La multiplication des drogues «légales» (ces substances détournées de leur premier objet médical) met en lumière l’inefficacité des politiques répressives menées par les autorités, dénoncent de nombreux experts en Grande-Bretagne, selon le quotidien The Guardian.
L’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT) révèle en effet qu’entre les mois de janvier et mai 2011 plus de 20 nouvelles drogues «légales» sont arrivées sur les marchés européens (soit près d'une par semaine). Paolo Deluca, chercheur au Psychonaut Research Project basé au King’s College de Londres, précise que l’année dernière, l’OEDT avait dénombré 41 nouvelles «substances psychoactives», faisant de 2010 une «année record».
Pour lui, cette tendance de plus en plus marquée à la «défonce légale» (qui consiste à détourner de leur usage traditionnel des produits autorisés et même commercialisés), faisant de la Grande-Bretagne le premier marché en Europe pour les drogues de synthèse, rend «inefficace» toute mesure anti-drogue.
En avril 2010, deux substances de synthèse, la méphédrone (aussi appelé «miaou miaou») et la naphyrone (plus connue sous le nom de «NRG1») produites dans des laboratoires clandestins en Chine selon le magazine Scientific American et ayant connu un rapide succès au Royaume-Uni, ont été interdites outre-Manche. En France, il a fallu attendre quelques mois de plus pour que la méphédrone, en vente en toute légalité sur Internet, soit finalement classée comme stupéfiant par l’Agence française de sécurité sanitaire (AFSSAPS).
Alors que le gouvernement britannique continue actuellement sa politique d’interdiction, de plus en plus de voix s’élèvent contre cette manière de lutter contre la prise de «drogues légales». Steve Rolles, de la fondation pour un changement de politique concernant les drogues (TDPF) montre à quel point cette approche répressive n’est plus adaptée:
«A chaque fois qu’on en interdit une, une autre apparaît. Ça montre qu’on ne comprend toujours pas comment le marché fonctionne.»
Paolo Deluca reprend justement l’exemple de la méphédrone. Cette drogue de synthèse a été interdite l’année dernière en Grande-Bretagne et pourtant elle est désormais presque aussi populaire que la cocaïne chez les jeunes de 16 à 24 ans, qui sont près de 300.000 à en avoir pris sur les 12 mois précédant l’enquête (l'OFDT précise qu'en France cette alternative à la cocaïne est beaucoup moins répandue).
Pour Deluca, il est clair que «la légalité des composants chimiques ne va pas faire diminuer le nombre des utilisateurs potentiels, mais seulement la qualité du produit».
Le site d'information 100gf insiste quant à lui sur le rôle important joué par Internet: si les politiques d'interdiction sont de plus en plus inefficaces c'est parce que maintenant, avant qu'une substance ne soit déclarée illégale, au moins deux ou trois nouvelles drogues sont déjà en vente en ligne.
Photo: Cocaine / Valerie Everett via FlickrCC License by
Source:State.fr