Cannabis en stock

Par Invité ,

 

Le comté de Humboldt, vaste territoire montagneux et verdoyant, est au coeur du fameux Triangle d'émeraude, première région productrice de marijuana de la Côte ouest américaine. Ici, des gangs organisés cultivent le cannabis à grande échelle : en plein air au fond de vallées inaccessibles, ou dans des containers, des tentes, des hangars, des pavillons de banlieue et même des appartements de centre-ville aux fenêtres condamnées, transformés en pépinières.

 

Source: LeMonde.fr

A Arcata, jolie bourgade côtière, le cannabis est omniprésent. Régulièrement, des amateurs de joints organisent des "fêtes cannabis" dans un parc, où tout le monde fume, sous l'oeil blasé de la police. La ville compte trois magasins d'outillage spécialement conçu pour la culture et le traitement du cannabis, des boutiques de vêtements et accessoires fabriqués en chanvre. Sur la grand-place, des chômeurs attendent patiemment qu'un cultivateur de cannabis arrive en 4 × 4 et leur propose du travail.

 

Arcata compte aussi quatre "dispensaires", des boutiques où l'on vend en toute légalité de la "marijuana médicale". En Californie, le cannabis a un double statut. Son usage récréatif reste interdit : la possession d'une petite quantité est un délit passible d'une amende, et les gros trafiquants risquent la prison. Mais depuis le vote par référendum, en 1996, de la Proposition 215, son usage à des fins médicales est autorisé.

 

Si un médecin estime que la marijuana peut calmer les douleurs ou les angoisses d'un malade chronique, il peut lui prescrire de fumer un ou plusieurs joints par jour, ou de manger des fleurs de cannabis dans un gâteau. Muni de son ordonnance, le patient se fait délivrer par les services municipaux une carte cannabis, qui l'autorise à en transporter pour son usage personnel.

 

La Proposition 215 a permis le développement d'une puissante industrie, à la lisière de la légalité. Dans tout l'Etat, des cabinets médicaux spécialisés rédigent des ordonnances de complaisance à la chaîne, pour 100 ou 200 dollars. Trois cent mille Californiens possèdent aujourd'hui une carte cannabis.

 

Certains le font pousser eux-mêmes, d'autres délèguent la culture à un soignant officiel, qui devient producteur légal pour le compte d'autrui. Le soignant peut sous-traiter la culture à un agriculteur, et ouvrir un dispensaire. Ailleurs, des groupes vivant en communauté louent des terres agricoles et cultivent le cannabis dans des fermes collectives. Ils distribuent gratuitement une partie de leur récolte à leurs patients encartés, et vendent le reste au marché noir.

 

Il existe plus de cinq cents dispensaires en Californie, surtout dans les villes gérées par le Parti démocrate. Certains sont d'authentiques centres de soins, d'autres des vitrines légales pour les militants de la légalisation, ou encore de pures entreprises commerciales. Dans les villes conservatrices, les autorités locales utilisent tous les moyens pour décourager leur implantation. Procès et contre-procès se multiplient, intentés par les militants procannabis contre des collectivités locales, et vice versa. La situation est encore compliquée par le fait que le gouvernement fédéral de Washington ne reconnaît pas la Proposition 215, et mène une répression sporadique contre les dispensaires.

 

A Arcata, le dispensaire baptisé Patient Resource Center est géré par une femme d'affaires énergique. Les clients font la queue devant un petit guichet, choisissent leur variété préférée sur catalogue, et paient entre 30 et 40 dollars le sachet de 3,5 grammes. Derrière la boutique, une vaste serre abrite plus de mille plantes, cultivées sous lampe et irriguées au goutte-à-goutte. A l'étage, des milliers de jeunes pousses attendent d'être mises en terre. Ce système de rotation, contrôlé par ordinateur, permet une récolte tous les dix jours, tout au long de l'année.

 

Dans la même rue d'Arcata, un autre dispensaire, Humboldt Coop, tenu par un expert en gestion des collectivités locales, fournit à lui seul près de 8 000 patients dans tout l'Etat. Il sous-traite la culture à des agriculteurs de la région, qui arrondissent ainsi leurs fins de mois.

 

Face à cette situation inextricable, les autorités du comté cherchent une solution. Paul Gallegos, le district attorney du comté ("chef procureur") installé dans le port d'Eureka, à 10 km d'Arcata, continue à pourchasser les trafiquants. Pourtant, il en est arrivé à la conclusion que le mieux serait de légaliser le cannabis : "Je ne parle pas de demi-mesures comme la dépénalisation, il faudrait que la marijuana soit complètement légale, et que l'administration puisse surveiller la production. En lui-même, le cannabis ne pose pas de problèmes de sûreté, seulement des problèmes d'éducation et de santé."

 

M. Gallegos rêve de supprimer l'immense gaspillage provoqué par cette guerre sans fin de l'Etat contre le cannabis, et surtout de mettre fin à l'hypocrisie générale : "Le maintien de ces lois inapplicables sape l'autorité de l'Etat. La justice devient une farce, la population perd tout respect envers les institutions."

 

la légalisation aurait selon lui un autre avantage : "Le prix du cannabis s'effondrerait, les trafiquants se retrouveraient au chômage. En fait, les deux seuls groupes vraiment opposés à la légalisation sont les forces de l'ordre, pour des raisons culturelles, et les dealers, pour des raisons économiques."

 

Même au sein de la police, les mentalités changent. Le détective Wayne Cox, qui travaille sous les ordres de Paul Gallegos, semble être du même avis que son patron. Cette évolution ne s'est pas faite sans déchirement, car M. Cox est un ancien de la brigade des stups : "Une chose est sûre, plus jamais je ne risquerai ma peau en allant défoncer la porte d'un trafiquant de cannabis, ça n'a plus de sens. Récemment, j'ai contrôlé un adolescent qui conduisait un 4 × 4 tout neuf, il venait de l'acheter cash, 70 000 dollars. Dans la voiture, j'ai trouvé une facture pour un équipement stéréo à 30 000 dollars. Les jeunes du comté n'ont plus d'autre ambition que de cultiver du cannabis." A demi-mot, le policier et le magistrat reconnaissent que l'industrie du cannabis apporte une certaine prospérité à la région, durement touchée par le déclin de la pêche et de l'exploitation forestière.

 

Le principe de la légalisation n'effraie plus les responsables locaux. Mark Lovelace, supervisor du comté ("chef de l'exécutif local"), n'a rien contre, à condition qu'elle profite aux agriculteurs de la région : "Je ne voudrais pas voir débarquer ici des grosses entreprises d'agrobusiness, qui créeraient des exploitations intensives et transféreraient leurs profits ailleurs. Il faudrait que la production reste à taille humaine."

 

Dans de nombreuses villes californiennes, l'action de la police est de plus en plus bridée. Des conseils municipaux démocrates ont décrété que la répression de la consommation de cannabis devait être "la plus basse priorité possible" pour les policiers. D'autres ont voté des résolutions visant à instaurer la liberté de fumer chez soi et dans des clubs privés.

 

A Sacramento, capitale de l'Etat, des hommes politiques procannabis, aidés par une myriade d'associations, sont passés à l'offensive. Tom Ammiano, représentant démocrate de San Francisco à l'Assemblée législative, a déposé un projet de loi visant à la légalisation : "Selon des études du département de l'agriculture, le cannabis représente en Californie un marché de 14 ou 15 milliards de dollars par an, plus qu'aucun autre produit agricole. Si cette production était réglementée et taxée, comme l'alcool, cela ferait rentrer un milliard et demi de dollars par an dans les caisses de l'Etat. En ces temps de crise et de déficit budgétaire, ce ne serait pas négligeable."

 

M. Ammiano sait que la partie est loin d'être gagnée, mais il est confiant : "Pour la première fois, toutes les conditions favorables sont réunies. Les sondages montrent que 55 % de la population sont pour la légalisation. Les démocrates détiennent la majorité dans les deux Chambres de l'Assemblée législative."

 

M. Ammiano a reçu le soutien de plusieurs élus et de membres de la haute administration. Betty Yee, directrice du Trésor, qualifie le projet de loi de "mesure de bon sens", qui permettrait une "utilisation plus avisée des ressources publiques". Le shérif de San Francisco, Michael Hennessey, va plus loin : "Réprimer la consommation de marijuana, c'est comme faire un château de sable pour arrêter la marée montante. La marijuana fait partie intégrante de la culture populaire californienne."

 

De son côté, le gouverneur républicain Arnold Schwarzenegger a récemment déclaré qu'il était ouvert à une discussion sur ce sujet délicat. Une vidéo remontant aux années 1970 le montrant fumant un joint, écroulé dans un fauteuil avec un large sourire, est visible sur YouTube.

 

Par ailleurs, M. Ammiano constate que le gouvernement Obama, sans être en faveur de la légalisation, a une position plus souple sur ce sujet que son prédécesseur. Le ministre de la justice Eric Holder a annoncé que la police fédérale allait cesser ses raids contre les dispensaires, s'ils sont en conformité avec la loi locale.

 

Au cas où le projet de loi de M. Ammiano ne serait pas voté, une alliance d'associations procannabis et de groupes de la gauche libertaire a lancé en parallèle une autre procédure : un référendum d'initiative populaire, qui pourrait avoir lieu dès novembre 2010

 

Yves Eudes

 


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Énorme... excellente synthèse de tout ce qu'il se passe en californie depuis un mooment. Merci le monde (enfin un article plus sérieux que "le cannabis donne le cancer des testicules"!)

Les californiens m'ont l'air bien en avance coté "ouverture d'esprit" (malgré le recul sur le mariage gay) et ont visiblement été les premiers à comprendre l'intérêt de la légalisation.

Mais bordel en a t-il fallut arriver à ce point là de pauvreté et de criminalité pour faire quelque chose?

Pourtant en france on en est pas loin mais on est loin de voir le bout du tunnel (avec tous ces cons...)

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Jack Herer avait raison, c'est la plante qui sauvera le monde.......... de la crise.

Après avoir bâtit l'Amérique, elle la rebâtira.

 

Si c'est pas ironique, après que la nation entière l'ai diabolisé, elle l'a sortira du gouffre xD

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Les U.S.A sont responsable de la prohibition mondiale.

 

Un vent américain de réforme balaye tout sur son passage.

 

Le cyclone démocrate soufflera t il en Europe ????

 

merci ricco.

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Si je ne me trompe pas c'est bien ce meme etat qui est au bord de la faillite et qui a licensié des fonctionnaires... vu le contexte actuel quelque chose me dit que l'appat du gain facile, avec les taxes, pourrait accélérer la légalisation ;)

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1979 exacte et il faut savoir que ça risque d'etre pareil en france...

 

mais il me semble que obama avait dit qu'il ce pencherai sur la question canabis/cocaine on attend toujours!! encore un qui aura enflé tout le monde.

 

il ne suffit pas d'un "YES WE CAN" pour tout changé en "UN WEEK AND" .

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SI!

Il autorise déja le cannabis médical pour les états qui le désirent et c'est énorme par rapport à l'administration Bush. Personnellement je pense que le cannabis médical est le cheval de Troy du cannabis récréatif!

Et concernant le crack (dérivé de la cocaïne) il a quand même rétabli les peines au même niveau que pour la blanche c'est un bon début.

Il carbure laissons lui le temps (et surtout aux électeurs) de changer d'avis sur la question de la drogue comme c'est le cas en Californie (56% pour la légalisation?).

Ca vaut mieux que l'autre connard de nabot qui ne comprend rien à rien à part "comment manipuler les moutons".

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ok je ne savais pas vraiment tout ça!!

 

il faut savoir que certains medecin en france on des contact et "prescrivent" illegalement du canabis pour les passients atteint de maladie ou de traitement très douloureux!

plus jeunes j'avais un ami dans le sud est sont père avait une maladie(je ne sais plus quoi) au gros colon(intestin) et le traitement était assez dur à supporter son doc lui avait refilé un contact le mec lui fournissait de grosse quantitée assez souvent et l'herbe était loin d'etre dégeu!par contre plaine de graines!!de ces graines énormement de plan on poussés :-D et doivent encore donner ;-) mais je ne vois plus mon poto pour en etre sur!!

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J'espere que ca va continuer dans ce sens.. Qu'il y est une prise de conscience général..

Que les états tolerent petit a petit notre plante afin que tous les états la tolere..

 

Je pense vraiment que c'est en ce moment meme qu'il faut redoubler d'effort, pour faire comprendre aux gens les moins averti ce que notre marie jeanne est réelement!!

Que tous ceux qui la defendent en parle doublement autour d'eux, et reussissent a demontrer, que cette prohibition est inutile..

 

Que tous les gens qui ont été victime de cette repression en parle a toute leur famille surtout au plus vieux..

C'est récurrent, et au quotidien, y'a qu'a ouvrir un journal hebdomadaire local a la page faits divers pour s'en rendre compte..

 

Parlez en autour de vous de maniere constructive, ouvrez les esprit fermés, et pour certains arrété de vehiculer cette image du gros defoncé trop high aprés un joint!!

 

Combien de personne enfermé ?(qui de plus n'ont pas le droit de vote)

 

Combien de famille touché par cette repression?

 

Combien de fumeurs et d'autoproducteurs se cachent a l'abri des regards indiscret par peur de delation?

 

Nous sommes nombreux, alors combien de temps allons nous encore toléré cela??

 

a++

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