Le procès des cinq membres du cannabis social club de Namur devait démarrer ce vendredi devant le tribunal correctionnel de Namur. Mais un incident de procédure a empêché l'audience de se tenir.
Appelant chacun des cinq prévenus à la barre à l'entame des débats, la juge Marie-Cécile Matagne a constaté qu'elle connaissait un des prévenus. "Je dois me déporter", a-t-elle immédiatement conclu. Avant de reporter le procès au 22 juin prochain, devant un autre juge.
On peut s'étonner qu'il faille attendre l'ouverture d'un procès pour constater une telle incompatibilité. L'identité de la prévenue figure en effet dans le dossier depuis le début de l'enquête en 2014. "Mais cela arrive, nous explique maître Blaise Guesquière, le conseil d'un des prévenus. On peut très bien connaître quelqu'un de vue, et même assez bien, sans nécessairement connaître son nom. Par exemple en fréquentant la même salle de sports. C'est normal qu'un juge se déporte dans de telles circonstances pour que son impartialité soit inattaquable."
Difficile pourtant de ne pas voir dans ce dossier un exemple de l'arriéré judiciaire : des faits qui remontent à 2013, une enquête facilement bouclée en 2014 (flagrant délit, aveux... le dossier est limpide), le renvoi devant le tribunal correctionnel par la Chambre du conseil en octobre 2016... et un procès en première instance qui ne se tiendra pas avant juin 2018.
Une asbl créée en 2013 pour produire du cannabis
Le cannabis club de Namur, c'est l'histoire de deux frères, la cinquantaine, fumeur de marijuana, et qui décident en 2013 d'immiter une association anversoise, Trek uw plant, des militants de la dépénalisation. Le principe est simple : puisque la justice belge tolère la détention de 3 grammes de cannabis, ou la culture d'un plant pour une consommation personnelle, une asbl pourrait prendre en charge la production pour l'ensemble de ses membres, à raison d'un plant par personne. Ainsi, les membres du club ne doivent plus se fournir dans la rue auprès de dealers peu fréquentables ; plus besoin non plus de faire pousser un ou deux plants de cannabis à la maison, en s'inquiétant de ce que les voisins peuvent penser... Les statuts de l'asbl sont publiés au moniteur, la police et le procureur sont même prévenus par courrier. Les responsables du cannabis club parlent ouvertement aux journalistes. La formule séduit des dizaines de consommateurs, qui participent à l'assemblée générale et payent leur cotisation.
Mais un beau matin, la police perquisitionne au local de l'association et saisit 4 kilos de cannabis prêts à être distribués aux membres de l'association. La position du Parquet, c'est que le débat sur la dépénalisation du cannabis ne peut pas se faire devant les tribunaux mais au Parlement. Donc, oui, pour le Parquet, faire pousser des dizaines de plants de cannabis dans un garage pour les vendre, même dans le cadre d'une asbl déclarée, même sans faire de profit, même à raison d'un plant par membre cotisant, c'est du trafic de stupéfiant. On imagine toutefois que dans les peines réclamées, le Parquet voudra marquer la différence avec des dealers classiques. Récemment, devant la Cour d'appel du Hainaut, le président du cannabis club de Tournai a écopé d'une simple peine de travail.
Par François Louis
Source: rtbf.be
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