Une tournée d’adieu canadienne pour Marc Emery ?
Les 23 et 24 mars 2006, Marc Emery s’adressait aux étudiants des universités montréalaises McGill et Concordia.
L’apôtre de la légalisation de la marijuana au Canada, Marc Emery, ainsi que deux employés font l’objet d’une demande d’extradition vers les États-Unis, suite à une descente musclée menée conjointement par la GRC et la DEA en juillet 2005.
Source : Chanvre-info
Aujourd’hui, l’auto-proclamé « Prince du pot » fait face à des accusations de trafic pour avoir vendu des millions de graines de marijuana aux États-Unis via son lieu d’affaire, à Vancouver ; des accusations qui pourraient lui valoir la prison à vie, s’il est reconnu coupable.
Rappelons que Marc Emery opérait son commerce depuis plus de 10 ans, à la connaissance des autorités policières et acquittait ses taxes municipales, provinciales et fédérales sous la rubrique :Commerce de graines de marijuana. L’organisme fédéral gouvernemental « Santé Canada » comptait Marc Emery parmi ses fournisseurs accrédités de marijuana à des fins thérapeutiques. Marc Emery est également le fondateur du Parti Marijuana de Colombie-Britannique.
L’audience en vue de fixer la date de la requête en extradition a eu lieu le 9 mars 2006 et fut remise à avril 2006. Les représentations devraient débuter à l’automne 2006.
En attendant, Marc Emery entreprend une tournée canadienne des campus universitaires, afin de récolter encore plus d’appuis au mouvement pour la légalisation de la marijuana mais également pour parler de son combat contre les autorités américaines et de la campagne contre l’extradition qui s’amorce.
Dans une entrevue avec un journaliste montréalais, Marc Emery explique qu’il s’agit d’une forme de tournée d’adieu « ... parce que beaucoup de Canadiens ne me reverront plus vivant. Si je suis extradé aux États-Unis et emprisonné pendant 35 ou 40 ans, ou même pour la vie, comme la tendance le laisse croire, alors les Canadiens doivent entendre ce que j’ai à dire avant d’être remis par mon propre pays à cet État nazifié, corrompu et voyou que sont les États-Unis ».
Marc Emery a peu à espérer du nouveau gouvernement conservateur, reconnu pour ses positions pro-américaines en matière de lutte à la drogue. À titre d’exemple, le nouveau ministre de la jsutice, Vic Toews, est en faveur de peines d’emprisonnement obligatoires pour les mariculteurs. Des milliers de personnes seraient automatiquement emprisonnées. Les Conservateurs sont déterminés à éradiquer le mouvement pro-pot et sont prêts à utiliser des mesures encore plus sévères que l’ancien gouvernement libéral.
De façon générale, les arrestations sont en hausse au Canada et aux États-Unis, malgré la réputation de « tolérance » des autorités canadiennes. Selon Marc Emery, il faut y voir une similarité entre les visions républicaine et conservatrice : « On le voit poindre à l’horizon. Il y a, dans le monde, environ 250 000 personnes emprisonnées pour des infractions reliées au cannabis, la violation la plus flagrante des droits humains dans le monde. Des millions de personnes se cachent, se sauvent, sont arrêtées, inculpées, emprisonnées, humiliées, soumises à des fouilles abusives et battues par la police - uniquement pour leur mode de vie, un mode de vie honnête et pacifique. Imaginons qu’on emprisonne 250 000 végétariens, chrétiens, musulmans ou homosexuels ! Il me semble tellement absurde de penser qu’on puisse être emprisonné pour du cannabis, mais à partir de maintenant, nous allons voir encore plus de personnes victimes de la répression ! »
« Au Canada, les descentes se multiplient. Le discours se radicalise aussi, et il y encore plus de collaboration entre les autorités canadiennes et le gouvernement américain. Les Conservateurs sont des Républicains dans l’âme. L’Alberta, berceau des Conservateurs, n’est pas très canadienne, à mon avis. Les Albertains ne rêvent que de joindre les États- Unis et se libérer du reste du Canada. Cela se voit dans les intentions de vote. Si Stephen Harper, Jason Kenney et le mouvement conservateur peuvent obtenir de 60 à 70% du vote albertain, cela signifie que les Albertains ne sont pas de loyaux Canadiens mais des Américains républicains qui participent à l’abdication de notre souveraineté. »
« Quant à la récente descente du Heaven’s Stairway, à Montréal (mars 2006), tout n’était que désinformation de la part des autorités policières. On a tenté de les représenter comme des criminels mais ils exerçaient un commerce toléré depuis des années, tout comme moi, un commerce légitime, enregistré et pleinement taxé. Cette descente fait partie d’une vaste opération pan-canadienne. La police se sent revigoré par l’élection d’un gouvernement conservateur. La saison de la chasse est ouverte... »
Interrogé sur la meilleure stratégie en vue de décriminaliser la marijuana, Marc Emery prône le militantisme actif. Il importe de s’impliquer dans tous les partis afin d'influencer le débat sur la prohibition. C’est la seule stratégie gagnante :
« En ce moment, les jeunes s’éloignent de la politique parce qu’ils sont désabusés. À mon avis, il s’agit d’une grave erreur car les jeunes sont les premières victimes de la guerre contre la drogue. Tous les jeunes qui fument de la marijuana ou qui croient aux libertés individuelles dans une société libre devraient s’impliquer activement afin de véhiculer le discours anti-prohibition dans tous les partis politiques. »
Pour Marc Emery, le temps est compté. La DEA en a fait une cible de choix et demeure confiante que l’extradition soit accordée. Les procureurs canadiens étaient récemment en formation aux États-Unis, une formation qui portait sur l’harmonisation de nos lois et de nos normes. En mai 2006, la ville de Montréal sera l’hôte de la Conférence internationale sur la répression des drogues, sous l’égide de la DEA. Un contre-évènement est prévu.
Nathalie Durand, Canada
Cannabis Culture - en français
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