Les scientifiques bougent sur le cannabis… et trébuchent parfois

Par Invité ,

 

Alors que le front afghan (grand producteur de hasch) s'enlise, les choses bougent vite sur le front cannabique américain (grand producteur d'herbe). Après la proposition de loi californienne pour légaliser et taxer le commerce, l'annonce par Washington que les patients et dispensaires des Etats ayant légalisé le cannabis médical ne seraient plus poursuivis, l'American medical association (AMA) s'est prononcée la semaine dernière pour une déclassification du cannabis :

 

Source: Rue89

« Notre association demande que le classement de la marijuana au premier tableau fédéral des substances contrôlées soit réexaminé afin de mener des recherches cliniques et de permettre éventuellement le développement de médicaments à base de cannabis. »

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Le premier tableau rassemble les substances addictives, considérées comme dangereuses et qui n'ont pas d'utilisation médicale reconnue, comme l'héroïne, le LSD ou le PCP. Cocaïne et amphétamine, elles, ne figurent qu'au tableau II (en raison de leur potentiel médical). Bien sûr, la plus puissante association américaine de médecins (250 000 membres) précise immédiatement :

 

« Cela ne doit pas être considéré comme un soutien à un quelconque programme fédéral de cannabis médical ou à une légalisation de la marijuana, ou encore comme une reconnaisse scientifique du fait que la marijuana remplit les critères pour devenir un médicament. »

 

Reste que cette position est une très nette avancée par rapport aux précédentes déclarations de l'AMA, opposée à cette déclassification depuis 1997, alors que les demandes se faisaient de plus en plus nombreuses de la part des chercheurs.

 

Rappelant son opposition à la légalisation, le Tzar antidrogues (responsable de la politique des stupéfiants à la Maison blanche) a déclaré au LA Times : « C'est encore une drogue figurant au premier tableau et nous la traiterons comme telle. »

 

Un conseiller du gouvernement remercié en Grande-Bretagne

 

On comprend la prudence des médecins américains dans leur avancée après la mésaventure arrivée au début de ce mois à un de leurs collègues britanniques. Président du Conseil consultatif sur l'abus de drogues (ACMD) au ministère de l'Intérieur britannique, le docteur David Nutt a été congédié pour avoir osé déclarer que le LSD, le cannabis ou l'ecstasy étaient moins nocifs que le tabac ou l'alcool…

 

Pharmacologue et psychiatre, David Nutt s'exprimait dans un rapport du très sérieux King's college de Londres. Il y regrettait que le ministère de l'Intérieur « torde et dévalue » la parole scientifique, notamment en ayant décidé l'année dernière, contre l'avis des experts, de repasser le cannabis du tableau C au tableau B des stupéfiants (la déclassification avait été décidée en 2004 par le gouvernement Blair, procédant à une dépénalisation de fait).

 

Pour le ministre de l'Intérieur Alan Johnson :

 

« David Nutt ne peut à la fois être notre conseiller et faire campagne contre notre politique face au cannabis. C'est une question de principe. »

 

Reste que cinq des 31 membres de l'ACMD, craignant pour leur indépendance, ont démissionné par solidarité. Pas sûr que cela console le docteur Nutt, mais l'essentiel des panels d'experts ayant tenté de classer les drogues (légales ou non) selon leur dangerosité sont arrivés à des conclusions équivalentes.

 

Ce fut le cas pour l'OMS en 1971. Pour le rapport sur « La dangerosité des drogues » du professeur Roques en 1998. Mais aussi plus récemment dans une étude publiée dans The Lancet en 2007. L'héroïne y arrivait en tête des produits les plus dangereux, tabac et alcool étaient dans la première moitié, tandis que le cannabis se classait 11e et l'ecstasy 18e.

 

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Par Arnaud Aubron

 

 


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