Attention à l’herbe fruitée
Visiteurs d’Amsterdam, méfiez-vous !
La culture des coffee shops qui existe à Amsterdam est soumise à des règles de plus en plus strictes, dont la plupart sont objectivement absurdes. La dernière règle tracassière adoptée par la capitale européenne du cannabis est le nouveau critère de distance par rapport aux écoles, en vigueur depuis l’an passé. En plus de cette règle de distance, la ville d’Amsterdam contrôle désormais scrupuleusement l’interdiction de fumer prévue par l’UE : dans les coffee shops, on est autorisé à fumer de l’herbe pure, sans ajout de tabac.
Cela étant difficilement contrôlable par les gérants, beaucoup d’entre eux ont décidé de déclarer leur établissement « espace non-fumeurs ». Certains coffee shops, dont la configuration des lieux le permettait, ont désormais aménagé un espace séparé réservé aux fumeurs. Mais beaucoup sont ou étaient si petits qu’il était impossible de diviser la salle en deux, si bien qu’ils sont aujourd’hui devenus des établissements non-fumeurs.
Les coffee shops se raréfient
l’herbe fruitée @ Jonas Dietz
Ces deux limitations récentes ont engendré une véritable pénurie de coffee shops à Amsterdam. Les établissements restants sont généralement tellement surchargés de monde qu’il est impossible de trouver une place pour s’asseoir et se détendre. Certains obligent même les clients à acheter de l’herbe ou du haschich s’ils souhaitent s’asseoir et prendre un café. C’est non seulement scandaleux, mais illégal. Les coffee shops sont des cafés dans lesquels la vente de produits issus du cannabis est tolérée. Si l’on est contraint d’acheter du cannabis pour prendre un café, le propriétaire enfreint la loi, car il oblige en principe les clients à acheter des drogues pour entrer dans l’établissement.
Cette attitude hostile de la part de certains coffee shops situés dans le centre touristique de la métropole des canaux, qui mécontente aujourd’hui de nombreux visiteurs, est une conséquence de l’absence de concurrence.
Lorsqu’on vend des sachets zippés à tour de bras, on n’a pas besoin d’être aimable ou à l’écoute du client pour afficher un bon chiffre à la fin du mois. 31 autres établissements devraient fermer d’ici 2016, ce qui aggravera encore la situation. Mais cette monopolisation du marché n’a pas pour seul effet que les établissements toujours moins nombreux enregistrent des profits croissants, les fumeurs d’herbe n’étant pas moins nombreux que lorsque la ville comptait encore plus de 400 coffee shops. Certains gérants peu scrupuleux vendent également de l’herbe frelatée, sans risquer aucune amende.
De l’herbe à l’odeur de préservatif
Dans le cadre d’un achat-test, Kimo, rédacteur pour le Hanf Journal (version allemande de La Gazette du Chanvre), s’est vu remettre une herbe à l’odeur infecte, additionnée d’arômes de fruits indéfinissables.
Des variétés bien connues comme la « Strawberry Cough » ou la « Lemon Haze » dégagent un léger parfum qui rappellent le fruit dont elles tirent leur nom. Par contre, le sachet du « XXX » sent – comme toute la boutique – aussi fort qu’un préservatif au goût fraise-banane-pomme-vanille. Je m’abstiendrai de dépenser de l’argent pour un gramme de l’« Applejack », la « Kush fraise banane » est déjà suffisamment écœurante.
L’herbe dégage non seulement une odeur dégoûtante, mais elle est extrêmement humide et se consumerait de toute façon très mal. Même si je n’ai pas l’intention de consommer cette substance douteuse, je ne jette pas le sachet pour autant, parce que j’ai encore besoin de bonnes photos. Quand je décide de faire ces photos quelques heures plus tard, l’herbe à moitié humide a déjà commencé à pourrir, parce que la bouillasse humide et nauséabonde ne peut pas respirer dans le sachet hermétique. Comme de la laitue qu’on laisse traîner un moment à la chaleur dans un sachet en plastique. »
Voilà ce qu’a écrit en mars à Amsterdam le rédacteur spécialiste du guerilla growing (culture clandestine du chanvre). Lorsque Kimo a demandé des comptes aux vendeurs le lendemain à propos des fleurs puantes, le gérant du café est devenu agressif et le client escroqué s’est fait virer de l’établissement. Une enquête approfondie a révélé que la boutique située près de la Oude Kerk n’était pas la seule à vendre ce type d’herbe aux touristes. Une prudence particulière s’impose dans au moins quatre autres coffee shops pour les variétés telles que la « Vanilla Kush » ou la « Blueberry ».
Une interdiction de fumer de l’herbe au Cannabis College
Le problème des fleurs frelatées touche désormais aussi le Cannabis College, un centre d’information indépendant pour les personnes qui s’intéressent au chanvre. Dans ce centre, le vaporisateur doit être en permanence surveillé par un employé afin de ne pas être endommagé, l’herbe fruitée abîmant le précieux appareil mis gratuitement à la disposition des visiteurs du Cannabis College afin de leur permettre de vaporiser l’herbe qu’ils apportent. L’appareil porte même une pancarte qui indique :
"Herbe parfum pomme et fraise interdite. »
Herbe parfum pomme et fraise interdite
@ Cannabis College
Une interdiction de fumer de l’herbe au Cannabis College ? Il est grand temps qu’Amsterdam revienne à une culture des coffee shops où la transparence, la protection des consommateurs et une concurrence saine régissent le marché. À l’heure actuelle, celui-ci demeure sous l’influence des gros trafiquants et des politiques, et la qualité est en conséquence. Le pire dans tout cela, c’est que les intéressés ne peuvent même pas se défendre. Dans les coffee shops, chaque geste des gérants ou des employés est réglementé, doit être documenté, et peut être contrôlé à tout moment. Si les infractions mineures sont sévèrement sanctionnées, le consommateur, lui, est impuissant face à la vente d’herbe frelatée, pour laquelle le vendeur n’est pas pénalisé.
La politique néerlandaise de tolérance prétend vouloir protéger le consommateur en instaurant constamment de nouvelles règles. Mais en réalité, il s’agit de permettre aux coffee shops de continuer à agir dans une zone floue de non-droit, qui prive également les clients de leurs propres droits. Cela permet à l’État de continuer à encaisser un montant faramineux de taxes sur l’herbe et à attirer les touristes dans le pays, sans se soucier de la protection des consommateurs.
Source: sensiseeds.com