Khalid Tinasti, est secrétaire exécutif de la Global Commission on Drug Policy. Il est également chargé de recherche honoraire à l’Université de Swansea. Dans cette tribune, il explique comment le Maroc pourrait franchir le pas et légaliser sous condition le cannabis.
Khalid Tinasti, Secrétaire exécutif de la Global Commission on Drug Policy.
Depuis la nomination du Premier ministre Saâdeddine El Othmani, il est écrit ici et là qu’il est favorable à la légalisation sous conditions du cannabis au Maroc. Les conditions sous lesquelles une telle légalisation serait éventuellement considérée par le Premier ministre et le nouveau gouvernement ne sont pas publiques à ce stade. Par ailleurs, aucun calendrier de réforme ne l’est non plus. Toutefois, l’inclusion de cette information dans les divers portraits du Premier ministre permet de poser un diagnostic sur les défis que doit relever le Maroc afin de réguler de manière stricte, efficace et juste sa production de cannabis.
Il s’agit de répondre à la fois à des défis internes au Maroc, à savoir la mise en place d’une réelle stratégie de réduction de l’usage du cannabis à travers sa légalisation, mais surtout de répondre de manière équitable à la problématique urgente des cultivateurs dans le Rif. Il s’agit également tenir compte des défis externes au pays qui influenceront directement ce débat.
Quelle sera notre interprétation nationale des traités internationaux sur les drogues et notre conformité à la loi internationale ? Quelles seront les réactions des pays voisins qui y verront une menace, certes exagérée, à leurs modèles prohibitionnistes ?
Le Maroc est le premier producteur de cannabis dans le monde, et sa production est largement destinée à l’export. La prohibition de cette substance, qui est cultivée depuis des siècles dans le Rif occidental, a produit plusieurs méfaits qui sont difficiles à ignorer : la mise en péril quotidienne des cultivateurs qui sont criminalisés par la loi et mis sous pression par le crime organisé ; le manque d’alternatives économiques dans les zones montagneuses éloignées ; et le règlement, par les trafiquants, des livraisons de résine de cannabis par d’autres stupéfiants et non par de l’argent, augmentant ainsi la consommation et le trafic dans cette même région.
Ces effets ne sont pas seulement liés au fait de produire du cannabis, mais en grande partie au fait de le produire dans un cadre illicite. Cette criminalisation renie aux cultivateurs et aux usagers leurs droits les plus basiques, ceux de pouvoir être protégés du pouvoir coercitif des criminels, de même que de pouvoir compter sur des recours légaux dans les cas d’abus par les forces de l’ordre. La régulation légale permettra dans ce sens d’habiliter ces personnes actuellement vulnérables à demander leurs droits, et de se protéger contre l’arbitraire qui est souvent le résultat de la prohibition.
Cela permet, et c’est l’essentiel en termes de politiques publiques, de pouvoir contrôler cette substance bien trop souvent dépeinte, sans lien avec l’évidence scientifique, comme une drogue destructrice. En effet, une régulation étatique stricte peut décider des quantités à produire, des zones où la production peut être autorisée (afin de la contenir aux zones historiques et de substituer ces revenus au marché illicite qui répond aujourd’hui à l’urgence sociale dans le Rif occidental), de la qualité et de la teneur des substances actives (en limitant la puissance du THC), et de l’âge et du profil des consommateurs, court-circuitant ainsi les trafiquants.
Mais si la régulation légale, ou légalisation sous conditions strictes, sonne comme une bonne solution, elle est tout sauf facile ou évidente à mettre en place. L’exemple le plus illustratif de ces difficultés est le Canada qui met en place actuellement une légalisation fédérale du cannabis. Mais nos problématiques sont différentes.
Elles sont liées en premier lieu au pouvoir de nos institutions à exercer un réel contrôle pour que la production légale ne soit pas détournée vers le marché noir, à pouvoir contrer la corruption à tous les niveaux pour sécuriser les circuits de production et de revente, et à pouvoir concentrer les efforts sur le crime organisé si résilient face aux politiques publiques même les plus novatrices. Débattre de la place du cannabis
Notre second problème est le contrecoup régional et mondial. En effet les trois conventions internationales sur les drogues interdisent la légalisation des drogues illicites. Les Etats-Unis clament dans les arènes multilatérales que les légalisations du cannabis dans neuf de leurs Etats dépendent des lois de ces mêmes Etats, et que la loi fédérale continue à prohiber le cannabis.
L’Uruguay profite de cette situation américaine pour passer sous les radars, et le Canada doit présenter ses arguments bientôt. Mais que pourrait plaider le Maroc ? Certainement que lesdites conventions permettent de la flexibilité lorsque leurs articles ne correspondent pas aux Constitutions nationales. Surtout, il doit rappeler que si le combat contre le crime organisé est de nature transnationale, la santé, le bien-être et la sécurité des citoyens sont une responsabilité nationale.
Et ces éléments sont, de manière documentée, mis en péril par la prohibition et la criminalisation du cannabis, par le simple fait de le laisser ainsi que ses cultivateurs ou autres usagers sous contrôle criminel. Finalement, la régulation légale changera la nature même du marché du cannabis au Maroc, le faisant passer de produit illicite destiné à l’export à un produit licite et contrôlé destiné au marché local uniquement.
La régulation du cannabis est un saut dans l’inconnu car les résultats des expériences aux Amériques ne seront connus que dans quelques années, mais il est certain qu’elle ne peut produire plus de méfaits que la prohibition actuelle. Toutefois, il est nécessaire d’être réaliste et de mesurer les difficultés de sa mise en place : il faut débattre de la réelle place du cannabis dans notre société loin des dogmes et des idéologies basées sur des idées fausses propagées par 50 ans de prohibition, et surtout de la capacité de nos institutions à mener une telle réforme de manière efficace avec tous les garde-fous nécessaires au contrôle stricte du cannabis légal.
Les Verts ont remis sur la table jeudi le débat sur la dépénalisation du cannabis avec le dépôt d'une initiative parlementaire. Ils font valoir deux points nouveaux: la protection des jeunes et la taxation au même titre que l'alcool.
Selon une étude de Suchtmonitoring Schweiz, le cannabis est de loin la substance illégale la plus consommée en Suisse. Les Verts veulent en finir avec la pénalisation et ont déposé jeudi une initiative parlementaire visant à réguler la consommation, la culture et le commerce du cannabis. Pour la conseillère nationale verte Maya Graf, dépénaliser et réguler permettrait de mieux protéger les jeunes.
"Ce n'est pas le cas aujourd'hui. Nous voulons une législation comparable à celle pour l'alcool, qui n'est pas interdit mais régulé de manière stricte", explique-t-elle. Elle estime qu'il en va aussi de la crédibilité de la réglementation suisse sur les stupéfiants. "Trois cent mille consommateurs contournent la loi et alimentent le marché noir à hauteur de millions, si ce n'est de milliards de francs."
Les tentatives de dépénalisation ont toutes échoué en Suisse
Toutes les tentatives de légalisation du cannabis ont échoué jusqu'à présent. En 2001, la Genevoise Ruth Dreyfuss, alors conseillère fédérale, a présenté une révision de la loi fédérale sur les stupéfiants, bloquée par le Conseil national.
En 2008, les citoyens se sont prononcés contre la dépénalisation à 63%. En 2015, la police a amendé environ 23'000 personnes avec moins de 10g de cannabis dans la poche.
La cour d’appel du Hainaut a condamné, mardi, le président et fondateur de l’ASBL ‘Bon pied, bonne herbe’, qui n’est autre que le cannabis social club de Tournai, à une peine de travail de 200 heures (ou 12 mois de prison).
L’ASBL en question proposait la prise en charge de la culture de plants
de cannabis, au bénéfice de fumeurs, en échange d’une cotisation-Fotolia
L’homme avait pourtant été acquitté en première instance. Trois semaines après l’ouverture de l’établissement, en octobre 2015, la police l’avait interpellé et une instruction avait été ouverte. L’ASBL en question proposait la prise en charge de la culture de plants de cannabis, au bénéfice de fumeurs, en échange d’une cotisation. Selon le gérant, le but était d’informer les fumeurs sur les risques du cannabis et de gérer au mieux cette consommation.
Le parquet avait été informé de cette ouverture par le biais d’un article paru dans la presse locale et avait fermé le club et confisqué onze plants de cannabis chez le président. Lors du procès devant le tribunal correctionnel de Tournai, le ministère public avait requis la dissolution de l’ASBL et réclamé une peine de 12 mois de prison avec sursis contre le président du conseil d’administration, un jeune homme qui avait voulu copier le cannabis social club d’Anvers.
Le prévenu avait expliqué qu’il avait investi 2.000 euros dans du matériel de culture et publié des statuts avalisés par le tribunal du commerce. En échange d’une cotisation de 50 euros, chaque membre pouvait cultiver son plant.
Le président avait finalement été acquitté au motif que «le dossier ne permet pas de prouver à suffisance que le but de l’ASBL est de faciliter la consommation de cannabis». Mardi, la cour d’appel du Hainaut a toutefois estimé l’inverse et condamné le jeune homme.
Source: lavenir.net
Toujours en Belgique:
Bientôt un cannabis social club à Mons ?
Le PS veut dépénaliser la consommation du cannabis
Cannabis: le plan de légalisation de trois scientifiques belges
Ottawa - Un consultant américain embauché par le gouvernement fédéral pour évaluer le marché éventuel de la marijuana à des fins récréatives au Canada affirme que les gouvernements légalisant le cannabis doivent s'attendre à des croissances des ventes « incroyablement élevées » dans les quelques premières années, alors que les criminels sont graduellement écartés du marché.
Les évaluations de Marijuana Policy Group pour le secteur du cannabis réglementé au Colorado laissent croire que le Canada peut s'attendre à ce que son propre secteur génère des milliards de dollars chaque année en retombées économiques directes et indirectes.
PHOTO ANDRÉ PICHETTE, ARCHIVES LA PRESSE
Adam Orens, partenaire fondateur du Marijuana Policy Group, a indiqué qu'il n'était pas encore autorisé à discuter de ses conclusions sur le futur marché de la marijuana étant donné que son organisation est liée par contrat avec Santé Canada.
Néanmoins, les évaluations du groupe pour le secteur du cannabis réglementé au Colorado laissent croire que le Canada peut s'attendre à ce que son propre secteur génère des milliards de dollars chaque année en retombées économiques directes et indirectes. Le secteur de la marijuana au Colorado a généré près de 2,4 milliards de dollars US en retombées économiques en 2015, a créé 18 000 emplois à temps plein et a entraîné 121 millions US en revenus fiscaux dans les coffres de l'État, a indiqué le groupe de M. Orens dans une étude dévoilée l'automne dernier.
Une conclusion clé de l'étude sur le Colorado est que les entreprises dans un environnement nouvellement légalisé devraient se préparer pour des croissances marquées des ventes dans les quelques premières années, alors que les transactions souterraines migrent vers le marché réglementé, a souligné M. Orens.
Sa firme établie à Denver a montré que les ventes de marijuana réglementées au Colorado avaient bondi de 42,4 % entre 2014 - la première année de l'autorisation de la marijuana à des fins récréatives dans cet État - et 2015, lorsqu'elles ont totalisé 996 millions de dollars US. « Nous avons connu des taux de croissance des ventes incroyablement élevés d'une année à l'autre », a dit le partenaire fondateur du Marijuana Policy Group en entrevue, ajoutant que le groupe s'attendait à des bonds similaires dans d'autres endroits réglementés tels que l'État de Washington, la Californie et l'Oregon.
« Il s'agit de la transformation d'un marché existant informel en un marché formel et réglementé, et on pourra observer plusieurs années de croissance très rapide », a-t-il ajouté. Après le bond initial, l'étude sur le Colorado prédit des croissances des ventes considérablement plus lentes, en fonction d'un marché souterrain qui se sera fait graduellement avaler. Le rapport projette une croissance des ventes de 13,1 % au Colorado en 2020.
En juillet, l’Uruguay proposera en pharmacie du cannabis produit sous contrôle de l’Etat. Une première au monde…
Des barrettes de cannabis. Illustration. - Krod - WPA - Sipa
L'Uruguay, qui deviendra en juillet le premier pays au monde à vendre en pharmacies du cannabis produit sous contrôle de l'Etat et pour un usage récréatif, ouvre ce mardi son registre des consommateurs, ont annoncé les autorités.
La condition pour acheter légalement du canabis
C'est sur ce registre que les Uruguayens et étrangers titulaires d'une carte de résident permanent devront s'inscrire, s'ils souhaitent s'acheter du cannabis par ce biais. La drogue douce sera commercialisée au prix de 1,30 dollar le gramme, chaque consommateur pouvant en acheter au maximum 10 grammes par semaine. La drogue sera commercialisée en sachets de 5 et 10 grammes, au plus tard au mois de juillet, selon les autorités.
Deux producteurs privés sous contrôle de l’Etat
L'Uruguay dispose pour l'instant de 400 kilos de cannabis, produits par deux entreprises privées sous contrôle de l'Etat. L'Uruguay a adopté en décembre 2013 une loi polémique, autorisant trois modes d'accès au cannabis: culture à domicile pour la consommation personnelle, appartenance à un club cannabique pour planter de manière coopérative et achat de marijuana en pharmacie.
Les deux premiers volets ont déjà été mis en pratique, mais celui de la vente en pharmacies, qui suscitait notamment de nombreuses réticences chez ces dernières, a été plusieurs fois repoussé. Cette loi unique au monde avait suscité un fort intérêt médiatique international lors de son approbation.
En Espagne, grâce au succès des "clubs" qui essaiment depuis 2011, le cannabis est devenu un nouvel or vert. Produits dérivés, cliniques spécialisées, tourisme associé… Toute une économie a fleuri autour de cette plante, dont la production reste pourtant illégale en Espagne. Nos reporters ont exploré les diverses facettes – publiques et cachées – de cette activité en plein boom.
Tout a commencé en 2011, lorsque des amateurs de cannabis ont réussi à exploiter une faille dans la loi antitabac espagnole, leur permettant de consommer du cannabis dans des lieux fermés et privés. L’État a fermé les yeux sur ces associations sans but lucratif, où seuls les membres inscrits ont le droit de consommer en toute liberté. Depuis, les "cannabis clubs" ont fleuri dans toute l’Espagne. On en compterait aujourd’hui plus de 700 à travers le pays. Au total, ils réunissent des centaines de milliers d'"associés" et brassent des millions d’euros chaque année.
Vente de graines de cannabis, matériel et engrais pour en faciliter la pousse, laboratoires pour en contrôler la qualité, sucettes et boissons à base de THC (le principe actif du cannabis), extrait liquide pour voyager, applications pour téléphone, chaîne de télévision sur le web, en passant par son utilisation thérapeutique dans des cliniques proposant des soins à base de "cannabinoïdes"… L'"or vert" a engendré toute une économie. En témoigne le succès des salons spécialisés de Barcelone ou encore d'Irun, au pays basque. Des concours y sont organisés pour élire les meilleurs clubs et les meilleures variétés.
La production reste illégale
Quant au "tourisme cannabique", c’est un domaine en pleine expansion. En effet, de plus en plus de "cannabis clubs" un peu trop gourmands laissent les étrangers accéder à leurs établissements. À Barcelone notamment, leur développement est devenu un problème pour la ville. Car le paradoxe, c’est que la production de cette plante reste illégale sur le territoire espagnol. Il faut donc ruser pour fournir tous les consommateurs des clubs. Et c’est là où nous nous sommes frottés à la face cachée de cette industrie. Il nous a fallu montrer patte blanche pour que les portes des clubs nous soient ouvertes et que des acteurs majeurs acceptent d’être suivis en toute confiance par nos caméras.
La plupart des personnes que nous avons rencontrées sont des trentenaires qui maîtrisent déjà tous les codes de la communication et du marketing, parfaitement au fait de ce qui peut être montré et dit – ou pas – à la caméra. Il faut dire qu’ils sont tous conseillés par des juristes spécialistes de la question, et ont une excellente connaissance des outils juridiques à leur disposition pour faire face à d’éventuels problèmes avec la Guardia civil ou la justice.
Conscients de leur poids dans l’économie espagnole, ils sont aujourd’hui bien décidés à peser de tout leur poids pour que le cannabis finisse par devenir légal dans le pays, à l’image de ce qui s’est passé dans certains États aux États-Unis, comme celui du Colorado. Et ils ont bon espoir qu’en la matière, l’Espagne devienne un modèle pour l’Europe. C’est donc à la découverte d’un monde méconnu et réservé aux initiés que nous vous proposons de partir dans ce Reporters.
Si jamais vous faites partie de ceux qui passent leur temps à fumer des joints, ça risque de vous intéresser. Des chercheurs berlinois cherchent actuellement des fumeurs de cannabis pour suivre leur consommation sur plusieurs années.
Sous réserve d’approbation gouvernementale, cette enquête souhaiterait "étudier les conséquences du cannabis sur les consommateurs adultes et sains d’esprit". Les participants se verront envoyer 30 grammes d’herbe chaque mois. Seules contraintes : il faut être majeur et n’avoir aucun problème de santé mentale (y compris d’addiction), et il ne faut pas se mettre à la fumette pour l’étude.
Le but est d’appréhender de façon plus fine les effets au long terme d’une consommation récréative de cannabis. Si la science s’est beaucoup intéressée à ses propriétés thérapeutiques, il semble important de se pencher sur ses effets dans le cadre du quotidien.
Plus tôt cette année, une loi autorisant l’utilisation thérapeutique de cannabis aux malades atteints de certains symptômes (sclérose en plaque, douleurs chroniques, manque d’appétit, nausées) a été votée en Allemagne. Le cannabis est la drogue illégale la plus consommée en Allemagne : 7,3 % des adolescents et 6,1 % des adultes ont déclaré en avoir déjà consommé. Plus de 2 000 personnes ont déjà proposé leur candidature.
Laurette Onkelinx annonce le dépôt d’une proposition de loi en ce sens. Il s’agit d’un combat porté par les socialistes depuis… 2000.
photo@belga
Feu Patrick Moriau (PS) en était un ardent défenseur. Les socialistes vont déposer une nouvelle proposition de loi en faveur de la dépénalisation du cannabis, a annoncé jeudi Laurette Onkelinx, cheffe de groupe à la Chambre. "Sociologiquement, on constate qu’il n’y a pas d’autres solutions", a-t-elle déclaré jeudi à l’occasion d’une rencontre avec la presse. "Le système actuel ne fonctionne pas" parce que, dit-elle, "les gagnants sont les réseaux de trafiquants".
Depuis 2003, la consommation de cannabis, sans être autorisée, n’est plus sanctionnée si des conditions très strictes sont respectées (être majeur, ne pas posséder plus de trois grammes ou une plante cultivée pour une consommation personnelle, etc.). Le PS veut donc aller plus loin et dépénaliser la consommation de cette drogue douce. La mesure devra cependant s’accompagner d’un cadre réglementaire précis et de "campagnes de prévention à destination des jeunes", a détaillé Laurette Onkelinx.
Plusieurs textes similaires ont déjà été déposés par le PS ces dernières années. La toute première fois, c’était en 2000, à l’initiative des anciens députés fédéraux Thierry Giet et Patrick Moriau. C’est à cette occasion-là que le parti s’était officiellement prononcé en faveur de la dépénalisation du cannabis. La proposition actuelle, promet le PS, est toutefois la plus complète et la plus aboutie.
La politique migratoire du président Donald Trump va-t-elle avoir un impact sur le vin américain? Oui, estiment des producteurs de Californie qui s'inquiètent de la pénurie de main-d'oeuvre tout en faisant face à la concurrence de l'industrie du cannabis.
Un vignoble dans la région de Malibu en Californie, aux Etats-Unis, le 19 avril 2017 (AFP/Mark RALSTON)
Bien que le ciel semble dégagé pour le vin américain à l'issue d'une année 2016 record, les producteurs californiens s'attendent à une saison de récolte agitée en septembre, lorsque d'autres travailleurs seront nécessaires dans les vignes. "Le réservoir de main-d'oeuvre est assurément plus réduit" que ces dernières années, déplore Michael Silacci, vigneron au sein de l'Opus One dans la Napa Valley, région au nord de San Francisco, la plus célèbre aux Etats-Unis pour sa production de vin. "Il y a une préoccupation concernant le changement des politiques d'immigration et la situation dans les zones agricoles devient de plus en plus fragile", reconnait M. Silacci. "Les gens se demandent ce qui se passera et surveillent ce qui se passe dans d'autres cultures agricoles". Les vignerons affirment que le défi consiste de plus en plus à trouver du personnel qualifié parmi un échantillon qui se réduit. Majoritairement, il s'agit de Mexicains ciblés par le durcissement de la politique migratoire, alors que les Américains ne se bousculent pas, compte tenu de la nature éreintante du travail. - Vin ou cannabis? - Une autre préoccupation de l'industrie viticole est le secteur en plein essor du cannabis, estimé à plusieurs milliards de dollars et qui devrait progresser de manière exponentielle avec la légalisation de l'usage récréatif de la marijuana en Californie, l'un des plus grands marchés du pays. Le ministère américain de l'Agriculture indique qu'environ 4.200 établissements vinicoles sont installés en Californie, le plus important Etat viticole d'Amérique. Les producteurs de cannabis ont désormais des revenus deux fois plus élevés que ceux dans le vin, et peuvent ainsi attirer des travailleurs avec des salaires plus élevés, estime John Truchard, PDG de John Anthony Vineyards et FARM Napa Valley, une société de gestion agricole. La pénurie de travailleurs -renforcée par une économie qui se relance au Mexique et un reflux de personnes traversant la frontière- a entraîné une guerre pour le recrutement de personnels, les exploitants essayant de conserver leurs travailleurs. Les salaires ont régulièrement augmenté ces dernières années, variant entre 15 et 25 dollars par heure dans la Napa Valley. Un taux deux fois plus élevé que dans le centre de la Californie (10 à 12 dollars de moyenne). Et si certains producteurs de la Napa Valley peuvent se le permettre, la demande pour leurs vins ayant augmenté parallèlement, les producteurs d'autres régions luttent pour leur survie.
- La solution de l'automatisation - "Pendant la saison des récoltes, vous avez des équipes de base, mais vous recrutez également des travailleurs supplémentaires et ils vont au plus offrant", précise M. Truchard. Certains exploitants "paient un supplément de cinquante dollars par tonne". En plus des augmentations de salaire, les employeurs proposent des moyens novateurs et incitatifs pour garder leurs travailleurs, comme des services de garde d'enfants ou des possibilités d'étudier. Les vignerons affirment que la pénurie de main-d'oeuvre et les coûts croissants forceront l'industrie -estimée à près de 60 milliards de dollars annuels- à se tourner de plus en plus vers l'automatisation. "Les vignobles qui, dans le passé, ont compté sur la récolte à la main explorent la mise en oeuvre de la récolte par les machines", précise Jim Stollberg, partenaire de deux entreprises de la région viticole de Santa Maria. À court terme, cependant, certains pourraient se tourner vers leurs employés de bureau et leur demander de se retrousser les manches. "Dans une situation extrême, nous avons parlé d'avoir une équipe venant du bureau", reconnaît Michael Silacci, qui considère qu'il s'agit d'une "réserve" de travailleurs comme une autre.
Le casse-tête des industriels du cannabis: Liasses de billets dans des coffres-forts surveillés en permanence, sacs de grosses coupures livrés aux impôts par véhicules blindés, dispensaires truffés de capteurs et caméras, montages financiers... Dans l'industrie américaine du cannabis, on paye souvent en cash.
Cette situation la force à toutes sortes de contorsions rocambolesques, évoquant des films ou des séries comme "Breaking bad". Autorisé à usage médical dans 29 Etats et récréatif dans huit, le cannabis reste interdit au niveau fédéral.
Les banques qui ouvrent des comptes aux entrepreneurs du secteur peuvent être accusées de blanchiment d'argent. La majorité d'entre elles préfère donc ne pas toucher à tout ce qui à trait à la célèbre feuille. Seules environ 300 institutions sur près de 12.000 aux Etats-Unis acceptent --discrètement et en faisant payer cher leurs services-- quelques clients du secteur, selon Standard and Poor's, essentiellement des banques coopératives ou régionales.
"C'est un sérieux problème. A cause du gouvernement fédéral", qui considère le cannabis comme une drogue dure, "nous sommes forcés d'opérer presque à 100% en liquide", explique Steve DeAngelo, fondateur du vaste dispensaire Harborside Health Center à Oakland (Californie). Plus encore que les entreprises ayant pignon sur rue, "nous les cultivateurs, fonctionnons complètement en liquide", renchérit Justin Calvino, exploitant dans le comté de Mendocino, au nord de San Francisco, surnommé le "triangle émeraude" en raison des nombreuses plantations de cannabis.
- Epée de Damoclès -
De plus en plus de PME parviennent à trouver une banque ou une forme de trésorerie électronique, mais risquent en permanence fermetures de comptes ou saisies: 3.000 dollars déposés en liquide suffisent à déclencher un signalement d'"activité suspecte" au fisc. Justin Calvino en est ainsi à son "sixième compte en cinq ans".
Michael Katz, patron d'Evoxe, qui fabrique des huiles au cannabis, explique avoir eu "13.000 dollars gelés pendant 19 jours par Square", l'organisme de paiement sur appareils mobiles. Chacun essaie de contourner le problème à sa façon.
Une responsable marketing a raconté à l'AFP avoir un jour reçu un message de l'application Venmo sommant sa société de ne plus utiliser leurs services. Ils utilisent maintenant Paypal en espérant que la description "produits de bien-être" de leurs huiles pour le corps au THC --une substance extraite de la marijuana-- n'attirera pas l'attention. Il y a aussi ceux qui utilisent la monnaie dématérialisée Bitcoin, des distributeurs de monnaie inversés qui prennent de l'argent liquide contre une transaction électronique ou d'autres systèmes innovants.
Autre piste, les montages financiers: "Vous établissez plusieurs sociétés pour les différentes activités de votre entreprise", autrement dit une entité qui gère le marketing ou la comptabilité peut avoir un compte et devenir cliente de celle qui vend le cannabis, poursuit Michael Katz. L'administration Obama, voyant la perspective de recettes fiscales colossales, avait mis en place un cadre juridique permettant aux banques de travailler avec les industriels du cannabis où il est légal, au prix d'un fardeau de paperasses qui en a découragé plus d'un. Son successeur républicain Donald Trump pourrait renverser la vapeur et se mettre à poursuivre les acteurs du secteur.
Vu l'impossibilité de prévoir, beaucoup d'entrepreneurs gardent un bon matelas de liquidité au cas où, remarque M. Katz, mais c'est très contraignant: "L'argent n'est pas assuré et difficile à sécuriser".
- Forteresse -
Un cultivateur du sud de la Californie confie, sous couvert d'anonymat, avoir des "milliers de dollars dans un coffre-fort gardé 24 heures sur 24 dans un entrepôt". Justin Calvino, père de famille un peu "hippie" qui jongle en permanence avec les rentrées d'argent liquide et le paiement de ses employés ou de factures, dit s'être fait voler par une employée une grosse somme qui était dissimulée.. sous son lit.
A l'inverse, Harborside est une forteresse: "Pour entrer, il faut montrer ses papiers d'identité, passer au détecteur à métaux, nous avons 50 caméras, des capteurs de chaleur et de mouvements déclenchant des alarmes, un lecteur d'empreintes digitales pour les employés, ...", énumère Steve DeAngelo.
Autre casse-tête: la comptabilité. Les employés d'Harborside comptent pièces et billets manuellement dans une chambre forte... Quant aux impôts: "Chaque mois mes employés emmènent 100.000 dollars en liquide" pour payer la ville d'Oakland, explique M. DeAngelo. "On essaie de changer de véhicule, de personne, de route...".
En Californie, l'Etat le plus peuplé du pays, le problème devient épineux à l'approche de la légalisation de la marijuana à usage récréatif en 2018. "Ca va devenir un secteur trop gros pour que les banques ne s'y engouffrent pas, malgré les risques" estime Troy Danton, co-fondateur du cabinet de recherche spécialisé Arcview, qui prévoit que l'industrie légale de 6,7 milliards de dollars actuellement triple en cinq ans.
Des centaines d'Israéliens se sont retrouvés aujourd'hui sur une colline proche du Parlement à Jérusalem pour fumer des joints, un rassemblement destiné à faire pression pour une légalisation de la consommation de marijuana.
Une fille israélienne pose avec un fau joint de marijuana à Jérusalem le 20 avril 2017
lors d'un rassemblement pour exprimer l'opposition aux lois en vigueur
THOMAS COEX (AFP)
Assis par petits groupes sur l'herbe du Jardin des Roses, proche de la Knesset, les participants ont allumé leurs joints à 04h20 de l'après-midi, en clin d'oeil aux "rassemblements 420" qui réunissent partout dans le monde des amateurs de cannabis.
Le mois dernier, le gouvernement israélien a approuvé un projet dépénalisant partiellement la consommation de cannabis à usage récréatif au profit d'un système d'amende. Cette dépénalisation concerne uniquement la consommation personnelle. Mais les participants au rassemblement appelé "Big Bong Night" réclament une légalisation complète.
Des rassemblements similaires de fumeurs de marijuana ont déjà eu lieu en Israël. Le premier avait été organisé à l'initiative d'Amos Dov Silver en 2014. Poursuivi en justice et emprisonné, il a ensuite quitté Israël pour la Californie où il vit depuis 18 mois.
Jeudi 20 avril, journée annuelle pro-marijuana en Amérique du Nord, sept militants pour la légalisation du cannabis ont été arrêtés par la police dans la capitale américaine, près du Capitole, au cours d'une distribution gratuite de joints.
Un plant de cannabis (illustration) Crédit : AFP / Brendan Smialowski
Le 20 avril a beau être reconnu en Amérique du Nord comme la journée informelle pro-marijuana, les forces de l'ordre du Capitole, à Washington, ont arrêté jeudi sept militants pour la légalisation du cannabis pendant une distribution de joints gratuits.
D'après les agents auteurs de l'arrestation, trois des personnes interpellées l'ont été pour possession de cannabis avec intention de le distribuer, tandis que quatre autres ont été menottés pour simple possession. "En vertu de la loi fédérale, il est interdit de détenir du cannabis", a justifié Eva Malecki, directrice de la communication de cette force de police.
Aux États-Unis, le "420" (pour 4/20, soit le 20 avril, ndlr) est le code universel pour les amateurs de marijuana et c'est à l'occasion de cette journée annuelle que se déroulait la distribution à Washington.
Loi de l'État contre loi de l'État fédéral
Les personnes arrêtées, dont Adam Eidinger, co-fondateur de la DC Marijuana Coalition qui milite pour la légalisation dans la capitale américaine, estiment qu'ils se trouvaient durant la distribution sur une parcelle de terrain "non fédéral". Leur arrestation, selon eux, est donc injustifiée, puisqu'à Washington, depuis 2015, la possession jusqu'à 56 grammes de cannabis et la culture de six plants maximum sont légales à des fins récréatives pour les personnes majeures. En revanche, si la distribution est possible, la vente ne l'est pas.
Dans une vidéo de son arrestation publiée par le Washington Post, Adam Eidinger conteste le motif de son interpellation : "Ceci est une activité 420 légale pendant laquelle on distribue du cannabis dans le District de Columbia" (l'autre nom de Washington, ndlr). Et l'homme d'ajouter, menotté dans le dos : "Sur un trottoir de Washington, c'est 100% légal".
La culture du cannabis pèse près de la moitié du PIB albanais ! Production de longue date dans ce pays balkanique, où elle est devenue un moyen de survie pour beaucoup d’habitants. Et une source de corruption.
Tirana (Albanie), reportage
À l’automne dernier, les mêmes images se sont répétées quotidiennement sur les chaînes de télévision albanaises. Alors que la récolte de cannabis battait son plein, la police partait à l’assaut de zones difficiles d’accès et mettait le feu à des milliers de plants. Animateur de ce feuilleton audiovisuel enfumé, le gouvernement social-démocrate se félicitait du succès de sa « guerre contre la drogue ». Grâce au soutien de la Guardia di Finanza italienne, environ 2,5 millions de plants ont ainsi été détruits en 2016. Mais la culture est loin d’en avoir disparu. En ce début d’année 2017, Europol et le département d’État états-unien désignent toujours l’Albanie comme le « principal pays producteur en Europe ».
Le cannabis a pris racine en Albanie de longue date. Sous la dictature communiste d’Enver Hoxha (1944-1985), sa culture était contrôlée par l’État. Il était même l’une des rares marchandises exportées par ce pays très isolé politiquement. La Suisse appréciait les grandes qualités de l’herbe albanaise et l’utilisait comme plante médicinale et en matière pharmaceutique. Après la chute du régime en 1991 et la décennie chaotique qui s’ensuivit, une génération de groupes criminels albanais a émergé au cours des années 2000. Selon Fabian Zhilla, spécialiste du crime organisé et fondateur de l’ONG Open Society Foundation for Albania, « ces nouveaux acteurs, membres de réseaux internationaux, ont délaissé le trafic d’armes et d’êtres humains que privilégiaient leurs prédécesseurs des années 1990 et investi dans le trafic de drogue ». Un moyen de survie pour beaucoup d’Albanais
Le petit village de Lazarat, situé à quelques kilomètres seulement de la frontière grecque, s’est alors forgé une renommée internationale et gagne même le titre de « royaume européen du cannabis ». Sous la coupe des trafiquants, la commune s’est entièrement consacrée à « l’or vert », qu’une grande partie de ses 5.000 habitants cultivaient au grand jour dans les champs et les cours des maisons. Le gouvernement de droite, au pouvoir entre 2005 et 2013, fermait les yeux. Un rapport italien estimait que la production annuelle de Lazarat s’établissait à quelque 900 tonnes par an, pour un chiffre d’affaires estimé à 4,5 milliards d’euros, soit près d’un tiers du PIB albanais. Une somme astronomique pour ce petit pays, l’un des plus pauvres du continent.
Avec l’élection en 2013 du socialiste Edi Rama, le vent a tourné pour le village. Un an après son accession à la tête de l’État, M. Rama déclarait la « guerre aux trafiquants de drogue » et envoyait l’armée pour un assaut de cinq jours, très médiatisé. 80 tonnes de cannabis et des quantités d’armes utilisées par les trafiquants étaient saisies, une douzaine de personnes arrêtées. Parmi elles ne figurait cependant aucun « gros poisson ». De nombreux observateurs soulignèrent également le calendrier choisi pour cette spectaculaire opération policière : après trois échecs, l’Albanie obtint enfin de l’Union européenne le lancement de la procédure en vue de son intégration.
Plantation de cannabis vers Shkodër.
Mais la politique de M. Rama n’a pas été durablement soutenue. « La production, autrefois concentrée à Lazarat est aujourd’hui dispersée dans tout le pays et, de ce fait, totalement incontrôlable », dit Fabian Zhilla. Cultiver du cannabis s’est imposé ces dernières années comme un nouveau moyen de survie pour beaucoup d’Albanais. Dans ce pays où 45,5 % de la population vit avec moins de 5 € par jour et où l’immigration reste le seul espoir pour de nombreux jeunes, certains choisissent de se tourner vers cette activité bien plus lucrative que les bas salaires proposés par les centres d’appels ou l’hôtellerie.
Avec un kilo de cannabis équivalant à deux tonnes de blé, soit autour de 250 €, sa culture tente de nombreux paysans dans un pays où la population est rurale à 60 %. Comme nous le confie un policier régulièrement envoyé ces dernières années dans les montagnes du Nord, « nos actions de destruction ne dissuadent pas les cultivateurs et les petites parcelles sont même toujours plus nombreuses ». « Difficile d’imaginer que le personnel politique ne soit pas impliqué »
Avec une moyenne de plus de deux cents jours de soleil par an et d’importantes ressources en eau, le pays méditerranéen offre des conditions climatiques idéales pour Cannabis sativa L., et particulièrement pour une variété néerlandaise au cycle de floraison très court. Certaines parcelles agricoles vivrières des montagnes et des cultures de légumes ou d’herbes médicinales sont converties à sa production. La législation albanaise est pourtant particulièrement ferme : la culture et le transport du cannabis sont punis de trois à quinze ans d’emprisonnement. Mais sans beaucoup d’effet.
Car si de nombreux policiers sont impliqués dans le trafic, notamment dans les campagnes, pour Fabian Zhilla, cette corruption de terrain en cache une autre. « Étant donné que la police est une institution très hiérarchique, il est difficile d’imaginer que le personnel politique ne soit pas impliqué. » Dans son dernier rapport sur le pays, la commission de l’UE pour l’élargissement « salue les opérations menées dernièrement contre des plantations de cannabis », mais « relève que la police et le parquet ne sont pas en mesure d’identifier les réseaux criminels responsables de la culture de drogue ».
Une situation que déplorent les principaux pays de la région qui pointent régulièrement le manque de volonté politique de leurs homologues albanais. Avant de répondre à la demande aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, en Allemagne ou en France, le cannabis, mais également l’héroïne afghane ou la cocaïne, entre en UE essentiellement par l’Italie et par la Grèce voisines. Les moyens de transport utilisés vont du dos d’âne au jet privé en passant par les petites vedettes rapides.
Destruction de plantations de cannabis vers Shkodër.
À la fin de l’année dernière, le cas de Kelmend Balili a échaudé Athènes. Celui que les médias surnomment le « Pablo Escobar des Balkans » était accusé par la justice grecque d’organiser l’exportation de drogues vers leur pays. Directeur des transports de la circonscription de Sarandë de 2014 à mai 2016, non loin de la frontière hellène, il aurait bénéficié des liens de sa famille avec certaines personnalités politiques. Alors que la justice albanaise a mis près de sept mois avant de répondre au mandat d’arrêt grec, Kelmend Balili reste introuvable.
Plus récemment, un ancien directeur de la police antidrogue albanaise obtenait l’asile politique en Suisse. Visé par une demande d’extradition du gouvernement albanais, il assure que ses enquêtes en sont la cause puisqu’elles l’auraient mené à des proches du ministre de l’Intérieur, Saimir Tahiri, principal fer de la lance de la lutte contre le trafic de drogue, et qui a été récemment limogé. La « Colombie de l’Europe »
Ces liens entre groupes criminels et autorités politiques ainsi que les sommes colossales générées par le trafic inquiètent. À quelques semaines des élections nationales prévues en juin, le Parti démocrate d’Albanie, le principal parti d’opposition, menace de ne pas y prendre part et boycotte depuis bientôt deux mois le travail parlementaire. Dénonçant « la corruption d’un gouvernement qui a transformé l’Albanie en Colombie de l’Europe », il réclame la « formation d’un gouvernement technique afin de garantir la transparence des élections ».
Les cargaisons de cannabis jetées à la mer par les trafiquants lors de leur interpellation se retrouvent sur les plages du pays.
L’importance de l’argent du cannabis fait consensus chez les diplomates étrangers et les commentateurs politiques albanais. Pour Fabian Xhilla, « on est aujourd’hui proche d’un montant équivalent à la moitié du PIB du pays. Les groupes impliqués ont acquis un important pouvoir financier et massivement investi dans l’économie et la politique ».
Alors que les débats sont focalisés sur l’aspect politique et répressif de la question, le député et homme d’affaires Koço Kokedhima parait isolé dans le paysage médiatique albanais. Depuis des années, il est le seul à plaider pour une légalisation du cannabis et cite les milliers d’emplois créés dans plusieurs États des États-Unis par la production de cannabis à des fins pharmaceutiques et récréationnelles. Alors que la consommation albanaise intérieure est anecdotique, il vante les « qualités reconnues du cannabis albanais » et se veut pragmatique face à un marché évalué à « plusieurs milliards d’euros ».
Marijuana: Qui imposera sa loi? Ottawa, Québec ou les conseils de bande?
Photo: Jack Guez Agence France-Presse Au lendemain du dévoilement de son projet de loi visant à légaliser la marijuana, le gouvernement fédéral s’interroge sur l’application de la nouvelle législation dans les communautés autochtones du Canada.
Le gouvernement fédéral ignore toujours quelles lois s’appliqueront dans les réserves autochtones quand la marijuana sera légalisée, a constaté Le Devoir. Dans le flou, une certitude ressort cependant : Ottawa cherche à éviter que les « cabanes à tabac » se transforment en baraques à cannabis.
Au lendemain du dévoilement de son projet de loi visant à légaliser la marijuana, le gouvernement fédéral s’interroge ainsi toujours sur l’application de la nouvelle législation dans les communautés autochtones du Canada, où les compétences provinciales et fédérales cohabitent avec celles relevant des conseils de bande.
Jeudi dernier, le gouvernement Trudeau a présenté le projet de loi qui doit rendre la marijuana légale au pays en juillet 2018. La distribution, le respect des paramètres de la loi et le contrôle des lieux de vente seront, en outre, des responsabilités relevant des provinces.
Au Québec, certaines lois — celles émanant du Code civil ou du Code de la sécurité routière, par exemple — s’appliquent dans les communautés autochtones. D’autres relèvent des conseils de bande, qui peuvent par exemple interdire la vente d’alcool dans leur communauté. D’autres lois sont de compétence fédérale.
Quand la marijuana sera légale, quelles lois s’appliqueront donc sur les terres de compétence fédérale que sont les réserves autochtones ? Tant à Québec qu’à Ottawa, les porte-parole des ministres concernés par le dossier se renvoient la balle depuis l’annonce d’Ottawa.
L’unique réponse fournie au Devoir est venue de David Taylor, porte-parole au ministère canadien de la Justice. « Le gouvernement du Canada s’est engagé à travailler en étroite collaboration avec les peuples autochtones, de sorte que les besoins spécifiques des nombreuses et variées communautés autochtones du Canada soient satisfaits tout au long de la mise en oeuvre de la Loi sur le cannabis proposée », a-t-il écrit dans un courriel.
Divergences
Mode de distribution, modèle de vente, âge légal de consommation : il y a là autant d’éléments qui pourraient différer d’une province à l’autre. Dans les réserves, les lois concernant la marijuana pourraient-elles être carrément uniques ? Là-dessus, les chefs et les experts ne s’entendent pas.
« Ce n’est pas encore clair, reconnaît le directeur général du Conseil des Abénakis de Wôlinak, Dave Bernard, en ce qui concerne la loi qui s’appliquera. C’est assez nébuleux, on ne sait pas trop ce qui va arriver. » Autre point de vue : « Ce sera nécessairement, absolument la loi fédérale qui va s’appliquer, parce que c’est une terre fédérale », assure le grand chef de Wendake, Konrad Sioui.
Le professeur de l’Université d’Ottawa spécialisé en questions autochtones Sébastien Grammond apporte un éclairage différent. « Les lois provinciales s’appliquent aux réserves autochtones, sauf si elles touchent au coeur de la compétence fédérale sur les autochtones », a-t-il rappelé, se référant à une provision de la Loi constitutionnelle de 1867. « Je pense que la norme provinciale s’appliquerait », a aussi répondu Jean Leclair. Il a rappelé qu’une loi provinciale demeure constitutionnelle si elle correspond à l’objectif poursuivi par la loi fédérale et si elle n’est pas moins sévère que celle-ci. C’est ce qui explique, par exemple, que les provinces puissent augmenter l’âge légal de consommation de la marijuana, fixé à 18 ans par Ottawa, mais pas le réduire.
À Ottawa comme à Québec, personne parmi les porte-parole des élus n’a été en mesure de répondre à la question.
Comme tous les autres chefs auxquels Le Devoir a parlé, ni Konrad Sioui, ni Dave Bernard, ni le chef de la communauté algonquine de Kitigan Zibi, Jean-Guy Whiteduck, n’ont été consultés par le gouvernement fédéral avant que le projet de loi légalisant la marijuana ne soit annoncé. Pas plus qu’ils n’ont été avisés d’une rencontre à venir avec les représentants des gouvernements provinciaux ou fédéral. « Pas [de consultation] à notre niveau, ni [au niveau] des communautés, à ce que je sache », a aussi affirmé le chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, Ghislain Picard.
Pourtant, l’une des ministres qui pilotent le dossier de la légalisation de la marijuana à Ottawa, Jody Wilson-Raybould, est elle-même autochtone. Et elle fait partie d’un gouvernement qui s’est engagé à établir des relations respectant les traités conclus avec les peuples autochtones ; des relations dites « de nation à nation ».
Alors, « comment peut-on parler de relations de nation à nation si on donne tout ça aux provinces et qu’on dit aux autochtones “On vous a oublié” ? » demande le professeur Sébastien Grammond. Selon lui, cet « oubli » pourrait constituer un levier de négociation politique pour les communautés autochtones, en plus d’ouvrir la porte à des négociations à la pièce.
Ottawa
Si la situation est entourée de flou à l’heure actuelle, des sources gouvernementales à Ottawa soutiennent néanmoins que, une fois la marijuana légalisée, il n’est pas question qu’il arrive « la même chose qu’avec le tabac » dans les réserves.
Mais les questions sont nombreuses. « Comment ça va fonctionner pour la taxe sur la marijuana ? On ne veut pas qu’il arrive la même chose qu’avec le tabac », indique une source au ministère des Affaires autochtones. « Il va falloir impliquer les autochtones dès le départ sur la question de la production pour éviter qu’il arrive la même chose qu’avec le tabac », ajoute une autre source, du bureau du premier ministre celle-là.
Au Canada, « on ne peut obtenir l’exemption de taxes que si on est un Indien inscrit qui achète du tabac dans une réserve », rappelle toutefois l’expert en droit autochtone de l’Université de Montréal Jean Leclair.
N’empêche que la contrebande a fait son nid et que dans certaines communautés les « smoke shacks » se sont multipliés. Parce qu’ils se considèrent comme souverains sur leurs territoires, ou simplement par appât du gain — et avec la complicité du crime organisé —, des autochtones vendent des cigarettes sur le marché noir à des allocthones, sans prélever de taxes. La manœuvre ferait perdre des milliards de dollars par année à Ottawa.
Application difficile
Sur le terrain, le mauvais exemple de la contrebande de cigarettes fait craindre le pire. Jean-Guy Whiteduck s’inquiète déjà pour les sept policiers qui devront appliquer la nouvelle loi dans sa communauté de 3300 résidents. « Ils [les services de police et le gouvernement canadien] n’ont même pas été capables de s’attaquer au problème des cigarettes. Alors, imaginez la marijuana ! » a-t-il lancé quand Le Devoir l’a questionné sur la légalisation de la marijuana. « Comment vont-ils surveiller ? S’assurer qu’on leur rend des comptes ? » a-t-il encore demandé.
Comme lui, Konrad Sioui est rébarbatif à l’arrivée de la marijuana dans sa communauté. « La décision de la nation, ici, c’est qu’on ne veut pas être distributeur ni producteur. Si des Hurons-Wendat veulent s’acheter de la marijuana, il va falloir qu’ils sortent pour le faire. En tout cas, ce sera comme ça sous ma gouverne », a dit le chef Sioui.
Dave Bernard s’est dit du même avis. « On est plus ou moins d’accord avec la production du cannabis. Le moins possible, de notre côté », a-t-il résumé.
Avec Hélène Buzzetti Marie-Michèle Sioui - Correspondante parlementaire à Québec
Alaska, ainsi que Washington D. C.) ont légalisé la consommation de marijuana.
- Lars Hagberg/AFP
Fidèle à ses promesses de campagne, le Premier ministre canadien Justin Trudeau a présenté mi-avril un projet de loi visant à légaliser l'usage récréatif de la marijuana. Un seul pays au monde avait osé sauter le pas jusqu'alors : l'Uruguay. Aux Etats-Unis, le cannabis est prohibé mais les 50 Etats du pays ont le pouvoir d'outrepasser la loi nationale et de légaliser sa consommation. C'est ce qu'ont déjà fait huit d'entre eux : le Colorado, l'Etat de Washington, l'Oregon, la Californie, le Nevada, le Massachusetts, le Maine, l'Alaska, auxquels s'ajoute la capitale du pays, Washington D. C.
Dans le Colorado - le premier Etat à avoir ouvert la voie -, les retours d'expérience sont loin des scénarios alarmistes que faisaient circuler les détracteurs de la loi à l'époque de son adoption, en 2012. La part des consommateurs parmi les collégiens et lycéens n'a augmenté que d'un petit point de pourcentage et reste inférieure à la moyenne nationale (21,2 %, contre 21,7 %), selon un sondage mené récemment par les autorités locales. La consommation semble avoir plus augmenté chez les adultes : ceux de 18 à 25 ans seraient désormais 31 % à consommer du cannabis, contre 27 % avant l'adoption de la loi. Chez les plus de 26 ans, la part des consommateurs serait passée de 7,5 % à 12,5 %. Impossible toutefois de dire si les habitudes ont réellement changé ou si la légalisation encourage les habitants du Colorado à davantage dire la vérité.
Conséquences inattendues
La légalisation a en tout cas permis l'émergence d'une vraie industrie. Le cannabis a généré 1,3 milliard de revenus dans le Colorado l'an dernier. Le gouvernement local en a tiré 200 millions de recettes fiscales, allouées depuis à plusieurs causes d'intérêt général (éducation, santé, etc...).
Le cannabis draine aussi une nouvelle catégorie de touristes. Les hôtels du Colorado, qui voient défiler les skieurs et amateurs de nature depuis des décennies, se retrouvent ainsi assaillis par une nouvelle population, plus jeune et plus festive. Les étudiants, qui avaient l'habitude de rejoindre la Floride ou Cancun, au Mexique, pour fêter les vacances de « Spring Break » se sont ainsi massivement déportés vers le Colorado, Au total, ce sont plus de 16 millions de touristes qui se sont rendus dans cet Etat en 2015, soit 1 million de plus que l'année précédente.
La légalisation ne se fait toutefois pas sans heurts : le cannabis s'est développé sous des formes alimentaires (gâteaux, bonbons, chocolats, jus, etc.) aussi dangereuses que tentantes pour les bébés et enfants. Conséquence : les empoissonnements juvéniles dans le Colorado ont plus que doublé depuis 2014 (+150 %), selon le journal pédiatrique « JAMA Pediatrics ». La culture du cannabis a eu d'autres conséquences inattendues : les habitants de la petite ville d'Hugo ont ainsi dû cesser de consommer l'eau du robinet, qui présentait une concentration importante de THC - la substance active de la marijuana.
Un groupe représentant des propriétaires manitobains se joint au débat sur la légalisation de la marijuana récréative demandant au gouvernement fédéral de modifier la section de son projet de loi qui prévoit que les Canadiens puissent faire pousser jusqu'à quatre plants de marijuana par foyer.
Des feuilles de cannabis Photo : Associated Press
Selon l’Association professionnelle des gestionnaires immobiliers, qui représente une centaine de propriétaires au Manitoba, les inquiétudes grandissent concernant le projet de loi sur la légalisation qui a été déposé la semaine dernière. « Le gouvernement ne prend pas en compte le fait que nous possédons ces logements qui valent des centaines de milliers de dollars », commente Avrom Charach, porte-parole de l’association. Il aimerait qu’Ottawa indique si les propriétaires auront droit d’interdire à leurs locataires de faire pousser du cannabis chez eux.
Actuellement, les propriétaires n’ont que très peu de recours si un locataire fait pousser de la marijuana médicale, ce dernier n’étant pas obligé de le déclarer. Avrom Charach, lui-même propriétaire, affirme qu’il reçoit déjà des plaintes de locataires gênés par l’odeur de marijuana qui se dégage du logement de leurs voisins. « Pour une plainte pour cigarette, je reçois cinq plaintes pour marijuana », assure-t-il.
La Fédération canadienne des associations de propriétaires immobiliers appelle le gouvernement à interdire de faire pousser du cannabis dans les appartements, les condominiums et les co-op. Selon Avrom Charach, faire pousser de la marijuana peut créer des dommages dans les logements notamment à cause de la moisissure des plants et de la chaleur qui doit être maintenant dans la pièce.
Le texte de loi doit encore passer à la Chambre des communes et au Sénat. Ottawa espère qu’il entrera en vigueur pour le 1er juillet 2018.
Le gouvernement Trudeau prévoit d'ici juillet 2018 rendre légales la vente et la consommation de marijuana à des fins récréatives. Du lot de questions que ce projet de loi soulève, une demeure peu abordée : quel sera le prix de vente de la marijuana sur le marché légal?
La question du prix du cannabis tombera dans la cour des provinces, qui se verront ainsi incomber la tâche complexe de déterminer comment concurrencer le marché noir sans pour autant inciter à consommer davantage.
Pour l'heure, le prix moyen sur le marché illégal canadien se chiffre à 8,32 $ par gramme, selon le site Price of weed. Le Québec et la Colombie-Britannique arrivent en tête de liste du prix le plus bas, à respectivement 7,31 $ et 7,70 $. Le bureau du directeur parlementaire du budget s'est penché sur la question du prix d'un gramme de cannabis légal et est arrivé à un chiffre bien précis.
« 8,40 $, ce serait le prix avec les taxes » (soit 5,94€ au cours du jour), avance Jean-Denis Fréchette, directeur parlementaire du budget. Cette somme représenterait selon lui « le prix d’équilibre » qui permettrait au gouvernement d’accaparer « la plus grande part du marché illégal ». Ultimement, le projet de légalisation de la marijuana doit permettre d’éliminer le marché noir, a martelé à plusieurs reprises le gouvernement de Justin Trudeau.
L’important est d’éviter qu’un trop grand écart se creuse entre le marché légal et le marché noir, prévient Philippe Hurteau, chercheur à l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques.
« S'il y a un trop gros écart, les gens vont continuer de s'approvisionner sur le marché noir. »
- Philippe Hurteau, chercheur à l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques
D’autre part, si le prix fixé est trop bas, les consommateurs pourraient être incités à acheter en plus grande quantité et à consommer davantage, un facteur qu’invite à considérer le groupe de travail sur la légalisation et la réglementation du cannabis.
« Les taxes devraient être suffisamment élevées pour limiter la croissance de la consommation, mais suffisamment faibles pour pouvoir livrer concurrence efficacement avec le marché illicite », résume-t-il dans son rapport publié en novembre 2016. Après la légalisation
De l’autre côté de la frontière, dans les états de l’Oregon et de Washington, le prix du cannabis sur le marché légal a augmenté rapidement après la légalisation en raison d’un manque de marchandise. Mais une fois les problèmes d’approvisionnement réglés, les prix ont chuté. Or, les chances que ce scénario se produise au Canada sont minces, selon Brad Martin, chercheur chez CannStandard. « Je n’anticipe rien de cette magnitude […] parce que le marché est plus petit », explique-t-il.
Une étude de Canaccord Genuity prévoyait en novembre dernier que les prix resteraient stables pour une courte période après la légalisation. Santé Canada est relativement lente à approuver les licences de nouveaux producteurs, indiquent les analystes Matt Bottomley et Neil Maruoka. Une fois que le marché légal se sera ajusté à la demande, le prix moyen par gramme tendra à lentement baisser, estiment-ils.
Les provinces devront aussi garder un œil sur le marché noir. La réaction des organisations criminelles est difficile à prévoir, soutient M. Hurteau. Le marché illicite pourrait répliquer en baissant à son tour ses prix, fait-il valoir.
Le projet de loi déposé jeudi à Ottawa vise à légaliser et à réglementer le cannabis. Il vise, autrement dit, à mettre fin à notre hypocrisie collective.
« La marijuana a beau être illégale depuis les années 20, elle est en effet consommée par
plus de 40 % des 18-24 ans », explique François Cardinal.
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On débat depuis tout près de 50 ans de la nécessité de maintenir des politiques sévères pour contrer la circulation de marijuana. Près de 50 ans pendant lesquels on a pourtant constaté l'échec de l'approche prohibitionniste, qui n'a réussi à réduire ni l'emprise du crime organisé ni sa clientèle, au contraire.
La marijuana a beau être illégale depuis les années 20, elle est en effet consommée par plus de 40 % des 18-24 ans. C'est la substance illicite la plus consommée au pays, à laquelle les jeunes sont exposés pour la première fois à 15 ou 16 ans, en moyenne. La drogue est si populaire au Canada, en fait, que le taux de consommation des mineurs est le plus élevé au monde ! Au grand plaisir des groupes criminalisés...
Il fallait donc une nouvelle approche. Il fallait surtout un gouvernement assez courageux pour faire du cannabis une substance contrôlée et encadrée, au même titre que l'alcool et la cigarette. Cette approche de santé publique - plutôt que pénale - ne réglera pas tous les problèmes. Elle ne fera pas disparaître le marché clandestin. Elle n'empêchera pas les jeunes de fumer. Mais elle nous permettra de mieux encadrer la vente et l'usage, d'assurer un certain « contrôle de qualité » de ce qui est fumé, de superviser la quantité de THC et de lancer d'imposantes campagnes d'éducation, bien plus que si l'on s'était contenté de décriminaliser.
L'hypocrisie actuelle, elle est là. Dans le fait de poursuivre des politiques d'élimination de l'offre et de la demande... en sachant que cela ne réduit en rien la consommation. Et dans le fait de laisser autant de gens consommer... sans pouvoir créer un environnement sécuritaire. Le projet de loi est donc historique en ce qu'il normalise enfin la marijuana, sans la banaliser. Il légalise l'usage. Il fixe l'âge minimum à 18 ans (plutôt qu'à 21 ans, ce qui aurait permis de maintenir un marché noir pour les plus jeunes). Et il soumet la vente à des règles provinciales (tout en interdisant la publicité et les paquets attrayants).
Cela dit, il reste encore bien des questions en suspens, sur la conduite avec les facultés affaiblies, la chaîne d'approvisionnement, les seuils de THC, la promotion, etc. Et il y a un écueil : l'appui du fédéral aux provinces et aux villes, qui semble à peu près inexistant, sinon dans l'élaboration de normes et d'orientations.
Or ce seront les gouvernements inférieurs qui seront pris avec le fardeau de l'implantation (distribution, prix, police, etc.). Un fardeau inévitable, mais un fardeau quand même. Il existe donc des zones d'ombre à éclaircir au cours des prochains mois, mais pour l'essentiel, le projet de loi permet de contredire ceux qui prétendent que l'on perdra le contrôle de la consommation de cannabis l'an prochain, surtout que les exemples américains ont montré que la légalisation n'augmentait pas l'usage.
Soyons honnêtes, c'est aujourd'hui que la situation est hors de contrôle.
La copropriétaire d'une boutique vendant des produits pour la culture hydroponique, Valérie Pouliot, voit l'annonce d'un projet de loi sur la légalisation du cannabis comme une manne verte dont pourrait profiter sous peu son commerce Québec Mix, dans le secteur de Limoilou.
Valérie Pouliot, copropriétaire de Québec Mix à Limoilou
Photo : Radio-Canada/Maxime Corneau
La jeune femme de 23 ans est copropriétaire d’une boutique à la fois d’articles de fumeurs, mais aussi de matériel hydroponique servant à la culture de plantes de toutes sortes. Et c’est exactement ce créneau qui risque d’exploser, selon la commerçante.
« Ça nous offre une nouvelle clientèle. Ce sera un phénomène énorme », lance-t-elle d’emblée. Elle fait référence aux citoyens qui pourraient décider de cultiver leur propre cannabis. Le projet de loi présenté par le gouvernement Trudeau permettrait la culture d’au plus quatre plants de marijuana à domicile à des fins de consommation personnelle.
« Tout le monde peut devenir autosuffisant là-dedans, en plus que l’on sait que ça peut être un produit assez dispendieux, ça offre une belle possibilité aux gens. » Actuellement, les clients de Valérie Pouliot qui achètent du matériel de culture hydroponique, que ce soit pour des activités légales ou non, craignent selon elle d’être ciblés par les policiers en fréquentant le commerce. « Les gens sont peureux de venir ici, même si tout ce qu’il y a ici est légal », explique-t-elle.
Elle souligne d’ailleurs que des policiers sont régulièrement stationnés près de son commerce pendant de longues heures, une surveillance qu’elle attribue aux types d’activités qu’elle mène, même si elle respecte les lois.
Le gouvernement canadien présente ce jeudi un projet de loi visant à légaliser l'usage récréatif du cannabis d'ici à l'été 2018. Muffins au hasch et pétards pour tous? Entre petits cultivateurs, business juteux et dangers sanitaires, la réalité est plus complexe
(Avec la presse canadienne) C'était une promesse de campagne de Justin Trudeau dès 2013: lui élu, son gouvernement légifèrerait en faveur d'un usage récréatif du cannabis. Le moment est désormais venu: après avoir pris l'avis de nombreux experts et commissions diverses, le gouvernement s'apprête à déposer ce jeudi son projet de loi, qui pourrait être en vigueur pour le 1er juillet 2018, jour de la fête nationale. Et cela ne s'invente pas: la ministre de la Santé qui porte le projet s'appelle Jane Philpott...
Le père Pierre Elliott Trudeau avait été le premier chef de gouvernement occidental à lancer une commission de réflexion sur la dépénalisation du cannabis au Canada. C'était en... 1969. Juste après Woodstock, ses hippies et leurs fumettes. Déjà à l'époque, la presse relatait l'obsolescence des lois en vigueur. Mais c'est le fils Justin qui va devenir le premier chef de gouvernement occidental à légaliser la marijuana, presque 50 ans plus tard. Entretemps il y aura eu plusieurs tentatives, qui ont tourné court devant les pressions du grand voisin américain. Le Canada serait un des pays occidentaux avec la plus forte proportion de fumeurs réguliers de cannabis. Justin Trudeau lui-même a reconnu avoir fumé quelques fois, même du temps où il était député. Cultiver, acheter, vendre du cannabis deviendra légal
La légalisation est bien différente de la dépénalisation. Cela signifie qu'il sera légal non seulement de cultiver et consommer du cannabis, mais également d'en acheter et d'en vendre. Plusieurs sociétés se sont déjà spécialisées dans la vente de cannabis, qui est autorisée à des fins médicales depuis 2001. Selon le site de Santé-Canada, qui propose aussi une carte pour les localiser, 42 producteurs-vendeurs ont obtenu une licence pour vendre ce cannabis médical depuis 2015, et se positionnent aujourd'hui pour profiter du futur marché «public». Qui sera très encadré: la future loi veut légaliser tout en réglementant et contrôlant l'accès à l'herbe précieuse. Le commerce sera très bureaucratique, très taxé, et très surveillé.
Plantation de cannabis médical de la société Tweed, dans l'Ontario. Décembre 2016 (AFP)
Tous les détails ne sont pas encore fixés, le gouvernement ne reprendra pas forcément les 80 recommandations du groupe d'experts qui a planché sur le sujet fin 2016. Les particuliers pourront-ils faire pousser jusqu'à quatre plants d'un mètre de haut et être en possession au maximum de 30 grammes de cannabis? Il est en tout cas déjà acquis que tout comme pour l'alcool, la vente sera interdite aux mineurs - la majorité variant de 18 à 19 ans selon les provinces. Une proposition jugée très insuffisante par l'Association canadienne des psychiatres, qui préconise de fixer l'âge légal de vente à 25 ans, en raison des effets de l'usage du cannabis sur le système neurologique des plus jeunes. Acquis aussi, le durcissement des peines pour ceux qui feraient de la publicité ou de la vente auprès de mineurs, ou qui seraient surpris en train de conduire alors qu'ils ont consommé du haschich (même s'il est impossible de tester réellement . Le haschich ne devrait pas pouvoir être vendu là où on vend de l'alcool. La légalisation s'accompagnera d'une très forte campagne d'éducation dans les écoles et sur les lieux de travail. L'idée n'est pas de faire du Canada le paradis du cannabis, mais le pays où ceux qui ont l'âge d'en vouloir peuvent y avoir accès dans de bonnes conditions de sécurité.
Le moteur du changement: l'argent
Ce qui a fait bouger le Canada est une histoire de gros sous. Les chefs de police au Canada ont eux-mêmes à plusieurs reprises appelé à assouplir l'actuelle loi sur les stupéfiants, qui coûte trop cher en temps et en argent. Près de 70 000 poursuites pour possession ou consommation de cannabis ont été engagées en 2014, un vrai gaspillage des ressources au détriment de délits plus graves, selon ces responsables policiers.
Le gouvernement d'autre part attend beaucoup de retour sous forme de taxes de ce nouveau marché. Une légalisation du haschich fera baisser ses prix, gênera la criminalité organisée qui contrôle une grande partie du marché «gris» aujourd'hui et rapportera beaucoup à l'Etat. Les autorités estiment ainsi que 4,6 millions de personnes (sur 37,5 millions) consommeront 655 tonnes de cannabis par an et dépenseront de 4,2 à 6,2 milliards de dollars canadiens (3 à 4,2 milliards d'euros ou de francs suisses).
Dernier acteur intéressé par la légalisation de l'herbe - les vendeurs de cannabis médical déjà autorisés. Les perspectives pour ces professionnels en herbe sont très bonnes et l'industrie dispose d'un haut potentiel de croissance. Les fusions, acquisitions ou entrées en Bourse se sont récemment multipliées dans le secteur, remarque le quotidien Le Devoir, qui cite l'exemple de Canopy Growth: «Le groupe ontarien dont le symbole boursier à Toronto est WEED, vaut présentement près de 2 milliards. En six mois, son titre est passé de 5,50 $ à plus de 10 $.»
La légalisation du cannabis serait-elle donc une belle histoire pour tout le monde, pour l'Etat qui va gagner de l'argent sur le dos des trafiquants, pour les consommateurs qui pourront fumer en paix des produits plus sûrs, pour les producteurs et vendeurs qui vont augmenter leurs résultats? Plusieurs bémols s'imposent. Le Canada, le pays où l'herbe n'est pas forcément plus verte
Car des zones d'ombre demeurent. Les producteurs reprochent ainsi déjà à l'Etat de vouloir imposer des paquets neutres, sans logo, sans slogan - ce qui ne fait pas forcément leurs affaires. Pour rendre leurs produits plus attrayants qu'au marché noir et fidéliser une clientèle, il faut pouvoir créer des marques. L'Etat refuse, a priori.
Ensuite des experts fiscaux mettent en garde contre la tentation de taxer trop fortement la marijuana légale, au risque de relancer là encore le marché noir. L'influent thinktank C.D. Howe Institute estime ainsi que Etat et provinces ne devraient pas essayer de capter plus de 675 millions de dollars de taxes en 2018, en se fondant sur un prix de 9 dollars le gramme.
Autre bémol encore, la loi va confier aux provinces un rôle important, et toutes ne sont pas sur la même position. Les normes sanitaires encadrant la production de cannabis seront a priori définies par le gouvernement fédéral, mais ce sont les provinces qui prendront en charge la mise en place des réseaux de distribution et des prix de vente du cannabis.
Le Québec et l’Ontario, où sont installée plus de la moitié des producteurs-vendeurs autorisés, et qui à deux abriteraient 63% des consommateurs potentiels, selon des études, ont déjà fait savoir que l'été 2018 leur paraissait une échéance trop proche, vu le nombre de problèmes à régler. Ils redoutent les dégâts sociaux et sanitaires lourds à endosser.
Marc Emery, autoproclamé «prince du pot» dans sa boutique illégale de Montréal, décembre 2016. (AFP)
Enfin, la loi étant annoncée depuis longtemps, des milliers de particuliers ont décidé d'anticiper sur le futur marché public et de se lancer dans la vente, d'où une certain capharnaüm. Des centaines de boutiques proposant du concentré de hasch, des plantes en pot, et des produits plus exotiques comme des space cakes, du miel ou du dentifrice au cannabis se sont ouvertes à Vancouver, Toronto ou Montréal, à la colère des producteurs médicaux légaux qui craignent la concurrence de ces nouveaux entrepreneurs qui n'ont peur de rien.
Un business encore illégal, ont souligné plusieurs fois les autorités, et des dizaines d'arrestations ont eu lieu. L'été dernier Cannabis Culture a créé le tollé à Montréal en ouvrant une succursale près de deux écoles primaires. Sur son site, la société hurle contre la tentative de monopolisation, d'étatisation du cannabis. Des dizaines de millions de dollars sont en jeu. «Tant que nous n'avons pas de cadre légal pour contrôler et réguler la marijuana, les lois actuelles s'appliquent» a répété Justin Trudeau.
Aujourd'hui, seul l'Uruguay a complètement légalisé l'usage du cannabis. Nul doute que l'exemple canadien sera étudié de près dans de nombreux pays qui s'interrogent.
C’était à la salle municipale de Belle-Rose le samedi 8 avril. Le public était convié à un débat, non pas sur les fleurs, mais sur le gandia. L’initiative est à mettre à l’actif du Mouvement patriotique (MP), le parti de la rose.
Le Mouvement patriotique a organisé un débat sur le «gandia» le samedi 8 avril 2017 à la salle municipale de Belle-Rose.
Alan Ganoo, Président du parti, a indiqué qu’il est fier que son mouvement politique ait pu organiser un débat sur un sujet qui divise la société mauricienne depuis longtemps et qui a été à la source des évènement tragiques qui ont mené à l’arrestation du chanteur Kaya et de la suite que tout le pays connais.
Modéré par Jean Claude Barbier, ce forum/débat qui avait pour thème » Un nouveau regard sur la dépénalisation du gandia? » a permis de comprendre les faits, les actions et les réactions du cannabis dans le corps humains mais aussi de découvrir des chiffres qui sont loin de la réalité pour certain bien au courant de la chose sur le terrain.
Parmi les orateurs : l’avocat Anupam Kandhai. Il est d’avis qu’il faut «structurer les accusations sous le Dangerous Act au sujet du cannabis». Le MP, dit-il, ne souhaite pas adopter une position tranchée s’agissant de la légalisation du cannabis. Le Dr Taroonsing Ramkoosalsing, psychiatre, a tenu pour sa part à faire ressortir que le gandia est utilisé depuis 2 500 ans déjà. Et que le cannabis aide à soulager plusieurs malades. «J’étais contre la dépénalisation au départ, mais j’ai changé d’avis…»
15 % des Mauriciens consomment régulièrement du gandia, estime Nathalie Rose Nathalie Rose, de l’ONG PILS a quant à elle abordé la question de l’impact social de la criminalisation du cannabis a Maurice. Selon elle, 15 % des Mauriciens consomment régulièrement du gandia. Et d’ajouter : «Kan enn dimounn gagne trapé, sé stigmatisation. Li pass par kaz prison ek li rétrouv li parmi bann gran kriminel.» La travailleuse sociale a également indiqué que 86 % des personnes arrêtées sont des consommateurs de drogue.
(Ottawa) Le gouvernement de Justin Trudeau déposera ce jeudi son projet de loi sur la légalisation du cannabis, alors que plusieurs questions restent en suspens dans ce dossier.
Une fois le projet de loi déposé jeudi sur la légalisation du cannabis à usage récréatif,
il sera débattu en comité pendant les prochaines semaines.
Photo archives AFP
Selon le Globe and Mail, le projet de loi prévoit un encadrement serré de la façon dont sera mise en marché la marijuana.
Ottawa miserait par exemple sur des emballages neutres, dans le but de ne pas rendre le produit trop attrayant pour les jeunes acheteurs. L'âge minimum requis pour acheter du cannabis serait fixé à 18 ou 19 ans, selon les provinces. Ottawa sera responsable d'approuver et d'encadrer les producteurs de pot, tandis que les provinces fixeront les prix et choisiront les canaux de distribution pour ce produit.
Une fois déposé jeudi, le projet de loi sur la légalisation du cannabis à usage récréatif sera débattu en comité pendant les prochaines semaines. Ottawa mise sur entrée en vigueur de la loi le 1er juillet 2018, un échéancier que plusieurs observateurs ont remis en question.
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OTTAWA - L'Association canadienne des chefs de police exhorte le gouvernement fédéral à exclure la culture personnelle de ses plans de légalisation de la marijuana.
clone de marijuana dans un dispensaire de marijuana médicale à Oakland, Californie, le 1er février 2011. (AP / Jeff Chiu)
Un groupe de travail sur la légalisation a recommandé de permettre aux gens de cultiver jusqu'à quatre plantes de marijuana à usage personnel, mais le président de l'association, Mario Harel, dit que l'application de telles limites peut être très difficile.
Harel, qui devrait témoigner jeudi devant le comité des affaires juridiques et constitutionnelles du Sénat, affirme qu'il est impossible d'assurer que ce pot ne soit pas cultivé pour le marché noir.
L'association affirme que les dangers des «campagnes de culture» ont longtemps été clairs et que l'utilisation de la culture de la maison rendrait impossible le contrôle des niveaux de THC, l'utilisation des pesticides et les maladies tels que la moisissure.
Le gouvernement devrait introduire une loi dès la semaine prochaine avant les célébrations annuelles de la «Fête des l'herbe», ou Weed Day, le 20 avril pour réglementer l'utilisation de la marijuana.
Le Premier ministre Justin Trudeau prévient que la marijuana restera illégale jusqu'à ce qu'un nouveau cadre soit mis en place pour protéger les jeunes et empêcher les criminels de tirer parti de la drogue.
Source: ctvnews.ca
"Donc, lorsque la police dit qu'ils ne «font pas la loi, nous l'imposons ...», ce n'est pas vrai." aura commenté Marc Emery via les réseaux sociaux
À quelques jours du dépôt du projet de loi légalisant la consommation de cannabis, l'Association pour la santé publique du Québec recommande à Ottawa d'interdire toute forme de marketing entourant la marijuana, incluant la vente de casquettes, de t-shirts et d'autre matériel promotionnel par les producteurs de marijuana.
L'Association pour la santé publique du Québec recommande à Ottawa d'interdire toute forme de marketing entourant la marijuana, notamment la vente de casquettes et de t-shirts.
PHOTO HAVEN DALEY, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS
LA CIGARETTE COMME EXEMPLE
L'Association pour la santé publique du Québec (ASPQ), un organisme indépendant qui regroupe 165 personnes impliquées dans la promotion de la santé, affirme que sa «pire crainte» est de voir apparaître des emballages tape-à-l'oeil et des produits promotionnels qui banaliseraient la consommation de marijuana chez les jeunes.
La société Tweed, le plus important producteur de cannabis médical du pays, vend déjà des t-shirts et des tuques stylisés sur son site web, souligne l'organisme. «Ça nous inquiète. On a vu par le passé ce qui s'est produit avec les compagnies de cigarettes. Si on laisse la porte ouverte à ce genre de promotion, ce sera très difficile de revenir en arrière. Il vaut mieux commencer de façon stricte», estime Émilie Dansereau, chargée de projet à l'ASPQ.
L'organisme souhaite l'imposition d'emballages neutres, sans logo ou marque distinctive, qui préciseraient la teneur en THC du produit avec une mise en garde sur les risques liés à sa consommation.
PAS PLUS DANGEREUX QUE L'ALCOOL
En se basant sur des dizaines de mémoires et études scientifiques déposés à Ottawa ces derniers mois, l'ASPQ arrive à la conclusion que consommer du cannabis ne comporte pas plus de risques pour la santé que consommer de l'alcool.
«Selon l'OMS, il est plus risqué de consommer de l'alcool ou d'être en surpoids que de consommer du cannabis, lorsque l'on analyse le nombre d'années perdues dues à la mort et à l'invalidité», affirme l'organisme dans un énoncé de position obtenu par La Presse. Les données provenant des États américains où la consommation récréative a été légalisée tendent à démontrer que la consommation chez les jeunes est restée stable depuis la légalisation.
«Au Colorado, une légère augmentation a été observée au début de la légalisation. Par la suite, la consommation de cannabis chez les jeunes a diminué», écrit l'ASPQ.
18 ANS COMME ÂGE MINIMUM
Même si plusieurs études démontrent que le cerveau des jeunes se développe jusqu'à l'âge de 25 ans et que les risques de psychose sont plus élevés chez les jeunes consommateurs, l'ASPQ plaide pour que l'âge légal pour acheter du cannabis «corresponde avec celui pour l'alcool et le tabac».
«Les deuxièmes plus grands consommateurs de cannabis après les 18-25 ans, ce sont les jeunes de 15 à 17 ans. Le mieux qu'on puisse faire, c'est de leur donner un accès à une substance qui est strictement contrôlée. Autrement, ils vont se le procurer sur le marché noir, ce qui n'est pas mieux», explique Mme Dansereau.
CAMPAGNE DE PRÉVENTION NÉCESSAIRE
La Fondation et la Maison Jean-Lapointe, qui administrent un centre de traitement de l'alcoolisme et de la toxicomanie, se sont officiellement prononcées pour le projet de légalisation du cannabis hier, mais à condition qu'un programme de prévention financé de façon récurrente à même les revenus fiscaux de la vente de marijuana y soit greffé.
«Toutes les recherches démontrent que la prévention doit se faire auprès des jeunes lors de la transition entre l'école primaire et le secondaire», insiste Anne Elizabeth Lapointe, directrice générale de la Maison Jean-Lapointe. L'Association pour la santé publique abonde dans le même sens.
«Une telle campagne devrait expliquer aux jeunes quel est l'impact de la consommation de cannabis et des psychotropes sur leur cerveau, et leur faire comprendre qu'il serait mieux pour eux d'éviter d'en consommer avant l'âge de 25 ans», dit Mme Dansereau.
Le MR de Mons a déposé une motion visant à soutenir la création d’un cannabis social club. Le texte sera débattu lors du prochain conseil communal, le 25 avril.
Un cannabis social club est un cercle fermé où s’organise la production et la distribution de cannabis pour un usage individuel.
"Nous voyons que l’interdiction ne fonctionne pas. Il faut trouver une autre voie. Celle de la régulation. La régulation de ce qui existe déjà en fait", explique le chef de file MR Georges-Louis Bouchez. "Le projet doit se faire en dialogue avec la ville et la justice, à l’extérieur de la ville, et en associant médecins et psychologues. Je propose donc de tenter l’expérience. Et si cela ne fonctionne pas, tant pis, nous reviendrons en arrière."
Le bourgmestre Elio Di Rupo (PS) se dit "favorable" à une telle structure. "Il est scandaleux de laisser les consommateurs de cannabis et en particulier les jeunes dans les bras d’organisations criminelles pour consommer quelques grammes de cannabis. Il est aussi scandaleux de fermer les yeux sur la qualité des produits mis sur le marché noir."
Jean-Luc Manouvrier, porteur d’un projet de social cannabis club à Mons, acquiesce. "Une bonne partie du cannabis que l’on retrouve sur le marché est coupée avec des produits chimiques, des pesticides, alors que la plante peut se cultiver de manière biologique. Un cannabis social club devrait aussi permettre d’enrayer le trafic des dealers et des bandes organisées." Elio Di Rupo se dit prêt à solliciter le fédéral et le procureur du roi "pour permettre une expérimentation", mais il n’a pas encore reçu de demande officielle.
Il semble toutefois que le projet de social cannabis club ait peu de chance d’aboutir. Si une telle structure existe – est toléré – à Anvers, des initiatives à Namur, Charleroi ou encore Tournai ont avorté.
"La règle est la même à Tournai qu’à Mons", souligne le procureur du roi de Mons-Tournai Christian Henry. "Si je m’en réfère simplement à la loi, elle punit déjà la simple détention de cannabis. Il y a bien eu une directive ministérielle en 2003 disant aux parquets que la détention d’une quantité minime de cannabis pour assurer sa propre consommation quotidienne, soit un maximum de trois grammes par jour, ou la possession d’un plant devaient recevoir le traitement de poursuite le plus faible. Mais cela reste punissable d’une peine d’amende par le tribunal correctionnel. C’est reste bien une infraction."