Le député socialiste, candidat à la présidentielle de 2017, propose de légaliser le cannabis pour mieux contrôler son usage.
XAVIER LEOTY / AFP
Nouvelle prise de position politique en faveur de la légalisation du cannabis… et nouveau vœu pieu, sans aucun doute. Cette fois, c’est à Benoît Hamon que l’on doit cette percée médiatique. Le député socialiste des Yvelines a annoncé sa candidature à la primaire de gauche pour l’élection présidentielle de 2017 ce mardi, et a précisé son programme ce matin sur France Inter.
« Hypocrisie »
Programme qui comprend donc la légalisation du cannabis. Benoît Hamon fustige l’ « hypocrisie » des solutions de fermeté et propose à la place de la politique d’affichage menée jusqu’ici une « distribution contrôlée par l’Etat », afin de « tarir l’économie souterraine et les violences » et de contrôler les consommations.
Une proposition soutenue par plusieurs acteurs du milieu de la santé, à commencer par les addictologues. Nombre d’entre eux dénoncent les contradictions et les effets pervers de la loi actuelle, qui plonge les consommateurs dans la clandestinité et les expose à des substances frelatées, coupées à des agents toxiques, échappant à tout contrôle qualité. Ces médecins militent ainsi pour un renforcement de la prévention et des soins, dont les budgets au cours de la décennie ont été largement grignotés par les crédits alloués à la répression de l’usage.
Avec des résultats particulièrement médiocres... La loi, inchangée depuis 1970, est l’une des plus sévères d’Europe ; en parallèle, la France est le pays du continent qui dénombre le plus de consommateurs. Cette ineffacité législative a d’ailleurs fait d’un rapport interministériel (intérieur, santé, justice et douane) rédigé par la Mildeca (1) et remis il y a quelques jours au Premier ministre.
L’amende plutôt que la prison
Dans ce rapport, les auteurs s’interrogent ainsi sur la valeur de la « réponse pénale à l’usage des stupéfiants » et montrent qu’elle est, en l’état, tout à fait inappropriée – et d’ailleurs, très peu appliquée. « Puisque les peines d’emprisonnement ferme sont rarement prononcées et encore plus rarement mises à exécution, l’effet dissuasif est limité », peut-on lire.
Dans les faits, « un nombre important d’infractions constatées ne fait l’objet d’aucune procédure », mais malgré cela, les tribunaux s’encombrent de dossiers qui ne feront l’objet d’aucune poursuite. Le groupe interministériel propose donc de supprimer la peine actuelle qui prévoit un an d’emprisonnement pour un simple usage de drogues. A la place, ils préconisent la mise en place d’une contravention de 5e classe, avec une amende s’élevant à 300 euros. Au bout de plusieurs récidives (le nombre n’a pas été fixé), le consommateur reviendrait dans le circuit judiciaire.
On est donc très loin de la légalisation, dont il n’est pas question dans le rapport, et même de la dépénalisation puisque avec ce système, l’usage resterait pénalement réprimé. Le rapport en question sommeille sur le bureau de Manuel Valls, qui a déjà fait comprendre qu’il ne s’aventurerait pas sur ce terrain politiquement miné. N’en déplaise à Benoit Hamon, à la Mildeca, et à tous ceux qui espèrent une évolution de la législation.
(1) Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives
par Marion Guérin
Source: pourquoidocteur.fr