Éric Correia, président de la Communauté d’agglomération du Grand Guéret, a semé les premières graines de la légalisation du cannabis thérapeutique dans le débat public. Jouany Chatoux en récolte les premières plantes, pour prouver que la Creuse est prête à être un département pilote dans le domaine.
Un lobbying hétéroclite s’est constitué afin de faire germer l’idée d’une légalisation du cannabis thérapeutique en France. Pour aider parlementaires et gouvernement, certains n’hésitent pas à aller plus loin que le discours en proposant la démonstration par l’exemple.
L'expérimentation est complètement légale
Ainsi, des commerçants ont commencé à exploiter un vide juridique en vendant des produits étrangers contenant une substance non interdite en France, dénommée CBD, et sans substance euphorisante (THC).
Jouany Chatoux est de ceux-là mais il a souhaité, avec ses associés du Gaec Chatoux-Jeanblanc-Pichon, démarrer les tests de culture grandeur nature pour gagner du temps et faire la démonstration de la pertinence du projet. Pour autant, pas question pour les agriculteurs d’être hors-la-loi : « Nous ne cultivons que des espèces autorisées ne dépassant pas un taux de THC de 0,2 %. Nous nous conformons aux dispositions légales (voir par ailleurs) et avons sélectionné une dizaine de variétés de chanvre inscrites au catalogue des plantes autorisées. »
« Nous avons des agriculteurs prêts à cultiver, un labo pour le transformer et des investisseurs étrangers » affirmait en décembre dernier Éric Correia. Le député Jean-Baptiste Moreau lui a emboîté le pas et œuvre à présent auprès de Matignon et du Parlement pour faire de la Creuse un département test. Il y a quelques jours, le Sénat votait les premières dispositions assouplissant la législation pour permettre les premiers essais.
Jouany et ses associés ont investi dans du matériel de pointe pour se donner toutes les chances de réussite et rester dans les clous de la législation. « Cette année, nous nous concentrons sur la sélection des meilleures variétés et des meilleurs pieds dans le cadre d’une phase de sélection génétique. Nous voulons créer notre propre variété élite à bouturer, répondant précisément aux critères français ».
« Une façon de se faire la main »
Et cette sélection a visiblement bien démarré puisque des centaines de plants ont été cultivées depuis quelques semaines avec beaucoup de succès. Les premiers semis atteignent à présent une taille de quelques dizaines de centimètres.
À leur apogée, les plantes peuvent atteindre 2 ou 3 mètres de hauteur. À terme, « les plantes seront commercialisées entières. Nous ne commercialiserons pas spécifiquement les fleurs car c’est interdit en France. Notre objectif, avec ces tests, c’est d’être prêts et opérationnels dès que la législation aura évolué. C’est une façon de se faire la main. En attendant, les tests sont suivis par la Chambre d’agriculture et des visites seront organisées », précise Jouany.
Historiquement, on a l’impression de vivre un retour aux sources puisque la Creuse était, il y a un siècle, le plus gros département producteur de chanvre en France. Il se pourrait donc que d’ici peu, le futur creusois retrouve des airs d’antan.
Que dit la loi ?
La réglementation française prévoit que toutes les opérations concernant le cannabis sont interdites, notamment sa production, sa détention et son emploi. Dès lors, tout produit contenant du cannabidiol extrait de la plante de cannabis est interdit sauf s’il entre dans le cadre d’une dérogation permettant l’utilisation du chanvre à des fins industrielles et commerciales. Ainsi, certaines variétés, dépourvues de propriétés stupéfiantes, peuvent être utilisées sous trois conditions : les variétés de chanvre autorisées figurent sur une liste ; seules les graines et les fibres peuvent être utilisées. L’utilisation des fleurs est interdite ; la plante doit avoir une teneur inférieure à 0,2 % en THC.
Source: lamontagne.fr