséquences sur le développement du cerveau surtout si l'on a commencé jeune, une étude britannique vient expliquer pourquoi, dans certains cas, le cannabis peut avoir des conséquences dramatiques sur la santé mentale. En effet, un gène isolé par l'équipe scientifique expliquerait pourquoi certains sont sujets a des épisodes psychotiques.
1% des fumeurs déclenchent des troubles psychotiques
Les chercheurs de l'Université d' Exeter et de l'University College de Londres ont découvert que les patients qui souffraient de psychoses présentaient une mutation du gène AKT1.
Ces personnes ont des hallucinations, sont sujettes à la paranoïa, et ces syndromes psychotiques ont tendance à être accentués quand elles ont consommé des drogues.
On sait que 1% des personnes qui consomment quotidiennement du cannabis présentent des troubles psychotiques sévères, or ces profils ont en commun de souffrir d'une mutation du gène AKT1. Pour arriver à cette conclusion les scientifiques ont passé en revue les données médicales de pas moins de 441 patients qui fumaient régulièrement, ils ont ensuite étudié leur comportement.
Ce qui peut paraître anecdotique est en réalité fort intéressant sur le plan de la prévention. En effet pourquoi ne pas imaginer un dépistage des personnes à risque dans la consommation de cannabis ? Les détails de cette étude ont été publiés dans la revue Translational Psychiatry.
Ce n’est pas rien pour un hebdomadaire très libéral comme The Economist de prendre une position qu’ils appellent eux-mêmes « décidément alibérale ». Et c’est encore plus surprenant parce qu’il s’agit de légalisation du cannabis. On peut lire sur la « une » de l’hebdo britannique de cette semaine :
« La bonne façon de prendre des drogues. Légaliser le cannabis en toute sécurité. »
Partant du constat que la légalisation, à usage médical et, de plus en plus, récréatif, gagne du terrain dans le monde, The Economist se félicite que « ceux qui (comme nous) ont dit que la légalisation est meilleure que la prohibition vont accueillir avec joie le début de la fin de l’inutile guerre contre le cannabis ».
La prise de position est réfléchie, basée sur des arguments davantage économiques que moraux. La substance « pèse pour plus de la moitié d’un marché de drogues illicites de 300 milliards de dollars » et « reste la drogue de choix de 250 millions de personnes dans le monde ». Or, cet immense marché est sous le contrôle de groupes criminels et meurtriers.
« Légaliser le cannabis priverait le crime organisé de sa plus grande source de revenu, tout en protégeant les consommateurs qui deviendraient des honnêtes citoyens. » Un argument répété plusieurs fois dans leur exposé, qu'on peut résumer sous la forme d'un graphique assez simple :
La question n'est plus « Doit-on » mais « Comment fait-on » ?
Réglementer le marché du cannabis -->
---> protégerait le consommateur
---> permettrait à la police d’économiser de l’argent
---> augmenterait les revenus des Etats
---> enlèverait une part de marché aux criminels
Manifestation pour la légalisation du cannabis à Toronto (REUTERS/Mark Blinch)
The Economist n'est pas le premier média ou organisme d'influence à prendre parti pour la légalisation du cannabis ces dernières années. Qu'est-ce qui le pousse à le faire publiquement maintenant ? Comme l'expliquent les articles du dossier, la balance commence sérieusement à pencher en ce sens.
Aux Etats-Unis, un des principaux consommateurs, « vingt-deux Etats et le district de Columbia ont légalisé le cannabis à usage médical, et ce chiffre devrait atteindre trente d'ici un an ». Trois Etats - le Colorado, Washington et l'Oregon - ont franchi le pas de la légalisation, bientôt rejoints par l'Alaska et peut-être par la Californie, où un référendum aura lieu en novembre. En Uruguay, la vente libre devrait être effective cet été, et des débats en ce sens sont en cours au Mexique, en Australie et en Afrique du Sud.
Le cas du Canada a fini par donner à ce débat un autre degré de sérieux. Le gouvernement du nouveau premier ministre, Justin Trudeau, a fait connaître son intention d'adopter, dès cette année, des lois « qui légaliseront et réglementeront la consommation de marijuana ». Cela en ferait le premier pays du G7 à passer le pas.
Le ministère de la santé canadien devra définir les règles d’accessibilité et d’âge légal de consommation, de prix de vente, taxation, taux légal de THC (principe actif du cannabis), contrôle de la qualité des produits, des réseaux de production et de distribution.
C'est là où le travail de The Economist est intéressant ; il dépasse le débat sur la nécessité de la législation et s'intéresse plutôt, comme le gouvernement canadien, à son application très concrète : à combien chaque pays taxera-t-il l'herbe ? Et les « comestibles au cannabis » ? Comment utiliser en priorité l'argent obtenu ? Faudra-t-il interdire la publicité ? Faut-il s'attendre à l'émergence d'un lobby du cannabis, comme il existe un lobby de la cigarette ou du vin ?
Le statu quo français
« Trouver le bon niveau d'imposition sera un défi. S'il est trop bas, vous encouragez l'usage. S'il est trop haut, vous perdez un des bénéfices de la légalisation : faire disparaître les marchés noirs. »
« Le "bon" niveau d'imposition dépendra des conditions de chaque pays : en Amérique latine, où l'abus de la drogue est rare mais où le marché noir est puissant et sanglant, il devrait être bas. Dans le monde développé, où l'abus est plus courant et où les dealers sont davantage une nuisance qu'une menace à la sécurité nationale, il pourrait être plus haut. Notre modèle : les Etats-Unis après la Prohibition. Les taxes sur l’alcool ont d'abord été très basses, pour faire fuir les contrebandiers, avant d'être rehaussées. »
Transaction légale à North Bonneville, dans l'Etat du Washington (REUTERS/Jason Redmond)
En France, la situation est simple, à défaut d'être rassurante : c'est un des pays où on fume le plus de cannabis en Europe, tout en étant un des pays avec les lois les plus répressives en la matière. En 2014, 11 % des Français âgés entre 18 ans et 64 ans ont consommé du cannabis au moins une fois dans l’année, selon une étude de l’Institut national de prévention et d’éducation. Un adolescent de 17 ans sur deux ayant déjà expérimenté, et près d’un sur dix fume régulièrement des joints, selon l’Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT).
Avant The Economist, Le Monde (et oui, on avait déjà pris position dès 2014), expliquait dans un éditorial pourquoi la légalisation était une bonne solution. Le constat est quasiment le même :
Il est difficile, voire impossible, d'avoir un débat politique sur la légalisation du cannabis en France. A droite comme à gauche, on évite le sujet. Une proposition de loi de la sénatrice Esther Benbassa (EELV) visant à autoriser un « usage contrôlé » via une vente au détail similaire à celle du tabac, et dans le cadre d'un « processus de sensibilisation » a été rejetée en avril 2015.
« Pourtant, malgré son arsenal législatif, la France est (avec le Danemark) le pays européen où l’usage du cannabis est le plus répandu. Un Français sur trois en a fait l’expérience – un collégien sur dix et deux lycéens sur cinq –, tandis que 550 000 personnes en consomment quotidiennement. Bref, la politique répressive en vigueur est inefficace. En outre, elle est coûteuse, car elle mobilise une part significative de l’activité de la police (interpellations et gardes à vue) et de la justice, pour une dépense publique évaluée à 500 millions d’euros par an. Enfin, la prohibition a favorisé le développement d’un marché clandestin de type mafieux. »
2016, année critique
Le Liban est un des premiers producteurs de résine de cannabis, selon l'ONU.
Or, dans les faits, la consommation de cannabis en France est presque dépénalisée. Depuis une loi de 1970, elle était un délit pénal, passible d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende. Une peine, rarement appliquée, qui a été remplacée récemment par une amende, payable directement au policier qui vous a surpris à fumer.
Une modification qui ne doit pas être comprise comme un pas vers la dépénalisation, et encore moins vers la légalisation. François Hollande, au cours de sa campagne de 2012, avait clairement affirmé la « nécessité de l’interdit » et il n'a pas changé d'avis depuis (malgré la couverture des Inrocks).
Des études très sérieuses du Conseil économique, social et environnemental ou du think thank Terra Nova, très proche du Parti socialiste, soulignent pourtant la nécessité d'un débat sur la question. Le professeur Bertrand Dautzenberg a récemment appelé à la dépénalisation encadrée en France, justifiant sa prise de position par l’inefficacité de l’interdiction complète de cette drogue. Là encore, c'est le même constat qu'ont fait Le Monde, The Economist et d'autres avant eux.
« Je constate que la consommation de cannabis chez les jeunes augmente, que la France est numéro un en Europe avec 45 % des jeunes qui ont essayé alors que, dans d’autres pays, comme les Pays-Bas où il est légalisé, le taux est de 29 %. Plus c’est interdit, plus il y a de consommateurs. »
Le timing de la prise de position de The Economist n'est pas étranger à l’organisation, en avril, d'une assemblée générale des Nations unies sur la drogue qui se penchera notamment sur la consommation de cannabis et l'intérêt d'une législation contrôlée. La date de cette assemblée a été avancée de trois ans, notamment sous la pression de plusieurs pays américains qui critiquaient la politique inaltérable de répression de l'ONU en la matière. Le ministre colombien de la justice de l'époque avait joliment résumé la chose :
Luc Vinogradoff
« Les politiques sur la drogue ne peuvent pas bouger au rythme du télégraphe, alors que les problèmes se déplacent à la vitesse de l'Internet. »
Aux Etats-Unis, le cannabis est au-delà du bien et du mal. C’est un marché. Et sa croissance explosive magnétise les investisseurs. Au point de gonfler la prochaine bulle?
L'industrie du du cannabis a créé 20000 emplois en 2 ans au Colorado.
Commerce
Avec son décor en bois lasuré gris, son long bar design et ses vitrines rétroéclairées, on se croirait dans une boutique Nespresso. Sauf que sur les rayons, boissons énergisantes, bonbons, chewing-gums, infusions, sels de bain et même lubrifiants pour le sexe sont tous estampillés THC, la principale substance psychoactive du cannabis. Au mur, des centaines de sachets affichent 40 variétés de fleurs de marijuana. Blue Dream, Ingrid, Sour Diesel, Church, AK-47… pour les plus vendus.
Jeunes, vieux, la boutique que vient d’inaugurer Good Chemistry à Aurora dans la banlieue de Denver ne désemplit pas. C’est une des 700 entreprises de cannabis qu’a vues éclore le Colorado depuis deux ans et l’entrée en vigueur de la légalisation. Ici, la marijuana n’est plus seulement prescrite pour un usage médical et sous ordonnance, comme c’est le cas dans 24 autres Etats américains, et dans encore 17 qui autorisent les médicaments à base de cannabidiol (CBD). Au Colorado, comme plus récemment en Alaska, en Oregon et dans l’Etat de Washington, le cannabis est en vente libre pour le fun, le récréationnel, aux plus de 21 ans.
Dans ses usines DIxie Brands produisent des milliers de "shot" a base de THC pour lesdispensaires.
Evidemment, le marché explose. Et il fonctionne bien sûr à la mode Far West: sous forme de ruée vers l’or postmoderne. Avec venture capitalists, incubateurs de start-up et conférences pour les investisseurs. Quand ce n’est pas carrément en reprenant les codes du luxe, comme le fait Good Chemistry.
Cash is king
En visitant l’entreprise en compagnie de son directeur marketing, Steve Spinoza, on découvre qu’il y a autre chose que l’esprit pionnier et les modèles d’affaires inspirés par la Silicon Valley qui caractérisent l’industrie émergente et déjà milliardaire du cannabis au Colorado. Dans les bureaux, une comptable trie les liasses de billets de 100 dollars avec une de ces machines qu’on voit d’habitude dans les films de gang-sters. Photo interdite, précise notre guide. Plus loin, quelques liasses traînent sur un énorme coffre-fort. Manière de rappeler qu’il n’y a pas si longtemps la vente de «weed» se faisait au marché noir. Et qu’elle reste illégale au niveau fédéral.
Régulées par la FDIC, les banques n’acceptent pas, officiellement en tout cas, ces transactions. Cela n’empêche pas ce cash de remplir les caisses de l’Etat. Les plus grandes entreprises de cannabis du Colorado, comme LivWell et Medicine Man, vont payer leurs impôts en fourgonnette blindée. On n’est qu’au début des surprises.
Bouillonnante de créativité, avec qui plus est le sentiment de participer à une expérimentation sociale inédite, l’industrie du cannabis est la nouvelle frontière de l’économie américaine. Comme de juste, elle se construit à l’échelle de ce pays-continent sur une trame géante qui repose sur des modèles d’affaires inspirés du numérique, mais aussi l’héritage de la contre-culture.
«Notre défi est de passer de la culture alternative à celle mainstream», confirme Steve Spinoza, qui justifie le choix d’avoir créé la deuxième boutique de Good Chemistry dans une zone commerciale de banlieue quand la première était au centre-ville. Lui parle d’«éducation» et de «changement démographique» pour toucher plus de consommateurs.
Il y a des risques, cependant. Que ce mélange économique et social détonnant n’explose sous forme de bulle financière ou ne s’épuise dans un combat de valeurs.
Une origine activiste
Boston, 2 novembre. Difficile, pour un activiste politique, d’avoir une meilleure adresse qu’en face de Faneuil Hall, le marché couvert d’où les pères fondateurs des Etats-Unis ont lancé l’idée d’indépendance. C’est là qu’opère Kris Krane, consultant et capital-risqueur après avoir été l’une des chevilles ouvrières de la légalisation du cannabis.
«Mon père souffrait d’une maladie des poumons que seule l’inhalation d’un joint parvenait à détendre pour lui permettre de respirer», dit-il pour expliquer son opposition viscérale à la guerre contre la drogue décrétée par Reagan dans les années 1980. Dans les années 2000, il est à la tête du mouvement Students for sensible drug policy, la plus grande organisation militante en charge d’une question sociétale avec une présence sur 300 campus. Et puis, il passe au business.
En 2011, il crée 4Front pour conseiller les entreprises qui font des demandes de licences pour créer des magasins (appelés dispensaires). L’an dernier, il ajoute un fonds de capital-risque utilisant de la dette convertible pour investir dans les nouveaux business du cannabis. Parce que d’abord à but non lucratif ou coopératif, ces derniers sont entrés dans le marché. Surtout au Colorado.
Denver, 6 novembre. Depuis son bureau qui fait face au Parlement du Colorado, Brian Vincente, l’avocat qui a coécrit la législation sur la légalisation du cannabis, confirme que le cas d’activistes devenus entrepreneurs n’est pas rare. «Beaucoup se sont rendu compte que le business est un moyen de rendre durable ce à quoi il croit», explique-t-il.
«Nous avons voulu que la législation s’approche le plus possible du cadre d’un marché libre tout en mettant en place des règles qui puissent servir d’exemple à d’autres Etats», poursuit l’avocat. C’est la raison pour laquelle, depuis janvier 2014, le Colorado a alloué plus de 700 licences, créant un marché ultraconcurrentiel autour de quatre types de business: les producteurs, leurs magasins, les laboratoires de tests et les produits dérivés.
Produits dérivés. Si 80% du cannabis est fumé, Medicine Man multiplie les produits tels que cigarettes électroniques et bonbons infusés.
Chez les mangeurs de ganja
Ces produits dérivés, les comestibles ou «édibles», c’est la spécialité de Jaime Lewis dans sa cuisine de Mountain Medicine. Venue de Californie et du mouvement procannabis pour participer à l’expérience du Colorado, elle cuisine des gâteaux et des chocolats au THC pour le marché médical et récréationnel.
Nouvelle surprise: ceux destinés aux patients se présentent comme des friandises et autres pâtisseries, tandis que les barres chocolatées pour la grande consommation sont emballées comme des médicaments. En ouvrant un de ces paquets, Jaime Lewis fait remarquer qu’il est portionné en dix parts estampillées 10 milligrammes de THC. La législation sur les comestibles dérivés du cannabis a déjà changé deux fois. Il a fallu rendre les emballages résistants aux enfants et avertir le consommateur de la teneur en THC – quelques consommateurs trop gourmands ayant fini avec un interminable bad trip.
Même si cela pose beaucoup de contraintes à sa petite entreprise, Jaime Lewis est pour ces règles. «Il faut satisfaire le consommateur pour qu’il revienne.» De plus, les entrepreneurs du Colorado savent que les projecteurs sont braqués sur eux. Ils doivent se montrer exemplaires pour étendre leur business aux autres Etats qui devraient légaliser tous les usages du cannabis demain. Parce que même s’ils ont vu leurs ventes passer de 700 millions de dollars en 2014 à plus de 1 milliard cette année, les entrepreneurs du cannabis du Colorado sentent qu’ils sont au début d’une folle croissance.
Il y a cependant à cela un certain nombre de conditions. «Pour commencer, votre réputation repose sur la constance de vos produits», explique Steve Spinoza. Cette standardisation d’une marchandise jusque-là produite clandestinement entraîne une professionnalisation passablement stupéfiante du secteur.
Denver, 9 novembre. Dans la banlieue industrielle, l’entreprise Dixie témoigne de cette évolution. Fondée par Tripp Keber et Chuck Smith, deux anciens de l’immobilier qui ont levé 8 millions de dollars pour construire cette usine à laquelle s’en ajoutent trois autres en Californie, en Arizona et en Oregon, Dixie manufacture quantité de produits à base de cannabis: des shots aux boissons énergisantes en passant par des produits vétérinaires à base de CBD et des plaquettes de chocolat au THC.
L’entreprise emploie 60 personnes à Denver. Joe Hodas, son directeur marketing, jongle avec des concepts tirés de la Harvard Business Review comme les «good manufacturing practices». «Les policiers qui ont visité notre installation ont été très surpris par notre niveau de professionnalisme», confie-t-il. Il montre une installation d’extraction d’huile de cannabis à 200 000 dollars qui permet de récupérer le THC et le CBD des feuilles laissées de côté lors du tri des fleurs. On est loin de la cuisine artisanale de Jaime Lewis. On n’a pourtant encore rien vu.
La société Dixie dispose d’une ligne d’embouteillage pour ses boissons énergisantes au cannabis.
Maman est «ganjapreneuse»
Pas très loin de l’usine de Dixie, l’abord de l’entrepôt de Mindful se signale par la forte odeur d’herbe qui en émane. Meg Sanders, CEO, est à des années-lumière de l’image qu’on peut avoir des entrepreneurs de cannabis croisés dans les coffee-shops d’Am-sterdam. Silhouette fine sous sa blouse blanche, elle a quelque chose de ces «soccer moms» des grandes banlieues américaines. Jusqu’à la création de Mindful en 2010, elle travaillait dans la compliance d’un family office. Désormais, sa PME emploie 52 personnes.
En suivant la patronne au travers des 4000 m2 de sa plantation, on découvre le degré de sophistication atteint par l’industrie. Système d’irrigation automatique, écorce de coco et nutriments dans les pots, ventilation et, partout, des lampes pour recréer la lumière et faire croire aux plantes que c’est l’été pour qu’elles fleurissent. Alors qu’il a neigé quelques jours avant dans cette ville située à 1600 m d’altitude. «Les clones prélevés sur les plantes mères poussent durant douze à treize jours avant d’entrer en état végétatif pour trois semaines puis dans le cycle de floraison qui dure de quarante-cinq à cinquante jours, explique Meg Sanders. Cela nous donne une récolte de l’ordre de 230 kilos de fleurs par mois.»
Au prix de détail, soit environ 200 dollars l’once (28 grammes), cela fait 1,8 million de dollars de chiffre d’affaires mensuel. L’Etat du Colorado et la Ville de Denver prélèvent une taxe de 21,12% sur ces ventes (5,9% pour le médical). Jim Marty, consultant en comptabilité auprès d’une centaine d’entreprises de cannabis, estime que cette année les collectivités publiques du Colorado encaisseront environ 140 millions de dollars. Ils en consacrent une bonne part aux écoles et aux bourses des étudiants. On comprend que ces recettes fassent rêver d’autres Etats.
Meg Sanders, elle, prévoit un chiffre d’affaires de 14 millions de dollars cette année et de 20 l’an prochain. «Nous allons construire une nouvelle usine de 4000 m2 et nous prévoyons des serres dans le sud de l’Etat sur 1,5 ha», explique la «ganjapreneuse», qui s’apprête aussi à ouvrir un dispensaire dans l’Illinois et a fait une demande de licence en Floride.
A quelques centaines de mètres de Mindful, Medicine Man, l’une des plus grosses entreprises de cannabis du Colorado, poursuit, elle aussi, ses plans d’expansion. Ex-employée de la Navy puis de Lockheed Martin, Elan Nelson mène la visite des trois lignes de production toujours plus modernes qui racontent l’histoire de cette usine. Conçue comme une salle blanche, la dernière fait penser à une production de biotechnologies.
Elle explique aussi que la facture d’eau s’élève à 800 dollars par mois et celle d’électricité à 40 000. D’où, ici aussi, des projets de serres. Avec la croissance du marché, tout le monde veut diminuer ses coûts pour faire face à une correction inévitable des prix du cannabis. Pas de quoi paniquer cependant. Il y a de la marge. En substance, cela coûte environ 1000 dollars de produire une livre d’une marijuana dix fois plus forte en THC que celle des années hippies et qui va se vendre entre 3000 et 4000 dollars.
Sans surprise cette fois, le Colorado est donc inondé de cash. Les prix de l’immobilier se sont envolés. «On estime qu’entre 10 000 et 20 000 emplois ont été créés par le secteur avec des salaires oscillant entre 15 dollars l’heure pour le «budtender» d’un dispensaire et 60 pour un manager», explique Carole Richter, qui a créé sa boîte de ressources humaines pour répondre à la professionnalisation du secteur. Du coup, malgré les difficultés à bancariser l’activité, les financiers commencent à s’y intéresser.
Le parfum de l’argent
Las Vegas, 11 novembre. C’est party time pour l’industrie américaine du cannabis ce soir-là au Voodoo Lounge, le bar en attique du casino. Organisé par Woman Grow, le réseau des femmes entrepreneuses en cannabis, cette fête ouvre les quatre jours de la Marijuana Business Conference & Expo, le plus gros événement annuel du secteur avec 400 exposants et 5000 participants. En parallèle, se tiennent aussi deux Investors Summits où se pressent les business angels du réseau ArcView, les capital-risqueurs de Privateer et de Tuatara Capital, et même quelques banquiers d’affaires et autres gérants de hedge funds.
Anthony Denaro fait partie de ces derniers. Ex-trader pour la Banque Jefferies, il explique avoir mis toutes ses économies pour amorcer un fonds capable de traiter les 200 titres du Marijuana Composite Index. «On y trouve non seulement des producteurs de cannabis mais aussi pas mal de sous-traitants. Cependant, attention, il y a aussi des coquilles vides.»
Dans les discussions du Voodoo Lounge ou dans les allées du salon, d’autres informations cruciales remontent. Par exemple que, après des PME du secteur de l’horticulture pour qui le cannabis représente déjà 15 à 20% des ventes, le big business prépare son entrée dans le secteur. Le glacier Ben & Jerry’s va lancer des desserts infusés à la marijuana, confirme-t-on à plusieurs reprises. Et aussi que le boom du cannabis conduira inévitablement à une bulle, au fur et à mesure de sa légalisation dans d’autres Etats. Sans que cela n’inquiète personne.
Le jeu de la démocratie directe
La grande question qui domine pour l’heure, ce sont, en effet, la douzaine d’initiatives en faveur de légalisation du cannabis récréationnel dans les Etats comme le Maine, le Massachusetts, Hawaï et, surtout, la Californie dès l’an prochain. Là, c’est même le premier président de Facebook, Sean Parker, qui est derrière l’initiative qui a le plus de chances de passer en même temps que le prochain président.
Cet intérêt n’est guère surprenant. Le cannabis est vu par beaucoup d’entrepreneurs de la Silicon Valley comme la prochaine vague. Hrish Lotlikar, banquier d’affaires ex-UBS et HSBC, devenu capital-risqueur, est intimement convaincu qu’après le Colorado «la Californie sera le début d’un domino qui va voir les Etats, puis les pays, légaliser un par un».
Difficile de lui donner tort. Quelques jours plus tôt, la Cour suprême du Mexique a rendu légale la culture du cannabis à titre privé. Le lendemain, le nouveau premier ministre canadien Justin Trudeau annonce le lancement d’un «processus fédéral-provincial-territorial pour conduire à la légalisation et la réglementation de la marijuana».
A Denver, Brian Vincente avait prévenu: «Le Colorado apporte la preuve que le cannabis n’a non seulement pas les conséquences redoutées mais qu’il apporte la prospérité.» Directeur du Marijuana Industry Group, le principal lobby du secteur, Michael Elliott ajoute: «Depuis la légalisation, la mortalité routière, le trafic de stupéfiants et la violence domestique sont en baisse, tandis que les résultats des étudiants sont stables.»
Boulder, 12 novembre. Venus visiter Canopy, un incubateur de start-up actives dans le cannabis, trois professeurs d’économie de la London School of Economics, de la Copenhague Business School et d’HEC Paris ne cachent pas qu’ils sont impressionnés par ce qu’a accompli le Colorado. Toutefois, leurs questions se concentrent sur un certain nombre de difficultés liées au changement d’échelle de l’industrie, comme la polémique sur les pesticides.
Très bonne question qu’en prolonge une autre plus générale: en devenant de nouvelles marques que lancent des célébrités comme Julien Marley (le fils de Bob) ou le rappeur Snoop Doog ou en se structurant en business financés par le private equity, le cannabis ne risque-t-il pas de perdre ses racines de contre-culture?
«Je n’ai pas très envie d’apprendre que les licences des nouveaux dispensaires ont été attribuées aux copains du gouverneur», résume la cheffe Jaime Lewis. En refusant une légalisation menée par ce qu’ils appellent «big pot», en référence au big business, c’est le message qu’ont envoyé les électeurs de l’Ohio le 6 novembre dernier.
Toutefois, cela n’augure en rien des résultats de l’an prochain. Une majorité d’Américains est en faveur de la légalisation. Tous les candidats à la présidentielle, sauf un, ont promis, au minimum, de laisser les Etats faire ce qu’ils veulent. La bulle du cannabis ne fait que commencer de gonfler.
Une étude américaine sur la consommation de cannabis chez les ados relance le débat dans la communauté scientifique. C'était à la Une de la science avec Dominique Dupagne (médecin et chroniqueur) et Laurent Karila (Psychiatre et addictologue à l’hôpital Paul Brousse de Villejuif) .
En France, 40 % des moins de 17 ans disent avoir essayé. Et selon l'Éducation nationale, ces chiffres sont en hausse.
Dr Laurent Karila
"Le problème du cannabis reste le problème des ados en France."
Voir la pièce-jointe : CYsxLNWUsAA2Ttg.jpg
https://twitter.com/visactu/status/687697437851521026
L'étude américaine en question avait pour objet de démontrer ou pas les liens entre la consommation de cannabis et la baisse du QI chez les ados. Elle fut menée pendant dix ans sur près de 2000 sujets dont de nombreux jumeaux. En effet, la proximité génétique des individus avec des habitudes de consommations différentes permettaient des résultats plus probants.
Cette étude ne peut pas disculper le cannabis. Elle confirme un lien statistique entre QI faible et consommation mais elle ne prouve pas une accélération du déclin. Le problème c'est que le déclin ou la hausse du QI dépend de nombreux éléments comme l'entourage familial ou amical, le lieu de vie... Il est donc compliqué de tirer des conclusions définitives.
Une chose est sûre pour le Dr Laurent Karila, en revanche : le cannabis reste toxique pour les cerveaux des ados qui sont en pleine formation. Il a des effets négatifs sur ses structures, sur ses capacités cognitives comme la mémoire, la prise de décision... et ces variables là n'ont pas été mesurées dans l'étude.
Dominique Dupagne
"L'alcool est un fléau terrible, une des drogues les plus dures qui existent."
Pour Dominique Dupagne, cette étude ne cherchait d'ailleurs pas à réhabiliter le cannabis mais à le replacer dans une échelle de gravité. En effet, avec l'alcool, le tabac a également des effets néfastes sur la cognition, et d'autres drogues qui font leur retour dans les habitudes de consommation comme la MDMA, la cocaïne, le Poppers,...
SANTÉ - Je suis pneumologue et je me suis exprimé récemment à l'antenne de France info pour inciter à la dépénalisation du cannabis. Cette question sera également débattue lors du congrès de la pneumologie qui se tiendra à Lille du 29 au 31 janvier 2016. Voici les raisons concrètes de ce positionnement.
Etat des lieux
Plus de 17 millions de français ont expérimenté le cannabis, 4,6 millions sont consommateurs et 1,4 millions en consomment plus de 10 fois par mois actuellement selon l'Office français des drogues et des toxicomanies. Le dernier Eurobaromètre sur la consommation de drogues en Europe place la France sur la première marche du podium de la consommation avec 45% d'utilisateurs dont 25% dans l'année alors que dans un pays tel que les Pays-Bas, la consommation des jeunes est de 29%, dont 15% dans l'année.
En outre, les jeunes français consomment majoritairement de la résine de cannabis mélangée à du tabac sous forme de joints, une forme de cannabis particulièrement nocive du point de vue du pneumologue en raison:
du tabac contenu qui contribue au maintien et à la récidive tabagique chez les très nombreux consommateurs qui ont été ou sont dépendants au tabac,
de la fumée qui est 6 fois plus chargée en particules et en monoxyde de carbone qu'une cigarette de tabac et provoque à côté des effets neurologiques du cannabis, des infections respiratoires, des bronchopathies chroniques obstructives (BPCO), des atteintes du poumon profond et des cancers du poumon.
Dans de nombreux pays la marijuana (les extrémités fleuries des plants de cannabis femelles) est utilisée seule, sans tabac. Dans les Etats américains où le cannabis a été toléré ou autorisé, la consommation se fait majoritairement à l'aide de vaporisateurs, gros vaporisateurs ressemblant à des théières permettant d'inhaler le cannabis à partir de petits sacs en plastique recueillant la vapeur ou vaporisateurs miniatures.
Un constat en apparence paradoxal
L'idée simple que, plus la législation sur un produit est répressive moins l'on consomme a prouvé son inefficacité lors de la grande prohibition de l'alcool aux USA dans les années 30 et en 2016 en France avec la prohibition totale du cannabis.
Dans les pays développés, il est frappant d'observer que plus la législation est répressive, plus la consommation est importante et qui plus est, se fait avec les produits les plus toxiques. Il existe un fossé entre le statut législatif du cannabis en France et la réalité de terrain vécue chez les jeunes. La France a une des législations les plus sévères, la loi de 1970, mais est le pays d'Europe où l'on consomme le plus de cannabis chez les jeunes. Cette consommation est bien moindre aux Pays-Bas, où pourtant la législation est beaucoup plus souple. Les actions de prévention, chez les jeunes ou en milieu de travail, sont, de plus, grandement gênées par le statut illégal du cannabis en France. A ce constat, on peut rajouter les effets collatéraux liés au trafic de ce marché qui se chiffre en milliards d'euros et minent la vie sociale dans de nombreux quartiers.
Un débat de santé publique difficile
Beaucoup d'organisations ou d'individus prônent la libéralisation de la législation du cannabis dans le but de faire la promotion de sa consommation, cette démarche conduit très logiquement à l'inquiétude des décideurs qui restent figés dans la loi de 1970 et ce blocage est la cause de la place le champion d'Europe de la consommation de cannabis et d'un type de consommation à forte toxicité pulmonaire.
La démarche en débat chez les pneumologues qui a un objectif clair de réduction des risques et de réduction de la consommation n'exclue en rien un changement de la législation, bien au contraire le nécessite. Mais pour aboutir à ce changement de législation, il faudrait une Simone Veil ou un autre politique qui soit capable de transcender les partis et que ceux-ci acceptent d'aborder sans tabou la réalité de cette consommation, diabolisée par beaucoup de parents et de décideurs politiques et complètement banalisée par les jeunes et d'aborder des solutions dans l'intérêt des français et de la France, sans chercher la critique de l'adversaire politique à des fins électorales attisées par des médias cherchant voire même provoquant le conflit entre les décideurs pour faire le buzz.
La prise en compte de la réduction du risque et de la consommation de cannabis n'est pas plus un problème de gauche que de droite, de ville que de campagne, c'est en revanche un problème qui touche les jeunes. L'eurobaromètre montre qu'ils sont 3% à vouloir une libéralisation complète, 14% à vouloir le statu quo et 83% une réglementation en remplacement de la pénalisation actuelle. Une nouvelle loi est nécessaire comme cela a été fait, malgré les difficultés, pour le tabac et l'alcool: on consomme en France 50% moins de tabac et 25% fois moins d'alcool par habitant qu'au moment du vote il y a juste 25 ans depuis la loi Evin du 10 janvier 1991, deux drogues légales encadrées de façon pragmatique par la législation alors que la consommation de cannabis qui est totalement prohibée en France a augmentée de 20%.
Des solutions proposées dès maintenant aux praticiens pour aider les consommateurs à réduire le risque:
Ne plus utiliser de tabac
Chez tout fumeur ou ancien fumeur dépendant au tabac ne voulant pas quitter le cannabis, conseiller:
soit d'utiliser des plantes à fumer telles que décrites dans l'article 21 de la Directive 2014/40/UE sur les produits du tabac qui va être transposée en droit français d'ici mai 2016. Ces plantes peuvent être achetées en 2 clics sur internet ou dans certaines herboristeries.
soit de ne consommer que de la marijuana (de l'herbe) pour éviter la dépendance nicotinique.
Bien entendu en insistant sur le fait que l'arrêt de toute consommation est le bon objectif et que cet objectif de réduction du risque n'est qu'un pis-aller pour la santé.
Utiliser des systèmes de vaporisation plutôt que des joints
Chez tout fumeur de cannabis, le médecin qui ne peut obtenir l'arrêt de la consommation peut comme pis-aller recommander la réduction du risque respiratoire en utilisant des systèmes de vaporisation (sans fumée) encore peu répandus en France.
Néanmoins, que ce soit avec de gros vaporisateurs qui vaporisent la plante ou des petits vaporisateurs portables de cannabinoïdes ressemblant à des e-cigarettes sur lesquelles on dépose une goutte de produit, les risques pulmonaires sont à priori bien moindres qu'avec les joints, bien que la température de chauffe soit proche de celle des techniques de dry-hit utilisés par certains vapoteurs avec leurs e-cigarettes.
L'analyse précise des produits et techniques de vaporisation dans les nombreux états aux USA devrait rapidement permettre de mieux cerner aussi bien les dispositifs de vaporisation que les produits du cannabis à vaporiser. Comme on a pu le constater avec l'e-cigarette, les pays où cette utilisation est légale ont eu rapidement accès à des produits du cannabis et des appareils de qualité alors que dans ceux où l'utilisation est illégale, beaucoup de produits restent de piètre qualité, comme c'est le cas actuellement en France pour le cannabis.
Les dangers potentiels des cannabis de synthèse
La commercialisation sur internet, de quelques 130 cannabinoïdes de synthèse avec, pour certains d'entre eux des effets psychotiques puissants, pose problème. Une centaine d'entre eux -pourtant agissant sur les récepteurs CB1 ou CB2 du cannabis- sont en vente libre, seule une petite fraction de ces produits sont formellement interdits. Ils passent souvent à travers les mailles du filet tant la traçabilité est aléatoire. Ils se présentent le plus souvent en sachets de plantes à brûler imbibées de cannabinoïdes et se consomment sous forme de joints, exposant à la fumée. En l'état actuel des connaissances, on ne peut que déconseiller ces produits; mais il est possible que, dans le futur, certains apparaissent comme des produits de réduction du risque par une prise en vaporisation par rapport à la résine de cannabis fumée dans des joints avec du tabac.
La position qui sera discutée au congrès de pneumologie 29-31 janvier 2016 à Lille
Alors que depuis la loi Evin du 10 janvier 1991 la consommation par habitant des 2 principales drogues légales en France ont diminué de 50% pour le tabac et de 25% pour l'alcool, le statut pénal du cannabis est associé à une augmentation de 20% de la consommation de cannabis chez les jeunes.
Les travaux de l'OFDT ont montré l'absence de lien direct entre statut pénal et niveau d'usage. Les données européennes récentes montrent une consommation plus élevée dans les pays ayant le traitement le plus répressif. En 2014 La France est numéro 1 en Europe avec la Tchéquie avec 46% d'expérimentations et 26% d'utilisations dans l'année.
L'Eurobaromètre 2014 montre que seuls 3% des jeunes français sont pour une libéralisation totale du cannabis; 14% demandent le statu quo pénal, 83% voudraient que le produit soit disponible dans un cadre réglementaire.
A côté de ses effets neurologiques, la consommation de cannabis a des effets respiratoires liés à la fumée (infection, BPCO, cancer) et favorise les rechutes du tabagisme liées à la co-consommation de nicotine. Ces effets peuvent être supprimés ou réduits par d'autres modes de consommation.
Pour les pneumologues, le joint de résine de cannabis associé au tabac est la méthode la plus nocive de consommation du cannabis et pourtant la plus répandue en France.
La consommation de résine avec des plantes à fumer au lieu de tabac ou la consommation de Marijuana (sommités fleuries des plans de cannabis) sans tabac supprime le sur-risque de rechute d'une dépendance nicotinique.
La vaporisation d'huile de cannabis avec de grands vaporisateurs ou des vaporisateurs ayant la forme (mais non la fonction exacte) des e-cigarettes supprime l'effet fumée et la prise de nicotine et constitue une réduction de risque à défaut d'un arrêt total de la consommation, qui est toujours l'objectif ultime en terme de santé publique.
Les connaissances sur les cannabis de synthèse non formellement illégaux vendus sur internet sont insuffisantes. Dans l'état actuel des connaissances, les médecins ne peuvent que recommander de ne pas utiliser ces produits.
REPLAY / INVITÉ RTL - Éviter le tabac et préférer l'inhalation : avec ces mesures, le pneumologue souhaite rendre la consommation de cannabis moins toxique qu'elle ne l'est aujourd'hui en France.
Une série de propositions choc qui devrait relancer le débat sensible sur la dépénalisation du cannabis. Mercredi 14 janvier, Bertrand Dautzenberg, pneumologue à la Pitié-Salpêtrière, a énoncé plusieurs mesures possibles pour lancer une façon plus saine de consommer du cannabis. Son constat est simple : l’interdiction sera toujours contournée, puisque près d’un jeune sur deux en fume en France. Autant faire en sorte, donc, que la drogue soit consommée de la manière la moins dangereuse possible.
“La France est vraiment le mauvais élève, et il y a un lien entre le type de législation et la forte consommation”, estime Bertrand Dautzenberg, pneumologue à la Pitié-Salpetrière. “Pour l’instant, j’observe que depuis le vote de la loi Evin, on constate une baisse de 50% de vente de cigarettes par Français, une baisse de 25% de vente d’alcool mais une augmentation de 20% de la vente de cannabis. Parce le cannabis est soumis à une législation totalement inadaptée, pas du tout pragmatique et qui ne marche pas”, argumente-t-il.
Supprimer le tabac en le remplaçant par des feuilles de cannabis
Sa première recommandation est d’abord de supprimer le tabac que l’on retrouve dans un joint, mélangé à la résine de cannabis, car cela entretient la dépendance à la nicotine. Il s’agirait par exemple de le remplacer par des feuilles de cannabis ou des plantes à fumer, à l’image de celles que l’on peut trouver dans les coffee shops aux Pays-Bas.
Autre danger selon le pneumologue : la fumée, extrêmement toxique pour les bronches. “Cela abîme le poumon, donne des bronchites chroniques, et augmente les risques de cancer du poumon et de maladies cardio-vasculaires”, explique le Dr Dautzenberg. Selon le médecin, il vaudrait donc mieux inhaler le cannabis sous forme liquide à l’aide de gros vaporisateurs ou d’objets ressemblant à la cigarette électronique.
"Les pétards électroniques, quant à eux, ne marchent pas bien pour l'instant", rappelle le médecin. "Dans ces objets qui ressemblent effectivement à des cigarettes électroniques, on ne met pas vraiment du cannabis mais certains cannabinoïdes de synthèse dont on se connaît pas tous les effets sur la santé", prévient le Dr Dautzenberg.
Mais au-delà de ces préconisations, qu’il présentera également au congrès de pneumologie fin janvier à Lille, Bertrand Dautzenberg souhaite qu’au lieu de criminaliser la pratique du cannabis, on la réglemente de façon très stricte, stratégie plus efficace selon lui pour dissuader les consommateurs, lutter contre les trafics et faire disparaître les produits les plus dangereux.
«Légalisez la marijuana et j’en assurerai la promotion», chantait Peter Tosh sur
(1976). Une prise de position qui lui valut de se faire battre quasiment à mort par la police. Finalement assassiné d’une balle dans la tête en 1987, l’artiste jamaïcain n’est plus là pour voir son rêve prendre forme. Car depuis quelque temps, la ganja connaît un spectaculaire retour en grâce. Légalisée à des fins médicinales en Californie et 22 autres Etats américains, puis à des fins récréatives dans l’Oregon, en Alaska et dans les Etats de Washington et du Colorado, la weed se répand en épais nuages de fumée sur tout le continent américain, jusqu’en Uruguay. Le «boom de la ganja», déjà comparé par certains à la ruée vers l’or de 1849, aurait des effets économiques miraculeux. Cette herbe serait-elle, comme le clament depuis toujours les Rastas de Jamaïque, la «panacée des nations»?
Soudain, un drone survole la maison de vos voisins pour déposer un sachet de weed dans votre jardin. Non, vous n’hallucinez pas : il s’agit du nouveau service proposé par la firme californienne Trees Delivery. Depuis que l’Etat a légalisé son usage thérapeutique en 1996, une simple consultation téléphonique permet d’obtenir une ordonnance, puis une Medical Marijuana Identification Card pour s’approvisionner en toute légalité. Depuis, les «nouveaux dealers» rivalisent d’inventivité pour servir leurs respectables clients.
Au Colorado, Etat héraut de la légalisation récréative, on trouve plus de 500 «dispensaires» ayant pignon sur rue, où l'on peut se procurer jusqu’à 28 grammes d'herbe par transaction. Les prix restent un peu chers, environ 50 dollars pour 3,5 grammes, car la marijuana est taxée à 25%. Néanmoins, loin des cohortes des petits truands hagards qui vous alpaguent au sortir des coffee shops d’Amsterdam pour vous refourguer de la coke ou de l’ecstasy, la légalisation à l’américaine semble lumineuse... et diablement rentable. Les contribuables du Colorado doivent désormais se prononcer sur l’utilisation des 10 millions de dollars de surplus de taxes générés lors de la première année d’exploitation. Ainsi, «la drogue des Latinos, des nègres et des assassins» se voit propulsée au rang d’or vert en l’espace de quelques mois. Un revirement de plus dans l’histoire mouvementée de cette plante.
Originaire d’Asie centrale, la marijuana ou Cannabis Sativa Indica, est longtemps exploitée pour le chanvre qu’elle fournit et qui sert à la fabrication de cordages (notamment pour les bateaux), de tissu ou de papier. «Il est bien difficile de situer les débuts de ce qu’on pourrait qualifier d’utilisation ‘hédoniste’ du cannabis en Chine ou en Orient» reconnaît le professeur en médecine André-Julien Fabre. Dans l’Antiquité, seul Hérodote fait mention de l’utilisation du "kannabis" en tant que psychotrope. Il rapporte en effet que les terribles guerriers Scythes de la Mer Noire jettent des graines sur des pierres rougies pour respirer la fumée ainsi dégagée, «en poussant des cris de joie».
Si d’aucuns décèlent une odeur de ganja derrière la drogue qui «apporte l’oubli» citée par Homère dans l’Odyssée, les références explicites s’avèrent peu nombreuses. «Tout fait penser que les Anciens redoutaient de voir arriver chez eux le cannabisme», en conclut André-Julien Fabre. Mais au Moyen-Âge s’ouvrent les premières routes commerciales vers l’Orient, et Marco Polo évoque en 1270 la légende des guerriers «hashashins», retranchés dans la forteresse perse d’Alamut. On leur enseigne, dit-il, les beautés de l’après-vie dans un mystérieux jardin à grand renfort de dragées de cannabis. Garcia Da Orta, Juif portugais passé aux Indes en 1534 avec l’Inquisition aux trousses (qui fera exhumer et brûler ses restes douze ans après sa mort), devenu médecin du Vice-Roi des Indes, décrit le cannabis qu’il nomme «le bangue» (on dirait aujourd'hui le bhang, ndlr). Les sujets qui s’y adonnent, dit-il, «sont comme ravis, en extase et délivrés de tout pensements (sic : de toute pensée, ndlr) et soucis, et rient pour la moindre chose qui soit» ; son ouvrage demeure le seul à évoquer l’usage récréatif de la ganja avant le XIXème siècle.
Le Club des Hachichins
Si le Colorado se dit aujourd’hui «cannabis-friendly» comme d’autres se disent «gay-friendly», c’est que la weed est sortie du placard. On peut même réserver un «ganja tour» par internet. Une limousine vous conduira alors à la découverte des paysages dantesques du Colorado, des serres où pousse le cannabis et de quelques points de vente triés sur le volet. Contenus dans d’élégants bocaux en verre, les différents germes de marijuana feront briller les pupilles des connaisseurs. Mais attention ! Fumer dans les lieux publics reste interdit. Y compris dans les restaurants McDonald’s, qui ne s’apprêtent nullement à ouvrir des sections «pot smokers», contrairement à ce que prétendait une récente rumeur.
De plus, la libre consommation ne concerne que les adultes de plus de 21 ans, et se limite à 28 grammes par achat pour les citoyens du Colorado et à 7 grammes pour les autres (mais le nombre d’achats n’est pas limité). Interdit aussi de conduire sous l’influence du cannabis ou de transporter de l’herbe dans un récipient non-hermétique. Mieux vaut potasser les petits guides légaux avant de s’allumer un pétard au centre ville de Denver. En Jamaïque, où l’on accueille la «vague verte» de la légalisation avec bonheur, l’informaticien Varun Baker a développé une application pour smartphones, Ganjagram. Elle permet de faire rapidement le point sur les avancées légales en matière d'herbe. Car l’île de Bob Marley, réputée pour donner la «meilleure ganja du monde», ne devrait pas rester à la traîne. Si la légalisation y avance à pas feutrés, la commercialisation à grande échelle s’organise déjà et, en octobre dernier, le gouvernement a autorisé une entreprise pharmaceutique canadienne, la Timeless Herbal Care (THC) Limited, à cultiver de la marijuana à des fins scientifiques.
Des recherches qui, rappelle le gouvernement, devront rester dans le cadre des «restrictions imposées par les nouvelles réglementations liées au Dangerous Drugs Act» (The Observer). L’herbe en odeur de sainteté, une nouveauté ? Pas vraiment, en fait. Malgré la répression, il y a toujours eu des cercles «cannabis friendly», notamment à Paris au XIXème siècle, où ils se regroupaient au sein du «Club des Hachischins».
Après avoir été agressé par un homme «ivre de cannabis» à son arrivée en Egypte en 1800, Napoléon promulgue un décret prohibant l’usage «de la liqueur forte faite par quelques Musulmans avec une certaine herbe forte, nommée haschisha, ainsi que celui de fumer la graine de chanvre» (Fabre). Mais ses soldats ne rentrent pas en France les mains vides, et dès 1844, le haschich se «gobe» à Paris, notamment à l’Hôtel Pimodan, sur l’Île Saint-Louis. Baudelaire, Flaubert, Victor Hugo ou Balzac se croisent au sein du Club des Haschischins, co-fondé par l’intrigant Paul Moreau de Tours (1844-1908). «Avant son voyage en Orient, personne ne consomme de cannabis en France», souligne Claude Renner dans son Histoire des sciences médicales (2012). Dans ce club sélect, on se rassemble le temps de dégustations culinaires appelées «fantasias».
Théophile Gautier décrit sa première «indigestion»: «le dîner tirait à sa fin ; déjà, quelques-uns des plus fervents adeptes ressentaient les effets de la pâte verte (...). L’eau que je buvais me semblait avoir la saveur du vin le plus exquis, la viande se changeait dans ma bouche en framboise, et réciproquement. Je n’aurais pas discerné une côtelette d’une pêche. Mes voisins commençaient à me paraître un peu originaux ; (...) leur nez s’allongeait en proboscide ; leur bouche s’étendait en ouverture de grelot. (...) L’un d’eux (...) riait aux éclats d’un spectacle invisible ; l’autre faisait d’incroyables efforts pour porter son verre à ses lèvres (...). Celui-là, renversé sur le dos de sa chaise, les yeux vagues, les bras morts, se laissait couler en voluptueux dans la mer sans fond de l’anéantissement». L’auteur succombe ensuite à de terribles hallucinations qui laissent présager des doses ingurgitées.
La lecture de ses délires cannabiques publiés dans la presse fait frémir la bonne société et entérine la réputation de substance hallucinogène de la marijuana (qui peut le devenir lorsque ingurgitée en grande quantité). La psychiatrie s’intéresse alors au cannabis, et Paul Moreau de Tours (médecin aliéniste de son état et auteur de Du Haschisch, des rêves et de l’aliénation mentale) croit même un temps y déceler la panacée à tous les désordres mentaux. Mais après quelques tentatives peu concluantes, et la «débandade» scientifique de l’entreprenant Docteur Roubaud (il tente en vain de faire l’amour à une prostituée pour tester les effets stimulants du cannabis), l’usage thérapeutique de la ganja est abandonné ; voilà qu'on le redécouvre ces dernières années. Cela fait d’ailleurs longtemps qu’il est légal au Royaume-Uni, en Nouvelle-Zélande, aux USA (dans 23 Etats), en Espagne ou en Allemagne. Si elle ne provoque pas, en son temps, l’érection escomptée chez ce bon Dr. Roubaud, la weed adoucit les effets secondaires de la chimiothérapie, combat l’asthme, les glaucomes, le syndrome de Gilles de la Tourette, la maladie d’Alzheimer ou encore l’épilepsie ; ce ne sont là que quelques bénéfices que lui trouve l’Association pour le Cannabis Médical (ACM). Du coup, évidemment, certains en profitent pour fumer sous couvert d’ordonnance.
Au Canada, où seul l’usage thérapeutique est autorisé, on trouve plus de 400 «dispensaires» cannabiques, presque tous équipés de distributeurs automatiques ! Sous des aspects de respectables «dealers de cannettes», ils délivrent de petits sachets d’herbe. Afin d’y accéder, il faut néanmoins prouver que l’on est majeur et en possession d’une ordonnance. Les distributeurs du Colorado, eux, les fameux ZaZZZ, varient l’offre et proposent du thé, du chocolat ou des bonbons à la marijuana. Une réalité étonnante, qui rappelle que l’Amérique n’a pas toujours été un pays «pot unfriendly». D’ailleurs, en 1900, on recense plus de 1000 «haschisch parlours» à New-York.
The Indian Hemp Commission
En Angleterre, Robert Burton préconise dès le XVIIIème siècle le recours au cannabis afin de traiter la mélancolie ainsi que la frigidité féminine. Mais les nouveaux maîtres des Indes se méfient de cette plante et tentent d’abord d’en réguler la consommation, puis de la taxer - en vain. Trop profondément enracinée dans les mœurs indiennes, elle appelle une tolérance de raison. D’ailleurs, les conclusions de l'Indian Hemp Commission de 1894 s’avèrent rassurantes : «il n’existe aucune preuve d’une quelconque cause à effet entre les défaillances mentales ou morales et la consommation modérée de cette drogue». Pendant ce temps, aux Etats-Unis, George Washington cultive des hectares de cannabis pour la lucrative industrie du chanvre.
L’utilisation récréative semble plus tardive aux USA, où le joint est tout d’abord assimilé aux migrants Mexicains qui déferlent sur la blanche Amérique au début du siècle dernier. «Les Blancs (...) cherchaient des excuses à leur haine raciste envers les Mexicains, écrit Scott Miller, et des rumeurs commencèrent à circuler, selon lesquelles la marijuana conférait à ses consommateurs une force surhumaine et les transformait en assassins fous. Bien que ces deux idées soient totalement fausses, elles allaient perdurer plusieurs décennies». On voit alors fleurir une littérature mélodramatique où la marijuana déclenche d’odieux crimes de sang.
Après la Première guerre mondiale, une vague de travailleurs antillais débarque à la Nouvelle Orléans avec de la ganja plein les poches. Très répandue parmi la population noire des Antilles, on la qualifie de «drogue des nègres et des joueurs de jazz» ; elle est en fait «l’herbe des Indiens» (on la nomme encore la collie weed en Jamaïque). Ce sont eux qui l’importent dans cette région du monde lors des grandes migrations du XIXème siècle. Elle se consomme en toute légalité jusqu’à la première Convention internationale de l’Opium, tenue à La Haye en 1912, et à la suite de laquelle elle rejoint l’opium, la morphine ou la cocaïne sur la liste des drogues dangereuses. En Jamaïque, le Conseil des Eglises Evangéliques fait voter la Ganja Law l’année suivante afin de lutter contre la dépravation des mœurs de ses ouailles. Le journaliste jamaïcain Louis Myston dénonce cette loi (The Gleaner, 2013) comme «enracinée dans la peur et dans la tradition de discriminer les Noirs des classes inférieures par le biais de la loi». Á Trinidad, la Ganja Ordinance de 1916 en prohibe la culture et la vente.
Le temps tourne à l’orage ! En 1937, les USA votent le Marihuana Tax Act (sic : on l'écrit alors avec un "h" à la place du "j", ndlr), loi fédérale qui jette les fondements d’une armada répressive contre l'herbe magique. On dit cette croisade orchestrée par de puissants industriels, dont le magnat de la presse William R. Hearst (qui inspire Citizen Kane à Orson Welles) qui détient de gros intérêts dans la filière du bois. Craint-il la concurrence du chanvre ? Ou bien ne cherche-t-il qu’à vendre du papier en abreuvant ses diverses publications d’articles effarants qui prétendent que la marijuana pousse les Noirs à violer des Blanches tout en jouant du jazz satanique ? Paraissent alors des ouvrages comme On the Trail of Marihuana, The Weed of Madness (Sur les traces de la marijuana, l’herbe de la folie), d’Earle Albert Rowell (1938).
«Sous son influence», y lit-on, «les prisonniers tombent éperdument amoureux les uns des autres, comme ils le feraient avec des femmes à l’extérieur». Dans son article Assassin of Youth paru dans The American Magazine en 1937, Harry J. Anslinger (responsable du US Federal Bureau of Narcotics pendant 32 ans) relate plusieurs atrocités commises sous l’emprise du haschisch. «Un crime gratuit survenu il y a quelques années (en 1933, ndlr) nous a fait prendre conscience que cette drogue ancestrale était arrivée en Amérique. Une famille entière a été massacrée par un jeune accro (Victor Licata, ndlr) en Floride. En arrivant sur les lieux, les policiers l’ont trouvé qui déambulait sans but au milieu d’une boucherie humaine. Á l’aide d’une hache, il avait tué père, mère, frères et sœur. Il paraissait être dans un état second». Cet article donne naissance à un film du même nom dirigé par Elmer Clifton en 1937 - les jeunes de la beat generation l’élèveront au rang de classique par dérision.
Finalement, la Convention Unique sur les Stupéfiants, convoquée par l’ONU en 1961 à New-York, classe le cannabis dans le Tableau 1 - celui des drogues «représentant un important risque d’abus.»
Mais Satan, jamais à cours d’idées, revêt bientôt un nouveau masque hideux pour dévoyer la jeunesse : celui de la beat generation et de sa musique dégénérée. Richard Nixon a beau «déclarer la guerre à la drogue» en 1971, pas moins de onze Etats décriminalisent la weed entre 1973 et 1977. En octobre 1977, on évoque même une décriminalisation fédérale. Mais l’austérité des années 80 tombe comme un couperet, jugeant sans complaisance la permissivité de la génération précédente. L’arrivée de Ronald Reagan à la Maison Blanche marque le début d’une nouvelle diabolisation.
Tu vas dire non à la drogue, p’tit con !
Nancy Reagan, première dame américaine, se lance dans une croisade anti-drogue au début des années 80. Elle combat toutes les drogues, mais spécialement la marijuana. Sa Just Say No Foundation connaît un succès retentissant et compte, au milieu des années 90, un million de membres à travers douze pays. Parmi ses plus ferventes supportrices se trouve Sue Rusche, une activiste forcenée de Géorgie qui, entre 1984 et 1992, alimente la presse nationale en diatribes anti-drogue avant de participer, dans les années 1990, au Parent Corps, ces «bastions de parents» qui font du porte-à-porte pour répandre la bonne parole du Just Say No sous la houlette de George W. Bush ; les plus motivés sont même salariés de l’organisation. De nos jours, l’empire de la Just Say No Foundation est en déliquescence.
Sue Rusche explique ce revirement par l’action combinée de trois milliardaires américains, George Soros, Peter Lewis et John Sperling. Le premier, à la tête d’un fonds d’investissement de 25 milliards de dollars, a en effet soutenu le projet de légalisation à des fins thérapeutiques en Californie : «sa fondation y a consacré près de 200 millions de dollars depuis 1994» précise le site Forbes.com. Peter Lewis, décédé en 2013, est quant à lui responsable de la légalisation en Oregon. «La National Organization pour Réformer les Lois sur la Marijuana estime que Lewis a dépensé plus de 40 millions de dollars depuis les années 1980 pour soutenir la dépénalisation», précise le même site. Obsédé par l’idée de prolonger la vie, Sperling est mort en 2014, à l’âge de 93 ans. Il avait, d’après Time Magazine, découvert les bienfaits médicinaux de la marie-jeanne en combattant le cancer dans les années 1960.
Bref, ce petit «illuminati de la ganja», fort d’autant d’argent et de relations, ne pouvait manquer d’atteindre son but. La réaction en chaîne ne s’est pas faite attendre. Dans le sillage des Etats-Unis, les petits Etats affidés suivent la tendance. En Jamaïque, par exemple, où la ganja renfloue les caisses des 270 gangs locaux, les policiers espèrent que la légalisation portera un coup au portefeuille des cartels. C’est d’ailleurs ce que redoute la branche canadienne du gang des Hell's Angels. Ses membres ont même manifesté contre le projet de légalisation en octobre dernier ! «Je vends de l’herbe depuis que j’ai 12 ans, confie Gino Ouellet, un «ange de l’enfer» âgé de 57 ans, au site WorldNewsDailyReport. Vous pensez que je vais aller bosser à Walmart ou à McDonald’s pour le salaire minimum ?».
Un autre «ange», déjà condamné pour un triple homicide, s’inquiète : «j’ai des tatouages partout sur le corps et le visage, qui va me donner un job ?». Le gouvernement sera-t-il sensible aux revendications de ces citoyens au-dessous de tout soupçon ? En fait, couper les vivres aux gangs est la motivation première de certaines politiques de légalisation, comme celle suivie par l’Uruguay, où un méfait sur quatre serait lié à l’abus d’alcool et de drogue. «Le pays veut endiguer la violence liée aux drogues, ôter les bénéfices des trafics des mains des narcotrafiquants et protéger les consommateurs de cannabis d'un passage éventuel aux drogues dures», lit-on sur Express.be.
Mais de son côté, le Paraguay, pays voisin, redoute au contraire une recrudescence de la consommation liée à la chute des prix (le gramme de marijuana passerait à un dollar !). Le même site rapporte les propos du ministre paraguayen de la défense : «nous sommes persuadés que l'interdiction de certaines drogues cause plus de problèmes que les drogues elles-mêmes et a des conséquences destructrices». Car son pays, second producteur de ganja au monde derrière le Mexique, produit à des prix défiant toute concurrence - à peine 45 euros le kilo. Les mafias locales pourraient bénéficier de l’ouverture du marché légal en Uruguay, et cette nouvelle prospérité s’accompagnerait probablement d’une recrudescence de meurtres, de corruption et de violences des deux côtés de la frontière.
Aux USA se pose toutefois un problème de santé publique, à commencer par la qualité de la ganja en question. Les Etats qui ont dépénalisé ont pris le parti de traiter la weed comme l’alcool, mais les deux substances ne posent pas les mêmes problèmes. La traçabilité s’avère compliquée à assurer, pour commencer. Suivre une plante depuis sa sortie de terre jusqu’au joint du consommateur est un défi nouveau. Le relever va prendre un peu de temps. Sans compter que, comme le précise le site ibtimes.com, «on ne dispose que de peu de recherches scientifiques sur la marijuana à cause de l’interdiction dont elle est frappée au niveau fédéral (...), ce qui rend presque impossible l’instauration de toute politique basée sur des faits scientifiques, comme c’est la norme en matière de santé publique». Par ailleurs, le Colorado a-t-il placé la charrue avant les bœufs en légalisant sans légiférer sur le taux maximum de tétrahydrocannabinol (ou THC, la substance psychotrope du cannabis) ?
«Le niveau de THC a augmenté d’environ 15 à 20% et les marqueurs relevés dans le haschisch ou ses concentrés ont pu atteindre les 90%», relève le New England Journal of Medecine sur des informations obtenues auprès du Colorado Department of Public Health and Environment de Denver. Assisterons-nous à une surenchère visant à proposer une herbe toujours plus forte ? «Peu après la légalisation à des fins récréatives, poursuit le site, ces produits dérivés se sont retrouvés impliqués dans la mort de deux personnes au Colorado.» La course marketing a commencé : bonbons, boissons, gâteaux ou dragées, la marijuana est déclinée à toutes les sauces.
Ce qui multiplie les risques d’ingestion involontaire, notamment chez les jeunes enfants. Rien qu’en France, où l’usage et la culture de cannabis n'ont de cesse de se développer, l’Agence du Médicament s’inquiète du chiffre croissant des intoxications recensées chez les moins de dix ans : 151 cas d’hospitalisation en 2013 pour 247 en 2014, soit une augmentation de 60%. «Les principaux signes de l'intoxication, explique L’Express, sont une somnolence avec des phases d'agitation, des vomissements, des tremblements, des convulsions, une détresse respiratoire, voire un coma». Le débat sur la légalisation peine d’ailleurs à prendre dans l’Hexagone. Dans une tribune publiée par Libération en novembre dernier, un collectif marseillais appelle à la légalisation pour œuvrer au rétablissement de la paix sociale dans les quartiers. Dénonçant une guerre onéreuse (568 millions d’euros par an) et perdue d’avance devant une horde de plus d’un million d’usagers quotidiens, le collectif estime que «la légalisation du cannabis permettrait de faire baisser le trafic et d’empêcher la lutte armée entre les trafiquants, mais surtout de mener une politique de santé publique fondée sur la prévention et l’accompagnement des usagers dépendants.»
Au-delà de rentrées fiscales non négligeables, le collectif évoque la possible création de 13 000 postes. Pour eux, ce n’est pas la marijuana qui tue, mais la pénalisation. Face à ces premiers frémissements, quelques voix s’élèvent, dont celle de Jean Costentin, professeur de pharmacologie à l’université de Rouen et président du Centre National de Prévention sur les Toxicomanies depuis 2007, qui use de slogans à l'ancienne : «le chichon rend con» confie-t-il au site de La Montagne en novembre dernier. «Pétard du matin, poil dans la main ; pétard du soir, trou de mémoire»... Il dénonce le THC comme une substance à effet persistant et assimile le pilon à de la drogue dure. Stéphanie Maruelle, professeur en région parisienne, constate de son côté que de plus en plus d’élèves arrivent «défoncés» dans ses cours. «Leurs yeux rougis et leur propension à s’endormir sur leur table prouvent qu’ils ont fumé avant de venir en cours». D’ailleurs, Valérie Pécresse vient de reprendre à son compte le vieux projet de tests salivaires dans les lycées.
«La consommation de drogue a pour conséquence la démotivation, lit-on dans le Huffington Post, le décrochage et l’échec scolaire. Lutter contre l’usage de la drogue chez les mineurs, c’est ma responsabilité de candidate». Bref, tandis que plus de 500 points de vente ont déjà ouvert leurs portes au Colorado, que le Malawi, le Mexique ou l’Iran parlent de légalisation, les premières inquiétudes se profilent derrière les sourires radieux. Faut-il les mettre entièrement sur le dos de la paranoïa que peut susciter une consommation excessive de ganja ?
Saviez-vous que d’autres plantes produisent aussi des cannabinoïdes ?
Pendant des années, on a cru que seule la plante de cannabis pouvait produire des cannabinoïdes. Les recherches des dernières années ont cependant découvert que ce n’est pas seulement cette plante qui peut produire de tels composés chimiques, et qu’ils sont même assez répandus !
Que sont les cannabinoïdes exactement ?
Les cannabinoïdes sont des molécules à base de lipides qui agissent toutes, dans une certaine mesure, sur les récepteurs cannabinoïdes qui forment l’une des composantes primaires du système endocannabinoïde. Les cannabinoïdes sont produits par des plantes (la plus connue étant la plante de cannabis), mais aussi par le corps des humains et de la plupart des autres espèces animales, et peuvent aussi être synthétisés en laboratoire.
Les cannabinoïdes produits par les plantes se nomment phytocannabinoïdes, ceux produits par le corps se nomment endocannabinoïdes, alors que les molécules synthétisées en laboratoire sont appelées cannabinoïdes de synthèse.
La plupart des adeptes du cannabis ont certainement déjà entendu parler des cannabinoïdes classiques tels le THC, le CBD, le THCV et le CBC. Pendant des années on a pensé qu’ils étaient les seuls composés agissant sur les récepteurs cannabinoïdes. Ces cannabinoïdes partagent tous la même formule chimique, C21H30O2.
Toutefois, alors que nous approfondissons notre connaissance du système endocannabinoïde, nous avons découvert que le nombre et le type des différents composés qui agissent sur ces récepteurs excèdent largement ce que nous avons d’abord cru.
À la lumière de ces découvertes, nous devons changer les critères de ce qui constitue un cannabinoïde – au-delà des quelque 120 cannabinoïdes classiques, il existe un nombre encore indéterminé de composés associés qui agissent aussi sur les récepteurs mais qui ne partagent pas la même structure classique.
Et que sont donc les composés cannabimimétiques ?
En plus des cannabinoïdes, il existe également une importante classe de composés cannabinoïdes non classiques connus sous le nom de cannabimimétiques, du fait qu’ils imitent littéralement l’activité biologique des cannabinoïdes classiques, malgré leur structure différente.
Ces composés cannabimimétiques revêtent une importance croissante dans le monde de la recherche sur les cannabinoïdes médicinaux. Jusqu’alors, le système endocannabinoïde (EC) était considéré comme un ensemble simple composé de deux récepteurs et de deux ligands (terme qui désigne un composé qui se lie à un récepteur).
Cependant, de plus en plus d’évidences suggèrent que le système EC est beaucoup plus complexe. On a découvert des dizaines de composés différents qui agissent, directement ou indirectement, sur le système EC, et plusieurs d’entre eux sont aussi impliqués dans d’autres systèmes de signalisation biologiques, tels les systèmes de signalisation opioïde, sérotoninergique et dopaminergique.
Quelques exemples de composés cannabimimétiques connus :
NAE et N-alkylamides
Les N-acylethanolamines sont une classe de composés d’acide gras qui sont largement impliqués dans les systèmes de signalisation biologique. Les NAE incluent les N-arachidonoylethanolamines (mieux connus sous le nom d’anandamides), N-palmitoylethanolamines (PEA), N-linoleoylethanolamides (LEA), et N-oleoylethanolamines (OEA).
L’anandamide est bien connu comme étant le composé biologique dont l’activité ressemble le plus à celle du THC en ce qu’il agit directement en agoniste des principaux récepteurs cannabinoïdes. On sait maintenant que l’anandamide agit aussi en agoniste d’un troisième récepteur appelé GPR119 qui est aussi affecté par le N-oleoylethanolamine.
En plus d’agir directement sur les récepteurs cannabinoïdes principaux et secondaires, on sait aussi que les NAE exercent une gamme d’effets indirects. Par exemple, le LEA, PEA et OEA inhibent les niveaux d’enzymes FAAH responsables de la dégradation de l’anandamide, pouvant donc accroître les niveaux d’anandamide dans les tissus au fil du temps.
Les composés similaires N-alkylamides n’ont pas fait l’objet d’autant de recherches, mais font aussi partie de la classe des composés cannabimimétiques. Il a été démontré qu’ils exerçaient des effets sélectifs sur les récepteurs CB et qu’ils avaient des effets anti-inflammatoires similaires à ceux de l’anandamide.
Bêta-caryophyllène
Ce terpène important se retrouve dans le cannabis, et c’est sa forme oxydée (au contact avec l’air) qui est perçue par les chiens détecteurs de drogues ! Il a été démontré que le bêta-caryophyllène agissait en tant qu’agoniste complet des récepteurs CB2, bien qu’il n’agisse pas sur les récepteurs CB1.
On a aussi relevé des effets anti-inflammatoires et analgésiques chez les souris, mais non chez les souris croisées pour être dépourvues de récepteurs CB2, ce qui montre que son action biologique s’exerce via les récepteurs mêmes.
Salvinorine A
La salvinorine A est le principal constituant de la plante psychoactive Salvia divinorum. Les phytocomposés hallucinogènes sont normalement des alcaloïdes – la mescaline, la psilocybine et la DMT – mais la salvinorine A est inhabituelle en ce qu’elle est un terpénoïde. De plus, elle est classée en tant qu’hallucinogène dissociatif, et non classique.
Plus intéressant encore, il semble que la salvinorine A n’interagisse pas avec les récepteurs cannabinoïdes classiques, mais plutôt avec un troisième récepteur putatif qui se forme apparemment seulement lors d’inflammation, et qui agit en tant que récepteur opioïde kappa (k-opioïdes). Les récepteurs k-opioïdes jouent un rôle important d’analgésiques, et sont aussi les principales cibles de la plupart des composés hallucinogènes !
Le myrcène est un autre terpène important présent dans le cannabis. C’est aussi l’un des principaux constituants de l’huile essentielle de houblon. Bien qu’on ne croie pas que le myrcène agisse directement sur les récepteurs cannabinoïdes, il a été démontré que son activité biologique modifie les effets psychoactifs du THC.
Le myrcène est retrouvé en grande concentration dans les variétés de cannabis qui provoquent chez les utilisateurs la sensation d’être stoned ou collés au divan. Les effets sédatifs des plantes qui contiennent du myrcène, comme le houblon et la verveine, sont connus depuis des millénaires. On croit aujourd’hui que ces effets sont dus à son activité d’agoniste (activation) des récepteurs opioïdes (des études ont démontré que l’antagoniste opioïde bloquait les effets du myrcène, suggérant que le myrcène est un agoniste).
Ainsi, bien que le myrcène n’appartienne pas spécifiquement au groupe des cannabinoïdes selon la littérature scientifique, il affecte certainement l’expérience subjective du high du cannabis. Les chercheurs détermineront sans doute la nature exacte de ce lien ; présentement, bien que des laboratoires d’essai, tel le Steep Hill Halent en Californie, amassent des données à ce sujet depuis des années, aucune étude formelle n’a jusqu’à présent été menée.
Les plantes qui produisent des composés cannabimimétiques
D’abord, il faut savoir qu’il existe une abondance de sources végétales de terpènes tels le β-caryophyllène et le myrcène, mais que certaines sources en sont plus riches. Le myrcène se retrouve en très forte concentration dans l’huile de houblon, représentant près de 80 % du volume d’extraction de certaines variétés. La mangue, la citronnelle, le thym et la verveine sont aussi très riches en myrcène.
Le β-caryophyllène se retrouve dans le poivre noir, le clou de girofle, le romarin, le houblon, le carvi, l’origan, le basilic, la lavande, la cannelle et plusieurs autres espèces végétales. L’huile essentielle de la plupart de ces espèces contient une importante quantité de β-caryophyllène (20 % dans certaines espèces de houblon).
La salvinorine A est beaucoup plus rare, et semble n’être présente en grande quantité que dans S. divinorum. Toutefois, des preuves indiquent que d’autres espèces de sauges contiendraient des traces du composé en question ou de molécules très similaires.
Les NAE, incluant les OAE, PEA et LEA, ont été trouvés dans plusieurs espèces végétales. Notamment, le OAE et LEA se retrouvent dans la plante de cacao, alors qu’on rapporte que les truffes noires contiennent de l’anandamine ! Finalement, le composé N-alkylamide a été trouvé dans plusieurs espèces d’échinacées, et l’importance de cette plante en médecine naturelle pourrait être liée à ce composé.
Éventuellement, la liste de plantes contenant des composés cannabimimétiques s’allongera drastiquement, alors que les chercheurs continuent de découvrir des composés capables d’agir sur le système EC.
Outre le cannabis, existe-t-il d’autres plantes qui produisent des cannabinoïdes classiques ?
Jusqu’à très récemment, il semblait en effet que seule la plante de cannabis pouvait produire de vrais cannabinoïdes classiques. Cependant, cette notion conventionnelle a dû être renversée lorsqu’en 2012, on a découvert la présence de cannabidiol (CBD) dans les graines de lin ! Du moins, la plante produit un composé de type cannabinoïde très similaire au CBD qui semble présenter les mêmes propriétés anti-inflammatoires.
Toutefois, une recherche bien antérieure à la précédente a suggéré que le composé cannabigérol (CBG) et son précurseur, l’acide cannabigérolique (CBGA) sont présents dans une plante sud-africaine, et une étude plus récente (2011) a quant à elle suggéré la présence de cannabichromène (CBC) et de composés de même type dans le rhododendron chinois.
Finalement, il existe une plante, l’hépatique (Hepaticophyta) de la Nouvelle-Zélande, qui produit un type inhabituel de cannabinoïde (appelé acide perrottetinenique) qui semble être étroitement lié au THC, si bien qu’il pourrait effectivement agir sur le récepteur CB ! Si tel était le cas, il représenterait le seul autre composé trouvé dans la nature capable d’une telle interaction. Cependant, nous ne savons pas encore si ce composé peut agir ou non sur le récepteur CB .
Une chose est certaine : aucune autre plante, à part le cannabis, ne produit de THC.
Son principe actif, le THC, présente des similitudes avec l’hormone du lien social.
Si fumer du cannabis est souvent perçu comme un moyen de faciliter les relations sociales ou de calmer l’anxiété, c’est peut-être en raison de son principe actif : le THC (tétrahydrocannabinol). Il emprunte en effet la même voie de signalisation dans le cerveau que celle de l’hormone du lien social et maternel, l’ocytocine, indiquent des chercheurs de l’université de Californie à Irvine (États-Unis).
THC et ocytocine stimulent les mêmes récepteurs dans une région du cerveau responsable du sentiment de récompense. De plus, ont découvert les scientifiques américains, cette stimulation augmente, chez les souris, le plaisir à retrouver des congénères. Le cannabis serait donc un substitut des effets bénéfiques d’une reconnaissance sociale ou maternelle passant par la production d’ocytocine, en plus de son action déjà connue contre l’anxiété.
Des médicaments produisant cette action sans les effets délétères de la drogue sont envisagés par les chercheurs, notamment pour soulager certains troubles psychiques.
Article extrait du mensuel Sciences et Avenir n°826 disponible en kiosque jusqu'au 1er janvier 2016
Source: sciencesetavenir.fr
La légalisation du cannabis aux Etats-Unis a transformé les lieux d’achat précaires et illégaux en business florissants et désireux d’attirer leur clientèle. Certains dispensaires ont fait le choix d’une présentation haut de gamme, designés avec goût par des entreprises spécialisées dans l’industrie du cannabis.
Ces dispensaires ont su créer des espaces sophistiqués, pour offrir une expérience d’achat agréable à leurs clients. Voici une sélection des plus beaux dispensaires des Etats-Unis, classés par Etat.
Etat de Washington L’Evergreen Market
Situé à 15 minutes du centre de Seattle, et dispensaire le plus proche de l’aéroport international Sea-Tac, le dispensaire Evergreen Market installe une ambiance familière. Conçu par les propriétaires avec l’aide d’un architecte ayant travaillé pour plusieurs Starbucks, l’espace reflète le style de vie robuste du Nord-Ouest avec du bois récupéré d’une grande et de l’acier ondulé.
Un mur en saule torsadé sépare l’entrée du reste du dispensaire qui propose un « bar éducatif » et une molécule de THC gravée dans le sol. L’Evergreen Market devrait ouvrir un deuxième dispensaire à Auburn, Washington, à l’été 2016.
Oregon Le Bridge City Collective
Ayant grandi dans l’entourage d’artistes et de designers grâce à un père épris de marketing, le propriétaire David Alport a appris deux ou trois choses sur le branding, l’identité et le design à travers les années.
En collaboration avec des artisans locaux, il a matérialisé sa vision d’un lieu emblématique du Nord-Ouest Pacifique moderne. Les bancs et le bar ont été fait en noyer local. Une fresque murale et des plantes complètent un look très cool.
Californie L’Apothecarium
Une porte en bois frappée d’acier marque l’entrée de ce petit bijou situé dans un bâtiment du début du siècle dans le quartier historique de Castro. L’intérieur impressionne par une ambiance de vieille pharmacie qui mélange des éléments traditionnels comme un papier peint et des lustres en cristal victoriens avec un mobilier moderne. Les menus sont reliés avec du cuir, des compositions florales sont changées quotidiennement, le comptoir est en marbre, et le dispensaire accueille des oeuvres d’artistes locaux.
Le Sparc
Le studio d’architecte Sand Studios est derrière le design du San Francisco Patient and Resource Center (Sparc), un collectif cannabique non-lucratif qui existe depuis 2001. Le look minimaliste mêle sol en ciment, étagères en acier et lustres en verre, avec des récipients en bois pour conserver les produits. Le comptoir de vente est fait main en chêne local incrusté de verre et fixe définitivement le chic dans la boutique.
Le Green Easy
En exercice depuis 2009, le Green Easy se distingue des centres commerciaux de Los Angeles. De confortables fauteuils bleus vous attendent dans l’entrée, avec un sol en marbre blanc qui mène à une pièce principale minimaliste aux accents de cristal.
Arizona Le TruMed
Le studio de design High Road a été fondé en 2013 et se concentre sur la clientèle liée au milieu du cannabis. La fondatrice et designer Megan Stone s’est inspirée des tendances des boulangeries et autres magasins de cupcakes pour imaginer ce nouveau dispensaire qui a pris place dans un ancien magasin de pneus. Utilisant au départ l’esthétique propre et moderne du TruMed, Megan Stone a installé une ambiance incroyable.
Nouveau-Mexique Le Minerva Canna
Un autre projet du studio High Road. Le Minerva Canna propose un dispensaire traditionnel, avec un gros shop et un magasin d’accessoires et de vêtements au sein d’un même espace. Les matériaux utilisés mélangent pierre et bois, avec un sol en ciment brut, des tapisseries en cuir et en velours, des carreaux de verre et du métal brossé pour donner une atmosphère décontractée.
Colorado Le Silverpeak Apothecary
Le studio Tanagram Design, spécialisé dans la création d’espaces de marque aux Etats-Unis, en Espagne, en Argentine et en Uruguay, a été interrogé pour « complètement repenser la culture du cannabis pour amener une nouvelle ère de responsabilité et d’acceptation sociales » en 2013.
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Desservant les résidents et visiteurs d’Aspen, station de ski de luxe, le Silverpeak Apothecary abrite des lignes propres, de la lumière naturelle et des bois riches qui rendent le cannabis encore plus beau. Cerise sur le gâteau : tous les achats sont présentés sur un plateau d’argent.
Le Good Chemistry
Le studio Your Green Contractor, fondé par Nathan Mendel pour travailler spécifiquement avec l’industrie du cannabis, a apporté au Good Chemistry sa vision pour un dispensaire tout juste ouvert près de Denver. Ils ont monté ensemble ce lieu de 300m² élégant et à la pointe de l’esthétique, divisé en 4 espaces qui se distinguent chacun par une couleur en fonction des effets recherchés : stimulation, sommeil, déstress et relaxation. Un comptoir en noyer et acier accueille les visiteurs.
Le Native Roots
Ce qui a commencé comme un simple dispensaire médical a évolué en chaîne de 14 magasins à travers l’Etat du Colorado. Missionnant leur propre équipe de design, chaque magasin intègre sa propre signature minimaliste au look industriel : des planchers en béton, et des murs en bois blanc et en acier noirci.
A lire : Les premières stations service « gasoil et cannabis » ont ouvert au Colorado
Les murs graphiques en noir et blanc typiques ont définitivement donné leur look typique à ces dispensaires du Colorado.
District de Columbia Le Capital City Care
Premier dispensaire de son District, le Capital City Care ne devait pas se louper. Et en embauchant le Studio 3877, un cabinet d’architecte renommée et plusieurs fois récompensé, ce bâtiment de grès brun met en avant un hall très éclairé aux murs en briques avec des sols en érable. Le dispensaire, proche de la Maison Blanche, a été spécialement conçu pour abriter une boutique d’accessoires et un lien de conseil.
Dans la petite localité de Senada, tous les habitants cultivent le kif, seul moyen de subsistance dans une région marquée par la pauvreté et le racket. Saïd est l’un d’eux.
Crédit: Tarek Bouraque
« C’est mon père qui a commencé, il y a 25 ans, à cultiver du kif sur une petite parcelle de 1000 mètres carrés », nous confie Saïd, qui entame ses cinquante printemps. Toute sa vie d’adulte, il n’a vécu que grâce à cette plante. Comme les autres paysans de la région, Saïd n’est pas propriétaire du terrain qu’il cultive. L’écrasante majorité des paysans est donc doublement menacée: d’abord par l’illégalité des cultures, puis par le risque que le propriétaire des terrains cultivés débarque à tout moment.
Nous sommes à cinquante kilomètres d’Al Hoceïma. Dans ce décor, une énorme kasbah surgit de nulle part dans la plaine où est situé le petit village de Senada. La légende veut que la forteresse ait été construite par les Almohades il y a huit siècles, au moment où Maroc et Andalousie ne faisaient qu’un. Aujourd’hui, deux cages disposées de part et d’autre de la kasbah laissent penser que l’édifice historique sert de terrain de football. Laissée à l’abandon, la citadelle est entourée de toutes parts de champs de cannabis. C’est ici que démarre la longue ceinture du kif, qui va de Senada à Ksar El Kébir.
Feu vert de l’État
Dans cette vallée qui compte environ douze mille âmes, « 100% des habitants vivent directement ou indirectement de la culture du kif », nous affirme Mohamed Bounab, acteur associatif. C’est d’ailleurs ce dernier qui nous a fixé rendez-vous avec Saïd, un des rares paysans cultivateurs de cannabis à avoir accepté de se confier. A quelques pas de la citadelle en ruines, le cultivateur nous reçoit chez lui, dans sa fermette au charme bucolique. « Entrez, vous êtes les bienvenus », nous lance-t-il, affable, avant de se précipiter à la cuisine pour nous préparer du thé.
L’introduction du kif à Senada date de 1985, après une rude période de sécheresse. « La localité s’était vidée de ses habitants. La majorité a émigré, seuls quelques-uns sont restés pour surveiller les propriétés en cas de retour à Senada des propriétaires. A ce moment, un des notables et gouverneur de la région avait donné son feu vert aux paysans pour introduire la culture du kif », rapporte Mohamed Bounab, entre deux gorgées de thé. A cette époque, le Rif sort d’une période de tension, les émeutes du Rif ont eu lieu un an auparavant, la rupture entre la région et Hassan II est consommée. Le père de Mohammed VI avait, dans un discours adressé à la nation, traité les habitants du Rif de « racaille » (awbach dans le texte), vivant « du vol et de la contrebande ». C’est ce qui explique, selon Mohamed Bounab, que « la culture de cannabis ait alors été encouragée par l’État pour éviter à la région de nouveaux soulèvements ».
Sur la route des « tamtams »
Tout au long de notre visite dans ce bout de Maroc, l’écho des « tamtams » des petites exploitations du village nous a accompagnés. Chaque jour, Saïd et les autres petits cultivateurs transforment la résine de cannabis en poudre en utilisant des tamis sur lesquels ils tapent avec deux bâtons de bois. Cette symphonie des percussions marque la transformation du kif en haschich. Compressé en boulettes ou plaquettes, ce haschich voyagera vers les marchés nationaux et internationaux.
Où est alors l’État à Senada? Ici c’est la gendarmerie royale qui veille sur la région. Notre cultivateur explique entretenir des relations très tendues avec ces représentants de l’autorité. « La gendarmerie, je n’en ai pas peur. Ils débarquent tous les 28 du mois. Dès qu’ils m’entendent transformer mon kif en haschich, ils viennent prendre leur commission. C’est comme si je leur payais un loyer », témoigne, avec beaucoup d’humour, Said. Quand nous lui demandons s’il a essayé des cultures alternatives, il réagit vivement: « Que voulez-vous cultiver sur 1000 mètres carrés. Des tomates? J’y perds plus que j’y gagne. Les céréales, n’en parlons même pas. Seul le kif me permet de dépanner». Selon l’Observatoire français des drogues et toxicomanies, la culture de cannabis « est 12 à 46 fois plus rentable que les cultures de céréales ».
La peur et deux sous
Cette année, le haschich se vend à 5 dirhams le gramme, bien loin des 20 dirhams le gramme des années 1990. « C’est dû, en partie, à la dépénalisation survenue dans certains pays européens, où ils commencent à cultiver sur place leur propre cannabis », affirme Mohamed Bounab. « On ne fait que survivre », soupire Saïd. Les paysans comme Saïd constituent la première chaîne du trafic de cannabis. Du bznass (l’intermédiaire, ndlr) à “l’exportateur” jusqu’au revendeur final, le produit prend de la valeur. Il peut être vendu jusqu’à 120 dirhams le gramme en Europe. Mais Saïd en veut particulièrement aux barons de la drogue: « C’est dégoûtant. Certains se sont fait des millions alors qu’ils ne sont jamais allés à l’école. Nous, nous n’avons rien, à part la peur et deux sous ».
Dans la caverne d’Ali Baba
Lorsque nous évoquons avec lui le débat sur la dépénalisation du cannabis, Saïd acquiesce: « Oui, j’en ai entendu parler. Bien sûr que c’est une bonne chose. Personne ici ne veut continuer à vivre dans la peur ». Mais si ce dernier affiche sa connaissance du débat en cours sur la dépénalisation, certains petits paysans demeurent tout de même perplexes. « Il y a une peur face à l’inconnu. Ils ne savent pas dans quelles conditions cette légalisation pourrait se faire. Mais quand vous usez de pédagogie avec ces gens, qui sont pour la plupart analphabètes, ils finissent par comprendre. Personne n’est contre quelque chose qui va dans son intérêt », nous explique l’acteur associatif.
Alors que nous nous apprêtons à remercier Saïd pour son hospitalité, le paysan insiste lourdement pour nous montrer sa « caverne d’Ali Baba ». Une petite chambre, coincée entre un poulailler et une petite grange, lui sert de lieu de stockage de la récolte. Nous n’avons pas encore franchi la porte que l’odeur de chanvre nous arrive déjà. « Voici le résultat de quatre mois de travail. Il doit y avoir ici entre entre 400 et 500 kilos de kif ». Combien espère-t-il gagner en vendant sa récolte? « Pas plus de 15 000 dirhams. Ce qui constitue mon unique revenu durant toute une année. C’est avec ça que je dois nourrir ma famille et envoyer mes gosses à l’école», nous lance le cultivateur. A Senada, tout le monde vit dans l’illégalité, tout le monde le sait, et tout le monde attend un geste de l’État pour qu’enfin le statu quo soit brisé et que les milliers de cultivateurs de kif puissent vivre dignement de leur labeur.
Les Nouvelles Calédoniennes
Devant l’émergence d’une population de jeunes cancéreux, les pneumologues accusent l’intoxication précoce au cannabis. Soupçons confortés par la forte présence de métaux dans l’herbe cueillie en terrain minier.
Photo: Aurélien Lalanne/lnc.nc
Si la culpabilité du tabac n’est plus à démontrer, de forts soupçons pèsent désormais sur le rôle du cannabis dans le cancer du poumon chez les jeunes. En l’espace de cinq ans, 35 patients de moins de 45 ans ont été diagnostiqués de cette tumeur, dont 13 depuis le début de l’année sur le Caillou (Nouvelle Calédonie). C’est beaucoup pour un petit centre hospitalier comme celui de Gaston-Bourret. « Il se passe quelque chose sous nos yeux », alerte Hervé Levénès, pneumologue au CHT.
Même constat dans la profession libérale. La grand-messe de pneumologie et d’allergologie qui s’est close hier a été l’occasion de mettre un « petit coup de sonnette » sur un risque qui paraît « urgent ». « Ce phénomène bouleverse notre équilibre car ces malades sont plus jeunes que les médecins, et aussi jeunes que les infirmières qui les prennent en charge », déplore le médecin.
Un « rite initiatique »
Une étude rétrospective basée sur le service de pneumologie révèle l’apparition d’une nouvelle population de jeunes cancéreux. Ce qui frappe ? Des cancers « très agressifs », essentiellement chez les individus masculins (70 %), et d’origine mélanésienne (60 %). Quant à la province d’origine, elle « semble essentiellement du Nord ». Une disparité qui interroge sur « le déficit d’accès au soin ».
Ceci dit, pourquoi incriminer le cannabis ? Le recueil de données auprès des patients atteints trahit une histoire commune. « On a l’impression que tout se passe entre 11 et 13 ans » indique le pneumologue. Echec scolaire, désocialisation et déscolarisation à l’entrée au collège. Résultat : l’enfant « malheureux » se réfugie dans le « tabagisme intensif de cannabis » qui, outre ses effets anxiolytiques et antalgiques, présente l’avantage d’être gratuit dans certains lieux, puisque de « production locale ». A cela s’ajoute une forme de « rite initiatique ». Les médecins le savent, ces données « partielles » méritent d’être affinées par une étude épidémiologique et toxicologique, pour engager, à terme, une prévention ciblée du risque.
« Les liens sont difficiles à prouver entre le cancer bronchique et le cannabis (…). Nous n’avons pas d’outil robuste de mesure comme pour le paquet de tabac à l’année. Il n’en reste pas moins que l'inquiétude est majeure », assène Hervé Levénès. « On ne peut pas rester dans le doute », renchérit Bertrand Mellin, un de ses homologues du privé.
Produit d’une économie parallèle
Nickel, cobalt, chrome, manganèse : plus récemment, ce doute est conforté par la découverte de forte teneur en métaux toxiques dans la marijuana cultivée à proximité de terrain minier. « Certains taux sont nettement supérieurs à ce qu’on peut relever dans les tabacs les plus riches en métaux lourds », indique Yann Barguil, biochimiste du CHT. Certains échantillons, sur les 55 prélevés en Calédonie, présentent une teneur en nickel près de 500 fois plus élevée. Et comparé à « l’herbe » cultivée sur les terrains pollués du Nigeria, l’herbe calédonienne est « sans commune mesure. » Produit d’une économie parallèle au même titre que le tabac de contrebande, elle ne fait bien évidemment pas l’objet de contrôle de ses sols.
« Le cannabis est déjà toxique puisqu’il contient du goudron », ajoute le scientifique. « Les métaux viennent s’ajouter à sa toxicité, car lorsqu’ils sont brûlés, donc oxydés, ils prennent une forme volatile qui les rend encore plus réactifs. » Se pose dès lors la question d’éventuels autres vecteurs de contamination, dont les produits agricoles.
Pour la troisième année, «Libération» s’associe à la Global Drug Survey, enquête internationale sur les drogues auprès des usagers. Au cœur de l’édition 2016, la répression et ses effets.
Manifestation pour la légalisation du cannabis, à Paris le 9 mai. Photo Albert Facelly pour Libération
Et si, pour définir des politiques de prévention sur les drogues, on écoutait d’abord les usagers ? C’est l’idée de la Global Drug Survey (GDS), une grande enquête qui donne la parole aux consommateurs, de façon anonyme et confidentielle. Quelles drogues prenez-vous ? A quelle fréquence ? A quel prix ? Que faites-vous quand ça se passe mal ? Où l’achetez-vous ? Votre avis compte (1), il permettra de mieux connaître les usages, de renseigner les experts et les politiques et, finalement, d’inspirer des conseils de précaution dont vous serez les premiers bénéficiaires.
Libération est, pour la troisième année consécutive, le média français associé à ce projet qui couvre une vingtaine de pays. Cette année, 102 000 personnes ont participé à l’enquête, dont 8 696 en France (âge moyen : 29 ans). 94 % d’entre elles avaient déjà pris une drogue illégale, mais l’enquête s’intéresse aussi aux drogues légales : alcool, tabac, médicaments sur ordonnance… Alors participez !
Mieux connaître les usages
N’étant pas basée sur un échantillon déterminé, la GDS ne délivre pas de résultats représentatifs. Mais elle éclaire sur les pratiques, pas toujours bien connues. Car si l’usage de drogues est un phénomène massif, il évolue très vite, souvent sans que l’on puisse mesurer ces changements. Pour mieux le documenter, «il faut donner la parole à ceux qui les connaissent le mieux : les consommateurs», estime Adam Winstock, le psychiatre londonien à l’origine de la GDS.
Les politiques de prévention, selon lui, s’intéressent surtout «à une minorité d’usagers qui ont développé une dépendance», ignorant ceux qui «aiment boire et prendre des drogues» pour le plaisir. Or, la plupart des consommateurs «ne subissent pas de conséquences graves» de leur usage. Ils réduiraient mieux les risques si les messages officiels ne les enjoignaient pas à l’abstinence. Laquelle n’a guère de sens, sauf pour le tabac : «Ne pas en fumer est un excellent conseil de santé, car le risque d’addiction est plus grand que pour la majorité des drogues, et un usage même faible accroît les risques de maladie du poumon et de cancers, explique Winstock. Mais pour la plupart des autres drogues, le concept de tolérance zéro a une efficacité zéro.»
Prendre des drogues, c’est prendre des risques. Il convient donc de respecter des règles, estime le spécialiste des addictions : «Comme pour conduire une voiture, on peut appliquer certaines règles pour rester en sécurité.» Ces règles, la GDS en a déjà consigné dans un «code de bonne conduite», le High-Way Code (jeu de mots sur high, qui signifie «haut» mais aussi «défoncé»). Disponible - en anglais uniquement - sur son site, il est farci de conseils en fonction des produits (cannabis, alcool, LSD, kétamine, etc.).
La GDS offre d’autres services : pour savoir si l’alcool nous rend insupportable (Onetoomany.co, «un coup de trop»), mesurer sa consommation de drogues (Drugsmeter.com) et d’alcool (Drinksmeter.com). La GDS édicte aussi des règles de précaution pour les usagers de cannabis, basées sur les réponses de 40 000 d’entre eux (www.saferuselimits.co). Tout ceci est uniquement en anglais, mais pas de panique : pour des conseils en français, le site officiel dépendant du ministère de la Santé (Drogues-info-service.fr) est très bien fait.
Les thèmes de la GDS 2016
Pour affiner son travail, la GDS 2016 a besoin de vos avis sur différents thèmes. D’abord, l’évolution des prix des drogues. Elle veut aussi savoir si la pureté accrue de certains produits (cocaïne, MDMA), combinée à une minimisation de leur dangerosité, accroît le risque pris par les consommateurs. Autre objectif cette année : détecter les nouvelles substances sur le marché, ainsi que les techniques de consommation novatrices, comme la vaporisation (pour le tabac et les substances illégales). Les nouvelles zones de commercialisation (Internet officiel, darknet) seront aussi explorées.
La GDS 2015 a mis au jour quelques tendances : la consommation préoccupante d’alcool en France, le retour en grâce de l’ecstasy, l’attrait toujours fort pour la cocaïne malgré sa très mauvaise qualité, le risque des médicaments sur ordonnance, la vente de plus en plus répandue sur Internet, l’essor des NPS (nouveaux produits de synthèse), le danger du cannabis de synthèse.
L’impact de la répression
La GDS veut également mesurer l’effet dans le monde de la dépénalisation des usages, notamment sur le cannabis. Bonne idée. Sauf qu’en France, c’est l’inverse que l’on mesure, comme le démontre une enquête fouillée de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) d’octobre 2015.
«En deux décennies (1990-2010), les interpellations d’usagers ont été multipliées par sept pour le cannabis», explique la chercheuse de l’OFDT Ivana Obradovic. Contrairement au discours officiel prétendant que la justice cherche surtout à faire tomber des réseaux, les consommateurs sont les plus visés : «L’activité des forces de l’ordre est centrée sur la lutte contre la demande», note la chercheuse.
Depuis 1970, les interpellations d’usagers ont augmenté «trois fois plus vite» que celles d’usagers-revendeurs et de trafiquants. Et parmi les consommateurs, on cible ceux de cannabis : en 1985, ce produit représentait 40 % des interpellations. Aujourd’hui, 90 %.
Ivana Obradovic rappelle tout l’intérêt d’interpeller des consommateurs : ces infractions étant élucidées dès qu’elles sont constatées, elles permettent de faire remonter le taux d’élucidation, qui «peut ainsi atteindre, et même dépasser, 100 %». Car lorsqu’on interpelle un usager, on constate parfois d’autres infractions.
Alors n’hésitez pas si vous aussi vous avez été arrêté, participez à la GDS, qui en tirera les leçons. Notamment celle-ci : quel est l’effet de cette politique ? L’étude de l’OFDT laisse songeur. Même si, en 2013, 163 497 personnes ont été mises en cause pour usage de stups, plus 17 702 pour usage-revente, cela représente «moins de 4 %» des usagers de cannabis. Dont le nombre, en augmentation, atteint 4,6 millions de personnes en France, selon les estimations.
L’accroissement des interpellations n’a donc pas d’impact sur la consommation - une donnée vérifiée par de nombreuses études. Et ce, bien que cette hausse s’accompagne de sanctions accrues. Les classements sans suite sont de moins en moins fréquents, le taux de réponse pénale est passé de 79 à 97 % entre 2001 et 2013.
Dans les condamnations pour affaires de stups, la part de l’usage a triplé entre 2002 et 2013, passant de 22 à 59 %. En 2013, 33 645 personnes ont été condamnées pour usage (en majorité du cannabis) en infraction unique. Soit «6 % des condamnations délictuelles prononcées sur une année». En 2014, 102 000 affaires d’usage ont occupé les tribunaux.
Une contravention pour le premier usage ?
Le système actuel engorge la justice sans régler le problème. Certes, le gouvernement a mis en place, le 15 octobre, la «transaction pénale» qui permet, après accord du parquet, de proposer une amende pour usage simple. Cela ne signifie pas que la justice sera plus clémente, ou que l’on va vers la dépénalisation.
Car la gauche se montre bien plus répressive que ne le fut la droite, et refuse de corriger le tir, de peur de passer pour laxiste. L’opposition, elle, se veut plus pragmatique. En septembre, le Sénat - à majorité de droite - a adopté un amendement au code de la santé publique proposé par Les Républicains : il punirait «la première infraction» d’usage d’une simple contravention de troisième classe, «accompagnée des coordonnées des centres spécialisés de soins aux toxicomanes les plus proches». Cela remplacerait la sanction actuelle (maximum d’un an de prison). En 2003, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, avait déjà proposé pareille modification, avant de faire machine arrière.
Mais l’Assemblée nationale, à majorité de gauche, devant laquelle le projet de loi santé doit revenir en discussion, acceptera-t-elle cette modification ? Pas sûr. La ministre de la Santé, Marisol Touraine, s’y oppose, car ce «serait un mauvais signal à adresser». Si vous voulez que cela change, donnez votre avis dans l’enquête GDS.
La Marijuana est légalisée dans certains états des States et est devenue un véritable business pour certains.
La chanteuse Rihanna, malgré une carrière profitable dans le monde de la musique, a l’intention de lancer sur le marché américain une toute nouvelle entreprise: une marque de cannabis appelée MaRihanna.
Selon les sites web spécialisés en musique et en célébrités, la star a annoncé l’info lors de la High Times Cannabis Cup, un festival spécialisé dans les médicaments psychotropes, qui se réalise à Negril, en Jamaïque. Le lancement est prévu pour le premier semestre de 2016.
Le haschisch, aussi connu sous les noms de cannabis et de marijuana, est partiellement légalisé aux États-Unis. La substance est légale dans les états du Colorado, de Washington, de l’Oregon et de l’Alaska, mais toujours illégale dans le reste du pays. Ce business est également exploité par Willie Nelson et Snoop Dogg, qui ont lancé des entreprises similaires, appelées respectivement, de Willie’s Reserve et Leafs by Snoop. A l’instar de Snoop, la chanteuse est une consommatrice avide de la drogue en question.
Selon les informations publiées par la presse, la marque MaRihanna sera composé de différents types de marijuana. Pour différencier les échantillons les uns des autres, il y aura plusieurs lignes : chaque produit recevra un nom personnalisé, parmi lesquels Jamaica High, Haitian Haze et Karibbean Kush.
La chanteuse Rihanna, de son vrai nom Robyn Rihanna Fenty, est âgée de 27 ans et elle a commencé sa carrière musicale en 2005. Découverte lors d’une audition par le producteur Evan Rogers, elle atteint la même année le top 10 du Billboard. Il n’a pas fallu longtemps pour qu’elle devienne une star mondiale et devenir une référence dans l’univers pop internationale. La chanteuse a également un autre commerce : Rihanna Umbrellas, qui vend des parapluies.
Alors ?
Après trois décennies d’existence, nous sommes en mesure de reconnaître ce qui est la base de Sensi Seeds : la plante de cannabis et les impacts qu’elle a sur tous ceux qui sont familiers avec elle. Pensez-y quelques instants. Vous souvenez-vous de la première fois qu’elle vous a apporté un high ? Nous parions que vous pouvez même vous rappeler l’endroit où vous étiez et les gens avec qui vous avez partagé ce moment.
Cette expérience, notre fondateur Ben Dronkers l’a aussi vécue, et c’est ce qui l’a incité à lutter en faveur de la plante de cannabis. La même chose peut-être dite d’un de ses meilleurs amis, Jack Herer. Dans cet article, nous tracerons le parallèle entre les parcours des deux hommes, et nous expliquerons comment ils sont parvenus à faire progresser la communauté cannabique tout entière.
L’introduction de Jack à la plante
C’est en 1969 que survient un tournant majeur dans la vie de Jack Herer. Il avait jusqu’alors été un Américain conservateur, de droite, partisan de la guerre du Vietnam, et réfractaire au cannabis et à la culture hippie avec laquelle on associait la plante. Cependant, l’amour qu’il porte à une femme qui le convainc de fumer un joint vient ébranler ses convictions. Il ne ressent aucun effet les premières fois qu’il fume – probablement en raison de ses réticences envers le cannabis et du fait qu’il ne sait pas à quoi s’attendre. Sa copine ne se décourageant pas, elle décide d’acheter le meilleur cannabis qui soit, et de fait, Jack ressent son tout premier high. L’homme développe envers la plante un attachement qui ne cessera de se renforcer, jusqu’à sa mort.
L’introduction de Ben à la plante
Pour sa part, c’est quelques années plus tôt que Ben Dronkers expérimente pour la première fois le cannabis. Un ami était parvenu à trouver un morceau de hash, et avec lui, Ben fume son premier joint. Il aime son expérience, mais n’en est pas renversé ; il ne comprend d’abord pas le branlebas qui entoure le cannabis. Comme il a été dit de Jack, Ben ne commence à ressentir réellement les effets qu’après son deuxième ou troisième joint.
Dans son processus de familiarisation avec le cannabis, Ben profite d’un atout : de sa mère, il hérite un amour pour les plantes. Ben est fasciné par le fait que les fleurs séchées et la résine d’une plante puissent procurer d’aussi agréables effets. Et cette fascination l’encourage à pousser plus avant son exploration cannabique.
Jack s’attache de plus en plus à la plante
Une fois qu’il découvre le cannabis, Jack devient soudainement sensible aux arguments des opposants à la guerre du Vietnam. Il adopte une position de plus en plus progressive, et en 1973, il commence à publier avec un ami des bandes dessinées au sujet du cannabis. Ses histoires font aussitôt sensation, et les lecteurs présument que Jack Herer s’y connaît largement en matière de cannabis. Ne voulant pas les décevoir, Jack décide de se plonger dans une étude approfondie de la plante.
C’est alors que s’ouvre à lui un monde nouveau. Jack Herer découvre que le chanvre est au service de l’humanité depuis des milliers d’années. Plus il en apprend au sujet de la plante, plus il s’y attache, et plus vive devient son aversion envers l’interdiction qui pèse sur elle et la propagande déployée pour maintenir son statut illégal.
Ben s’attache de plus en plus à la plante
De son côté, Ben développe aussi une conscience plus large, et fait l’expérience des qualités spirituelles de la plante. Lui aussi devient de plus en plus choqué par les interdictions appliquées au chanvre et au cannabis, mais son aversion est issue d’une perspective différente. Vers le début des années 70, il voyage fréquemment en Turquie, en Afghanistan et au Pakistan et découvre qu’on y utilise le chanvre en tant que matériel. Les paysans partagent avec lui leur cannabis et leurs graines, et Ben réalise rapidement que le cannabis comme le chanvre, plantes bannies et interdites dans tous les recoins de la planète, peuvent véritablement enrichir l’humanité.
Ben commence donc à cultiver et à croiser différentes espèces dans le but de combiner leurs propriétés et de parvenir à développer de nouvelles variétés. Dans le processus, il éprouve un attachement de plus en plus sincère et profond à la plante de cannabis : une admiration devant sa beauté, son caractère, son adaptabilité et sa vigueur. Cette affection toute particulière le porte de par le monde, dans des endroits et des cultures où le cannabis et le chanvre font partie de l’héritage médicinal, culturel et spirituel depuis des millénaires.
L’arrestation de Jack Herer
En janvier 1981, quelques jours avant l’investiture de Ronald Reagan, Jack Herer et cinq autres personnes recueillent des signatures pour une campagne prochanvre près des édifices fédéraux de Los Angeles, en Californie. Lorsque Ronald Reagan arrive sur les lieux, il croit d’abord avoir affaire à un groupe de protestataires canadiens, prenant la feuille de cannabis pour la feuille d’érable du drapeau canadien. Lorsqu’on l’informe qu’il s’agit d’activistes procannabis ayant la permission de protester, Reagan déploie tous les moyens en son pouvoir pour les faire arrêter quand même. Avec succès. Les cinq personnes reçoivent chacune une contravention de cinq dollars, alors que Jack est envoyé en prison où on le gardera pendant deux semaines. C’est durant ce séjour qu’il élabore le plan qui aura une profonde incidence sur sa vie.
Les multiples emprisonnements de Ben Dronkers
Durant la même période, Ben Dronkers s’affaire à cultiver de la marijuana et à croiser différentes espèces pour créer de nouveaux hybrides. À cette époque, c’était le haschisch qui était largement fumé aux Pays-Bas. Le cannabis était relativement peu connu, et était importé de la Thaïlande et de l’Afrique sous forme de blocs bruns compressés. Lorsque Ben tente d’introduire son cannabis dans les premiers coffeshops, le succès est loin d’être au rendez-vous. « Ils ont même appelé ça des épinards », partage Ben dans cet interview du blogue de Sensi Seeds.
Jack Herer écrit L’Empereur est nu
En 1974, Jack a une vision. Une croyance ferme s’empare de lui et devient l’œuvre de sa vie. Jack veut convaincre le monde entier que le chanvre a le potentiel de sauver la planète Terre. Le biocarburant écologique produit à partir du chanvre peut supplanter l’industrie des combustibles fossiles. On peut cesser la déforestation en faisant du papier à partir du chanvre. Des centaines de produits variés peuvent être fabriqués à partir du chanvre, éliminant le besoin de recourir à des matériaux conventionnels et polluants.
C’est lorsque Jack se fait de nouveau arrêté et emprisonné suite à une protestation pacifique pour la plante que son besoin de partager ses découvertes devient plus ardent. Comment entrer en contact avec plus de personnes ? En écrivant et publiant un livre, voilà. Derrière les barreaux, l’homme jette les bases de ce qui deviendra l’un des livres les plus populaires au sujet du cannabis, du chanvre et de l’activisme, L’Empereur est nu (The Emperor Wears No Clothes). Le bestseller est publié en 1985, la même année qu’est officiellement fondé Sensi Seeds.
https://vimeo.com/102517870
Ben Dronkers découvre une faille dans le système
À l’occasion d’un de ses séjours dans une cellule, alors que Ben consulte la Loi de l’opium (Opium Act), une idée germe dans son esprit. Bien qu’il soit légal de vendre des graines de cannabis, la culture de cannabis, pour sa part, est considérée illégale. Comment donc s’approvisionner en graines ? Ben présente donc ce cas classique de la poule et de l’œuf à un éminent avocat, qui partage éventuellement son point de vue. Survient alors le moment crucial lorsque Ben obtient la permission légale de cultiver du cannabis dans le but de produire des graines. Dorénavant, ni la police ni les autorités agricoles ne peuvent s’opposer à sa pratique.
Cette victoire avive son esprit entrepreneurial, son sens de la justice et son caractère rebelle, en plus de renforcer son attachement déjà profond pour tout ce qui entoure la plante de cannabis. Il est temps de redoubler d’efforts afin de redonner à la plante sa juste place dans la société. Rien ne peut arrêter Ben dans sa détermination, et en 1985, il fonde Sensi Seeds et ouvre le Hash Marihuana & Hemp Museum.
La rencontre de deux pionniers
À l’évidence, Jack Herer et Ben Dronkers ont suivi des parcours parallèles, et la rencontre de ces deux combattants était inévitable. Jack et Ben se sont rencontrés à maintes occasions, mais ce n’est qu’en 1990 qu’ils prennent le temps de mieux se connaître lorsque Ben invite Jack chez lui. Assis à la table de cuisine, ils parlent pendant des heures de leurs expériences, de leur amour commun pour le cannabis et le chanvre et de l’importance de disséminer de l’information juste ; Jack à l’aide de L’Empereur est nu, Ben par l’entremise de sa banque de gènes de cannabis et de son Hash Marihuana & Hemp Museum. Cette rencontre a été fortuitement filmée et des extraits son disponibles en ligne sur le blogue SensiBilisation de Sensi Seeds.
Le lancement de la légendaire variété de cannabis Jack Herer
Après cette rencontre privilégiée, une chose était certaine : grâce à la plante de cannabis, une solide amitié venait d’être scellée. Peu de temps après, Ben a envie de rendre hommage à son compatriote engagé, ainsi qu’à cette nouvelle amitié. Et pour Ben, il n’y a qu’une manière de véritablement honorer quelqu’un : développer une variété nouvelle, unique et incroyable, portant le nom de Jack Herer.
En 1994, après des années de croisements et de stabilisation, la variété Jack Herer® est lancée lors d’une cérémonie au Cannabis Castle où sont conviées les personnalités les plus importantes du monde du cannabis, et bien sûr, l’homme en question, qui profite du moment dans toute sa gloire.
Vingt ans plus tard, Sensi Seeds est encore incroyablement fier de cet honneur et du statut auquel est parvenue cette variété au sein de la communauté cannabique mondiale. Jack Herer est en quelque sorte immortalisé par cette plante de cannabis qui forge des amitiés, rassemble, inspire et aide les gens.
Jack Herer et Ben Dronkers durant le lancement de la variété Jack Herer.
Nous pouvons tous être un pionnier du cannabis !
L’histoire que nous venons de raconter est particulièrement mémorable, et représente un des évènements les plus importants de nos trente années d’existence. Mais est-elle unique en son genre ? Pensez-vous que de telles expériences sont réservées à une poignée d’individus ? Nous pensons que non.
Nous croyons que tout le monde peut devenir un pionnier du cannabis ! La lutte pour un retour en force du cannabis à sa juste place dans la société n’est pas réservée à quelques individus seulement. C’est une lutte qui affecte et implique tout le monde. Une lutte qui commence à partir d’un moment singulier. Vous rappelez-vous votre première rencontre avec cette plante ? Où étiez-vous ? Comment vous êtiez-vous senti ? Avec qui étiez-vous ?
Pouvez-vous ressentir le lien que vous avez avec la plante ? Pouvez-vous ressentir à quel point elle peut vous être chère ? Tout ce que vous devez faire est d’exprimer tout cela. Rayonnez de par le monde, faites confiance à ce lien que vous ressentez, célébrez-le, plongez dans l’univers de cette plante et rappelez-vous fréquemment des bons moments qu’elle vous a procurés et dont vous jouissez encore. C’est exactement ce qu’a fait Jack Herer et ce que continue à faire Ben Dronkers.
Vous aussi avez le pouvoir de vous engager dans cette voie, de promouvoir le cannabis, de devenir un pionnier. Êtes-vous partant ?
#jackherer20
Michka entourée d'autres spécialistes du cannabis a dirigé la publication de l'ouvrage du « Cannabis médical, du cannabis indien aux cannabinoïdes de synthèse ».
La France est encore à la traîne pour les patients qui souhaitent utiliser le cannabis pour soigner, soulager et même guérir différentes pathologies y compris certaines graves. Un bilan des études est dressé autour du chanvre thérapeutique. Les différentes législations sont prises en compte pour comparer l'arsenal répressif ou au contraire bienveillant de différents pays concernés. Le livre fait foi dans la recherche et est très complet, avec de multiples illustrations, documents et références. Un livre très sérieux et très compétant sur la question, qui ouvre de nouveaux horizons pour se soigner de façon naturelle et efficace en connaissance de cause.
La France est le pays le plus répressif d’Europe à la gueule du client et selon la classe sociale et compte le plus grand nombre de fumeurs de cannabis.
Raison de plus pour laquelle se soigner de façon naturelle avec du cannabis demeure un sujet encore très tabou en pays franchouille. Sans doute qu’une des raisons principales provient des trusts pharmaceutiques qui distillent et insufflent leurs industries chimiques dans les moindres interstices laissés vacants par la société et imposent leurs produits, comme seule solution probante pour se soigner. C'est tout bénef pour eux. Ils s'assoient sur les bavures sanitaires dont ils sont pourtant les premiers responsables et trinquent à la vie à la mort des patients tombés entre leurs griffes.
C'est un lobby bras armé, des politiques es moral, qui freine les avancées médicales autour de l’usage du cannabis et les remettent en question. D'où la France qui arrive bonne dernière des pays les plus évolués dans les soins de santé naturelle. Alors que les neuroleptiques sont admis dans les mentalités pour apaiser les souffrances tant physiques que mentales et que le jaja représente le sport national pour emboucher les estomacs. C’est la cirrhose ou l’overdose !
« La santé par les plantes », Ramon Pipin's Odeurs connaît la musique :
“Mon crane bascule / Le soir parfois / Ma mère me tend des amphétamines / En fait elle ne comprend pas l’écologie !... » C'est par cette boutade que s'achève la chanson !
Aborder le cannabis médical, c'est aussi revenir aux sources des plantes et des molécules qui composent les médicaments. Sauf que les plantes sont supposées être plus naturelles dans leur environnement, que le cachet que vous ingurgitez prescrit par la médecine allopathique toute puissante. Quand elles ne sont pas transformées et engraissées par substrats chimiques pour être plus productives, les plantes regorgent encore toutes leurs substances guérisseuses.
Comment, moi qui pète la forme j'en suis arrivée à m'intéresser à ce sujet pointu ?
Pour tout vous dire, j'ai découvert presque par hasard Michka sur les ondes de France Culture.
https://www.franceculture.fr/emission-sur-la-route-sur-la-route-des-jardiniers-en-herbe-a-la-frontiere-espagnole-2015-09-19
(entre 37 minutes 57 et 45minutes12)
Elle est à l'origine de ce livre collectif qui nous intéresse dont elle a assuré la direction. Elle se désigne elle-même comme « auteure française traduite en plusieurs langues qui a publié une demi-dizaine d'ouvrages sur le cannabis. Appelée comme expert auprès des tribunaux, elle est également journaliste et voyage régulièrement entre l'Europe et l'Amérique, où elle observe depuis plus de trente ans l'évolution de cette plante, qu'il s'agisse de son versant récréatif ou thérapeutique ». (page 15)
A l'entendre et à la lire c'est un plaisir, pour la clarté et la qualité de ses propos. En plus, c'est une grosse pointure en la matière. Elle cherche avant tout à nous informer et dire toute la vérité, rien que la vérité sur le cannabis. Faut croire, qu'elle y soit parvenue, puisque j'ai tout pigé du gros livre richement illustré dont je vous cause aujourd’hui. Et pourtant je n'ai aucune connaissance scientifique à mon actif. Je ne fume pas des bananes comme Daevid Allen en zizique, avec son groupe Gong. Tout m'intéresse. Surtout ce qui est d'essence naturelle. J'ai été servie par la richesse des propos, tant de Michka, pour toutes les autres personnes qui ont contribué à ce pavé dans la mare à donner lire un autre son de cloche, que celui officiel tout puissant et majoritaire. Ensuite, à chacune et chacun, comme toujours d'exercer son sens critique et se forger sa propre opinion.
Ni la question récréative du cannabis ni celle de sa dépénalisation ne sont abordées dans cet ouvrage. Ce n'est pas le sujet. Seul compte la santé.
Même si forcément le plaisir de consommer du cannabis transpire entre les pages et dans son entretien sur France Culture. Michka explique d’ailleurs que c’est comme parler du vin, des grands crus à la bibine. Qu’il y a toutes sortes d’herbes et autant de grands écarts dans la qualité, que pour le vin. Puisque le cannabis peut avoir de vraies vertus thérapeutiques apaisantes et peut redonner l’appétit dans certaines pathologies très graves. J’y reviendrai.
Michka explique les raisons pour lesquelles le cannabis médical a été si longtemps interdit et s'interroge si ça va durer. Il est considéré comme une des plus anciennes plantes médicinales qui compte pas loin de huit cents variétés (chanvre ou marijuana) dont près de 500 composants identifiés et 70 que l'on trouve dans aucune autre plante. « En dix mille ans d'utilisation, le cannabis n'as jamais tué personne – ce qui n'a pas empêché les conventions internationales de le considérer comme un dangereux stupéfiant » (page 15) Ses principes actifs n'ont été reconnus que dans les années 1960.
Dans certains milieux bobos de l’époque, le Club des Hachischings dans les années 1845 en ont l'expérience, idem les musiciens noirs de jazz, « Dans une société âprement divisée par la ségrégation raciale, la marijuana associée aux descendants des esclaves noirs et aux travailleurs saisonniers mexicains, fut d'emblée perçue comme une menace à l'ordre établi ». (page 16) En 1937, le Sénat vota une taxe si importante, digne d'une prohibition en bonne et due forme.
Au XIX eme siècle la ganja était considérée comme un remède international qui se traduisit par des applications médicales, Elle fut prescrite pour soigner la douleur, le tétanos, la rage, l'épilepsie, l'asthme et utilisée dans les cures désintoxication des alcooliques et des héroïnomanes....
Aussi étonnant que cela puisse paraître, on redécouvrit ses vertus curatives à travers son utilisation récréative qui permit pas exemple à un GI au Vietnam atteint de glaucome héréditaire de lui rendre une clarté de vision. Idem chez un patient atteint de leucémie qui ne supportait pas son traitement en chimiothérapie et a recouvré l'appétit... En 1970, des études sont entreprises à ce sujet avec des résultats très probants. « En 1976, la recherche sur le cannabis est tout simplement interdite aux États-Unis, car le gouvernement fédéral trouve qu'il serait inapproprié d'envoyer à sa jeunesse « un message contradictoire », en reconnaissant quelque vertu que ce soit pour le cannabis ». (page18)
Michka met un point d'honneur à redonner ses vertus aux plantes qui soignent tel le cannabis sous ses différentes formes. Expliquant avec justesse que la plupart des médicaments actuels sont dérivés de plantes. On doit au maréchal Pétain, parmi ses nombreuses tares et en dehors du criminel galonné et chef des collabos, d'avoir supprimé le diplôme d'herboriste en France !
Pour se soigner avec le cannabis il existe une multitude de possibilités qui vont de le boire, l'inhaler, le manger, l'absorber par la peau...
Les preuves du cannabis pour soulager sont faites. Suivant les symptômes aussi divers que l'anorexie, les spasmes, différentes douleurs, l'asthme, l'épilepsie, le glaucome, le déficit de l'attention, la maladie d'Alzheimer, le cancer...
J'apprécie le caractère objectif du livre qui prend en compte également certains effets secondaires. Ainsi, sur une thérapie de longue durée peuvent apparaître certains symptômes qu'il faut bien évidemment prendre en ligne de compte. « Le cannabis possède un potentiel de toxicomanie et peut provoquer les symptômes de l'état de manque (anxiété, nervosité, insomnie, salivation, diarrhée), Toutefois, cela n'a jamais été décrit chez les patients traités à long terme avec du THC ». (page 51)
Le THC est le principal composé actif du cannabis.
Des patients témoignent du bienfait du cannabis dans leur traitement de maladies graves. Tout un chapitre y est consacré. Plusieurs pays (Etats Unis, Canada, Espagne, Hollande... sont passés au crible des législations. Les citoyens ne sont pas traités sur le même pied d'égalité et suivant le lieu où l'on habite on sera plus ou moins libres de consommer du cannabis à titre médical ou subir la justice,
L'histoire des variétés et leurs évolutions sont également développées.
Comme du temps de la prohibition de l'alcool où de nouvelles boissons tirées de l'alambic selon des formules magiques pas toujours très cohérentes pour les bienfaits physiques ont fait leur apparition. Il en va de même avec le cannabis. Pour parer les interdictions, sont apparues sur le marché des substances chimiques imitant les effets du cannabis et autres cannabinoïdes de synthèse. Un chapitre se consacre à cette analyse.
Ce livre très complet n'est pas écrit par une bande de babas cools, mais par des spécialistes sur la question, docteurs, biologistes, avocats, professeurs de droit et j'en oublie tant ils sont riches de leur sujet qu'il connaisse sur le bout des doigts.
Les plus grands spécialistes internationaux se sont penchés sur le berceau du cannabis et répondent aux questions que l'on peut se poser.
Ce n'est pas non plus un hasard si de plus en plus de pays dans le monde et autour de notre tout petit hexagone s'intéressent désormais aux vertus du cannabis médical.
Ce livre exulte une synthèse actuelle se basant sur l'histoire du cannabis et de tous ses relents qui n'ont pas toujours bonne presse, par manque d'informations sur le sujet complexe. Ce le livre a au moins le mérite de creuser le cannabis médical jusqu'à la racine et de nous éclairer de ses lumières.
La culture, les lieux dans les différents pays où on peut s'approvisionner légalement ainsi que les dérivés du cannabis qui sont disponibles actuellement... Tout vous saurez tout sur le cannabis et toutes ses vertus médicinales.
L'ouvrage s'achève sur un « CannaScope » qui répertorie les sites internet et propose un annuaire selon les pays, un agenda et les publications et ressources internationales ainsi que des références de vidéos,
Balèze de chez balèze se travail entreprit avec Michka et des spécialistes sur la question, qui l'ont bien entourée pour écrire en chœur ce livre très détaillé et complet sur la question. Afin de lever un tabou ancestral, rétablir certaines vérités et suggérer enfin des solutions thérapeutiques.
Michka entourée d'autres spécialistes internationaux : Cannabis médical du chanvre indien aux cannabinoïdes de synthèse, éditions Mama, nombreuses illustrations, 320 pages, 24 euros, existe également en format poche
Le succès underground du roman «Génération H» d'Alexandre Grondeau n'est pas dû au hasard. En racontant la quête existentielle du jeune Sacha, fumeur d'élite et mélomane utopiste, il comble un vide dans la littérature française.
REUTERS/Ueslei Marcelino
Sacha est en jeune adulte dans les nineties. Ce qui fait de lui un membre de la génération Y. Pourtant, selon Alexandre Grondeau, journaliste, écrivain et universitaire, son personnage principal appartient plutôt à la «génération H». «H» pour hardcore ou haschich. Sacha est un fumeur d'élite, un jeune type en quête de vécu et d'expérience. Idéaliste qui se heurte aux réalités et aux contradictions des utopies, il fait partie de ces centaines de milliers de Français qui ont inscrit le cannabis dans leur vie.
Il serait trop réducteur de le résumer à cette seule consommation, mais elle reste centrale dans ce second tome de Génération H. La musique, la fuite en avant face aux luttes perdues par les générations passées, l'autorité... Alexandre Grondeau réussit à raconter une part de la population oubliée de la littérature française. La France qui fume, mais pas seulement.
Prendre le phénomène dans sa diversité
Derrière les envies de road-trip de Sacha, on retrouve un éternel débat: celui qui oppose la France Pinard à la France Pétard.
«Je ne vais pas mentir: la Génération H, c'est une génération festive, avoue Alexandre Grondeau. Les usages de l'alcool et du cannabis s'y retrouvent. Il est donc difficile de les opposer. La France pinard existe toujours, mais il y a une autre France qui existe, qui a grandi et qui concerne aujourd'hui des gens entre 15 et 65 ans.»
Avec le cannabis, tout un jargon, une culture, une vraie passion se déclinent. Pour cette génération H, elle n'a rien à envier aux amateurs de bon vin. Alexandre Grondeau y raconte les déclinaisons, les goûts, les manières de consommer, les pratiques venant d'Inde comme le shilom, les nouvelles herbes qui venaient de Hollande à l'époque... Sacha et ses potes se retrouvent passionnés par le cannabis mais pas seulement pour ces effets. Cela fait partie de leur mode de vie.
«Il y a une dimension festive dans le cannabis, mais aussi de la réflexion, de la contestation, de la prise de recul par rapport au système.»
Le roman n'a rien de moralisateur. Il constate et casse bons nombres de clichés, comme celui du dealer violent qui exploite la dépendance. Si cette vision est souvent vraie, elle n'est pas unique. Génération H, c'est la prise du phénomène cannabis dans toute sa diversité, avec les yeux d'un auteur qui l'a vécue au plus près.
Un succès underground
«Les gens dont je parle dans mes romans, ils ont aujourd'hui entre 35 et 45 ans, ils sont totalement insérés dans la société. Je me suis inspiré de mes proches qui sont aujourd'hui fonctionnaires, chefs d'entreprise, avocats, journalistes, chômeurs... Malgré le côté radical, ces gens sont des Français comme tout le monde.»
Avec 20.000 exemplaires vendus du premier tome (sorti en 2013) et déjà 6.500 du second, le succès est notable pour un livre (une future trilogie) dont les médias généralistes ne font que peu échos. En mais 2013, alors qu'Alexandre Grondeau était l'invité de France Inter, la radio publique se faisait rappeler à l'ordre par le CSA:
Comme nombre de sous-cultures, et la France ne fait pas exception, le livre a tourné dans les festivals, dans les réseaux undergrounds, jusqu'à ce que nombre d'artistes, beaucoup de chanteurs reggae notamment, ne le soutiennent ouvertement. Si le rapport au cannabis est ce qui domine dans ces hommages, si la dépénalisation est l'une des motivations de ce «mouvement Génération H», le discours d'Alexandre Grondeau n'est pas seulement là:
«[Le CSA] considère que les propos tenus pouvaient avoir pour effet de banaliser la consommation de cannabis, ce qui est contraire à la délibération du 17 juin 2008 relative à l’exposition des produits du tabac, des boissons alcooliques et des drogues illicites à l’antenne des services de radiodiffusion, l’animateur n’ayant, à aucun moment, rappelé le caractère illégal de la consommation de cannabis ni évoqué les risques pour la santé qu’une consommation importante de cette drogue peut entraîner, manquant ainsi à son devoir de bonne information des auditeurs.»
Tout n'est pas rose
«Des gens se sont reconnus dans la jeunesse que je décris. Ils ont des responsabilités, des enfants, ils ne comprennent pas pourquoi ils risquent autant en fumant un joint le soir. Le paradoxe entre les consommateur de cannabis lambda et les moyens mis en place pour lutter contre lui est énorme. Après, il y a un problème de santé publique, d'éducation, il y a beaucoup de choses à faire. C'est pour cela que je parle de responsabilisation. Il y a un traitement global à mettre en place, une réflexion qui considère les réalités et qui essaie de s'y adapter. Or, je vois des gens fermés à toute discussion, qui considèrent que la Génération H ne représente personne, qu'elle n'est pas insérée.»
Et quand on lui avance qu'il y a aussi des effets néfastes au fait de fumer, que cela peut poser des problèmes psychiques ou de désocialisation et d'addiction forts:
La question n'est donc pas de savoir si le cannabis est bon ou mauvais. Le débat prendrait des heures et a déjà été maintes fois ressassé. Rétorquer que le cannabis est mauvais pour la santé et engendre des troubles physiques? C'est évident, et les fumeurs le savent, d'où la quête d'existence:
«Tout n'est pas rose. La France qui fume, ça représente des millions de personnes, des millions de cas différents. On pourra toujours trouver des histoires horribles. Avec des romans, j'ai voulu dédramatiser tout cela. Quand Bukowski écrivit ses bouquins, personne n'allait lui dire que l'alcoolisme c'est terrible, personne ne lui faisait la morale en posant la question de l'interdiction de l'alcool. Je crois qu'on aura avancé quand les gens parleront autant de mes romans pour la description des milieux alternatifs que pour le cannabis.»
Les sales gosses ont grandi, et en plus, maintenant, ils ont un livre.
«Il y avait l'idée qu'il fallait tout vivre maintenant parce que l'avenir n'était pas à nous. Ça explique les excès, les abus, cette volonté de tout faire en se disant qu'on vivait un rêve éveillé à qu'on se réveillerait dans un cauchemar. C'était une sorte de symbiose entre le “do it yourself”, la recherche de liberté, la quête d'expérience... Mais il n'y avait plus le regard idéaliste des années 1960. On avait bien vu l'échec des utopies des soixante-huitards et des Trente glorieuses. Nous, on voulait vivre différemment et on mettait tout de suite en application nos idéaux et nos valeurs. On était leurs enfants, mais on était des sales gosses qui voulaient montrer que leurs échecs n'étaient pas les nôtres, qu'on pouvait vivre différemment sans faire de communication.»
Courir procure les mêmes effets que le cannabis,
affirme une étude
Tous drogués ? (Ph. Elvert Barnes Via Flickr CC BY 2.0)
S’entraîner à la course est bien meilleur que consommer du cannabis. Mais il n’empêche que les deux activités auraient beaucoup en commun, selon une nouvelle étude effectuée chez les souris – dont on sait par ailleurs qu’elles constituent un modèle très proche de celui des humains.
Si l’on savait depuis longtemps que faire du sport déclenche les endorphines, en particulier la course de fond, les chercheurs montrent que finalement ces endorphines ne participent pas (ou peu) à l'”ivresse du coureur” : ce sont les endocannabinoïdes qui lui procurent ce sentiment de bien-être.
Euphorie du coureur et cannabis
Ceux qui pratiquent la course – mais cela vaut sûrement pour les autres sports d’endurance – connaissent cet effet “second souffle” où tout à coup les douleurs et lourdeurs physiques s’estompent et où l’esprit connaît un moment de plénitude et d’euphorie.
L’effet, qui peut intervenir durant l’effort où après son arrêt, est notamment lié à l’invasion du cerveau par des substances qu’il sécrète. Et jusque-là l’on évoquait le rôle des “endorphines” dans ce processus, soit la production au niveau cérébral de molécules opioïdes, les mêmes que celles de l’opium.
Mais la nouvelle étude bat en brèche cette affirmation pour démontrer que l’effet est plutôt du type cannabis, du moins chez la souris : la course déclencherait la production des mêmes neurotransmetteurs qui apparaissent lorsqu’on fume de la marijuana, en particulier un “endocannabinoïde” nommé anandamide (contraction de “ananda”, signifiant béatitude en sanskrit, et “amide”, signalant la forme moléculaire de la substance).
Des souris coureuses
Pour démontrer cela, les chercheurs ont entrainé à la course 234 souris mâles et les ont testé pendant plusieurs semaines, à raison de 10 à 12 souris par jour en moyenne, pour une série de tests (chacun répété plusieurs fois avec différents groupes de souris).
La première expérience, avec 32 souris, visait à tester leur comportement : les 3 premiers jours, toutes les souris ont été enfermées dans une cage avec une roue tournante afin de les familiariser avec l’exercice. Laissées libres de leurs choix, elles ont en moyenne couru 5,4 km/jour.
Puis les chercheurs ont bloqué les roues pendant 2 jours, pour les faire récupérer, et ont scindé le groupe en deux : le 6e jour, seules 16 souris ont pu bénéficier d’un déblocage de la roue pendant 5 heures – et elles s’y sont données à cœur joie. Les autres n’ont pas pu courir.
Le test de la boite sombre-lumineuse
C’est alors que les chercheurs ont soumis l’ensemble à deux tests dont on sait qu’ils permettent d’évaluer chez la souris l’anxiété (ou stress) et la douleur ressentie : l’expérience de la boite sombre-brillante et celle de la plaque chauffante.
La première est un montage où deux boites, l’une obscure l’autre exposée à la lumière, communiquent par une ouverture. Il a été démontré qu’une souris placée dans un tel environnement inhabituel tend naturellement à se réfugier dans l’obscurité : ses incursions du coté lumineux sont d’autant plus nombreuses que son niveau d’anxiété est élevé. Or les souris joggeuses ont par ce biais montré que leur anxiété était moindre.
Le test sur plaque chauffante
Le deuxième test, celui de la plaque chauffante (à 53 °C), mesure la sensibilité à la douleur : et encore une fois, les souris sportives réagissaient moins violemment (temps de latence entre l’immobilité et les mouvement réactifs) que les autres.
Ces tests ont été répétés ensuite mais cette fois en mesurant les taux d’endocannabinoïdes et d’endorphines dans le sang des souris. Puis avec des inhibiteurs de ces substances. Puis enfin (pour confirmer les résultats) avec des souris modifiées génétiquement afin de ne pas produire d’endocannabinoïdes.
Mettre en lumière le rôle du système endocannabinoïde
Dans chaque test, les chercheurs ont constaté que le taux d’endorphines dans le sang n’influe pas sur l’anxiété ni la sensibilité à la douleur, ce qu’ils expliquent par le fait que ces molécules sécrétées dans le sang ne peuvent traverser la barrière encéphalique et donc atteindre le cerveau.
En revanche, ils ont montré qu’il y a un lien fort entre le taux de molécules du système endocannabinoïde, qui passent la barrière, et le comportement moins anxieux et sensible à la douleur des souris coureuses.
L’étude a ainsi permis de relativiser l’effet des endorphines et, au contraire, mettre en avant l’importance du système endocannabinoïde dans les effets ressentis par les joggeurs – et, supposent-ils, pour tout un ensemble de sports d’endurance. Mais bien sûr cela ne signifie pas qu’il faut compenser le manque de course par du cannabis.
Poursuites même en l’absence d’interdiction sur le cannabis – LEAP
La Law Enforcement Against Prohibition est arrivée en Europe
Bonne nouvelle de Berlin : la LEAP (Law Enforcement Against Prohibition), l’organisation composée de policiers et d’agents de la force publique, vient tout juste de s’établir en Allemagne. L’organisation à but non lucratif qui connaît un véritable succès aux États-Unis n’avait jusqu’à présent qu’une seule division en Europe, au Royaume-Uni.
La Law Enforcement Against Prohibition est arrivée en Europe
Le 10 septembre 2015, l’ancien chef de police de Münster, Hubert Wimber, a été élu président de la division allemande de l’organisation LEAP. Wimber est entouré de cinq membres fondateurs hautement distingués : Frank Tempel, membre du Parlement fédéral allemand et porte-parole de gauche des politiques en matière de drogues ; Andreas Müller, célèbre juge de la cour juvénile ; Annie Machon, directrice de la LEAP en Europe et ancienne fonctionnaire du MI5 ; et Wolfgang Neskovic, ancien juge de la Cour suprême fédérale. Wimber a toujours promu la libéralisation de l’interdiction qui pèse sur le cannabis, et il y a à peine un an, juste avant de prendre sa retraite, Ralf Jäger (SPD) lui avait interdit de participer à la rencontre inaugurale de la LEAP.
L’exemple des États-Unis
En 2002, Jack A. Cole a établi la LEAP à Medfort dans le Massachussetts. Après un lent départ, il y a treize ans, l’ancien agent d’infiltration est maintenant entouré d’un bon nombre de confrères militants. Il reste néanmoins beaucoup d’efforts à déployer pour parvenir à mettre en lumière les conséquences néfastes qu’ont les politiques actuelles en matière de drogues sur le public, les politiciens et les médias.
Parallèlement à cette mission, la LEAP s’attache à ré-établir le respect des citoyens envers le travail des policiers ; en effet, ceux-ci sont souvent perçus d’un mauvais œil puisqu’ils sont tenus d’appliquer les lois antidrogues. La LEAP tentera d’atténuer les nombreuses conséquences néfastes qu’entraîne la guerre contre les drogues, notamment, le nombre grandissant de policiers impliqués dans des crimes liés aux drogues. Par-dessus tout, les membres de la LEAP veulent démontrer à leurs propres collègues que le taux élevé de délinquance n’est pas tributaire des substances consommées, mais plutôt des interdictions qui pèsent sur les drogues.
Bien que la LEAP ne soit pas encore solidement installée en Europe, la plupart des anciens agents de la force publique des États-Unis exercent maintenant une grande influence dans les discussions actuelles concernant la réglementation du cannabis. La LEAP compte un total de 15 000 membres, la plupart résidant aux États-Unis. Toutefois, les membres des deux divisions européennes viennent renforcer la délégation de bons flics des divisions costaricaines et brésiliennes, ainsi que celles de 190 autres pays. La LEAP s’assure d’envoyer des conférenciers lors d’évènements politiques portant sur les drogues dans 35 États américains et 16 pays. L’organisation est ouverte à tous, mais les fonctions de conférenciers et de gestionnaires sont réservées aux agents de la force publique, actifs ou retraités, tels les policiers, les agents des douanes, de contrôle frontalier et de prison, les représentants du ministère public et les juges. À ce jour, environ 5000 membres de la LEAP exercent, ou ont déjà exercé, de telles fonctions. Plus d’un de ces professionnels s’est porté, à un certain moment dans sa carrière, à la défense du parti opposé, et tous peuvent parfaitement comprendre l’expérience qu’a vécue le directeur général de la LEAP, le général à la retraite Neill (Stanford) Franklin. Franklin a été très actif dans la guerre contre les drogues à l’époque où il était jeune politicien et agent d’infiltration dans les opérations antidrogues. Lorsque son collègue est bon ami, le caporal Ed Toatley, a été abattu durant une opération d’infiltration à Washington DC en 2000, il a clairement émis ses opinions, et a joint la LEAP.
Conflit d’intérêts
En Allemagne, la plupart des militants qui font partie de la LEAP ne sont plus en service actif, mais aux États-Unis, quelques membres exercent toujours leurs fonctions de policiers. Conformément à la loi en matière d’emploi dans le secteur public, leur affiliation à la LEAP est souvent considérée comme une source de problème. À ce jour, l’épée de Damoclès est toujours suspendue au-dessus de la tête de tous ces officiers qui osent exprimer – ouvertement ou discrètement à leur collège avant de prendre leur retraite – leur soutien pour la relégalisation du cannabis ou la libéralisation du marché des drogues. Le fameux cas de l’agent de contrôle frontalier californien, Bryan Gonzalez, illustre peut-être le mieux le type de représailles qui attends celui qui ose prendre position en faveur de la LEAP. L’agent n’a fait qu’exprimer ses doutes quant à la pertinence d’interdire le cannabis et mentionné la LEAP pour que ses collègues aillent le dénoncer à leur supérieur. Lors des procédures de l’audience disciplinaire, il a été démontré que les points de vue de Gonzalez étaient contraires aux intérêts de sa profession, et sur ce, il a été licencié de la fonction publique. En 2011, une poursuite intentée par la LEAP et l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU) a finalement été rejetée. Qu’à cela ne tienne, à partir de ce moment, la LEAP a connu une croissance prolifique aux États-Unis et à l’étranger, et au cours des quatre dernières années, elle a joué un rôle clé dans les campagnes de légalisation du cannabis dans les États du Colorado, de l’Oregon, de l’Alaska, de Washington et à Washington DC.
À la suite de la suspension de son client Bryan Gonzalez en 2011, le directeur juridique de l’Union américaine pour les libertés civiles de l’Arizona, Daniel Pochoda, a déclaré que :
Et sa déclaration s’avère juste. Il ne reste plus qu’à espérer que la LEAP s’ancrera rapidement, et solidement en Europe.
"De plus en plus de membres des organismes d’application de la loi dénoncent l’inefficacité des lois antidrogues, et en dépit du fait qu’ils reçoivent leur rémunération du gouvernement, ils exercent le droit qu’ils ont de partager leurs impressions et de s’engager dans cet important débat ".
Alors que les élections américaines approchent à grand pas, la question de la légalisation de la weed ravive les débats outre-Atlantique. Un tel projet serait à l'ordre du jour dans au moins cinq États, dont la Californie. Comme à leur habitude, les membres de la classe politique – y compris la candidate à la primaire républicaine Carly Fiorina – répandent l'idée que la weed est une drogue « passerelle » dont la consommation inciterait à découvrir d'autres produits stupéfiants. Pourtant, de nombreuses études tendent à montrer que cette théorie est incorrecte – le cannabis aiderait les accros à se désintoxiquer des drogues dites « dures ».
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Si, à première vue, l'idée de la passerelle n'est pas idiote – après tout, les fumeurs de weed ont 104 fois plus de chances de consommer de la cocaïne que les non-fumeurs – les scientifiques rappellent à l'envi que corrélation ne veut pas dire causalité. Par exemple, le nombre de personnes tuées par des chiens chaque année est corrélé de manière quasi parfaite à la croissance des achats en ligne lors du Black Friday. Sinon, on a également noté que l'augmentation des diagnostics d'autisme est fortement corrélée à celle de la vente de nourriture bio. Il est pourtant peu probable que l'achat massif de galettes de riz ait quelque chose à voir avec la détection d'un trouble comme l'autisme. Au contraire de la causalité, la corrélation peut découler d'un simple hasard.
Pour en revenir au lien supposé entre la marijuana et la consommation d'autres substances psychotropes, une étude de la National Household Survey a montré que la moitié des Américains âgés de plus de 12 ans a déjà fumé de la weed, tandis que moins de 15% ont déjà pris de la cocaïne et 2% de l'héroïne. Si la marijuana s'avérait responsable de la consommation d'autres drogues, les fumeurs devraient logiquement finir par absorber des substances encore plus nocives – ce qui est faux.
Mais le débat reste ouvert chez les scientifiques. Des études menées sur des ratssuggèrent en effet que la consommation de marijuana pousse les rongeurs à ingérer de l'héroïne et de la cocaïne. Ces travaux oublient tout de même de préciser que la plupart des rats n'aiment pas le THC, la principale molécule active du cannabis.
L'idée très répandue de « drogue passerelle » occulte les racines d'un problème sanitaire de plus en plus prégnant aujourd'hui. Au lieu de populariser ce genre de théories pseudo-scientifiques, nous devrions nous attacher à déterminer les raisons qui expliquent la dépendance à un produit stupéfiant. Pour commencer, on pourrait insister sur le fait qu'une large partie de la population souffrant d'addiction – au moins la moitié– est accro à plus d'une substance. De plus, la moitié des consommateurs dépendants présente un trouble psychiatrique distinct de la simple addiction à une drogue.
Les risques d'addiction croissent systématiquement chez les malades psychiatriques. Dans la plupart des cas, le problème n'est pas causé par la consommation de drogues. Certaines études ont suivi des enfants jusqu'à leur âge adulte et ont contribué à prouver que ceux qui finissent accros doivent faire face à des problèmes comportementaux parfois détectables dès la maternelle.
À force de déclarer que le cannabis est une passerelle vers l'addiction, nous sommes devenus aveugles à son utilité médicale.
Les théories concernant la « prédisposition » à la dépendance sont nombreuses – mais l'immense majorité d'entre elles se rejoignent pour dire qu'il n'existe pas de « personnalité encline à l'addiction ». Un traumatisme survenu pendant l'enfance pourrait être un facteur explicatif essentiel. L'exposition à un stress extrême augmente le risque – que ce soit un abus sexuel, physique ou émotionnel. Plus grand est le trauma, plus importants sont les risques d'addiction.
De même, le statut socio-économique d'une personne influe grandement sur un risque d'addiction. Sans surprise, les personnes les plus exposées sont les plus pauvres – un Américain qui gagne moins de 20 000 dollars par an a deux fois plus de risques de devenir accro à l'héroïne qu'un compatriote qui gagne au moins 50 000 dollars.
La marijuana n'est donc pas une « passerelle » vers l'addiction. La dépendance à un produit stupéfiant est la somme d'une équation complexe dans laquelle se mêlent de nombreux facteurs fortement imbriqués.
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En 2001, j'avais publié un article au sujet de la tendance chez les fumeurs de crack « expérimentés » à remplacer cette drogue par du cannabis – ils avaient été témoins de trop nombreux drames personnels. Aujourd'hui, deux nouvelles études suggèrent qu'il est possible de soigner une addiction aux opiacés et à l'alcool par l'intermédiaire de la marijuana. La première est un essai clinique qui s'est attaché à déterminer si l'ajout d'une molécule de THC synthétique à un médicament anti-opiacé aide les accros à arrêter l'héroïne. La réponse s'est avérée positive.
La seconde étude a été menée au Canada sur une population de fumeurs de cannabis thérapeutique. Elle a démontré que 87% des consommateurs fument en lieu et place d'une absorption d'alcool, d'opiacés ou d'autres drogues illégales. 52% des personnes interrogées ont précisé que la marijuana les aidait à diminuer leur consommation d'alcool ; 80% ont avoué consommer moins de médicaments en général.
À force de déclarer que le cannabis est une passerelle vers l'addiction, nous sommes devenus aveugles à son utilité médicale. Les solutions appliquées aux quatre coins du monde – qui peuvent être résumées par l'expression de « guerre contre la drogue » – ne sont ni efficaces, ni justes. Tant qu'il y aura des gens pauvres, délaissées ou malades, et que le cannabis sera cantonné à un marché noir au sein duquel transitent de nombreuses substances ô combien dangereuses, le risque sera grand de voir ces personnes sombrer dans une addiction dramatique.
En 2001, le Portugal a été le premier à dépénaliser la consommation de drogue. Malgré quelques paradoxes dans la façon de voir les choses, un petit bilan, après 15 ans de recul, montre des résultats globalement positifs.
Il n'a pas augmenté ! C'est toujours le principal argument opposé à la décriminalisation de l'usage de drogue (quelle qu'elle soit), le nombre de «drogués» va augmenter ! Eh bien non, le scénario catastrophe prédit n'a pas eu lieu, l'usage de drogue n'a pas pas augmenté. Mieux que ça, si la consommation de drogue a légèrement augmenté chez les adultes, elle a nettement régressé chez les jeunes (en effet, quel est l'intérêt pour un ado de consommer un produit autorisé et de n'enfreindre aucune loi ?).
Soigner plutôt que réprimer
Les opposants à cette démarche jouaient, à l'époque, les oiseaux de mauvais augure en annonçant des hordes de toxicomanes européens déferlant sur le Portugal. Ce tsunami n'a pas eu lieu non plus.
Votée en novembre 2000, et appliquée à partir de juillet 2001, la décriminalisation de la consommation de drogue présente plusieurs autres points plutôt positifs.
Ainsi, conséquence directe de la dépénalisation : pas d'arrestations, pas de procès, pas de détention, autant de points qui ont notablement allégé les budgets police, justice, pénitenciaire. Les sommes libérées ont été allouées aux soins et traitements des toxicomanes. Les consommateurs interpellés devant se présenter devant une commission de dissuasion.
C'est une approche de santé publique qui est privilégiée par rapport à la répression. Le toxicomane considéré comme un malade plutôt que comme un délinquant se verra offrir tout un panel de soins, visant à le faire décrocher. Avec ce changement de politique, les taux de MST et d’overdoses ont chuté de façon spectaculaire. Il en va de même sur les contamination au VIH. Selon The Economist, depuis la décriminalisation, les morts provoquées par les drogues ont chuté de 80%, de 80 morts en 2001 à 16 en 2012. En parallèle, et sur la même période, le nombre d’héroïnomanes a décru de moitié, en termes absolus.
L'un des principaux paradoxes de cette démarche est que, s'il n'est plus illégal de posséder, ni de consommer de la drogue, en revanche, il reste interdit d'en produire ou d'en vendre.
Cannabis social clubs
Il a bien été envisagé de reproduire le modèle espagnol des «Cannabis social clubs». La Catalogne en compte près de 400. Ce sont des associations à but non lucratif de production et de consommation de cannabis en cercle fermé régies de façon très strictes, comme des accès restreints uniquement aux membres, l'obligation d'avoir plus de 18 ans, de ne pouvoir y rentrer que parrainé par un membre du club, entre autres. La gauche portugaise a tenté de les introduire, mais malgré cet encadrement rigide qui se veut rassurant, le Portugal ne les a pas légalisés.
Pas de d'éradication pour autant
Ne nous leurrons pas, tout n'est pas totalement rose pour autant. Une étude menée en 2012 montre qu'après avoir énormément chuté, la consommation est quand même légèrement remontée. Elle note aussi que les jeunes se tournent vers de nouveaux types de substances, appelées nouveaux produits de synthèse. Mais dans l'ensemble, ce sont l'alcool, le tabac et les médicaments qui sont les plus consommés, c'est-à-dire les drogues légales. Parmi les drogues illégales, c'est le cannabis qui remporte la palme, 8,3% des Portugais disent l'avoir essayé. Chez les 25-32 ans, la consommation quotidienne de cannabis est de 16,2%, de l'ecstasy 2,5%, et des champignons hallucinogènes 1,2%. La cocaïne quant à elle est consommée à égalité par 1,7% des 25-34 ans et 1,8% des 35-44 ans.
Globalement, force est de constater, près de 15 ans après, que la décriminalisation de la consommation de drogue à été nettement plus positive que négative.
Par Frédérique Harrus@GeopolisFTV
Source: geopolis.francetvinfo.fr
Reconversion, le chanvrier valaisan Bernard Rappaz veut planter du seigle et du quinoa dans les villages les plus hauts du monde.
Depuis sa sortie de prison l’année dernière, le chanvrier valaisan Bernard Rappaz s’est fait discret. Après trois ans passés au pénitencier de Crêtelongue près de Sion, sa vie d’homme libre a repris son cours.
Condamné à une peine de 5 ans et 8 mois pour son commerce de chanvre dans les années 2000, il demeure toutefois en liberté conditionnelle: «Tous les mois, je dois rencontrer quelqu’un de l’administration pénitentiaire, précise-t-il. J’aurai totalement fini de purger ma peine au mois de mai 2016.»
Aide aux paysans de montagne
Ces premiers mois de liberté n’ont pas été simples pour lui. Ayant perdu sa ferme à Saxon (VS), sans réelles ressources autres que des aides ponctuelles, il s’est installé dans le village d’Isérables à 1000 mètres d’altitude. Là, il a peaufiné un projet qui lui tenait à cœur depuis longtemps: monter une association pour venir en aide aux paysans de montagne du Népal, pays qu’il a visité à cinq reprises entre 1994 et 2008. Il a obtenu le parrainage de l’animateur Jean-Marc Richard et de l’écologiste genevois Philippe Roch. «En liberté conditionnelle, explique-t-il, on a le droit de voyager à l’étranger, alors j’ai préparé un voyage au Népal avec un budget de 4000 francs.»
Le 25 avril, le tremblement de terre qui frappe le centre du pays ne le fait pas reculer. Le 8 mai, il atterrit à Katmandou et s’adjoint les services d’un interprète, Chhiring Tamang. Mais le 12 mai, une violente réplique frappe à nouveau le pays: «Je suis allé alors avec lui dans le district de Dolakha, très sinistré, où l’on trouve beaucoup d’aide suisse.»
Mais le chanvrier valaisan s’intéresse à un autre endroit, au nord-ouest de la chaîne de l’Himalaya, le district de Dolpa, où vivent quelques milliers d’agriculteurs et d’éleveurs. Il s’agit de tribus souvent nomades de culture tibétaine qui peuplent les villages parmi les plus hauts du monde à plus de 3500 mètres d’altitude.
«Une sacrée marche»
Le voilà donc parti pour un circuit de quinze jours afin de distribuer dans ces «régions pauvres et oubliées par les Occidentaux» des graines de seigle et de quinoa dans le but de diversifier une culture essentiellement basée sur l’orge. «C’est un véritable exercice sportif et une sacrée marche pour nous qui ne sommes pas habitués à l’altitude, explique-t-il. On est monté un peu chaque jour, ce qui fait que le corps s’adapte. Ceux qui se sentent mal sont ceux qui montent trop vite en brûlant les étapes.»
De fil en aiguille, Chhiring Tamang, lui et un porteur de la région traversent les villages qui montent jusqu’à plus de 5000 mètres par le col de Numala (5309 m) et celui de Bagala (5109 m). «Tout en jeûnant six jours durant cette ascension», précise-t-il. Six jours qui ne sont rien à côté des 117 jours de sa grève de la faim très médiatique de 2010. En passant, il distribue semences et graines dans les villages: «Faut-il y voir un symbole, ce sont toujours les femmes qui m’ont accueilli…»
De retour en Suisse, Bernard Rappaz entend continuer sa mission: «Il y a 75 districts au Népal et seuls cinq d’entre eux ont été durement touchés par les séismes. Hélas les touristes boudent l’ensemble du pays depuis. Il faut continuer sur la voie d’un développement durable, apporter des améliorations tout en respectant leur culture ancestrale.»
Lundi 19 octobre, il présentera son association lors d’une «Soirée Népal» à l’Aula François-Xavier Bagnoud à Sion, dès 19 heures.
Comment aider les racines des plantes à puiser l’eau et les nutriments plus efficacement ? Pour le savoir, suivez ce robot dans Futuris.
Ce robot fait en effet partie d’un mécanisme complexe développé afin de dévoiler les secrets du blé et d’autres types de cultures.
Cultivés sur un sol enrichi en eau et en nutriments, ces échantillons de blé sont ensuite transportés dans une salle équipée d’un énorme scanner tomographique à rayons X informatisé.
Le point avec Malcolm Bennett, spécialiste des plantes à l’Université de Nottingham (Royaume-Uni) et coordinateur du projet “FUTUREROOTS”: https://www.cpib.ac.uk/research/projects/futureroots/ :
“Depuis dix mille ans, on s’intéresse essentiellement à la partie aérienne, c’est-à-dire visible des plantes. Or, nous voulons obtenir des cultures qui absorbent les nutriments et l’eau plus efficacement. Et pour cela, il faut aussi observer attentivement la croissance des racines. Nous voulons donc révéler la moitié cachée des plantes.”
Dans ce laboratoire de l’Université de Nottingham, au Royaume-Uni, différents scanners permettent aux chercheurs d‘étudier, dans le temps, le développement de l’architecture racinaire de diverses espèces de plantes. La technique est la même que celle utilisée en matière d’imagerie médicale comme nous l’explique Craig Sturrock, spécialiste du sol à l’Université de Nottingham (Royaume-Uni) :
“En 5 ans, le temps de réalisation d’un scanner est passé d’une heure à 10 minutes. Si on peut encore réduire ce temps, alors nous aurons une vision encore plus dynamique du processus de croissance des racines.”
Les images obtenues avec ces scanners permettent de créer des modèles informatiques. Objectif : reproduire avec précision la façon dont les racines poussent dans différents sols et dans différentes conditions d’humidité souterraine, précise Tony Pridmore, informaticien à l’Université de Nottingham (Royaume-Uni) :
“On arrive maintenant à voir de multiples racines sur le même cliché. Il nous faut ensuite séparer ces racines pour pouvoir observer comment elles interagissent entre elles dans le sol. On dispose aussi de séquences d’images qui permettent d’examiner comment les racines poussent. Nous analysons aussi le cliché pour localiser l’eau et les poches d’air présentes dans le sol. Ce qui nous permet d‘étudier les interactions entre la structure du sol et la croissance des racines.”
Des modélisations qui ont donc permis à ces scientifiques de confirmer certaines de leurs hypothèses formulées dans le cadre du projet de recherche européen “FUTUREROOTS”, à commencer par la possible corrélation entre la forme d’une racine et sa capacité à absorber l’eau et les nutriments.
Craig Sturrock :
“Nous avons découvert que dans des conditions d’humidité faible, les racines latérales ne se développent pas aussi bien que dans des conditions d’humidité plus élevée. Grâce à ces images, on comprend comment ces racines se développent d’un point de vue moléculaire. Et en associant ces données aux mécanismes moléculaires, on arrive à cerner la façon dont se développent les cultures et ainsi à tirer un meilleur profit des sols ayant un faible degré d’humidité.”
L’objectif final consiste à identifier, dans le système racinaire, les caractéristiques et les gènes responsables de l’absorption de l’eau et des nutriments. De quoi faciliter à terme la mise au point de nouvelles cultures plus versatiles et plus performantes, selon Stephanie Smith, microbiologiste à l’Université de Nottingham (Royaume-Uni) :
“On connaît déjà l’auxine. Cette hormone végétale joue un rôle déterminant dans l’enracinement des plantes. Vous pouvez donc avoir une racine très longue et très étroite ou bien une racine ramifiée très large. Mais nous voulons en savoir davantage. Par exemple, comment les nutriments présents dans le sol sont absorbés. Ou bien quelle quantité d’eau, exactement, est puisée par la racine.”
En plus d’améliorer le rendement des cultures, ces travaux pourraient aussi contribuer à la protection de l’environnement, notamment en rationalisant l’utilisation d’engrais agricole.
Malcolm Bennett :
“Actuellement, une plante n’assimile que 40 % de l’engrais pulvérisé sur elle. Ce qui veut dire qu’une quantité importante de cet engrais va se retrouver dans le sol, s’il n’est pas absorbé par la plante. Il va alors polluer les eaux souterraines. Donc, notre objectif est de réduire le niveau de déperdition des nutriments et à l’inverse, d’augmenter le niveau des nutriments capturés par les plantes.”
Pour y parvenir, une seule solution : renforcer la coopération interdisciplinaire entre spécialistes du sol – ou pédologues -, mathématiciens, chimistes, informaticiens et autres biologistes.
Imaginez la scène : la journée a été difficile, vous vous sentez un peu tendu et avez un peu de temps à tuer. Vous allez chez Nesprespliff, une chaîne de café, et commandez un Marocain serré avec un space cake sans gluten. Vous vous asseyez tranquillement dans un canap’ et vous détendez…
Si ce scénario vous semble illusoire en France, imaginez que vous êtes aux Etats-Unis, là où le marché regarde d’un oeil vorace le marché du cannabis en attendant les futures dépénalisations. Là où Snoop Dogg a annoncé la semaine dernière le lancement de Merry Jane, sa plateforme média qui veut devenir l’encyclopédie mondiale de la weed.
Entre temps, de nouvelles études suggèrent que le cannabis se démocratise rapidement. L’étude prédit que le cannabis deviendra un ingrédient de plus en plus familier en cuisine, alors que la restauration travaille à satisfaire l’envie de nouvelles sensations culinaires et la demande pour des alternatives moins sucrée et calorique à l’alcool.
Les gourmets commencent à tester des nouveaux plats, comme un saumon mariné au cannabis. Et avec l’essor de l’usage récréatif du cannabis, certaines entreprises y regardent de plus près.
Matt Gray, le Directeur Général du site US The Stoner’s Cookbook, prédit que le marché de la marijuana atteindra plus de 10 milliards de dollars d’ici 5 ans, et les produits comestibles représenteront 40%. C’est tout sauf un marché de niche : 111 millions d’américains ont déjà consommé du cannabis.
Beaucoup de produits contenant du cannabis sont déjà disponibles là où la loi le permet : du jus infusé au chocolat au hash, en passant par le beurre au cannabis, les possibilités sont nombreuses. En essayant de garder le THC intact, les produits jouent à la fois sur le caractère psychoactif de la plante et son goût. Compelling & Rich’s, une entreprise de Los Angeles, commercialise par exemple des grains de café infusés à la marijuana, préparés au cours d’un processus où le THC est brûlé.
Les opinions divergent quant à l’utilisation du cannabis comme ingrédient culinaire. Pour certains, le goût de la feuille est très amer. Pour d’autres, tout dépend de la variété de weed utilisée. Et c’est là où les connaisseurs peuvent démontrer leur créativité dans la cuisine. On rapporte que les meilleurs effets sont de combiner du cannabis avec des graisses comme du beurre, de l’huile d’olive ou de la crème. Utilisée de cette façon, c’est juste une herbe comme une autre, avec des arômes particuliers et un goût unique pour chaque variété.
Il est bien sûr trop tôt pour savoir si le cannabis deviendra vraiment la nouvelle frontière culinaire à franchir, et si de grosses enseignes comme Starbuck’s s’immisceront dans le commerce du cannabis. La loi dictera sans doute les possibilités offertes aux gourmets. Mais il y aura à coup sûr un débat entre les législateurs et les passionnés de cuisine !
Source: newsweed.fr
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