En février 2015, l'état américain du Colorado a perçu 30 millions d'euros de "trop" d'impôts suite à la légalisation du cannabis. Pendant ce temps, en France, le débat concernant une éventuelle dépénalisation reste au point mort. A La Réunion, des groupes contournent la loi, afin de lutter contre le marché noir et promouvoir les usages médicinaux du zamal.
Lancés en Espagne et aux Pays-Bas, les "cannabis social clubs" fonctionnent sur le modèle d’une association à but non lucratif, avec secrétaire et trésorier, la discrétion en plus. Leur but : affaiblir le marché noir et permettre à ses adhérents de se procurer un produit issu de cultures biologiques saines et non industrielles.
Sous forme de cotisation annuelle, le membre paye au prorata de ce qu’il consomme et se doit de mettre en commun sa production. A La Réunion, on compte 14 centres installés dans toutes les régions de l’île et plus d’une centaine de membres selon Gab Pacino, le président des Cannabis social club 974 La Réunion.
La principale "clientèle" de ces centres recherche les vertus médicinales de la plante de cannabis. La reconnaissance légale de ces "CSC", tentée en 2013 par Dominique Broc, le porte-parole des cannabis social clubs de France, a finalement abouti à leur dissolution. L'homme avait été condamné à 6 mois de prison avec sursis, laissant les CSC’s dans l’illégalité.
A La Réunion, l’ancien maire de Sainte-Rose, Bruno Mamindy-Pajany avait déjà montré son intérêt pour la culture de cannabis thérapeutique. "J’ai d’ailleurs envoyé un courrier à ce dernier pour l’informer qu’un groupe pro-cannabis est bien en place à La Réunion. [...] Mais je n’ai jamais eu de réponse", regrette Gab Pacino.
"Pouvoir se soigner avec le zamal"
"Tous les membres de nos CSC’s et beaucoup de personnes de mon entourage, se soignent de pathologies plus ou moins graves. Certains pour combattre les effets négatifs et nuisibles d’une chimio-thérapie par exemple, d’autres membres se soignent contre la maladie de Krowne, le cancer du poumon ou le SIDA. On dispose d’un laboratoire qui travaille uniquement pour ce genre de maladie", poursuit le président du CSC's 974. Mais les traitements au zamal - bien qu’efficaces selon plusieurs études - restent illégaux en France, favorisant l'expansion du marché noir.
"Ayant une consommation responsable à but thérapeutique, il est très difficile, de nos jours, de se fournir en zamal de qualité dans la rue et encore moins lorsqu’on recherche du matériel de bonne qualité pour faire nos extractions médicales. On connait tous maintenant les vertus du cannabis pour la santé, je ne vois pas pourquoi il nous serait défendu de nous soigner de la façon dont nous le voulons", témoigne le président du cannabis social club de La Réunion.
Une dépénalisation, c’est-à-dire, une autorisation partielle de la détention et la consommation de cannabis, "laissant le consommateur libre de pouvoir cultiver son propre zamal, choisissant l’auto-médication par les plantes comme seul remède à ses maux", serait la législation idéale pour les CSC de l'île. Cependant, une légalisation totale de la vente de zamal pourrait avoir des effets bénéfiques pour les finances de l'Etat et le développement économique de La Réunion.
Un business florissant
"Une légalisation apporterait de l’emploi. On parle même de 150 nouvelles entreprises. Cela pourrait être un élan économique pour notre département qui voit son taux de chômage augmenter", s'enthousiasme le président du cannabis social club de La Réunion. Dans cette hypothèse, "le rôle des centres sociaux de cannathérapie serait de […] proposer aux malades, un suivi de leur pathologie et un traitement aux cannabinoïdes adapté à leurs besoins."
Pour autant, le représentant des CSC’s "ne fait pas l’apologie du zamal" et pointe du doigt les marchés noirs de l'île. Il s'explique : "les traficants, de plus en plus, sans vergogne, ont dévié l’utilisation de la plante à des buts commerciaux, générant chaque jour une manne de bénéfices qui pourraient être utilisés pour le développement de notre département, au lieu d’être utilisés pour générer de nouveaux trafics."
Par ailleurs, dans une étude publiée le 19 décembre 2014, la estime que "la politique de répression est en échec en France." D'après le think-thank, une légalisation permettrait une économie budgétaire de 311 millions d’euros par an, et prévoit un bénéfice compris entre 1,8 et 2,1 milliards d’euros de recette fiscale si le cannabis devient un monopole public. Mais pour l’heure, le débat reste au point-mort en France, au grand dam des millions de consommateurs et des défenseurs de la cannathérapie.
Pour rappel, la législation française en vigueur prévoit jusqu’à 3750 euros d’amende ou un an d’emprisonnement pour consommation de cannabis. Quant à la production, même pour usage personnel, celle-ci est passible d'une peine maximale de vingt ans de réclusion criminelle ou d'une amende pouvant aller jusqu'à 7,5 millions d’euros.
par IPR
Il n’y a aucun commentaire à afficher.