Aux Etats-Unis, 23 Etats ont légalisé différentes formes de consommation de marijuana. La Californie a été le premier Etat à autoriser le cannabis médical en 1996. Un héritage que l’université du "business cannabis", l’Oaksterdam University, tend à développer par l’éducation.
Le cours de Sandy Moriarty est complet en ce samedi après-midi. C’est le week-end et pourtant des étudiants de tous les horizons et de tout âge sont installés dans la salle de cours, concentrés et attentifs. La plupart d’entre eux arbore des sweat shirts sur lequel on peut lire « Oaksterdam University ». Dans un coin de la pièce, quelque plants de cannabis sont installés sous une petite serre à la lumière noire. Une odeur de marijuana, de beurre et de bacon embaume la salle de classe. Sandy Moriaty, dit "Aunt Sandy" (tante Sandy), donne en effet un cours de cuisine.
Dans une ambiance très décontractée, élèves et professeur échangent sur la façon de cuisiner le cannabis à des fins médicales.
L’université d’Oaksterdam, est la première l’école américaine du "cannabis business". Fondée en 2007 sur le jeu de mots Oakland et Amsterdam, l’université est spécialisée dans la formation dans l’industrie du cannabis. De la plantation au commerce en passant par la préparation de plats innovants, l’école a pour mission de briser les préjugés concernant la marijuana. Elle a aussi pour objectif de continuer à participer à la réforme de la politique des drogues par l’éducation de ses élèves. Son programme tend à former des experts pour une expansion de l’industrie du cannabis en créant des leaders de l’industrie.
Livre de cuisine
Aunt Sandy est un peu la super-star de la faculté. Professeur depuis l’ouverture en 2007, elle est ravie d’éduquer ses élèves et de partager ses recettes allant de l’entrée au dessert. Dans son cours, elle explique comment personnaliser des plats avec le bon dosage adapté aux besoins du consommateur. Son livre Aunt Sandy’s Medical Marijuana Cookbook est le premier livre de cuisine de cannabis qui s’intéresse à la santé et aux besoins alimentaires spéciaux de malades, comme les diabétiques par exemple. Passionnée par les vertus médicinales de la plante, tante Sandy est enthousiaste quand elle revient sur la loi 215 adoptée en 1996 et légalisant la consommation du cannabis à des fins médicales. "Vous savez, je n’ai jamais fumé pour le fun. Grâce à la loi 215 qui a été signée à San Francisco, nous pouvons utiliser la marijuana comme traitement".
A l’université, la consommation est évidemment interdite, mais les professeurs ont le droit d’enseigner en utilisant la plante. Une plante qu’ils font pousser au sein même de l’établissement. Le proviseur Dr. Aseem Sappal explique : "L’université n’est pas surveillée comme un dispensaire de marijuana médicale pourrait l’être. Nous sommes autorisés à enseigner et nous sommes protégés par le 1er amendement (sur la liberté d’expression, NDLR). La seule chose que nous dispensons est l’éducation. Nous avons une relation fantastique avec la ville d’Oakland et le Service de police d’Oakland (OPD)".
Du sérieux et du professionnalisme
Plus qu’une faculté, c’est en quelque sorte une communauté de militants qui servent la cause du cannabis. D’ailleurs, l’université a été partisane de la "Measure Z" adoptée en 2004 qui soutient la fiscalité et la réglementation de la vente de cannabis chez les adultes. Dr. Aseem Sappal, le proviseur et professeur de commerce et d’éducation civique, dit qu’il est important de promouvoir l’éducation. "A partir de l’application de la loi, tout le monde, les entrepreneurs, les médecins, les avocats et les diplômés des universités seront intéressés à en apprendre davantage, donc, il y aura toujours un besoin d’éduquer le public.
Pas seulement en Californie, mais à l’échelle nationale, la nécessité de l’éducation ne fera qu’augmenter".
Le marché du cannabis est en effet en plein expansion. Selon une étude du See Change Strategy, la marijuana aurait rapporté 1,7 milliards de dollars aux Etats-Unis en 2011. D’ici deux ans, le marché du cannabis thérapeutique pourrait atteindre les 9 milliards de dollars d’après Arcview, une plateforme d’investissement et d’information sur l’industrie du cannabis. Mais pour l’Oaksterdam University, l’éducation prime : "Nous croyons et nous appuyons l’éducation autant que possible. Il est important que les élèves apprennent à partir d’une institution crédible et motivée par le changement et non le gain financier", déclare Dr. Aseem Sappal.
Une université internationale
De renommée internationale, l’Oaksterdam University accueille chaque année des élèves venant de tous les Etat-Unis, mais aussi d’Europe. Depuis 2007, environ 20.000 étudiants ont été diplômés de cette université hors du commun. Et le nombre d’étudiants ne cesse d’augmenter chaque année. "Nos classes sont généralement bookées deux mois à l’avance. Cette année, presque tous nos cours ont été réservés", nous dit le proviseur.
Moustafa d’origine turc, vit aux Etats-Unis depuis plus de vingt ans. Il est étudiant et bénévole à l’Oaksterdam University. Selon lui, la plante est la réponse à certains maux qu’ils soient du domaine de la santé ou de l’économie. "Je crois en la plante, je pense que ça peut aider beaucoup de personnes. Et puis c’est aussi un bon business. En Californie par exemple, la marijuana est une des sources de revenus de beaucoup de contés".
Pour Edouard, belge, et Yannick, français, l’Oacksterdam University est une porte ouverte à beaucoup d’opportunités et à une carrière professionnelle de taille. "Il n’y a pas d’université comme celle-ci en Europe. Alors j’ai fait mes valises et je suis venu voir ce que ça donnait. J’aime le professionnalisme et l’ouverture d’esprit qu’il y a ici" nous confie alors Edouard. Yannick quant à lui met un point d’honneur à l’éducation: "Il faut se former et éduquer les gens plutôt que de continuer à mettre des personnes en prison".
Et en Europe?
Ces deux étudiants européens sont d’accord pour dire que le "business cannabis" va s’étendre un peu plus au niveau des Etats-Unis où de plus en plus d’Etats légalisent la consommation de marijuana à des fins récréatives. "En France le marché, il est là. C’est un marché noir pour le moment mais il faut qu’il soit géré et organisé par l’Etat. Donc autant légaliser" déclare alors Yannick lorsque l’on parle de l’avenir. Une fois diplômés, leur projet est de s’orienter vers le côté médicinal et de changer le mode de consommation en créant de nouvelles recettes comme la sucette au cannabis par exemple.
Éduquer et promouvoir les vertus de cet or vert, tels sont les enjeux de l’Oaksterdam University. La création de formation de ce type est aussi une façon de changer l’image du cannabis qui ne se fume pas uniquement et qui n’est pas réservé qu’aux criminels.
Source: atlantico.fr