Drogues, alcools : Ne plus mentir aux jeunes pour être crédible

Par Invité ,

Pas d'affolement mais une meilleure information : le verdict des spécialistes. De plus en plus de spécialistes estiment qu'il est urgent de cesser de mentir aux jeunes sur les problèmes de toxicomanies dont la solution passe peut-être par une meilleure information donnée à tous les acteurs (lycéens, enseignants et parents) plutôt que par un "excès d'affolement ". On ne peut pas attendre des miracles de la prévention.En revanche, beaucoup peut venir de l'information, jugeait récemment Nicole Maestracci, présidente de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les toxicomanies, lors d'un déjeuner-débat organisé par le syndicat enseignant FSU. Plus question selon elle de se bander les yeux : tous les établissements scolaires sont touchés par les toxicomanies. Aujourd'hui, un tiers des 15/19 ans déclare avoir fumé du cannabis, 3% des lycéens parisiens (contre 0,1% en 1992) ont pris des drogues de synthèse, ecstasy en particulier, et la consommation d'alcool fort et les ivresses répétées sont en forte croissance chez les jeunes. "Il est important de donner des informations justes aux jeunes, ne plus leur raconter par exemple que le cannabis bousille le cerveau", assure Mme Maestracci, inquiète de "l'énorme sous-information des adultes qui se trouvent aux côtés des jeunes". Les enseignants sont d'ailleurs souvent désemparés quand ils découvrent un cas de toxicomanie. "Faut-il le dénoncer ? Mais dans ce cas, est-ce que cela ne va pas nuire aux enfants", s'interroge Monique Vuaillat, professeur et co-secrétaire général de la FSU.

 

 

Dire les choses vraies:

 

"C'est difficile d'être crédible sur notre discours de prévention car on a menti pendant des années en disant d'un côté que le cannabis détruit et de l'autre très peu de chose sur l'alcool qui fait pourtant des ravages", renchérit Danielle Atlan, assistante sociale dans un lycée d'un quartier sensible de Pantin (Seine-St-Denis). "Dire les choses vraies" est aussi le leitmotiv de Philippe Jeammet, pédopsychiatre reconnu. "N'oublions pas qu'au 19ème siècle, le dictionnaire Larousse écrivait que la masturbation rendait fou, avec des pertes au niveau du cerveau", rappelle-t-il. "On ne va pas éradiquer les problèmes de drogue, il faudra vivre avec", assure M Jeammet. "Dans l'ensemble, constate ce médecin à l'Institut mutualiste de Paris-Montsouris, les adolescents vont plutôt bien. Ils sont plutôt entreprenant et critiques. Il reste toujours 10 à 15% de jeunes en difficulté. Mais dans une société où l'expression est de plus en plus libre, il est normal que ces jeunes expriment leurs problèmes plus tôt". C'est justement cette précocité grandissante qui inquiète les spécialistes. "Les problèmes sont souvent posés aux débuts de l'adolescence", rappelle Sylvie Wieviorka, qui dirige à paris le centre de soins gratuits pour toxicomanes St Germain Pierre Nicole. "Les personnels, suggère-t-elle, doivent être mieux formés pour éviter de trop gros retards dans l'intervention des praticiens. Sans excès d'affolement ni banalisation".

 

 

Un guide pour les enseignants:

 

L'Éducation nationale a élaboré un guide pratique pour les enseignants et les personnels de santé, avec pour objectif de lever la loi du silence qui pèse sur l'usage de l'alcool et des drogues, les tentatives de suicide et plus généralement sur les comportements "à risque" des adolescents. "Oui, l'usage du tabac et de l'alcool est répandu parmi les élèves. Oui, les suicides existent", a déclaré Ségolène Royal, en présentant mardi ce document pratique et théorique, rédigé avec la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT). Depuis six ans, date des premières données épidémiologiques, la MILDT a relevé un "énorme changement de comportement des jeunes", avec une hausse des états d'ivresse excessive, une hausse de l'usage des drogues de synthèse, une hausse des produits dopants, "et pas seulement dans les zones d'éducation prioritaire". Selon la présidente de la MILDT, Nicole Maestracci, l'enjeu est désormais, en matière de consommation de produits interdits, "d'éviter le passage d'une consommation occasionnelle à une consommation nocive, régulière, en retrouvant un discours crédible auprès des jeunes". Le guide, qui sera diffusé à 780 000 exemplaires dans les collèges et les lycées, met à la disposition des adultes des études de cas et de données. "C'est un outil de mutualisation des savoir-faire, une base de réflexion et de dialogue avec les élèves pour les heures de vie de classe ou les cours de sciences et vie de la terre", a précisé Mme Royal. Dans l'esprit de la ministre, il représente aussi "une mutation de notre système scolaire" : le jeune n'est plus seulement un élève, mais doit être considéré dans sa globalité.

 


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