Une première en France. Un automobiliste du Maine-et-Loire, âge de 36 ans, vient d'être relaxé, alors qu'il restait dans son sang des traces de cannabis après une consommation.
Ses avocats ont fait valoir une décision du conseil constitutionnel.
Cet homme, qui avait consommé du cannabis plusieurs jours avant les faits, avait été contrôlé positif aux stupéfiants après un dépistage salivaire, le 14 octobre 2011.
Ses avocats, Me Pascal Rouiller et Me Vincent Jamoteau avait alors plaidé sa relaxe devant le tribunal correctionnel d’Angers. « Il n’existe, en matière de stupéfiants, aucun seuil sérieux, aucun taux défini par la loi, pour établir une quelconque influence sur le comportement d’un automobiliste.»
Se référant à l’emprise d’un état alcoolique où un seuil minimum est déterminé pour envisager la répression, une juge d’Angers vient de relaxer leur client.
« Nous ne sommes pas pour l’impunité, mais pour une application stricte de la loi. Or, le législateur, en matière de conduite sous l’emprise de stupéfiants, n’a pas choisi la bonne qualification. » Les deux avocats angevins enfoncent le clou : « Nous ne contestons pas les dispositions concernant l’usage de stupéfiants mais celles relatives au code de la route souhaitant réprimer la conduite sous influence de stupéfiants. »
Aucun lien avec le comportement au volant
Si en matière de conduite sous l’emprise d’alcool, le législateur a fixé des taux, il n’en existe aucun en matière de stupéfiants. Les deux avocats font état d’une décision du conseil constitutionnel qui affirme : « Il appartient au pouvoir réglementaire, sous le contrôle du juge compétent, de fixer en état des connaissances scientifiques, médicales et techniques, les seuils minima de détection témoignant de l’usage de stupéfiants. » Me Pascal Rouiller et Me Vincent Jamoteau ont alors fourni, au tribunal d’Angers, les avis de professeurs de l’Inserm et de plusieurs médecins chercheurs. Ils disent clairement : « En matière de prise de cannabis, il faut prendre en compte deux éléments : la présence d’un principe actif appelé le THC et un principe passif le THC-COOH. »
Le THC dans le sang à un certain degré atteste d’une consommation récente de cannabis pouvant, selon les experts, perturber les facultés du conducteur. Le THC-COOH dans le sang ou les urines révèle une consommation pouvant remonter à plusieurs jours, voire plusieurs semaines, sans lien avec d’éventuels effets sur le comportement de conduire.
Pour l’automobiliste du Maine-et-Loire, ses analyses n’ont révélé aucune présence de THC, seulement du THC-COOH à hauteur de 3, 7 ng.
Le parquet d'Angers fait appel
Dans son délibéré, la juge d’Angers note d’abord : « Il est indéniable, qu’en matière d’alcool au volant, un seuil a été évalué selon l’esprit de la loi. » En ce qui concerne, la conduite sous influence de stupéfiants définie par aucun seuil, elle estime : « La seule présence de THC-COOH, au regard des connaissances médicales et scientifiques actuelles ne permet pas, en l’absence de THC qui correspond au principe actif du cannabis, d’affirmer que le comportement du conducteur se trouve modifié et qu’il y ait un quelconque effet sur la conduite d’un véhicule. »
L’automobiliste est relaxé. Le parquet d’Angers a fait immédiatement appel.
Par Yves LAUNAY.
photo:Yves LAUNAY. Les deux avocats angevins, Me Pascal Rouiller et Me Vincent Jamoteau
Source Ouest France