On sentait la pression monter depuis quelques mois, cette fois les jeux semblent faits: des propriétaires de cliniques de marijuana médicale californiennes ont réçu ces derniers jours un courrier des autorités fédérales leur enjoignant de fermer leur commerce dans les 45 jours. Des lettres qui ont causé un vif émoi au sein d’une industrie qui pèse plus d’un milliard de dollars pour la seule Californie. Et la confirmation du revirement de l’administration Obama, visiblement débordée par le phénomène.
En février 2009, conformément aux engagements de campagne de Barack Obama, le Département de la Justice s’engage à ne plus poursuivre les usagers de marijuana médicale dans les Etats autorisant son usage. Les dispensaires, eux, restent une cible pour Washington, mais de fait, les raids menés par les fédéraux sous l’administration Bush prennent fin. Conséquence de cette accalmie: le nombre d’usagers de marijuana, plus vraiment médicale, explose. Entre 2004 et 2011, l’Etat délivre près de 60 000 cartes autorisant les porteurs à consommer de la marijuana médicale. Dans la seule ville de Los Angeles, on compte plus de 600 cliniques, où le médecin vous fait une prescription en 5 minutes, juste à côté du guichet où l’herbe est quasiment en vente libre. La marijuana est, de facto, dépénalisée en Californie.
Mais depuis quelques mois, l’administration Obama tente de faire machine arrière. Au mois de mai, les raids reprennent dans le Montana puis dans d’autres Etats pour faire fermer des cliniques. Dans le Colorado, les services fiscaux tentent de faire pression sur les propriétaires. Et déjà, les procureurs généraux de plusieurs des quinze Etats à avoir légalisé la marijuana médicale adressent des courriers aux propriétaires de cliniques pour les menacer de poursuites, sans plus de détails:
Il y a quelques jours, dans un surprenant mémo, le Département de la Justice précisait qu’il est interdit de vendre des armes ou des munitions aux fumeurs de cannabis thérapeutique.
Cette fois, la menace semble se préciser. Et ce dans l’Etat le plus emblématique du boom de la marijuana médicale. Plusieurs propriétaires de dispensaires ont reçu cette semaine un courrier leur laissant 45 jours pour fermer boutique, sous peine de passer 40 jours à l’ombre et de voir leurs biens saisis. Dans la lettre adressée le 29 septembre au Marin Alliance for Medical Marijuana in Fairfax, le plus vieux dispensaire des Etats-Unis, il est précisé qu’il se situe à moins de 300 mètres d’un parc, ce qui serait interdit par la loi. Les autres courriers ne font toutefois pas état de cet élément. Les quatre procureurs fédéraux de Californie doivent donner une conférence de presse ce vendredi pour préciser les actions qui devraient être menées.
« La bureaucratie fédérale continue de faire ce qu’elle fait depuis quinze: se cacher la tête dans le sable et dire non à tout cela », conclue Dale Gieringer, directeur de l’association antiprohibitionniste NORML en Californie. Idem, donc, du côté des propriétaires cliniques, dont aucun ne semble pour l’instant décidé à fermer boutique…
Arnaud Aubron
Source :Les Inrocks